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de savoir à quel tissu, nerveux ou musculaire, est dévolue cette propriété; et la question n'est guère moins importante au point de vue spécial de la fonction cardiaque, puisque le rythme est une des conditions essentielles à la production du travail utile du cœur; c'est le rythme cardiaque qui crée périodiquement les variations de pression auxquelles est dû le mouvement du sang dans le système vasculaire.

Or, la fonction rythmique a été considérée pour les raisons suivantes comme une fonction de la fibre musculaire cardiaque ellemême :

On a vu tout à l'heure que la pointe du cœur, qui paraît dépourvue de cellules ganglionnaires, si on la sépare du reste de l'organe, ne bat point; mais, si on l'excite, elle répond aux excitations et ses contractions sont rythmées. Voici en effet ce que l'on a observé :

To La pointe du coeur, excitée par un courant continu (courant de pile), répond par des contractions rythmées. Dans ces conditions, un muscle ordinaire ne donne qu'une secousse à la fermeture et une à la rupture du courant;

2o La pointe du cœur, excitée par un courant induit à interruptions fréquentes, réagit par des contractions dont le nombre ne correspond pas à celui des interruptions, contrairement à ce qui se passe pour un muscle ordinaire, mais qui se produisent suivant un rythme propre. Ce fait s'explique d'ailleurs par la loi de l'inexcitabilité périodique du cœur (voy. p. 393);

3o Si on lie le cœur sur une canule au-dessous du sillon auriculo-ventriculaire, de manière que le muscle puisse être irrigué avec du sérum ou avec une solution saline convenable, on voit la pointe continuer ses battements rythmiques.

Dans toutes ces expériences l'excitant est donc soit le courant électrique, soit un liquide de circulation artificielle; dans tous les cas, le myocarde manifeste la propriété qu'il possède de répondre rythmiquement aux exci

tations.

4o D'autre part, rappelons que le cœur du poulet présente des mouvements rythmiques réguliers dès la fin du second jour de l'incubation, alors qu'il n'est encore constitué que par un tissu épithélial, revêtu à sa surface extérieure d'une couche de cellules mésodermiques.

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C. Conduction des excitations dans le cœur; nature nerveuse ou musculaire de ce phénomène. Normalement, la contraction cardiaque, née à l'embouchure des veines dans les oreillettes, se propage à travers celles-ci, puis dans les ventricules. Expérimentalement, quand un point de la surface externe ou interne du cœur est excité, l'excitation est transmise à tout l'organe dont chaque partie répond par un mouvement.

Par quels éléments se fait cette transmission de l'excitation, que

celle-ci soit physiologique ou artificielle? On a rapporté cette propriété au système nerveux du cœur, par extension apparemment légitime à ce système d'une propriété bien connue de la fibre nerveuse, la conductibilité; quelques faits cependant ont été invoqués contre cette manière de voir.

1° Si on excite l'oreillette à des distances différentes du ventricule et qu'on mesure la durée de la période latente pour la systole ventriculaire, c'est-à-dire le temps qui sépare cette systole du moment de l'excitation, on constate que la systole est d'autant plus tardive que l'oreillette a été excitée plus loin. Et, comme la conduction de l'excitation est très lente (90 millimètres par seconde, soit trois cents fois plus petite que dans les

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Fig. 104.

Dissociation des contractions auriculaires et ventriculaires après section du faisceau de His (tracé de H.-E. Hering, 1905).

Coeur de chien. A, tracé des mouvements de l'oreillette; V, tracé des mouvements du ventricule. Le temps est inscrit en secondes.

nerfs moteurs), on en conclut qu'elle se fait par des fibres musculaires ;20 On a démontré l'existence, entre les oreillettes et les ventricules, de faisceaux ou « ponts » musculaires reliant la substance contractile des premières à celle de ces derniers faisceau de His 1, 1895, ou fibres de passage auriculo-ventriculaires).

