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Et maintenant, si l'ouverture de la cage thoracique permet au poumon et à la fois au thorax de satisfaire l'un et l'autre complètement leur élasticité, c'est que la condition nécessaire qui crée leur solidarité et qui maintient leurs conditions respectives d'équilibre, est justement la situation particulière du poumon enfermé dans une cavité close. Quand cette cavité est ouverte, alors la pression atmosphérique s'exerçant également sur les surfaces interne et externe du poumon, comme sur les faces interne et externe des côtes, poumons et thorax prennent naturellement leur position d'équilibre d'absolu repos.

b. EFFET DE LA PRESSION NEGATIVE INTRAPLEURALE SUR LA CIRCULATION ET PARTICULIÈREMENT SUR LA CIRCULATION PULMONAIRE. La pression négative intrapleurale crée, nous le savons (voy, p. 370 et 437), une aspiration thoracique pour le sang veineux de la circulation générale, d'où le retour facile de ce sang au thorax, et par conséquent au cœur droit.

Le même effet favorable s'exerce sur la circulation pulmonaire. Il est même beaucoup plus important sur cette dernière, en raison de ce fait, que tout son territoire se trouve dans la zone d'influence de la pression négative intrathoracique 1. En premier lieu, sous cette influence, les résistances à l'écoulement du sang dans les vaisseaux sont moindres. Mais, tandis que, pour la circulation générale, le système veineux bénéficie seul de cet effet, ce sont, au contraire, tous les vaisseaux (artères, capillaires, veines) du système de la circulation pulmonaire qui en bénéficient, parce que tous sont intrathoraciques. La pression négative intrapleurale constante tend à aspirer, à distendre excentriquement les parois de tous les vaisseaux, comme de tous les organes intrathoraciques (aspiration thoracique); elle en détermine donc la dilatation. Grâce à cette dilatation, l'écoulement du sang se fait constamment sous une résistance très diminuée, celle-ci s'affaiblissant nécessairement à mesure qu'augmente la béance des vaisseaux. Là est le caractère essentiel de la circulation pulmonaire. Aussi la pression dans l'artère pulmonaire est-elle très peu élevée (20 millimètres de mercure en moyenne chez le chien). Les résistances à l'écoulement du sang dans les vaisseaux pulmonaires sont donc beaucoup plus faibles qu'elles ne le seraient sans l'existence de la pression négative intrapleurale. Et c'est par là que s'expliquent la puissance et le développement

1. Il faut bien remarquer qu'il s'agit ici de pression négative intrapleurale ou ntrathoracique (dite encore vide pleural) et non pas de pression intrapulmonaire. Celle-ci, très différente, se rapporte à l'atmosphère intérieure du poumon, tandis que la pression intrapleurale ou intrathoracique se rapporte à tout ce qui se trouve placé entre cet organe et le thorax, c'est-à-dire aux plèvres, aux vaisseaux et aux organes du médiastin.

moindres du ventricule droit par rapport au ventricule gauche, puissance et développement adaptés à un effort moindre à accomplir. L'effort se règle sur le degré de résistance. Et la différence de puissance mesure justement la différence d'effort, celle-ci commandant celle-là. Comme nous venons de l'indiquer, la pression du sang dans l'artère pulmonaire est en effet très basse.

En second lieu, ce n'est pas seulement par la diminution constante des résistances à l'écoulement du sang que la pression négative intrapleurale favorise la circulation pulmonaire, c'est aussi en raison de ses phases régulières de renforcement inspiratoire. A chaque inspiration, en effet, l'aspiration thoracique augmente notablement (p. 512); par l'action de cette force périodique d'aspiration, la dilatation des parties de l'appareil circulatoire qui se trouvent dans le thorax et spécialement des vaisseaux du poumon augmente périodi quement (à chaque inspiration); par conséquent ces vaisseaux dilatés reçoivent à ce moment une plus grande quantité de sang. On l'a démontré de deux façons :

1o On introduit dans une cloche de verre, hermétiquement close ensuite, les poumons d'un animal; dans la trachée est fixé un tube qui communique avec l'air extérieur. On met l'artère pulmonaire en rapport avec un vase de Mariotte à pression constante qui contient du sang défibriné; celui-ci sort des poumons par une canule liée sur l'oreillette gauche. Grâce à ce dispositif, on peut donc mesurer le débit du sang qui passe par les poumons. Or, si, au moyen d'une pompe aspirante réunie par un tube à la cloche où se trouve enfermé le poumon, on crée une dépression autour de celuici, on voit le débit du sang devenir beaucoup plus considérable. L'aspiration exercée autour du poumon a dilaté cet organe et par conséquent ses vaisseaux se sont dilatés comme les cavités respiratoires elles-mêmes ; par ces vaisseaux élargis passe une plus grande quantité de sang. 2o On dose la quantité de sang contenue dans les poumons d'un animal pendant l'inspiration ou pendant l'expiration. Pour cela on pose une ligature à la base du cœur sans ouvrir les cavités pleurales (ce qui est possible sur le lapin) et on serre la ligature à la fin d'une inspiration ou d'une expiration. A la fin de cette dernière le poumon ne contient plus qu'une quantité de sang moindre que celle qu'il contient à la fin de l'inspiration (P. Heger et Spehl, 1881). Ces expériences ont été récemment répétées sur le chien avec le même résultat (L. Plumier 1, 1904).

