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artificielle, on peut suspendre celle-ci à divers intervalles: la circulation veineuse continue à se faire sous l'influence de la seule pression ou vis a tergo, résidu de l'impulsion cardiaque, qui existe dans les veines.

B. Causes adjuvantes. Aspiration thoracique. Pousséc abdominale. — Il y a une cause adjuvante dont le rôle est considérable, c'est l'aspiration thoracique, que renforce une autre cause, la poussée abdominale. Nous avons déjà eu l'occasion de dire ce que l'on entend par aspiration thoracique (voy. p. 369).

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Pour se rendre compte de cette force, il est nécessaire et suffisant de considérer 1° que le poumon est un organe élastique; 2° que son élasticité n'est jamais complètement satisfaite, même en expiration, c'est-à-dire qu'il n'est jamais complètement revenu sur lui-même ; 3° qu'il se trouve dans une cavité close. Il est clair, dans ces conditions, que le poumon, tendant constamment à revenir sur lui-même en raison de son élasticité, exerce sur tout ce qui l'entoure, dans le milieu où il est contenu, une aspiration constante. Cette aspiration s'exerce naturellement avec le plus d'effet sur les organes à parois faibles, très dilatables, comme les veines. L'expérience de Barry (1825) suffit à le prouver : on introduit dans une des grosses veines du cou, sur un cheval, l'extrémité d'un tube coudé dont l'autre extrémité plonge dans un vase rempli d'un liquide coloré; on voit à chaque inspiration le liquide monter dans le tube, de telle façon que la veine finit par l'aspirer en quelque sorte complètement. Les gros troncs veineux intrathoraciques sont donc constamment maintenus dans un état de large béance; ils se trouvent ainsi toujours gorgés de sang et la réplétion ventriculaire, aidée par ce fait, est constamment assurée. La distension veineuse, due à l'aspiration thoracique, constitue aussi un état de moindre résistance à l'écoulement du sang, pour lequel une faible vis a tergo peut dès lors suffire. Il y a mieux encore. L'aspiration thoracique due aux poumons varie nécessairement avec les variations de l'état élastique de. ces organes; elle croit et décroît comme la force de rétraction élastique pulmonaire. Or, celle-ci varie avec les deux temps de la respiration. Le poumon, plus distendu en inspiration, acquiert alors une force de rétraction élastique plus grande; en expiration, son état moindre de distension crée une force moindre de rétraction. L'aspiration thoracique subit done un renforcement inspiratoire. Tandis qu'en expiration la valeur de l'aspiration thoracique, qui représente celle même de l'élasticité pulmonaire est de 6 à 8 millimètres de mercure, sa valeur en inspiration atteint 30 et 40 millimètres de mercure. De ce fait, l'aspiration thoracique en inspiration n'est plus seulement une cause constante de moindre résistance à l'écoulement du sang, elle devient par ce renforcement inspiratoire une véritable force d'appel périodique pour le sang veineux.

Ici intervient un nouveau facteur qui facilite encore l'afflux veineux vers

1. David Barry (1780-1835), médecin anglais. Son principal travail, Recherches expérimentales sur les causes du mouvement du sang dans les veines, fut publié en français, en 1835, à Paris, où il avait travaillé. Il s'est aussi beaucoup occupé des maladies des vaisseaux.

le thorax pendant l'inspiration; c'est un phénomène qui se passe au même moment dans l'abdomen. Le diaphragme, en même temps que sa contraction agrandit le thorax, refoule en s'abaissant les viscères abdominaux; il résulte de là une augmentation de la pression abdominale qui s'exerce sur tout le système des veines de l'abdomen, à la face externe de ces vaisseaux (Bertin1, 1756-1758). Par cette poussée abdominale le courant veineux est renforcé de l'abdomen vers le thorax; le sang, aspiré d'un côté, est simultanément poussé de ce même côté. Plus le diaphragme s'abaissera, plus par cela même l'aspiration thoracique sera énergique et plus sera renforcé le courant du sang veineux vers la poitrine.

L'influence de l'aspiration thoracique s'exerce très loin. Ce ne sont pas seulement les veines intrathoraciques ou de la base du cou qui la ressentent, ce sont encore les veines éloignées, telles que les principales veines des membres, l'humérale, la fémorale.