Or, les contractions auriculaires se transmettent encore aux ventricules, même quand on a sectionné toutes les communications entre les deux portions du cœur, sauf le faisceau de His. Mais si on comprime assez fortement ce faisceau interauriculo-ventriculaire, il se produit immédiatement de l'allorythmie à deux ou trois systoles auriculaires succède seulement une systole ventriculaire (voy. fig. 104); si on écrase ou qu'on sectionne le faisceau, alors, après un arrêt plus ou moins long, les ventricules se remettent à battre avec un rythme qui leur est propre, indépendant de celui des oreillettes; la dissociation fonctionnelle est complète entre les deux parties du cœur.

1. W. His junior, médecin contemporain, professeur à l'Université de Berlin, est le fils du célèbre embryologiste suisse qui professa longtemps l'anatomie à Leipzig

Ces faits suffisent-ils à établir la nature musculaire de la transmission des excitations dans le cœur? Assurément non, parce que, d'une part, les expériences sur la vitesse de transmission des excitations des oreillettes aux ventricules ont été effectuées sur des cœurs privés de circulation, se trouvant par conséquent anémiés ou asphyxiés, dans lesquels par suite la vitesse de la conduction nerveuse peut être très diminuée; et, d'autre part, parce qu'il a été prouvé que le faisceau atrioventriculaire est largement pourvu de fibres nerveuses et mème de cellules ganglionnaires. Enfin les expériences de Carlson résumées plus haut (p. 445) montrent que la conduction des excitations se fait dans le cœur par voie nerveuse.

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D. Cause des mouvements rythmiques du cœur. Ainsi l'automatisme et le pouvoir de conduction des excitations paraissent bien être propriétés du système nerveux intracardiaque et le mouvement rythmique serait propriété du muscle cardiaque. Connaît-on pour cela la cause des contractions du cœur? Quel est en réalité le problème? Le cœur bat régulièrement chez l'homme 70 à 75 fois par minute, chaque révolution cardiaque dure 8/10 de seconde dont 1/10 pour la systole auriculaire, 3/10 pour la systole ventriculaire et 4/10 pour la diastole auriculo-ventriculaire; de la succession ponctuelle de ces fractions de temps dépend la permanence du rythme cardiaque, et c'est là ce qu'il s'agit d'expliquer. Il faudrait savoir quelles sont les excitations qui arrivent par intervalles aux cellules ganglionnaires et de quelle manière celles-ci les distribuent au muscle. En étudiant les propriétés de ce muscle, nous avons vu le rôle de la distension (p. 390) et celui du calcium (p. 389) comme excitants du cœur. Mais il est difficile de comprendre comment le calcium, dont la teneur dans le sang est constante, serait la cause du fonctionnement régulièrement intermittent du cœur; les mutations de cet élément dans le cœur seraient-elles suffisantes pour qu'il en résultât une source constante d'excitation? Quant à la distension, il n'est point aisé de décider actuellement si c'est là le seul excitant qui mette en jeu d'une façon périodique Ja propriété neuro-musculaire cardiaque.

20 Innervation extrinsèque du cœur.

La condition fonctionnelle habituelle du cœur est un état de toni.cité moyenne avec alternances régulières de contraction et de repos (rythme). Les nerfs qui agissent sur le cœur modifient cet état dans le sens positif ou dans le sens négatif, c'est-à-dire en augmentant ou en diminuant le nombre des contractions et aussi la tonicité du

myocarde. Les nerfs extrinsèques du cœur qui ne sont nullement, comme on l'a vu (p. 442), moteurs, sont donc seulement des nerfs modificateurs des mouvements cardiaques. Ils n'en sont pas moins pour cela très importants. La preuve en est dans l'expérience suivante :

H. Friedenthal1 (1902) réussit à sectionner sur le chien et sur le lapin tous les nerfs extracardiaques des deux côtés, extirpant en même temps le ganglion cervical inférieur et le ganglion thoracique supérieur; il faut conserver d'un côté les filets sensitifs pulmonaires et les filets œsophagiens et stomacaux du pneumogastrique (sur les lapins il faut aussi conserver un récurrent); de cette façon sont ménagées la fonction respiratoire, la déglutition et la digestion stomacale. Les animaux qui survécurent (un chien et plusieurs lapins [le chien fut conservé plus de huit mois]) semblaient normaux; le nombre des battements du cœur n'était pas sensiblement modifié; mais, dès qu'on leur imposait un travail, im médiatement des troubles graves apparaissaient; c'est ainsi que le chien ne pouvait faire une course de plus d'un kilomètre. La régulation durable du travail du cœur est donc sous la dépendance du système nerveux central ou des ganglions de la chaîne sympathique.

