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PREMIÈRE PARTIE

PHYSIOLOGIE CELLULAIRE

Les phénomènes physiologiques se localisent, avec leurs caractères de procédés spéciaux, dans les éléments anatomiques, cellules ou formes dérivées des cellules et en ayant conservé les propriétés fibres musculaires, par exemple).

Les cellules sont essentiellement changeantes; d'une existence plus ou moins courte, elles subissent d'incessantes métamorphoses, car leur forme et leur composition varient, depuis un moment qu'on peut appeler leur naissance, jusqu'à celui qui marque leur mort; bref, elles ont des dges, elles présentent une évolution. L'évolution est justement ce qu'offrent de plus particulier les éléments organisés.

Nous disons que ces métamorphoses sont des changements de forme et de composition. Les changements de composition ne caractérisent pas la vie par eux-mêmes, car tout corps organique, au contact de l'air, absorbe de l'oxygène et dégage de l'acide carbonique, jusqu'à ce qu'il soit complètement brûlé, ou bien il se putréfie peu à peu. La cellule, au contraire, ne se détruit pas par cet échange, elle se transforme, elle se multiplie; et c'est la vie.

C'est par l'étude des propriétés de la cellule que l'on peut commencer la physiologie, puisque la cellule est l'élément essentiellement

vivant.

CHAPITRE PREMIER

MORPHOLOGIE DES CELLULES

Une donnée morphologique caractérise d'abord toutes les cellules: elles ont toutes des dimensions microscopiques. De là l'importance du microscope dans les études de physiologie cellulaire. En effet, le diamètre des cellules est assez petit pour que les histologistes aient dû adopter comme unité de mesure le millième de millimètre (désigné par la lettre grecque p). Un seul élément, l'ovule, atteint chez les Mammifères jusqu'à 2/10o de millimètre, de façon à être déjà visible à l'œil nu, et présente chez les autres animaux des dimensions très considérables (jaune de l'œuf d'oiseau).

Quant à la forme des cellules, c'est une question dont il n'y a pas à s'occuper ici. Elle se trouve exposée dans les traités d'histologie. Rappelons seulement que les formes cellulaires sont des plus variées. Par les progrès de la nutrition, la cellule grossit; alors, pressée par ses voisines et les pressant elle-même, elle prend des formes plus ou moins géométriques. Pour beaucoup d'autres causes, les cellules peuvent présenter des formes polyédriques, cylindro-coniques, fusiformes, étoilées, lamellaires. Il n'y a pas lieu de s'étendre sur ce sujet. Rappelons aussi que les éléments cellulaires, à l'état le plus parfait ou complet, sont constitués par une membrane d'enveloppe, enveloppe amorphe (formée de cellulose chez les végétaux), par un contenu granuleux et transparent (protoplasma1 et substances diverses élaborées par ce protoplasma) et par une vésicule dénommée noyau, qui renferme elle-même une autre vésicule, le nucléole. Mais il s'en faut que toutes les cellules se présentent sous cette forme. Actuellement, on considère que la cellul› se compose essentiellement d'une petite masse de protoplasma et d'un noyau. Les propriétés de la cellule se ramènent donc à celles du protoplasma et du noyau.

1. De pros, premier, et mλáopa (de nìáoow, je forme); le protoplasma est la matière organisée vivante, la base physique de la vie », suivant l'expression du grand naturaliste anglais Huxley.

CHAPITRE II

COMPOSITION DES CELLULES

La composition chimique du protoplasma n'est pas la même que celle du noyau. La manière toute spéciale dont celui-ci fixe diverses matières colorantes suffit à le prouver. D'une façon générale, le protoplasma fixe les colorants dits acides (couleurs d'aniline dans lesquelles la matière colorante joue le rôle d'acide), et le noyau fixe les colorants basiques (couleurs d'aniline dans lesquelles la matière colorante joue le rôle de base)1.

