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2 gr. 50 à 3 grammes). Cependant il peut y avoir glycosurie malgré une glycémie très peu supérieure à la normale, si la perméabilité du rein est accrue.

Théoriquement, la glycosurie d'origine hépatique peut être due à deux causes à ce que le foie a plus ou moins perdu la propriété de retenir et de fixer le sucre sous forme de glycogène (trouble de la fonction glycogénique) ou à une production exagérée de glycose (trouble de la sécrétion glycémique). Dans le premier cas, il y a diminution de l'une des formes de l'activité hépatique, et, dans le second cas, exagération d'une autre forme de cette activité.

La glycosurie produite par diminution de la fonction glycogénique n'est qu'un phénomène passager1, sans graves conséquences, si elle est modérée. — La glycosurie par exagération de la production du sucre par le foie peut n'être aussi que passagère. Telles sont les glycosuries dites nerveuses que l'on observe chez l'homme, et analogues à celles que l'on détermine chez les animaux par la piqûre du quatrième ventricule ou par diverses lésions du système nerveux. Telle est aussi la glycosurie asphyxique.

A côté de cette dernière, on peut ranger toute une série de glycosuries toxiques.

L'absorption d'un grand nombre de substances très diverses, oxyde de carbone, sels d'urane, chloroforme, chloral, morphine, strychnine, curare, adrénaline, iodothyrine, etc., amène en effet de la glycosurie. Le mode d'action de la plupart de ces substances n'a pas été suffisamment étudié pour qu'il soit possible d'assigner sûrement leur cause à ces glycosuries toxiques 2.

En ce qui concerne la glycosurie par adr

l'adrénaline, plusieurs faits intéressants sont dès maintenant acquis. La substance produit son effet aussi bien en badigeonnage sur le pancréas qu'en injection intrapéritonéale ou intraveineuse. La glycosurie s'accompagne d'hyperglycémie et d'une no table diminution ou même de la disparition du glycogène du foie. Elle est donc d'origine hépatique. - On a soutenu, d'autre part, que cette action de l'adrénaline est antagoniste de celle de la substance que sécrète le pancréas et qui diminue la production du sucre (voy. p. 635); ce serait en raison de cet antagonisme qu'un excès d'adrénaline dans le sang amènerait la glycosurie. Les faits sur lesquels a été fondée cette théorie sont encore insuffisants.

1. Quelquefois cependant elle est persistante et donne alors lieu à des manifestations nerveuses rappelant celles du diabète (narcolepsie, fatigue, impuissance, etc.), à des lésions cutanées, etc., tous désordres qui ne présentent d'ailleurs point l'intensité de ceux du diabète. Ces cas de « petit diabète curable »> seraient dus à une insuffisance chronique du foie (A. Gilbert et Em. Weil, 1899). 2. Encore convient-il de remarquer que plusieurs d'entre elles, le chloroforme, le chloral, la morphine, le curare, etc., feraient passer dans les urines non pas de la glycose, mais de l'acide glycuronique C6H10O7 qui & également des propriétés réductrices.

Mais toutes ces glycosuries doivent être distinguées du diabète 1 proprement dit, ou diabète vrai, affection chronique, mettant plus ou moins rapidement la vie en danger.

Le diabète a-t-il toujours pour cause ce trouble de l'activité hépatique caractérisé par une sécrétion exagérée de la glycose? Chauveau et M. Kaufmann (1893-1895) l'ont soutenu en se fondant sur les résultats de leurs analyses comparatives du sucre dans le sang artériel et dans le sang veineux, d'après lesquelles la consommation du sucre est toujours la même chez les animaux diabétiques et chez les animaux sains. Il semble cependant qu'il puisse y avoir aussi diabète par diminution dans la consommation du sucre produit, par défaut du pouvoir de destruction de ce sucre dans les tissus (muscles et glandes plus particulièrement). Et voici par exemple par quels faits et quels raisonnements on s'est efforcé de l'établir (Ch. Bouchard, 1898) chez les diabétiques, après suppression complète des hydrates de carbone, on peut encore observer l'élimination d'une quantité considérable de glycose, de 100 à 200 grammes. Supposons que l'organisme ait dû, pour fournir à sa dépense énergétique et calorifique, brûler 500 grammes de glycose, chiffre d'ailleurs plutôt faible. Il s'ensuit que cet organisme avait 600 à 700 grammes de sucre à trouver par jour (500+100 à 200 de glycose excrétée). Pour produire cette quantité, il faudrait 6 kilogrammes de graisse ou 1073 grammes de substances albuminoïdes, soit 5 kilogrammes de viande. « Cela supposerait, dit Ch. Bouchard, une polyphagie invraisemblable ou une autophagie impossible. Ainsi, « pour expliquer par l'augmentation de la production du sucre une glycosurie même modérée, on est obligé d'admettre comme conséquence une polyphagie ou une autophagie et une azoturie telles qu'on n'en a jamais vu ». On voit que dans cette conception le diabète n'est pas sous la dépendance d'une lésion ou d'une altération fonctionnelle du foie, mais est lié à une incapacité des tissus en général à détruire le sucre 3; ce ne serait plus une maladie du tissu hépatique, ce serait une maladie des tissus, et spécialement des tissus musculaires et glandulaires.