Les nerfs centrifuges qui relient le bulbe et la moelle au cœur sont dits accélérateurs ou modérateurs du mouvement cardiaque. De plus, le cœur a des nerfs centripètes ou sensitifs.

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A. Nerfs accélérateurs du cœur. Ce sont des nerfs du système sympathique et qui, pour arriver au cœur, suivent des voies multiples. Démontrons d'abord leur existence.

L'expérience fondamentale, celle des frères E. et M. Cyon (1866), qui a établi sûrement cette existence, consiste en l'excitation électrique, sur des chiens et des lapins curarisés, de la moelle préalablement sectionnée audessous de l'atlas et après section des deux pneumogastriques, des deux nerfs dépresseurs, du sympathique cervical de chaque côté et des deux splanchniques; on observe à la suite de cette excitation une accélération considérable des battements du cœur, sans modification de la pression sanguine. C'est donc là une action directe de la moelle sur le cœur et qui, dans les conditions de l'expérience, ne peut s'exercer que par l'intermédiaire des ganglions sympathiques restés seuls à assurer les relations entre l'organe et le système nerveux, et notamment le ganglion cervical inférieur et le premier thoracique. La contre-épreuve achève la démonstration; après l'extirpation de ces deux ganglions l'excitation de la moelle, en effet, ne change rien au nombre des battements du cœur.

Quels sont les nerfs qui relient, par l'intermédiaire des deux ganglions sus-mentionnés, la moelle au cœur? Cette étude constitue la

1. Physiologiste allemand contemporain.

GLEY.

Physiologie.

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topographie des nerfs accélérateurs cardiaques, qui fut l'œuvre de plusieurs physiologistes dans le dernier tiers du siècle passé.

a. TOPOGRAPHIE DES ACCÉLÉRATEURS DU COEUR. Ces nerfs sont très nombreux; on peut les diviser en deux grands groupes naturels (voy. fig. 105):

1er groupe, médullaire principal, de beaucoup le plus important, qui se subdivise lui-même en trois portions: a, descendante, constituée par des

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Le trajet des nerfs accélérateurs est représenté par des lignes pointillées. B. bulbe avec les origines du pneumogastrique P et du spinal Sp; Gj, ganglion jugulaire; Gpl, ganglion plexiforme; Ges, ganglion cervical supérieur; Syc, sympathique cervical; C, moelle cervicale; NV, nerf vertébral; - D, moelle dorsale supérieure ; Gth, ganglion premier thoracique; Gei, ganglion cervical inférieur,-AV, anneau de Vieussens.

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fibres émanant des 4o, 5o, 6o et 7e paires cervicales et se réunissant dans le nerf vertébral (cordon cervical sympathique profond) pour aboutir au ganglion 1er thoracique, qui est le centre de convergence de tous les nerfs appartenant à ce grand groupe des accélérateurs; b, transversale, constituée par des fibres qui unissent directeinent la 8e paire cervicale et les 1re et 2e paires dorsales au ganglion 1er thoracique par les rameaux communicants; c, ascendante, constituée par des filets provenant des 3e, 4e et 5e paires dorsales et se jetant par les rameaux communicants dans le cordon sympathique thoracique pour remonter jusqu'au ganglion 1er thoracique. L'excitation du bout thoracique du nerf vertébral ou de l'un quelconque des nombreux filets qui unissent les racines cervicales ou dorsales au sympathique thoracique ou di rectement au ganglion 1er thoracique détermine l'accélération du cœur ;

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2 groupe, bulbo-médullaire, moins riche que le précédent et par conséquent beaucoup moins important, qui se subdi-vise en deux portions: a, médullaire supérieure, formée par des filets émanant des fre, 2e et 3e paires cervicales et gagnant, par les rameaux communicants, directement le ganglion cervical supérieur d'où ils descendent vers e cœur par le cordon cervical sympathique. L'excitation du segment thoracique de ce cordon sectionné, sur le chat, sur le lapin, préalablement anes

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