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albuminoïdes des sérums. Or, l'analyse chimique n'a point décelé de grandes différences entre les sérum-albumines ou les sérum-globulines du sang d'espèces voisines '; mais voilà que les expériences de ce genre nous apprennent qu'en réalité ces substances, à l'état de vie, présentent d'importances réactions qui ne leur sont point communes à toutes. Les faits de cette nature se multiplieront certainement au fur et à mesure que se perfectionneront les procédés d'investigation. Dès maintenant, c'est cette grande complexité moléculaire des matières protéiques, par laquelle ont été frappés tous les chimistes biologistes, qui explique la diversité des opérations chimiques qui se passent dans les cellules; car, seule, elle rend possible cette diversité; celle-ci entraîne la diversité mème des réactions des ètres entre eux et avec le milieu. A son tour, cette diversité chimique des substances constitutives des cellules et de leurs réactions explique les différences spécifiques qui existent entre les organismes et même les différences individuelles. On peut comprendre, par exemple, que l'hérédité consiste dans le maintien des propriétés chimiques spécifiques. Déjà, par une longue série de recherches sur les variations de l'espèce Vitis vinifera, Armand Gautier a pu montrer que chaque variation de race est accompagnée d'une variation dans la nature des principes immédiats qui entrent dans la structure de la nouvelle variété ; chacun des changements morphotogiques est corrélatif d'une modification profonde des molécules chimiques qui constituent les éléments de l'être. Ainsi, en modifiant expérimentalement les principes immédiats d'une plante, on arriverait sans doute à modifier rapidement l'espèce. On peut donc dire que « la spécificité des êtres vivants est toute chimique »2. De même on comprend qu'une espèce animale donnée soit réfractaire à tel ou tel microbe; la poule est réfractaire au choléra asiatique et l'homme au choléra des poules. Ces exemples pourraient être aisément multipliés. Bref, la cause du fonctionnement des cellules, c'est-à-dire des divers modes de la vie, apparaît dans les propriétés chimiques des molécules constitutives des divers protoplasmas cellulaires, propriétés qui dépendent elles-mêmes de la structure si complexe de ces molécules; c'est en raison de cette complexité même que le nombre des réactions physico-chimiques possible est si con

1. Il faut noter cependant que depuis longtemps déjà les chimistes ont montré qu'il paralt y avoir pour chaque espèce animale une hémoglobine spéciale (voy. plus loin l'étude du sang). De même il y a longtemps que l'on sait que le pouvoir rotatoire des différentes matières albuminoïdes n'est pas le mème. Il n'en est pas moins vrai que, si l'on constate déjà de telles différences entre les substances protéiques extraites des éléments vivants, les différences doivent être encore beaucoup plus grandes entre les mêmes substances, à l'état de vie.

2. A. Prenant, La matière vivante el la vie (Revue médicale de l'Est, 1902).

sidérable; de là l'extrême variété du jeu des phénomènes vitaux, à travers toutes les espèces végétales et animales. C'est « dans la structure et l'organisation des molécules chimiques dernières qui composent le protoplasma, ainsi que dans le mode physique d'association de ces molécules, qu'il faut chercher l'origine et la cause de la succession des phénomènes élémentaires de la vie... Si de nouvelles propriétés sont introduites, il est vrai, par l'association des molécules intégrantes en tissus, les propriétés vitales élémentaires dérivent primitivement de leurs fonctions chimiques, lesquelles ne dépendent que de l'arrangement des atomes dans les principes immédiats dont sont construits nos organes 1. »

On ne saurait donc trop insister sur l'importance de toutes les questions relatives à la composition chimique des cellules.

1. Armand Gautier, Chimie biologique. Paris, 1892, p. 7-8.

CHAPITRE III

COMPOSITION CHIMIQUE DU CORPS HUMAIN

Les êtres supérieurs n'étant pas autre chose que des assemblages de cellules, il est à prévoir que leur composition ne diffère pas essentiellement de celle du protoplasma.

Dans ce livre, ici comme ailleurs, le corps humain doit être naturellement pris pour type, autant que cela est possible. Quels sont donc les constituants du corps de l'homme ?

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Les éléments qui entrent dans la constitution de cet organisme sont ceux des protoplasmas en général. Ce sont les suivants : oxygène, hydrogène, carbone, azote, soufre, phosphore, chlore, fluor, iode, brome, arsenic, silicium, sodium, potassium, calcium, magnésium, fer, manganèse. Le fluor, l'iode, le brome, l'arsenic, le silicium ne font pas partie intégrante de tout protoplasma; ils ne se rencontrent que dans certaines cellules; leur présence paraît presque toujours révéler des substances auxquelles ils confèrent des propriétés spéciales. Les autres éléments, au contraire, se trouvent partout'. Ajoutons que O, H, C, Az, S, P, Cl, Na, K, Ca, Mg et Fe sont essentiels non seulement à tous les éléments du corps des animaux supérieurs, mais aussi à la constitution de toute matière vivante, à cette exception près que Cl et Na ne sont pas indispensables aux végétaux. Les autres corps énumérés plus haut, c'est-à-dire Fl, I, Br, As, Si, Mn, n'ont été trouvés que chez certains organismes, animaux ou végétaux marins ou vertébrés supérieurs.

II.