Ainsi l'effet circulatoire de l'aspiration thoracique s'exagère quand se produit l'inspiration. Mais c'est à ce même moment que le poumon contient le plus d'air. Comme l'a très bien dit P. Heger, «< le moment où le poumon contient le plus d'air est aussi celui où il con tient le plus de sang». Remarquable exemple d'harmonie fonction

1. Physiologiste et médecin belge contemporain.

nelle! Grâce au renforcement inspiratoire de la pression négative intrapleurale, c'est-à-dire de l'aspiration thoracique, l'inspiration détermine simultanément un appel d'air et de sang dans le poumon, créant ainsi la condition la plus favorable à l'hématose.

D'après tout ce qui précède, on voit que la circulation pulmonaire dépend de deux conditions essentielles, l'action du ventricule droit et l'aspiration thoracique. Nous savons déjà que par l'effet de ces deux conditions la pression dans l'artère pulmonaire est très basse. - Quant à la vitesse du sang, elle est la même dans les vaisseaux pulmonaires que dans ceux de la circulation générale; il est en effet nécessaire (voy. p. 441) qu'une égale quantité de sang passe au même moment dans tout segment considéré de l'appareil circulatoire. Enfin la durée de la circulation pulmonaire est environ trois ou quatre fois moindre (voy. p. 484) que celle de la circulation générale. Or, la capacité du système pulmonaire a été justement évaluée au quart de celle du système vasculaire général.

Ces faits et ces considérations ne concernent que le système de la circulation pulmonaire proprement dite, la circulation dans les vaisseaux pulmonaires, artères et veines, qui servent à la fonction spéciale d'hématose. Mais les poumons présentent d'autres vaisseaux, ce sont ceux qui assurent leur nutrition, artères et veines bronchiques. De même, le foie a une double circulation (voy. p. 629), l'une, la circulation porte, strictement fonctionnelle, et l'autre qui apporte au foie, comme à tous les organes, le sang nécessaire. La circulation dans les vaisseaux bronchiques est soumise aux lois de la circulation générale.

C. PRESSION INTRAPULMONAIRE. SES VARIATIONS PENDANT L'INSPIRATION ET L'EXPIRATION. Les variations de pression intrapulmonaire que produit le jeu mécanique du thorax et qui ont pour résultat de créer à travers le poumon la circulation d'air par laquelle se réalise la respiration, sont peu considérables à l'état normal. En effet, la pression dans la cavité pulmonaire, en l'absence de tout mouvement respiratoire, est égale à la pression atmosphérique, puisque cette cavité, la glotte étant ouverte, communique avec l'atmosphère. Au moment de l'inspiration, le volume de la cavité pulmonaire augmente et par conséquent la pression à l'intérieur diminue; elle devient négative, c'est-à-dire inférieure à la pression atmosphérique. Inversement, durant l'expiration, la cavité diminue, puisque le poumon se resserre, et la pression pulmonaire doit augmenter. Mais la diminution de pression, à l'inspiration, n'est ni forte ni longue, parce qu'elle donne lieu à un courant d'air de l'extérieur vers l'intérieur du poumon qui rétablit vite l'équilibre. De même, l'augmentation de pression expi

ratoire est faible et brève, parce qu'elle détermine immédiatement un courant d'air de l'intérieur du poumon vers l'extérieur', ce qui rétablit l'équilibre.

On peut mesurer ces variations de pression et par suite la force du courant d'air à l'inspiration et à l'expiration en mettant la trachée en communication latérale avec un manomètre, ou bien en fixant un manomètre dans une narine et faisant respirer par l'autre (expérience de Donders sur l'homme). La diminution de pression, à l'inspiration, est de 1 millimètre de mercure chez l'homme, et même moins, et l'augmentation expiratoire de pression a la même valeur à peu près.

On a le moyen, par la méthode de Donders indiquée ci-dessus, de mesurer les pressions maxima que peuvent développer l'inspiration et l'expiration (pneumatométrie). On fait un effort d'inspiration ou d'expiration en fermant la bouche et la narine restée libre et, dans ces conditions, le manomètre indique à l'inspiration une pression de 75 millimètres de mer. cure et à l'expiration 2 une pression de + 100 millimètres de mercure.

