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tique, pyocyanique, tuberculine, etc.), extrait de fraises, etc.1; et celles de la seconde classe, par l'action desquelles la quantité de lymphe s'accroît aux dépens de l'eau des tissus; ce sont les cristalloïdes dont il a été parlé tout à l'heure.

L'injection intraveineuse, chez le chien, d'un lymphagogue de la première classe détermine un écoulement plus ou moins abondant, quelquefois très abondant, suivant la substance injectée, et qui peut durer plus d'une heure, de la lymphe du canal thoracique 2. Cette lymphe provient presque exclusivement du foie, car la ligature préalable des lymphatiques qui viennent de cet organe empêche l'action de ces lymphagogues. Elle est plus riche en substances albuminoïdes et conserve sa teneur normale en sels. Or, on remarque que toutes ces substances, bien loin d'augmenter la pression artérielle, la diminuent et que cette diminution est souvent très forte. D'autre part, si l'on a constaté que plusieurs de ces colloïdes, l'extrait de muscles d'écrevisses par exemple, élèvent la pression dans la veine porte et par suite dans les capillaires intra-hépatiques, cette élévation de pression dure beaucoup moins longtemps que l'accroissement du courant lymphatique. Enfin, il ne peut être question d'expliquer ce dernier par des phénomènes osmotiques, étant donnée la faible quantité de ces substances qu'il suffit d'injecter pour qu'elles produisent leur effet.

Pour ces raisons, puisque la quantité de lymphe produite paraît être indépendante de la pression sanguine et que sa composition paraît être soustraite, en partie au moins, aux lois de la diffusion, Heidenhain a pensé que la lymphopoièse doit être rangée parmi les phénomènes de sécrétion. Les cellules endothéliales des capillaires seraient ici les cellules glandulaires. Et les lymphagogues devraient être considérés comme des excitants de ces cellules au même titre que les sialagogues sont des excitants de la cellule salivaire. Ainsi l'activité sécrétoire, facteur proprement physiologique, jouerait un rôle important dans la formation de la lymphe.

Il est vrai que l'on peut aussi bien expliquer l'action des lymphagogues en supposant que ces substances modifient la perméabilité des capillaires, qu'elles l'augmentent dans divers organes, ce qui amène une filtration plus considérable. Que la perméabilité des éléments cellulaires, des cellules endothéliales vasculaires comme d'autres cellules, ne soit pas toujours et partout la même, cela peut être admis d'après quelques données. On a vu (p. 68) le principe et la possibilité de ces variations de la perméabilité des cellules en général. Pour le cas qui nous occupe, déjà, dans une expérience

1. Les substances lymphagogues de cette catégorie sont en même temps anticoagulantes (voy. p. 352); et ces deux propriétés tiennent sans doute à leur action sur la cellule hépatique (rapprocher ce que nous disons plus bas à ce sujet de ce que nous avons dit à la p. 352).

2. En même temps, la lymphe devient beaucoup moins coagulable ou même incoagulable.

rapportée plus haut (p. 488), on ne comprend pas pourquoi l'écoulement lymphatique, qui persiste malgré l'obturation de l'aorte, ne dure qu'une heure environ. On a supposé que, dans ce cas, la perméabilité des capillaires, en raison peut-être de la suppression de la circulation artérielle, diminue peu à peu et finit par être nulle. D'autre part, la lymphe des membres est moins riche en matières albuminoïdes que celle de l'intestin et surtout que celle du foie. On ne peut guère attribuer ces différences qu'à des différences de perméabilité, les capillaires des membres laissent passer les albuminoïdes du plasma sanguin beaucoup plus difficilement. On a donc été amené à penser (théorie de E. H. Starling) que les lymphagogues de la première classe, qui agissent tous sur le foie, dont on a pu dire qu'ils sont des poisons du foie1, augmentent la perméabilité des capillaires de cet organe. Comme en même temps ils élèvent la pression dans la veine porte (E. H. Starling), c'est-à-dire dans les capillaires hépatiques, cette élévation de la pression peut déterminer une transsudation extrêmement active à travers les parois altérées, plus perméables, des capillaires.

Malgré leur caractère plausible, ces explications gardent quelque chose d'hypothétique, c'est le fait même de la modification de perméabilité de la membrane filtrante, qui n'est pas directement prouvé. Et ainsi on est conduit à considérer la formation de la lymphe comme dépendant assurément de facteurs physico-chimiques, pression intracapillaire, tension osmotique, perméabilité des parois des capillaires, mais aussi de facteurs physiologiques, activité fonctionnelle des cellules, désintégration moléculaire, qui d'ailleurs se ramènent sans doute eux-mêmes à des causes mécaniques.

2o Rôle des ganglions lymphatiques.

Le rôle des ganglions lymphatiques dans la formation de la lymphe n'a été démontré que dans la production des éléments figurés de ce liquide; ce sont des organes générateurs de lymphocytes (voy. p. 333). Il se peut qu'ils modifient aussi en quelque mesure la composition chimique de la lymphe qui les traverse. Mais les documents que l'on a sur ce sujet sont insuffisants.

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La lymphe, formée comme on vient de le voir, dans tout l'organisme et en plus grande quantité dans les viscères abdominaux, 1. Ils déterminent tous des altérations de la cellule hépatique.

s'écoule par les lymphatiques et gagne le système veineux par le canal thoracique et par la grande veine lymphatique droite.

