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6° Nerfs des veines.

On a vu que les veines sont contractiles (p. 435). Cette propriété, comme la propriété similaire des artères, est-elle sous l'influence du système nerveux? On peut l'admettre d'après quelques expériences.

L'excitation du bout périphérique d'un splanchnique détermine le rétrécissement de la veine porte et de ses branches intra-hépatiques. L'excitation du bout périphérique d'un sciatique amène la constriction des veines du membre inférieur (expériences sur le chien et sur le lapin). - Il est à supposer que l'on trouvera d'autres vaso-moteurs veineux.

Les veines, d'ailleurs, sont normalement dans un état de demicontraction permanente, analogue au tonus artériel et l'on admet que ce tonus est sous la dépendance du système nerveux central. Le rôle des nerfs moteurs des veines ne peut encore être déterminé. Nul doute cependant que la connaissance exacte des actions de ces nerfs ne vienne nous apprendre que dans beaucoup de cas les phénomènes vaso-moteurs sont plus complexes encore que nous ne le voyons déjà.

7.

Distribution du sang dans l'organisme.

Maintenant que l'on sait comment circule le sang dans les diverses parties de l'appareil cardio-vasculaire, il reste à voir de quelle manière se fait sa répartition

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Le sang passe des artères dans les veines à travers les vaisseaux de la peau, des muscles et des viscères, c'est-àdire par trois grandes voies. La voie musculaire est assez large pour donner passage en Fig. 121. un temps donné à une quan

Aorle

Peau

Muscles

Schéma des trois grands territoires

de la distribution du

sang dans le corps humain : les muscles, l'intestin et la peau (Lauder Brunton).

tité de sang égale à celle que contiennent les vaisseaux cutanés et intestinaux (voy. fig. 121). Pour que la distribution du sang dans toutes les parties de l'organisme se fasse régulièrement, il faut qu'à chaque instant il revienne au cœur

GLEY. Physiologie.

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par les veines une quantité de sang égale à celle que le cœur envoie dans les artères (voy. p. 440). Or, le système veineux est tellement spacieux qu'après la mort, c'est-à-dire quand il est en état de relâchement complet, il contient tout le sang de l'organisme. Si, pendant la vie, le sang ne s'accumule pas dans les veines, c'est qu'il est sans cesse aspiré vers le cœur (voy. p. 436). Ainsi se maintient sa circulation. Quant à sa répartition, on peut dire qu'en général et normalement chaque partie du corps reçoit la quantité de sang nécessaire à ses besoins et que, suivant son activité plus ou moins grande, elle en reçoit davantage, grâce à la dilatation de ses vaisseaux. En même temps les vaisseaux se resserrent dans une autre partie de l'organisme. Nous avons examiné déjà (voy. p. 479) les phénomènes de compensation et leur grandeur. La quantité de sang contenue dans les organes n'est donc pas constante, mais au contraire varie beaucoup. C'est dans ce fait que se dévoile toute l'importance des mécanismes vaso-moteurs qui ont été étudiés et grâce auxquels est sans cesse possible et sans cesse réalisé l'établissement plus ou moins durable d'une foule de circulations locales.

2o Circulations spéciales.

Il faut avoir soin de ne pas confondre avec les circulations locales les circulations spéciales ou particulières, qui s'opposent aussi à la circulation générale, mais s'entendent des circulations propres à des organes placés dans des conditions anatomiques telles qu'il en résulte des dispositions mécaniques et physiques par lesquelles le cours du sang se trouve constamment influencé. C'est ainsi que les poumons et le cerveau présentent des conditions qui donnent à la circulation dans ces organes des caractères particuliers. Ainsi en va-t-il encore quand un système capillaire spécial se trouve placé sur un point du cône artériel ou veineux qu'il interrompt; une telle disposition s'observe dans les vaisseaux artériels du rein, au niveau des pelotons vasculaires qui constituent les glomérules de Malpighi, ou dans le système de la veine porte par lequel le sang, que les troncs cœliaque et mésentérique fournissent aux organes de la digestion, est conduit dans un tronc commun par un grand nombre de veines, tronc commun qui, au lieu de se jeter immédiatement dans la veine cave, se ramifie d'abord dans le foie à la manière d'une artère; ce sont seulement les veines sus-hépatiques ou vaisseaux efférents de ce système surajouté de capillaires qui vont se jeter dans la veine cave. Dans quelque région qu'existe cette disposition, on donne toujours le nom de vaisseau porte ou de système porte à toute partie de l'appareil circulatoire dans laquelle le sang va des capillaires d'un organe

vers les capillaires d'un autre organe.

