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Ainsi le centre bulbaire peut être considéré comme le centre vaso-constricteur principal ou de premier ordre, parce que les phénomènes résultant de son excitation ou de sa section sont les plus considérables; les centres médullaires sont des centres de deuxième ordre et les centres périphériques (formations ganglionnaires) sont des centres de troisième ordre.

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B. Centres vaso-dilatateurs. Puisqu'il y a des nerfs vasodilatateurs parfaitement différenciés, il faut admettre que ces nerfs ont dans le bulbe et dans la moelle des noyaux d'origine jouant le rôle de centres. La preuve en est que, comme nous le verrons en parlant du fonctionnement des centres vaso-moteurs, une même excitation peut donner lieu, toutes conditions d'excitabilité de l'axe bulbo-médullaire paraissant égales, à des réactions vasculaires de sens inverse dans le même temps, dans des territoires artériels plus ou moins distants, souvent même voisins les uns des autres. Or, il est difficile de supposer qu'une même excitation puisse à la fois et au même moment exciter et inhiber le même centre; dans l'asphyxie, par exemple, il se produit en même temps, sous l'influence excitante du sang noir, des phénomènes vaso-dilatateurs et vaso-constricteurs, et cela non pas seulement dans des départements vasculaires éloignés, mais aussi dans des départements voisins (voy. plus loin, p. 478). De plus, il y a des substances qui diminuent l'excitabilité des centres vaso-dilatateurs, celle des centres vaso-constricteurs restant intacte; c'est ainsi que la toxine pyocyanique atténue considérablement le réflexe dépresseur causé par l'excitation du nerf de Ludwig-Cyon et le phénomène de vaso-dilatation réflexe que provoque dans l'oreille l'excitation du bout central du nerf auriculo-cervical (Charrin et Gley, 1890).

Le principal centre vaso-dilatateur se trouve dans le bulbe, comme le montrent les résultats des nombreuses excitations sensitives qui y arrivent et déterminent des vaso-dilatations réflexes, soit dans les diverses parties de la tête (face, glandes salivaires, etc.), soit dans les viscères (action des nerf dépresseurs, voy. p. 457). Parmi les centres vaso-dilatateurs médullaires, le mieux connu est celui du pénis; les excitations mécaniques du gland amènent parfaitement l'érection après la section de la moelle au niveau de la dernière vertèbre dorsale, l'animal (chien) étant remis du traumatisme; mais si on détruit la moelle lombaire, ce réflexe ne se produit plus (Goltz).

Les éléments nerveux périphériques peuvent aussi se comporter comme des centres. Des expériences de E.-H. Weber ont montré que, après la section de tous les nerfs qui se rendent à la membrane

interdigitale de la grenouille, des excitations chimiques directes de cette membrane peuvent amener de la congestion, et l'hypothèse a été exclue que, dans ces expériences, l'irritation se porte sur les vaisseaux eux-mêmes; c'est le tégument de la palmure interdigitale qui est excité, c'est-à-dire les nerfs centripètes de la peau.

C. Fonctionnement des centres vaso-moteurs. L'activité des centres vaso-moteurs, comme celle des centres cardiaques, est mise en jeu par des excitations réflexes, par des excitations chimiques (automatisme des centres), par association.

1° Les excitations des nerfs sensibles, quelles qu'elles soient, provoquent en général une augmentation de la pression aortique, par le resserrement des vaisseaux des organes profonds, en même temps qu'une dilatation des petits vaisseaux de la peau et des muscles; il y a donc réaction simultanée des centres vaso-constricteurs et des centres vaso-dilatateurs. C'est ce dernier fait qu'il est important de retenir, car le balancement entre les vaisseaux du tégument et des muscles et ceux des viscères n'est pas de règle absolue. Et des excitations sensitives peuvent donner lieu à des réactions de sens inverse dans des réseaux artériels voisins.

L'effet est le même des excitations des organes des sens et des excitations cérébrales (émotions diverses, sensations de plaisir, etc.), avec cette différence que ce sont surtout des phénomènes de vaso-constriction qui se produisent sous ces influences 1, tandis que le cerveau augmente de volume par dilatation de ses artères; ce dernier phénomène a été bien étudié par A. Mosso sur plusieurs individus qui présentaient des pertes de substance osseuse cranienne et sur lesquels on pouvait inscrire les changements de volume du cerveau pendant une émotion, un calcul mental, etc. (voy. fig. 120).

Le lonus artériel est en partie sous la dépendance de tout cet ensemble d'excitations sensitivo-sensorielles.

