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de faim est supprimée, le jeûne est supporté beaucoup plus longtemps que par les individus normaux.

La soif est aussi une sensation générale, qui tient à l'appauvrissement du sang et des tissus en eau, mais accompagnée d'une sensation spéciale de sécheresse des muqueuses buccale et pharyngienne (sécheresse de la gorge). L'application d'eau fraîche sur cette muqueuse calme la soif, mais ne la fait pas disparaître; un chien à fistule gastrique maintenue ouverte ne peut satisfaire sa soif, l'eau s'écoulant incessamment par la fistule. D'autre part, toute perte d'eau, par sudation exagérée, par forte hémorragie, dans certaines maladies comme le choléra, s'accompagne d'une soif vive qui est apaisée par l'injection d'eau dans les veines ou dans le rectum.

III. — PREMIÈRE PARTIE DE L'ACTE DIGESTIF.

Les aliments introduits dans la cavité buccale sont divisés par les dents (mastication), humectés et quelques-uns d'entre eux modifiés par la salive (insalivation), puis, le bol alimentaire étant formé, portés vers le pharynx, saisis en quelque sorte dans ce conduit et poussés jusque dans l'estomac par l'œsophage (déglutition).

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La mastication consiste dans la division des aliments solides. Ainsi divisés, ceux-ci sont attaqués plus facilement par les liquides digestifs lant du reste du canal intestinal que de la bouche. La viande et les matières azotées sont beaucoup plus aisément digérées dans l'estomac, quand elles ont été soumises dans la cavité buccale à une suffisante mastication. Toutefois cette opération n'est pas toujours poussée très loin pour les aliments de cette nature; ainsi les animaux exclusivement carnivores ont surtout des dents pointues, de véritables crochets qui déchirent seulement la masse alimentaire. Pour les aliments végétaux, au contraire, la mastication doit être aussi complète que possible; de là le système des dents molaires si développées chez les herbivores; la plupart des matières nutritives végétales sont renfermées dans des enveloppes, en général réfractaires à l'action des sucs digestifs; l'appareil masticateur doit donc fonctionner pour déchirer les enveloppes des graines, les cellules, etc.; prima digestio in ore, disaient les anciens, qui ne considéraient, en parlant ainsi, que la mastication, ignorant l'action chimique de la salive.

A. Role des dents, instruments principaux de la mastication. Les instruments de la mastication sont les dents. Grâce à

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leur sensibilité très fine, les dents sentent le degré de solidité des matières sur lesquelles elles ont à agir; à la suite de cette impression le système nerveux central peut proportionner l'énergie des actions musculaires aux résistances que les muscles doivent vaincre. Les molaires seules mâchent les aliments; les incisives les coupent et les canines, beaucoup moins importantes chez l'homme, perforent ou déchirent.

Les dents, supportées par les mâchoires, se meuvent par conséquent avec celles-ci. La mâchoire supérieure qui fait corps avec les os de la tête, est immobile. La mâchoire inférieure est mise en mouvement par des muscles élévateurs (masséters, temporaux et ptérygoïdiens internes) et abaisseurs (ventres antérieurs des digastriques, génio-hyoïdiens, mylo-hyoïdiens; la contraction de ces muscles se combine avec celle des muscles sous-hyoïdiens qui fixe l'os hyoïde sur lequel les abaisseurs de la mâchoire prennent leur insertion fixe); le mouvement d'abaissement peut être simplement passif, par le relâchement des muscles élévateurs et la chute qui s'ensuit de la mâchoire par son propre poids ; d'autres muscles enfin déterminent des mouvements de latéralité, assez bornés chez l'homme, très étendus chez les Ruminants; ces mouvements sont dus à la contraction du ptérygoïdien externe qui fait sortir de la cavité glénoïde, en le tirant en avant, un des condyles, tandis que la mâchoire pivote sur l'autre condyle. Le résultat de tous ces mouvements est la rencontre des dents des deux mâchoires les unes avec les autres; les incisives alors font office de ciseaux et les molaires peuvent exercer leur action triturante, leurs surfaces entrant en contact.