D'après tout ce qui a été dit de la formation de la lymphe, on voit d'abord qu'il ne s'agit pas ici d'une véritable circulation; le liquide en mouvement ne revient pas sans cesse à son point de départ pour recommencer sans cesse le même trajet. Ce n'est que par une extension abusive que le mot de circulation est appliqué au cours de la lymphe.

Quoi qu'il en soit, voyons sous quelles influences la lymphe parvient des espaces interstitiels jusque dans le système veineux.

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Ces causes sont multiples, dépendant soit du système lymphatique lui-même, soit des conditions anatomiques ou physiologiques dans lesquelles se trouvent placés les vaisseaux lymphatiques, et particulièrement les principaux d'entre eux.

Pour déterminer l'importance respective de ces causes, il faut pouvoir mesurer le courant de la lymphe, ce qui n'est possible que par le moyen d'une fistule du canal thoracique ou d'un gros vaisseau lymphatique, chez des animaux ayant au moins la taille du chien.

A. Cause principale. Vis a tergo. Il résulte des faits relatifs à la formation de la lymphe qu'il y a aux origines mêmes du système lymphatique une force en vertu de laquelle le liquide interstitiel est pour ainsi dire sans cesse poussé en avant, véritable force de propulsion ou vis a tergo.

Si on lie un vaisseau lymphatique, le segment situé en aval de la ligature s'affaisse, tandis que le segment situé en amont de l'obstacle se gonfle, et ce gonflement est tel qu'il peut amener la rupture du vaisseau. On voit par là quelle est l'intensité de la force de propulsion dont il est question.

D'autre part, de nombreuses observations microscopiques ont démontré (voy. p. 280) le passage à travers la muqueuse intestinale de diverses substances et tout spécialement des graisses dans les lymphatiques; un courant est ainsi déterminé de la muqueuse intestinale vers le système lymphatique, courant plus ou moins rapide.

B. Causes accessoires. Aspiration thoracique. Poussée abdominale. Battements aortiques. Mouvements gastrointestinaux. Contractions musculaires. Valvules lymphatiques. Le renforcement inspiratoire de l'aspiration thoracique (voy. p. 369 et 436) doit agir sur le cours de la lymphe du canal tho

racique et de la veine lymphatique droite comme sur celui des grosses veines de la base du cou. Ce même renforcement inspiratoire doit déterminer un appel de liquide de la portion abdominale du canal thoracique dans sa portion intrathoracique. Mais il importe de remarquer que cette action de la respiration ne peut que faciliter l'écoulement de la lymphe; elle n'est et ne peut être qu'adjuvante et nullement déterminante, comme le prouvent amplement les expériences dans lesquelles on voit la lymphe, après la mort, continuer à s'écouler, même pendant plus d'une heure. Ce fait a été invoqué par Heidenhain à l'appui de la théorie sécrétoire de la lymphopoièse (voy. plus haut) et pour montrer à quel point la formation de la

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Fig. 122.

- Augmentation de l'écoulement de la lymphe sous l'influence d'une compression abdominale (tracé de L. Camus, 1894).

Expérience sur un chien. Les variations de la pression intra-thoracique PT sont inscrites au moyen d'un trocart enfoncé dans la plèvre et relié à un tambour de Marey; - EL, écou lement de la lymphe. En P, on a placé un poids de 3 kilogrammes sur l'abdomen. L'accélération de l'écoulement cesse dès qu'on enlève le poids, en P', alors que la respiration continue à rester plus ample.

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lymphe peut être indépendante de toute action de la pression sanguine.

A l'influence de l'aspiration thoracique et agissant dans le même sens s'ajoute celle de la poussée abdominale (voy. p. 437). Quand le diaphragme s'abaisse, il comprime les viscères abdominaux ; cette compression se transmet à la citerne de Pecquet qui se vide plus ou moins complètement; en tout cas, l'écoulement de la lymphe par le canal thoracique devient beaucoup plus abondant. C'est ce que l'on voit, quand on place un poids sur l'abdomen d'un animal; immédiatement l'écoulement augmente (voy. fig. 122). On retrouve donc ici l'influence associée de l'aspiration thoracique et de la poussée abdominale qui s'exercent si heureusement pour faciliter. le retour au cœur du sang veineux (voy. p. 437).

On connaît les rapports du canal thoracique et de l'aorte. Les battements aortiques facilitent la progression de la lymphe. En effet, quand on comprime l'aorte au moyen d'une large pince, l'écoulement de la lymphe se ralentit. Le ralentissement du cœur à la suite d'une excitation faible du bout périphérique d'un pneumogastrique amène un ralentissement analogue de l'écoulement (fig. 123), pendant la durée de l'excitation.

Les contractions de l'estomac et des intestins, quand ces organes sont

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Fig. 123.

Diminution de l'écoulement de la lymphe sous l'influence du ralentissement du cœur (tracé de L. Camus, 1894).

Chien morphiné et chloroformé.

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E, excitation du bout périphérique du pneumogastrique droit; El, écoulement de la lymphe par une canule placée dans le canal thoracique, à la base du cou; - PCg, pression dans le bout central de la carotide gauche, 140 millimètres de mercure.

remplis, peuvent comprimer dans une mesure variable la citerne de Pecquet et proportionnellement accélérer l'écoulement de la lymphe. Il en est de même des contractions musculaires qui augmentent le cours de la lymphe dans les lymphatiques généraux. Il a même été établi que le lymphatique principal d'un membre, chez le chien, ne fournit point de lymphe, s'il ne se produit dans cette extrémité aucun mouvement, actif ou passif.

Tous ces faits démontrent l'analogie qu'il y a entre le cours du sang veineux et celui de la lymphe. Ce sont les mêmes influences

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