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2. Les excitations chimiques agissent également sur la pression artérielle. Celles qui sont causées par les modifications quantitatives des gaz du sang sont normalement les plus importantes. On considère souvent le tonus vasculaire comme dépendant, du moins en grande partie, de la teneur du sang en oxygène et acide carbonique. Dans l'apnée, l'excitabilité des centres vaso-constricteurs diminue et la pression artérielle tend à s'abaisser. Si, au contraire, la teneur du sang en acide carbonique augmente, le centre vaso-constricteur est excité. Mais si cette augmentation est notable, comme dans l'asphyxic, tous les centres nerveux, les vaso-dilatateurs 1. Il faut cependant remarquer la spécificité de la réaction des vaisseaux de la face sous l'influence soit de la pudeur ou de la honte, soit de la peur; dans le premier cas, c'est toujours une dilatation et, dans le second cas, toujours une constriction qui se produit. L'action des autres émotions sur les vaisseaux de la face n'est pas constante. Il est difficile de dire si, dans ces cas de vaso-dilatation, il s'agit toujours d'une excitation du centre vaso-dilatateur ou d'une paralysie du centre vaso-constricteur.

comme les constricteurs, vont être excités. Quelle sera, dans ce cas de l'asphyxie, la réaction artérielle prédominante? On a soutenu que, sous l'influence du sang noir, les vaisseaux des viscères se resserrent, tandis que les vaisseaux musculo-cutanés se dilatent; c'est cette constriction des vaisseaux profonds qui amène l'élévation de la pression aortique; ainsi se diviseraient, sous cette action, en deux groupes distincts les centres vasomoteurs. Si c'est là le sens général de la réaction, les choses cependant

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Fig. 120. Vaso-dilatation cérébrale sous l'influence d'une émotion ou d'un travail intellec

tuel (A. Mosso). - Tracé réduit de moitié.

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C1, inscription des changements de volume du cerveau. La flèche indique le moment où, pendant son sommeil, on a appelé à voix basse le sujet par son nom sans qu'il se réveille; Ca, idem. La flèche indique le début du travail mental, multiplication de 8 par 12; en w, le sujet donne le résultat. Le sujet est un paysan de trente-sept ans, qui avait reçu du haut d'un toit sur la tête, deux mois auparavant, une brique de 3 kilogrammes environ et auquel il était resté une brèche cranienne de 25 millimètres à peu près de diamètre, à la partie supérieure du front, du côté droit. Par cette ouverture se produisaient des mouvements d'expansion et de retrait du cerveau, faciles à inscrire par un dispositif approprié.

sont un peu moins simples que ne le veut cette formule, ou mieux la règle que celle-ci implique n'est pas absolue. Comme l'excitation des nerfs sensibles, l'asphyxie ne détermine pas d'une manière nécessaire et immuable le resserrement des vaisseaux de toute une partie de l'organisme et simultanément la dilatation de tous les vaisseaux d'une autre partie; mais il peut arriver que, dans le même département, les vaisseaux des diverses 'régions ne réagissent pas tous dans le même sens. L'expérience seule peut donc nous renseigner sur le sens de la réaction vasculaire dans des territoires même très voisins.

Beaucoup de substances qui se forment dans l'organisme, comme l'acide carbonique, et passent dans le sang, agissent sur les centres vaso-moteurs. L'urée augmente la pression artérielle par excitation des centres vasoconstricteurs. Il en est de même de l'adrénaline 2, principe actif des capsules surrénales, et de l'extrait d'hypophyse. Au contraire, l'extrait de glande thyroïde ou l'iodothyrine, principe retiré de cette glande, détermine une baisse de la pression artérielle. - On comprend par ces quelques faits que l'on soit amené à se demander si les petites quantités des produits des glandes dites à sécrétion interne qui passent dans le sang d'une façon

1. L'urée agit localement, en particulier sur les vaisseaux du rein, comme vasodilatateur.

2. L'adrénaline agit aussi ocalement sur tous les vaisseaux et en provoque le resserrement énergique. L'adrénaline est le plus puissant vaso-constricteur connu jusqu'à présent.

discontinue ou continue n'entretiennent pas le jeu des centres vasomoteurs; déversées normalement dans le sang, elles doivent contribuer à la régulation de la pression artérielle.

Nous n'avons pas à étudier les nombreuses substances toxiques qui, introduites dans l'organisme, agissent sur les appareils vaso-moteurs. Ce serait faire œuvre de pharmacodynamie.

3o Nous avons déjà eu l'occasion de signaler l'étroite association qui existe entre les centres respiratoires et les centres vaso-moteurs (voy. p. 409). Des excitations provenant de ceux-là sont transmises à ceux-ci par des fibres intercentrales.

5o Rôle des appareils nerveux vaso-moteurs. Conséquences des réactions vaso-motrices.

Les nerfs vaso-moteurs ont été souvent comparés à des robinets par le jeu desquels est réglée l'arrivée du sang dans les différents organes suivant les besoins de ceux-ci. A ce point de vue de la distribution du sang, les vaso-dilatateurs ont le rôle le plus important, puisque par leur intervention les organes reçoivent tout le sang dont ils ont besoin pendant leurs périodes d'activité.