L'étude des mouvements de la mâchoire inférieure montre que la mastication, chez l'homme, est mixte et participe à la fois de celle des carnivores et de celle des herbivores (Ruminants), vu la nature mixte de son alimentation; les carnivores qui ne font que déchirer leur proie, n'ont que des mouvements d'abaissement et d'élévation, et point de mouvements de latéralité; aussi leur condyle ne peut-il tourner que sur son axe transversal. Chez les Ruminants, les mouvements de latéralité sont puissants, et, à cet effet, le condyle est plat et mobile en tous sens. Un autre type de condyle est celui des Rongeurs, condyle à grand diamètre antéro-postérieur, avec une cavité glénoïde creusée dans le même sens. Le condyle de l'homme a une forme intermédiaire entre toutes les précédentes, de même que chez lui les mouvements de mastication sont plus variés et se combinent d'une façon plus complexe que chez aucun animal.

B. Instruments accessoires de la mastication. Les mouvements des lèvres, des joues et de la langue ramènent à

chaque instant les aliments sous les arcades dentaires. La suppression de ces mouvements (paralysie des lèvres et des joues) rend la mastication difficile. Il en est de même, si la sensibilité de ces parties est abolie, ce qui prouve le rôle important des impressions sensitives nées de ces régions sur la coordination des mouvements de leurs muscles. Il faut que la langue, par exemple, qui va chercher dans toutes les parties de la bouche les parcelles alimentaires pour les ramener sous les dents, sente ces parcelles afin de leur donner la direction nécessaire.

C. Innervation des muscles de la mastication. Les muscles de la mastication sont innervés, les masséters, les temporaux, les ptérygoïdiens internes et externes, le ventre antérieur du digastrique et le mylo-hyoïdien par la branche motrice du trijumeau (dite aussi masticatrice, partie motrice du nerf maxillaire inférieur); le génio-hyoïdien ettous les muscles sous-hyoïdiens par l'hypoglosse '; ceux des joues (muscle buccinateur) par le facial, ceux des lèvres par ce même nerf.

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D. Centre de la mastication. Le centre de tous ces muscles se trouve dans le bulbe. C'est donc du bulbe que partent les incitations motrices qui règlent les mouvements synergiques dont l'ensemble contitue la mastication.

La mastication est tantôt un acte à point de départ volontaire, tantôt un acte d'emblée réflexe. Il suffit que des impressions périphériques (buccales) spéciales arrivent au bulbe par des fibres centripètes du trijumeau et du glosso-pharyngien pour que les incitations motrices en partent qui déterminent la contraction des muscles masticateurs. Ce qui prouve la nature réflexe du processus, c'est que l'extirpation de l'écorce cérébrale, chez le lapin, n'empêche pas la mastication d'une feuille de chou mise entre les dents 2. On verra plus loin que c'est le phénomène masticateur proprement dit, la division des aliments (action des dents), qui seul est réflexe, et qu'il en faut distinguer la formation du bol alimentaire, acte cérébral.

2. Sécrétion et rôle de la salive. Insalivation.

L'insalivation se fait non seulement par la sécrétion des glandes salivaires proprement dites, parotides, sous-maxillaires et sublin

1. Trois de ces muscles, omo-hyoïdien, cléido-hyoïdien et sterno-hyoïdien sont innervés aussi par le plexus cervical.

2. La succion est aussi un phénomène réflexe. La moelle allongée suffit à son accomplissement, comme le prouve l'observation des fœtus anencéphales qui sont capables de téter.

guales, mais aussi par celle de toutes les petites glandes disséminées dans la muqueuse buccale, glandes des joues, des lèvres, de la face inférieure de la langue, de la voûte palatine et du voile du palais. Cependant on ne connaît, pas bien le liquide de toutes ces glandes, qu'il est très difficile de recueillir isolément et en quantité suffisante pour l'étudier1.

La sécrétion de la salive est constante, mais irrégulière, augmentant pendant les repas. Suivant qu'elle provient de telle ou telle glande, la salive est un peu différente; ces différences portent à la fois sur la composition chimique et, d'après Claude Bernard, sur les usages, de telle sorte que chaque sorte de salive serait adaptée à l'un des trois actes, mastication, gustation, déglutition.