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PRINCIPES ConstituantS DU CORPS HUMAIN.

Sous ces termes seront comprises et sommairement étudiées les substances inorganiques et les substances organiques que l'on trouve dans le corps.

1. Il est encore d'autres éléments que l'on rencontre dans divers organismes: tels le lithium, le cuivre, le plomb. Chez beaucoup d'Invertébrés (par exemple, Crustacés, Mollusques, etc.), le cuivre remplace le fer dans le sang.

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Parmi ces substances, outre les éléments minéraux cités ci-dessus, se trouvent l'eau et quelques gaz.

L'eau se trouve dans tous les tissus. La proportion est variable suivant les tissus; elle dépasse en général 60 p. 100 du poids du tissu frais. La moyenne générale, pour le corps de l'homme adulte, est de 64 p. 100, et, pour le corps du nouveau-né, de 70 p. 100. Ainsi un homme de 75 kil. contient 48 kil. d'eau, soit presque les deux tiers de son poids.

Il en est de même pour tous les organismes. De là l'expression pittoresque du chimiste et physiologiste allemand Hoppe-Seyler; <«< Tous les organismes vivent dans l'eau et même dans l'eau courante. » Aussi la vie sans eau n'est-elle pas possible. Il y a des animaux inférieurs (Rotifères, Tardigrades, etc.) que l'on peut dessécher et qui cessent alors de manifester toute propriété vitale; mais, dès qu'on leur restitue l'eau nécessaire, les manifestations de la vie reparaissent chez eux. C'est ce que Pouchet 2 résumait en ces termes : « Là où l'eau fait entièrement défaut, la vie paraît tout à fait impossible ».

L'eau existe dans l'organisme sous trois états: 10 à l'état de vapeur d'eau, dans les voies aériennes; 20 comme véhicule des substances dissoutes ou en suspension, se trouvant ainsi dans tous les liquides du corps, et comme eau d'imbibition des substances, solides, faisant ainsi partie intégrante des éléments cellulaires; 30 comme eau de combinaison, entrant ainsi dans la constitution mème de certaines substances organiques (eau de cristallisation des chimistes); cette dernière portion est très faible par rapport à la quantité qui se trouve sous les deux premières formes.

Toute cette eau tient des sels en dissolution et en proportion variable suivant les éléments cellulaires et suivant les espèces animales. Il n'est point de cellule qui puisse vivre dans l'eau pure, dans l'eau distillée. Celle-ci est comme un poison pour toutes les cellules, parce qu'elle altère profondément leurs propriétés physiques essentielles (voy. plus loin, p. 70).

1. F. Hoppe-Seyler (1825-1895), un des plus éminents chimistes physiologistes du XIXe siècle.

2. F.-A. Pouchet (1800-1872), directeur-fondateur du Muséum d'Histoire naturelle de Rouen, un des plus ardents défenseurs de la théorie de la génération spontanée.

2o Sels minéraux.

Tous les organes et tous les liquides du corps humain (comme tous les êtres vivants) contiennent des sels, en dissolution dans l'eau ou combinés avec les matières protéiques et avec leurs dérivés. Les sels représentent environ 4,7 p. 100 du poids du corps. Un homme de 75 kilos a donc, dans ses tissus, 3,525 de matières minérales. La teneur en sels des organes et des liquides organiques est très variable; c'est l'émail et l'ivoire des dents qui en contiennent le plus, 96 et 74 p. 100; puis viennent les os (65 p. 100); c'est à ces substances minérales, et par conséquent au calcium surtout et au magnésium, qu'est due la solidité des os; dans le cartilage, la quantité tombe à 3,4 p. 100, dans les muscles à 1,5-1,6 p. 100, dans le foie et le pancréas à 1, dans la rate à 0,5, dans les reins à 0,1. La proportion que l'on trouve dans les liquides de l'organisme n'est pas moins variable; elle sera indiquée pour chacun de ces liquides.

Ces sels sont surtout constitués par des chlorures de potassium, de sodium, d'ammonium;

Du fluorure de calcium;

Des carbonates de sodium, de calcium et de magnésium ;

Des phosphates de potassium, de sodium, de calcium et de magnésium ;

Des sulfates de potassium et de sodium.

A eux seuls, l'acide phosphorique et la chaux forment les trois. quarts de la masse de ces matières minérales. Ce sont en effet ces substances qui composent en grande partie le squelette.

3o Métalloïdes.

Dans l'énumération des éléments du corps faite plus haut, on a remarqué de nombreux métalloïdes.

Outre les combinaisons inorganiques en lesquelles entrent ces métalloïdes, ainsi que les combinaisons organiques connues depuis fort longtemps et que constituent les assemblages variés des principaux d'entre eux (O, H, C, Az, S, P), on les trouve engagés dans des substances auxquelles ils paraissent conférer un rôle tout spécial. Tel est l'iode dans la glande thyroïde (on le trouve ainsi dans le sang), tel l'arsenic dans la même glande et dans les poils et les productions cornées de la peau, tel aussi peut-être le fluor dans l'émail des dents et tel le silicium dans le tissu conjonctif.

Quant au brome, qui existerait dans la glande thyroïde, les capsules surrénales, le foie, l'hypophyse (?), les ongles, sa significa

GLEY.

Physiologie.

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