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Il nous paraît préférable de reporter l'étude des circulations spéciales à la physiologie de chacun des organes qui présente des dispositions particulières modificatrices des conditions de la circulation générale.

3o Durée moyenne de la circulation.

On a vu quelle est la vitesse du sang dans les divers départements de l'appareil vasculaire (p. 413, 434 et 440). Mais, en considérant la circulation dans son ensemble, il faut se demander quelle en est la vitesse générale, c'est-à-dire avec quelle vitesse moyenne le sang parcourt toute l'étendue du système cardio-vasculaire. La question revient à celle-ci combien faut-il de temps à un globule sanguin pour aller du ventricule gauche à l'oreillette droite?

Les expériences de E. von Hering1 (1827) ont permis d'y répondre en partie. Ces expériences consistent à injecter dans le bout central d'une veine une substance aisément décelable et à la reconnaître dès son appa rition dans le bout périphérique du même vaisseau ou du vaisseau symétrique. On injecte d'ordinaire du ferrocyanure de potassium dans une veine jugulaire; on recueille de cinq en cinq secondes le sang qui s'écoule par le bout périphérique de cette veine et on a, au bout de quinze secondes environ chez le chien, de trente secondes chez le cheval, un échantillon qui donne avec le perchlorure de fer la réaction bleue caractéristique (bleu de Prusse)2. Chez les grands animaux la durée moyenne de la circulation est plus longue et chez les petits animaux plus courte. La durée de la circulation pulmonaire, déterminée de la même façon, a été trouvée de six secondes chez le chien. Il faut remarquer que les chiffres trouvés par cette méthode ne donnent pas en réalité la durée moyenne de la circulation, mais seulement une valeur minima, le temps le plus court que met une substance injectée dans le sang à accomplir une circulation. En effet la substance introduite dans le sang se divise, à partir de l'aorte. entre toutes les artères et ses différentes fractions ont à parcourir des trajets très inégaux. La durée moyenne nécessaire à un globule sanguin pour faire le tour complet de la grande et de la petite circulation est au moins le double de la durée minima ci-dessus indiquée.

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Il y a de cette rapidité de la circulation une foule de preuves. Toutes les expériences d'intoxication par des substances étrangères à l'organisme sont très démonstratives à ce sujet. On sait qu'une ou deux gouttes d'acide cyanhydriqne, déposées sur la conjonctive, font périr un lapin en huit ou dix secondes; si le poison est déposé en un point plus éloigné de la moelle allongée, sur une plaie du pied, par

1. E. von Hering (1799-1881), vétérinaire et physiologiste allemand.

2. Cette réaction ne serait pas visible dans le sang total. On fait l'expérience avec le sérum des divers échantillons recueillis.

exemple, la mort est un peu moins rapide, parce que le sang met plus de temps à arriver au cœur par les saphènes que par les jugulaires. Toutes les fois qu'on empoisonne un animal par une injection sous-cutanée, l'action toxique est précédée des trois phases suivantes pénétration du poison dans le sang des capillaires (voy. p. 285); transport par le sang de la substance absorbée; exsudation de la substance, et c'est à la suite de cette dernière phase que se produit l'action toxique sur un tissu ou sur un ou plusieurs organes.

