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voquer un arrêt réflexe immédiat de la respiration; chez le lapin l'effet est typique; chez l'homme, l'arrêt réflexe de la respiration est un accident contre lequel on doit prendre garde, au début de la chloroformisation, et qu'on évite en administrant le chloroforme par très petites doses, qu'on augmente progressivement avec prudence, suivant l'état du système nerveux du sujet.

L'excitation électrique, par des chocs d'induction, de tous les nerfs sensibles provoque des réactions respiratoires, le plus souvent une simple accélération des mouvements respiratoires, pour une excitation faible ou moyenne, un arrêt de la respiration en expiration, si l'excitation est assez forte.

Parmi les nerfs sensibles qui interviennent le plus souvent pour provoquer des réflexes respiratoires, il faut citer surtout le trijumeau et le laryngé supérieur.

C'est en agissant sur les terminaisons nasales du trijumeau que l'ammoniaque ou le chloroforme produit l'effet que nous avons indiqué plus haut. Quant aux excitations du laryngé supérieur, il suffit qu'elles soient un peu fortes pour amener des réactions expiratoires défensives; tout le monde sait que la toux a pour résultat d'expulser soit des corps étrangers introduits accidentellement dans les voies respiratoires, soit des produits d'inflammation de ces mêmes voies.

Il n'est cependant aucun de ces nerfs, quelle que soit l'importance des réflexes auxquels son excitation donne lieu, qui agisse de façon à provoquer des mouvements respiratoires régulièrement sériés. Ils n'exercent tous sur la respiration qu'une influence modificatrice. La cause du rythme respiratoire est ailleurs.

Action des nerfs pneumogastriques sur la respiration. Par ce qui précède on voit tout d'abord que les nerfs vagues n'ont pas un rôle proprement spécifique, puisque beaucoup d'autres nerfs sensibles agissent sur la respiration. Si leur influence est spéciale, c'est qu'ils mettent les centres respiratoires en relation avec la surface sensible pulmonaire. De celle-ci partent des impressions transmises au bulbe par les fibres sensitives des pneumogastriques.

C'est bien en effet dans le poumon que l'influence régulatrice, exercée par ces nerfs sur la respiration, a sa source.

Une expérience célèbre de Breuer et Hering 2 (1868) le démontre. L'insufflation artificielle des poumons chez le lapin amène des mouvements expiratoires de l'abdomen et des narines; au contraire, le retrait du poumon sous l'influence d'une entrée d'air par la plèvre, par plaie du

1. J. Breuer (1842-1873), physiologiste autrichien. Ses recherches sur les fonctions des canaux semi-circulaires sont particulièrement connues.

2. Ewald Hering, physiologiste allemand contemporain, professeur à l'Université de Leipzig.

thorax, provoque des spasmes du diaphragme et des mouvements inspiratoires des narines.

Ainsi l'inspiration appelle l'expiration et l'expiration appelle l'inspiration (Breuer et Hering). Tout se passe comme si l'inspiration, c'est-à-dire la distension pulmonaire, déterminait une excitation de fibres expiratrices du pneumogastrique, tandis que l'affaissement du poumon paraît déterminer une excitation de fibres inspiratrices du même nerf1.

Quels sont donc les effets des excitations électriques directes du bout central d'un des nerfs vagues?

Sur des animaux normaux l'effet le plus fréquemment obtenu par des excitations faibles est une accélération des mouvements respiratoires avec diminution de leur amplitude (Rosenthal,

1861). C'est ce que l'on voit sur la figure 146.

Si l'on emploie des excitations fortes (chocs d'induction intenses et fréquents), on observe un arrêt des mouvements respiratoires en inspiration ou en expiration, sans qu'il soit bien facile encore de déterminer la cause immédiate de ces effets opposés 2. L'arrêt inspiratoire résulterait d'une série de très petites contractions ou d'un tétanos du diaphragme. L'arrêt en expiration est surtout passif, mais il peut traduire aussi un effort d'expiration. Les figures 147 et 148 fournissent des exemples de ces deux ordres d'effets, dans chacun desquels l'action propre des « fibres inspiratrices» et des « fibres expiratrices >> a respectivement prévalu.

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Fig. 146. - Excitation sur le lapin du bout central du pneumogastrique droit sectionné.

Accélération des mouvements respiratoires avec diminution d'amplitude. (La respiration est enregistrée par la méthode de Paul Bert [voy.p. 526].)

Chez les animaux préalablement chloralisés, l'arrêt a toujours lieu en expiration (L. Fredericq, 1879); le choral aurait la propriété d'affaiblir les fibres inspiratrices et de faire prédominer l'influence des fibres expiratrices (L. Fredericq).

1. On a peut-être généralisé prématurément le résultat des expériences de Breuer et Hering. A. Mosso a en effet montré (Arch. ital. de Biol., 1903, XL, p. 43-98; voy. surtout p. 56 et suiv.) que chez l'homme la loi des réflexes énoncée par les deux physiologistes allemands ne se vérifie pas. Dans la respiration normale de l'homme, l'action du centre respiratoire ne serait pas influencée par les excitations mécaniques venues de la surface pulmonaire.