La salive parotidienne, que l'on obtient chez les animaux par une fistule du canal de Sténon et que l'on peut obtenir chez l'homme par le cathétérisme dudit canal, est très liquide, claire, non visqueuse (absence de mucine); elle contient assez de carbonate de chaux pour faire effervescence quand on la traite par un acide fort. Claude Bernard l'a considérée comme étant la salive de la mastication. Sur un animal porteur d'une fistule du canal de Sténon, il est manifeste qu'elle augmente par cet acte. D'ailleurs la parotide n'existe que chez les animaux qui ont des dents pour broyer leurs aliments et son volume est en rapport avec le rôle de la mastication; elle ne se trouve ni chez les Oiseaux, ni chez les Mammifères aquatiques (qui ingèrent de l'eau avec leurs aliments).

La salive sous-maxillaire, que l'on obtient par une fistule ou (chez l'homme) par le cathétérisme du canal de Wharton, est opalescente, filante, visqueuse (riche en mucine). Sa sécrétion serait surtout liée à l'exercice du goût (salive de la gustation); on la provoque à coup sûr, en effet, sur un animal porteur d'une fistule du canal de Wharton, en déposant un corps sapide sur la langue ou même en lui présentant un morceau de viande. Mais elle se produit aussi quand la formation et le glissement du bol alimentaire doivent être facilités; on l'observe, par exemple, quand on donne à manger un morceau de pain sec à un chien porteur d'une fistule; la vue seule du pain sec suffit même à amener l'écoulement de cette salive visqueuse. C'est donc aussi une salive de déglutition, analogue à la suivante.

La salive sublinguale présente les mêmes caractères que la précédente, plus épaisse encore et plus riche en éléments solides. Comme le liquide des glandes buccales et palatines, elle serait plus parti

1. Sur des animaux sur lesquels on avait lié les conduits des glandes parotides, sous-maxillaires et sublinguales, on a constaté que le liquide sécrété par les glandes buccales est opaque, très épais, riche en mucus.

culièrement associée à la déglutition. Elle servirait à agglutiner les éléments du bol alimentaire et à faciliter le glissement de celui-ci sur le dos de la langue et dans l'isthme du gosier. Mais il est clair que, dans ce rôle, les deux autres salives, préalablement sécrétées, et qui ont déjà humecté les aliments, se joignent à la salive sublinguale. Et ainsi la différenciation établie par Claude Bernard ne doit pas être considérée comme absolue.

C'est le mélange normal dans la bouche de toutes ces salives el du liquide des glandes buccales qui constitue la salive mixte. Avant d'étudier celle-ci, sa composition et son rôle, il faut voir comment se forme chacun de ces liquides. Cela revient à déterminer le fonctionnement de chacune des glandes salivaires.

1° Mécanisme de la sécrétion salivaire.

Il y a des phénomènes communs à toute activité glandulaire. Ces phénomènes généraux consistent en des modifications du contenu cellulaire, puis, quand le produit glandulaire vient à être excrété, en des changements de la circulation dans la glande tout entière. Ceux-ci sont relativement simples et faciles à constater; les premiers, qui se passent dans les éléments cellulaires, sont de deux ordres : ils sont constitués par des changements de forme du protoplasma et du noyau (phénomènes histologiques) et par des variations plus profondes, plus difficiles à saisir, de nature chimique, dont les phénomènes histologiques ne sont sans doute qu'une traduction.

A. Phénomènes histologiques. Les cellules des glandes salivaires présentent des caractères différents, suivant qu'on les considère à l'état dit de repos ou pendant qu'elles sécrètent. Ces expressions sont d'ailleurs impropres ; l'état de repos est en réalité la période pendant laquelle les cellules sont en activité chimique, ces éléments élaborant alors les principes essentiels de la sécrétion; et la phase appelée sécrétoire n'est au contraire que le moment de l'excrétion cellulaire. On reviendra sur cette importante distinction lorsque seront étudiés, dans un chapitre spécial, les phénomènes de sécrétion en général.

On ne fera que rappeler ici les caractères des cellules, dans leurs deux phases d'activité chimique (prétendu repos) et d'excrétion; on les trouve décrits en détail dans tous les traités d'histologie.

Les cellules des glandes salivaires sont constituées, outre le noyau, par un protoplasma granuleux dans les mailles duquel s'accumulent les matières qui formeront les produits essentiels de la sécrétion. Dans les cellules dites

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