Le protoplasma contient de l'eau, une très petite quantité de sels minéraux, une petite quantité d'hydrates de carbone et de graisse et des matières albuminoïdes à l'état d'albumine et surtout de globuline; mais on tend à admettre que ces substances sont plutôt des matières nutritives de la cellule ou des produits de décomposition du protoplasma que des matériaux constitutifs; ces derniers consistent en protéides (nucléo-albumines [voy. plus loin, p. 32]). On voit donc que le protoplasma n'est pas une individualité chimique, c'est un complexus de substances.

Il en est de mème du noyau. Il est difficile actuellement de distinguer avec certitude entre les constituants chimiques du protoplasma et ceux du noyau; nous ne pouvons nous fonder pour cela que sur les recherches microchimiques et sur quelques analyses d'éléments particuliers, tels que les spermatozoïdes de divers animaux, considérés comme formés quasi exclusivement de substance nucléaire. Selon toutes probabilités cependant, les albuminoïdes du noyau sont des nucléo-protéides (voy. plus loin, p. 33). Le stroma du noyau, la chromatine, ainsi appelée parce que c'est sur elle que se fixent les colorants du noyau, est une nucléine; la substance achromatique serait constituée par une substance albuminoïde, probablement analogue aux globulines, la linine (de vov, filament). Le suc nucléaire contiendrait des albuminoïdes, albumines et globulines. Les réactions

1. Cette distinction entre les couleurs d'aniline, très importante pour l'étude des réactions intracellulaires, est due à Ehrlich (1879), biologiste allemand contemporain.

microchimiques ont démontré dans le noyau la présence du fer et celle du phosphore.

La question se pose nécessairement de savoir si la composition qui vient d'être indiquée est celle des éléments vivants ou des cellules mortes. L'application des agents usuels de la chimie aux cellules vivantes est, on le comprend de reste, immédiatement destructrice des fonctions de ces cellules, c'est-à-dire de la vie même. Les protoplasmas sont des composés trop délicats pour qu'une action un peu énergique n'en supprime pas le fonctionnement. On est en droit de se demander si les substances par lesquelles a lieu ce fonctionnement ne sont pas du même coup plus ou moins profondément altérées. Il est très vraisemblable que les matières albuminoïdes des protoplasmas vivants diffèrent des matières que l'étude chimique de la cellule est parvenue à distinguer. D'après Pflüger, l'albumine vivante différerait essentiellement de l'albumine morte, en ce que ses molécules seraient constamment en état d'instabilité; de là, l'extrême facilité et la grande variété de ses réactions; l'albumine morte, au contraire, est en équilibre stable. « Ce qu'il y a de caractéristique dans l'état d'organisation, a dit aussi Ch. Robin 2, est représenté par un fait d'équilibre instable des molécules des principes » immédiats faiblement associés. La supposition de Pflüger est tout à fait vraisemblable; nous ne savons cependant pas quelles sont exactement les différences entre la composition chimique de la cellule vivante et la composition de la cellule morte. Ces différences n'en sont pas moins réelles. Dans ces dernières années, on a montré qu'à la suite de l'injection dans le sang d'un animal (lapin, par exemple) du sérum sanguin d'un animal d'une autre espèce (cobaye, par exemple), le sérum de l'animal injecté (lapin) acquiert la propriété de produire un trouble et un précipité dans le sérum du cobaye; il s'est formé dans le sang du lapin ainsi traité une coaguline ou précipitine spécifique. Nous disons spécifique, parce que cette substance n'agit que sur le sérum du cobaye, et nullement sur celui de l'homme, du chien, du lapin, etc. On a semblablement obtenu les précipitines des sérums d'homme, de chien, de lapin, etc., toutes spécifiques. Il est intéressant de noter que la précipitine du sérum humain agit aussi, quoique faiblement, sur le sérum du sang des Singes anthropoïdes (Chimpanzé, Orang), mais non sur le sérum des autres Singes. Ces sérotoxines, comme on les appelle quelquefois, ont donc la propriété de précipiter les matières

1. Célèbre physiologiste allemand contemporain, professeur de physiologie à l'Université de Bonn. 2. Anatomie et physiologie cellulaires. Paris, 1873, p. 22. Ch. Robin (1821-1885), célèbre histologiste, fut professeur d'histologie à la Faculté de médecine de Paris.

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