C'est grâce toutefois à certaines dispositions anatomiques que l'aspiration thoracique peut, par son renforcement inspiratoire, exercer une action d'appel efficace sur le sang des veines extérieures au thorax. Ces veines, comme la jugulaire, la fémorale, sont tenues constamment béantes par des expansions aponevrotiques qui fixent leurs parois aux tissus voisins. Dans certains cas, comme celui des veines hépatiques, leur paroi est adhérente au tissu de l'organe même qu'elles traversent. Ces dispositions assurent l'efficacité de l'aspiration thoracique. Si elles n'existaient pas, les veines extrathoraciques s'affaisseraient simplement sous l'influence de la dépression intravasculaire créée par l'appel inspiratoire. Au contraire, comme elles sont maintenues largement béantes grâce à leurs liens de fixité aponevrotiques, l'appel inspiratoire s'exerce efficacement sur le sang veineux extrathoracique aussi bien qu'intrathoracique. En cas de blessure des veines dans certaines régions, de la veine jugulaire au cou, par exemple, lors d'une intervention chirurgicale, l'appel inspiratoire peut se traduire par une entrée d'air à l'intérieur de la veine, d'où des embolies mortelles, quand le sang spumeux est projeté dans les vaisseaux du bulbe ou dans les artères coronaires. L'entrée d'air dans une veine des membres ou même dans la jugulaire n'est toutefois pas nécessairement mortelle. L'injection lente de quantités d'air considérables dans les veines, chez le chien par exemple, est inoffensive. Seule, l'irruption brusque de l'air est dangereuse et peut amener la mort.

C. Causes accessoires. Aspirations systolique et diastolique cardiaques. Contractions musculaires. Battements des artères. Valvules veineuses. D'autres causes agissent encore pour favoriser le retour du sang au cœur, mais celles-ci ne sont qu'accessoires, au sens propre du mot.

Indiquons d'abord l'influence de l'aspiration systolique et de l'aspiration diastolique du cœur sur le sang des veines en rapport direct avec les oreillettes. Cet effet a été décrit à propos de la réplétion cardiaque (voy. p. 368), on n'y reviendra pas.

1. E.-J. Bertin (1712-1781), médecin et anatomiste français.

Le rôle des contractions musculaires est à mentionner ensuite.

Il faut distinguer entre les effets d'une contraction permanente et ceux de mouvements successifs, qu'ils soient simplement intermittents ou qu'ils soient rythmés. La contraction permanente d'un groupe musculaire est une cause générale de résistance à la circulation du sang dans le segment auquel appartiennent les muscles contractés; après l'expulsion première du sang contenu dans ce segment, il est évident que le gonflement musculaire comprime les vaisseaux et que le rétrécissement de ceux-ci qui résulte de cette compression augmente d'autant la résistance à l'écoulement du sang. Les contractions successives, simplement intermittentes ou rythmées, produisent seules un effet favorable sur la circulation veineuse, en amenant des chasses successives de sang hors du segment dont font partie les muscles contractés. C'est ainsi que la marche, la course, le saut favorisent la circulation veineuse par les mouvements alternatifs auxquels donnent lieu ces exercices, mais non point la contraction simple et maintenue du bras ou de la jambe.

L'efficacité des contractions musculaires intermittentes ne peut toutefois se manifester réellement ou pleinement que grâce à la présence des valvules veineuses. - Celles-ci ont, sans doute, un rôle par elles-mêmes. Disposées de telle manière que, sous l'influence d'un courant sanguin rétrograde, elles se redressent, obturent la lumière du vaisseau et empêchent le sang de retourner vers les capillaires, elles servent à soutenir, en les segmentant, les longues colonnes sanguines, comme, par exemple, la colonne veineuse du membre inférieur1. Mais les valvules sont encore un auxiliaire indispensable pour la manifestation de l'influence favorable du mouvement sur la circulation veineuse. Sans la présence des valvules, le sang chassé pendant la contraction musculaire n'aurait pas de direction déterminée et, pendant le relâchement, la décompression veineuse créerait un appel aussi bien en amont qu'en aval. Ce serait un véritable trouble circulatoire que détermineraient dans ces conditions les contractions musculaires. Au contraire, la présence des valvules assure, pendant la compression veineuse, le départ du sang du côté du cœur et, d'autre part, pendant la décompression veineuse, l'appel exclusif du sang périphérique dans le segment vidé.

Du reste, comme on le voit, cette disposition anatomique ne constitue pas une cause, à proprement parler, de la circulation veineuse, mais elle facilite celle-ci en s'opposant au retour du sang des veines vers les capillaires.

Enfin les battements des artères exercent une influence sur les veines voisines. La plupart des grosses veines étant unies aux artères cor

1. Rappelons qu'il n'y a point de valvules dans les veines des poumons, des reins, de l'utérus, du crâne, ni dans la veine porte.

respondantes par un tissu conjonctif serré ou même étant renfermées dans une gaine commune, la paroi veineuse ressent le contrecoup des mouvements artériels. On a constaté en effet que toute dilatation artérielle donne lieu à une ondulation veineuse.

3o Phénomènes intimes de la circulation dans les veines. Pression et vitesse du sang.