2. C'est le célèbre médecin et physiologiste allemand Traube, qui a vu le premier (1847) que l'excitation électrique du bout central d'un vague coupé arrête la respiration en inspiration, par contraction durable du diaphragme. En 1852, Cl. Bernard, sans connaître les expériences de Traube, constata le même fait. Budge* et, de son côté, Eckhard, la même année, en 1854, ignorant tous deux et les expériences de Traube et celles de Bernard, découvrirent l'arrêt en expiration.

J.-L. Budge (1811-1884), physiologiste allemand.

L'idée de la coexistence de deux sortes de fibres à action inverse explique commodément les réactions respiratoires variables que donne l'excitation du bout central d'un nerf vague. Mais tous les

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physiologistes n'acceptent pas cette opinion. D'après quelques-uns (Wedenski [1881] surtout), la phase d'activité - inspiratoire ou expiratoire, dans laquelle se trouve l'organe au moment de l'excitation du nerf, aurait la plus grande influence dans la détermination du sens de la réaction. Pour d'autres physiologistes, les fibres dites expiratrices des pneumogastriques ne sauraient être, à proprement parler, considérées comme telles; ce seraient seulement des fibres inhibitrices, ayant la propriété d'inhiber les mouvements d'inspiration. Chez les animaux anesthésiés

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l'excitation du bout central d'un vague ne produirait jamais qu'une réaction expiratoire, caractérisée par la contraction des bronches et le retrait de la paroi thoracique, avec inhibition du diaphragme (expériences de François-Franck, 1878-79). Quoi qu'il en soit, si l'influence des vagues sur la fonction respiratoire est manifestement très grande, la nature de cette influence n'est pas encore complètement élucidée.

Restent à étudier les effets sur la respiration de la section des deux nerfs pneumogastriques.

A la suite de la vagotomie double surviennent des modifications importantes de fréquence et de forme des mouvements respiratoires. Ces effets offrent toutefois une particularité; ils ne sont bien nets qu'au bout de

1 Physiologiste russe contemporain.

quelques heures. La respiration est alors diminuée de fréquence, tombant à la moitié ou même au tiers de la valeur normale; l'inspiration est plus ample et prolongée; l'expiration est brusque et suivie d'une pause respira

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Fig. 148.

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Excitation forte sur un lapin par un courant induit du bout central
du pneumogastrique droit sectionné. Arrêt en expiration.
(Enregistrement de la respiration par la méthode de P. Bert.)

toire. Les tracés de la figure 149 donnent la série des modifications respiratoires dues à la section des pneumogastriques chez le lapin, après des intervalles de temps variables.

Les expériences de ce genre montrent bien le rôle régulateur qu'exercent les nerfs pneumogastriques sur la respiration; la suppression des excitations centripètes venues des poumons et transmises au centre bulbaire par ces nerfs détermine des troubles profonds dans la respiration.

Quelle est la conséquence de ces troubles sur la vie de l'animal?

La vagotomie double, si elle est pratiquée au cou, entraîne la mort 1. Les lapins meurent en général en vingt-quatre ou quarante-huit heures; les chiens, en trois ou quatre jours; il est rare que la survie soit plus longue; les Oiseaux et les Reptiles résistent plus longtemps. Chez les jeunes animaux la mort est beaucoup plus rapide, elle survient d'habitude en moins de vingt-quatre heures.

On s'est efforcé de déterminer la cause de cette mort. Les jeunes animaux meurent par asphyxie, en raison de la paralysie des muscles de la glotte; comme les récurrents, qui innervent les muscles du larynx, naissent des pneumogastriques au-dessous du point sectionné (au cou), la section des pneumogastriques entraîne la paralysie des cordes vocales inférieures; celles-ci, à chaque inspiration, obstruent à peu près complètement l'orifice glottique. Ce qui n'arrive pas chez les animaux adultes, en raison de la rigidité des cartilages aryténoïdes qui s'oppose à l'affaissement total des cordes vocales sous la pression de l'air inspiré et maintient par suite un certain degré de béance de la glotte. D'ailleurs, la section des deux récurrents, à peu près inoffensive chez les animaux adultes, est

1. Les animaux survivent indéfiniment à la section d'un seul pneumogastrique.

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également mortelle, et pour la raison susdite, chez les jeunes animaux. L'asphyxie pure et simple étant écartée, à quoi donc attribuer la mort? A l'autopsie des animaux, on trouve une inflammation des poumons, les lésions de la broncho-pneumonie; cette inflammation paraît tenir à l'in

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A, respiration normale (enregistrement par la méthode de P. Bert); B, respiration après la section des deux pneumogastriques au cou. Respiration une demi-heure après la section. Ralentissement, augmentation d'amplitude et pause respiratoire apparente; C, respiration une heure après la section. Respiration très ralentie avec pause respiratoire très prolongée. Les trois lignes situées au-dessous des trois tracés respiratoires indiquent le temps en secondes.

troduction de corps étrangers, de parcelles alimentaires en particulier, dans la trachée et dans les bronches, conséquence de la paralysie de l'œsophage (voy. p. 193) et du larynx. De fait, on a vu des chiens survivre plus de six mois à la vagotomie double, sur lesquels on avait préalablement pratiqué une fistule stomacale, pour l'introduction directe des ali

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