On voit par ces chiffres que la différence de pression est plus grande pour l'expiration que pour l'inspiration, dans la respiration profonde. Il est du reste facile de constater qu'on produit plus d'effet mécanique en expirant qu'en inspirant, en soufflant, par exemple, dans un tube qu'en aspirant par ce tube. Cette différence s'explique aisément si l'on se rappelle que les contractions des muscles inspirateurs ont à lutter contre l'élasticité d'un grand nombre d'organes qu'elles violentent (poumons, cartilages costaux, viscères abdominaux, etc.), tandis que les muscles expirateurs, au moins aussi puissants que leurs antagonistes, n'ont qu'à ajouter leur action à celle de ces parties élastiques agissant dans le même sens qu'eux. C'est cette puissance de l'expiration forcée qui vient se joindre aux conditions mécaniques résultant du rétrécissement de la trachée et de la glotte, pour provoquer l'expulsion des corps étrangers ou des mucosités (toux; celle-ci consiste en une expiration brusque, précédée d'une inspiration profonde).

d. BRUITS RESPIRATOIRES.

Le passage de l'air dans les tubes aériens donne lieu à des bruits, bruit trachéo-bronchique ou souffle bronchique et bruit ou murmure vésiculaire.

L'auscultation (Laennec)3 au niveau du larynx ou de la trachée

1. C'est ce courant qui entraîne au dehors un volume d'air non pas égal à celui qui avait été introduit par l'inspiration, mais en réalité un peu supérieur, à cause de l'échauffement à travers le poumon (voy. plus loin, p. 533).

2. On sait que, dans l'expiration forcée, les muscles expirateurs (muscles abdominaux) interviennent.

3. Th. Laennec (1781-1826), illustre médecin français, un des fondateurs de l'anatomie pathologique moderne, fut professeur de clinique médicale à la Faculté de Paris. Son grand titre de gloire est la découverte de l'auscultation.

endre le premier, à l'inspiration et à l'expiration. C'est ssez rude. Il est dû au passage de la colonne d'air à trale, partie rétrécie du larynx. En réalité, c'est donc un bruit i se propage tout le long du conduit trachéo-bronchique. ltation de toutes les parties de la poitrine correspondant mons permet d'entendre, surtout à l'inspiration, un souffle ai est le murmure vésiculaire; on l'entend encore pendant la première partie de l'expiration; pendant la seconde partie, le courant d'air est trop lent et trop faible pour déterminer un bruit. Ainsi au point de vue de l'auscultation, l'expiration peut être considérée comme plus courte que l'inspiration, alors qu'en réalité elle est plus longue (voy. p. 525); seulement pour l'oreille les deux tiers sont inexistants. Le murmure vésiculaire, souvent attribué au déplissement des vésicules pulmonaires (de là son nom), est dû au passage de l'air à travers l'espace rétréci par lequel les bronchioles aboutissent aux cavités pulmonaires.

En effet, la section des deux pneumogastriques supprime le murmure vésiculaire. Or, cette section amène, entre autres effets, de la paralysie des muscles des petites bronches (voy. plus loin, p. 522); par suite, le rétrécissement terminal que celles-ci présentent, à l'entrée des canaux alvéolaires, disparaît; dès lors, l'air n'ayant plus à passer d'une partie rétrécie dans un endroit plus large, il ne se produit plus de souffle.

C. Mouvements associés à l'acte respiratoire. L'acte respiratoire s'accompagne de mouvements des divers organes annexes des poumons et, d'autre part, détermine des mouvements dans les parties voisines du thorax.

a. MOUVEMENTS DES DIVERS CONDUITS AÉRIENS. — L'air que les mouvements respiratoires amènent dans le poumon et en chassent passe par les narines, les fosses nasales, le pharynx, le larynx et la trachée. La béance des diverses voies que suit ce courant d'air est assurée par des dispositifs très simples. En raison de leur charpente osseuse les narines et le pharynx, en raison de leur charpente cartilagineuse le larynx, la trachée et ses divisions, les bronches, restent constamment béants. De plus, les orifices que présentent ces conduits s'ouvrent plus ou moins sous l'action de mouvements associés à ceux de la cage thoracique et du poumon, pendant l'acte respiratoire.

Narines. Les narines se dilatent activement pendant l'inspiration, surtout chez les animaux, ou dans les grandes inspirations et, en particulier, quand la respiration est difficile (dyspnéique 1). Ce

La première édition de son fameux traité, De l'auscultation médiale..., est de 1819. Ce fut lui aussi qui inventa le stéthoscope.

1. De dus, préfixe qui indique la difficulté, la peine, et viv, souffler, respirer.

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