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Il a été dit déjà (voy. p. 288) que la lymphe est, comme le sang et mieux et plus que le sang, le milieu intérieur. Une partie du plasma sanguin transsude à travers les parois des capillaires et se répand dans les espaces lymphatiques ou interstices des tissus qui se trouvent dans tout l'organisme; ce plasma ou liquide interstitiel, qui se modifie par les échanges au contact des éléments cellulaires qu'il entoure, constitue le véritable milieu intérieur; plus ou moins chargé des produits de l'activité des tissus, il est repris par les vaisseaux lymphatiques 1, traverse les ganglions lymphatiques et se jette dans le sang veineux par le canal thoracique et par la grande veine lymphatique droite. De là la distinction que R. Heidenhain a faite, au point de vue de l'origine de la lymphe, entre « la lymphe du sang et la « lymphe des tissus », hemolymphe et histolymphe. Il n'est malheureusement pas possible de séparer l'un de l'autre ces deux liquides, puisqu'ils se confondent dans les mêmes espaces lymphatiques où l'hémolymphe se mêle à des produits d'origine cellulaire en proportion variable et indéterminée. Quoi qu'il en soit, la lymphe (plasma interstitiel) apparait comme un intermédiaire entre le milieu extérieur et les éléments cellulaires; c'est elle qui du sang apporte aux divers organes les substances dont ils ont besoin et c'est elle qui déverse dans le sang, par le canal des vaisseaux lymphatiques, les produits de l'activité des tissus.

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D'après ce qui vient d'ètre dit, il est clair que la composition de la lymphe doit varier suivant les organes d'où elle provient; ces

1. On a indiqué p. 280 la découverte des chylifères; les lymphatiques généraux ont été découverts en 1651 par Olaus Rudbeck (1630-1702), anatomiste suédois, qui montra que tous les organes contiennent des vaisseaux lymphatiques. En 1652, il fit la démonstration de ce système vasculaire devant la reine Christine de Suède.

différences de composition seraient, au point de vue de nos connaissances sur les processus chimiques intracellulaires caractéristiques de l'activité des organes, encore plus importantes à fixer que celles qui concernent le sang veineux (voy. p. 297); mais, faute d'analyses des divers plasmas interstitiels et de la lymphe qui revient des divers organes, on n'a guère de connaissances précises que sur la composition du liquide que l'on recueille du canal thoracique, mélange de toutes les lymphes.

1o Quantité de lymphe.

La quantité de lymphe est variable, selon les conditions de repos ou de fonctionnement des organes d'où elle provient. Ainsi, lorsqu'on fait une fistule lymphatique au cou d'un animal, de façon à suivre l'écoulement de la lymphe qui vient de la tête, on remarque que ce liquide est bien plus abondant pendant les mouvements de mastication que pendant le repos. La différence est encore bien plus considérable pour la lymphe qui vient des intestins, selon que l'animal est à jeun ou bien en pleine absorption des produits de la digestion : l'expérience citée p. 291 (en note) en est une preuve convaincante.

Il est donc très difficile, sinon impossible, de déterminer la quantité totale de lymphe du corps. Mais on a déterminé la quantité qui s'écoule par vingt-quatre heures d'une fistule du canal thoracique chez différents animaux. On a vu à la p. 291 la quantité fournie par une vache normalement nourrie. Un chien du poids de 10 kilogrammes donne en moyenne 500 à 650 centimètres cubes de lymphe. - Chez l'homme, dans un cas de fistule du membre inférieur (chez une jeune fille de dix-huit ans, de 60 kilogrammes [I. Munk et Rosenstein, 1890)], on a recueilli, dans les douze à treize heures consécutives au repas, de 1134 à 1372 grammes de lymphe, et, après dix-huit heures de jeûne, 50 à 70 grammes par heure.

20 Propriétés de la lymphe.

La lymphe du canal thoracique est, chez les animaux à jeun, claire, incolore. Pendant la digestion, comme le chyle (lymphe des intestins) s'y mélange en grande quantité et que ce chyle (voy. p. 278-281) contient beaucoup de fines gouttelettes de graisse, la lymphe prend une couleur laiteuse. Sa saveur est salée.

Sa densité est de 1007 à 10431. Son point de congélation est un peu plus bas que celui du sang, en raison de la présence des produits de désassimilation qui augmentent sa concentration molécu

1. Dans le cas de fistule chez l'homme cité plus haut, la densité a oscillé de 1 017 à 1 023.

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