La pression veineuse se mesure avec des manomètres comme ceux qui servent à mesurer la pression artérielle.

Comme la pression dans les veines est basse, ces manomètres ne sont pas chargés avec du mercure, mais avec une solution saline anticoagulante; la densité de cette solution étant connue, on peut transformer les valeurs obtenues en centimètres de mercure1. - L'instrument est mis en relation avec la veine par un branchement latéral (tube en T), de manière que la circulation ne soit pas interrompue dans le vaisseau; sans cette précaution, c'est-à-dire si la canule était directement liée sur le bout périphérique d'une grosse veine, la pression s'élèverait progressivement et rapidement jusqu'au niveau de la pression artérielle, le sang continuant à affluer dans le segment veineux ainsi isolé sans pouvoir s'écouler latéralement.

La pression veineuse est très faible; elle ne s'élève pas dans les veines périphériques à plus de 5 à 11 millimètres de mercure (5 millimètres dans la fémorale du chien; 10 millimètres dans la crurale du mouton). Elle diminue de la périphérie au centre; dans les gros troncs veineux, voisins du cœur, elle ne dépasse pas 0mm,1 à 0mm,6 de mercure et même y devient négative; ainsi, chez le chien, dans la jugulaire, la pression est nulle ou négative. C'est que dans ces vaisseaux se fait sentir au maximum l'influence de l'aspiration thoracique. Et l'on saisit bien ici tout le mécanisme de la circulation veineuse; le sang, poussé d'un côté par la légère pression veineuse, est attiré du même côté par les forces conjointes de l'aspiration thoracique et de l'aspiration systolique et diastolique du cœur.

La valeur de la pression veineuse dépend principalement des résistances à l'écoulement du sang veineux et du débit du sang dans les artères. Abstraction faite des obstacles qui peuvent se trouver sur le trajet même des veines, les résistances à l'écoulement, surtout pour les veines centrales, sont réglées par le débit cardiaque. Si ces veines ont de la peine à se vider, alors la pression s'y élève; c'est ce qui arrive quand le cœur se ralentit ou s'arrête sous l'influence de l'excitation du pneumogastrique : le débit du cœur diminuant, le sang s'accumule dans le cœur droit et cette accumulation entraîne une élévation notable de la pression veineuse.

1. Il suffit pour cela de multiplier les chiffres de pression par le rapport des densités de la solution anticoagulante et du mercure.

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Au contraire, celle-ci s'abaisse dans toutes les conditions où le retour du sang au cœur droit et l'évacuation de ce dernier sont facilités; c'est ce que l'on observe, par exemple, dans l'accélération du cœur consécutive à la section des pneumogastriques, le cœur vidant alors plus complètement le système veineux, si le débit cardiaque augmente dans l'unité de temps. Ces variations de la pression veineuse sous l'influence du débit cardiaque sont donc inverses de celles de la pression artérielle, puisque cette dernière augmente ou diminue suivant que le travail du cœur augmente ou diminue. Quant au débit artériel, toutes choses égales du côté du cœur, il dépend des changements de calibre des artères (phénomènes vaso-moteurs); or, les artérioles se dilatant, la quantité de sang qui arrive dans les veines augmente et simultanément la pression s'y élève; les artérioles se resserrant, les veines reçoivent moins de sang et la pression s'y abaisse. Dans ces cas encore les variations de cette pression sont inverses de celles de la pression artérielle (voy. p. 405). On peut donc dire, d'une manière générale, que les conditions qui déterminent l'élévation ou l'abaissement de la pression artérielle font diminuer ou augmenter la pression veineuse. Le tableau ci-dessous résume les variations de la pression veineuse en fonction des différents facteurs que nous venons d'examiner.

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La vitesse moyenne du sang dans les veines a été mesurée, comme dans les artères, au moyen des hémodromomètres (voy. p. 413). Elle est un peu moindre que dans les artères correspondantes en raison du diamètre plus grand des veines; ainsi dans la jugulaire interne du chien elle est de 15 centimètres environ par seconde, tandis que dans la carotide elle est de 20 à 30 centimètres (p. 414). Mais, les veines étant plus larges, le débit du sang dans ces vaisseaux n'en est pas moins à peu près le mème que dans les artères correspondantes. C'est là d'ailleurs la condition d'une circulation sans troubles il faut que la quantité de sang que les veines ramènent au cœur soit égale à celle que le coeur chasse dans les artères.

4o Phénomène extérieur de la circulation veineuse. Pouls veineux normal.

Le signe visible de la circulation veineuse est le pouls veineux. A l'état physiologique, on constate en effet, mais seulement sur les veines voisines du cœur, telles que la jugulaire externe, un phénomène que l'on peut qualifier de pouls.

La figure 101 représente un tracé de pouls jugulaire, inscrit simultané

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