Les nerfs vaso-moteurs sont aussi les régulateurs de la pression du sang dans les vaisseaux. On doit remarquer tout de suite le rôle que jouent à cet égard les vaso-constricteurs; on a vu, en effet, que le tonus vasculaire est en grande partie sous leur dépendance; ces nerfs aident donc au maintien constant de la pression artérielle à son niveau moyen. Les faits qui suivent vont montrer encore cette fonction régulatrice des nerfs vaso-moteurs. Examinons pour cela les conséquences, sur la pression artérielle et par suite sur la circulation, des excitations, soit directes, soit réflexes, des nerfs ou des centres vaso-moteurs.

Le cas le plus simple est celui où les réactions vasculaires sont localisées; telle est la dilatation des vaisseaux de la glande sous-maxillaire par l'excitation de la langue; la vaso-dilatation gastro-intestinale qui accompagne le travail digestif; la dilatation des vaisseaux du pénis (d'où l'érection) par l'excitation du bout central d'un nerf honteux interne, etc., etc. Dans tous ces cas la pression aortique ne subit aucune modification. Il en est de même si les artères ne se contractent que dans une région limitée; la circulation générale n'est pas pour cela modifiée. La raison en est que les veines correspondantes, grâce à leur calibre si aisément extensible, s'accommodent tout de suite aux augmentations ou aux diminutions de l'afflux sanguin qui résultent passagèrement des mouvements des artères. Au contraire, les nombreux vaisseaux d'un ou de plusieurs territoires artériels étendus peuvent se resserrer ou se dilater en même temps. On a vu tout à l'heure que beaucoup d'excitations sensitives et, d'autre part, que l'asphyxie et diverses substances provoquent de telles réactions

vasculaires, par exemple la vaso-dilatation de la peau et des muscles et de quelques muqueuses et la vaso-constriction de la masse abdominale; d'autres excitations, comme l'application du froid sur la peau, déterminent le resserrement des réseaux artériels du tégument externe et des reins et la dilatation de ceux de la plupart des viscères. Quand cette sorte de << balancement circulatoire » (Dastre et Morat) se produit, quand une vasoconstriction sur un département étendu s'accompagne d'une vaso-dilatation dans un territoire approximativement égal, il est clair que par cela même il y a compensation et que la pression aortique ne varie que dans de faibles limites.

Mais on sait qu'il n'en va pas toujours ainsi et que l'excitation du nerf dépresseur, par exemple, ne détermine pas seulement de la vaso-dilatation abdominale, mais aussi périphérique (voy. p. 458) et que l'asphyxie donne lieu souvent à de la vaso-constriction cutanée en même temps que viscérale (p. 478); bref, qu'il n'y a pas une loi absolue de balancement circulatoire. Dans ces cas la circulation serait troublée, s'il n'intervenait pas des mécanismes nerveux compensateurs pour rétablir l'équilibre menacé. Supposons une élévation de la pression aortique, par suite du resserrement des artérioles dans un grand nombre de régions à la fois, chassant un excès de sang dans les veines, et de là dans le cœur droit, puis, si les vaisseaux pulmonaires ne modifient pas leur calibre, dans le cœur gauche. Or, ces fortes et rapides augmentations de la pression aortique provoquent des irritations des terminaisons nerveuses endocardiaques transmises au bulbe par les nerfs dépresseurs (voy. p. 458); alors le cœur se ralentit; par suite, entre les systoles moins fréquentes, la pression artérielle peut déjà s'abaisser; en même temps les vaisseaux abdominaux se relâchent, ce qui donne au sang une large et facile voie d'écoulement. Inversement, dans les cas d'abaissement trop considérable de la pression aortique (par diminution de l'énergie cardiaque, par exemple, ou par vaso-dilatation étendue), la diminution de la pression intracranienne qui en résulte ou l'anémie bulbaire qui se produit alors amène l'accélération des battements du cœur (par excitation des centres accélérateurs) et l'élévation de la pression artérielle (par excitation des centres vaso-constricteurs).

En résumé, quand il survient dans la circulation artérielle une modification profonde, aussitôt se produisent des réactions cardiaques et vasculaires de sens inverse, qui atténuent, puis suppriment la perturbation. Et ainsi par ces faits se montre bien toute l'importance du rôle régulateur des appareils vaso-moteurs.

Les nerfs vaso-moteurs exercent aussi une influence marquée sur la répartition de la chaleur dans l'organisme. La quantité de chaleur rayonnée au dehors dépend avant tout de la circulation cutanée et celle-ci est réglée par l'action des nerfs vaso-moteurs. Or, les pertes de chaleur, chez les animaux homéothermes et pour que leur température reste constante, doivent s'adapter aux variations thermiques du milieu extérieur. C'est une question dont l'étude sera faite au chapitre de la chaleur animale.

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