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Nous aurons à revenir sur cette question quand nous étudierons un peu plus loin le diabète causé par l'extirpation complète du pancréas ou diabète pancréatique.

Il y a lieu de distinguer encore une autre forme de diabète, d'origine rénale.

1. De da, incontinence d'urine, qui vient lui-même de diabave, passer à travers.

2. Ch. Bouchard, La théorie pathogénique du diabète (Semaine médicale, 4 mai 1898, p. 201).

3. Cette incapacité du diabétique à détruire ou à consommer le sucre ne tient pas, comme on l'a cru souvent, à une diminution des oxydations. Les oxydations ne sont nullement diminuées dans l'organisme du diabétique. C'est ainsi que la lévulose, qui s'oxyde à peu près aussi facilement que la glycose, est utilisée dans le diabète et se transforme en grande partie dans le foie en glycogène. Même dans le diabète pancréatique, la lévulose se comporte de cette façon.

Le type en parait être le diabète phloridzique (voy. p. 604) qui s'accompagne d'une glycémie normale ou même d'hypoglycémie. Pour cette raison, on ne peut l'attribuer à une production exagérée du sucre dans le foie, Sous l'influence de la phloridzine le rein devient très perméable à la glycose. comme N. Zuntz (1895) l'a conclu d'une expérience consistant à injecter directement de la phloridzine dans l'artère rénale (expériences sur le chien); immédiatement la glycose apparaît dans l'uretère correspondant, et quelque temps après seulement dans l'uretère de l'autre rein. Il a été dit déjà (p. 604) que ce diabète prend fin dès que l'on cesse de faire ingérer de la phloridzine.

4° Fixation et formation de graisses par le foie. Fonctions adipo-hépatiques.

L'action du foie sur les graisses est complexe. Non seulement la cellule hépatique retient des graisses, mais elle peut en former et elle les détruit aussi. A côté de la fonction de fixation et de la fonction adipogénique, il y a donc une fonction adipolytique.

A. Le foie, organe fixateur de graisses. La fixation au niveau du foie des graisses alimentaires a été directement démontrée.

1° De nombreuses observations ont appris, depuis longtemps, que l'augmentation des matières grasses dans l'alimentation fait augmenter la graisse du foie.

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huile d'olive et sacrifiant les Fig. 156. Fixation de la graisse alimentaire par le

animaux sept heures après, on a trouvé dans les cellules hépatiques des granulations graisseuses en grande quantité (graisses neutres et savons); mais l'huile végétale

foie (d'après Me C. Deflandre, 1903).

Un chien de 11kg,500 a reçu 250 centimètres cubes de lait cru et a été sacrifié six heures après l'ingestion de ce lait. Le foie est très riche en granulations graisseuses qui sont principalement réparties dans l'axe central de la cellule.

(huile d'olive) est fixée en bien moindres proportions. Mêmes constatations sur le foie de chiens sacrifiés après un fort repas de lait (voy. fig. 156).

1. La signification de ce fait a été indiquée p. 342.

Cependant les huiles végétales peuvent être retenues par le foie, comme le prouve une expérience bien connue (A. Lebedeff1, 1883) consistant à donner à un chien de l'huile de lin et à l'intoxiquer ensuite par le phosphore; le phosphore amène rapidement la dégénérescence graisseuse du foie et la mort; et, dans ce cas, on retrouve dans le foie gras de l'animal des graisses, dont la majeure partie (les 4/5) est de l'huile de lin.

4° L'injection de savon par la veine porte est beaucoup moins toxique que par une veine de la circulation générale (voy. p. 241); la dose mortelle est alors de 0,40 à 0,50 par kilogramme (expériences sur le lapin) au lieu de 08,10 seulement. Le foie retient donc une forte proportion de la matière grasse injectée.

B. Le foie, organe formateur de graisse. La formation de graisse par le foie n'est pas moins certaine.

1o On sait depuis fort longtemps que, chez les animaux bien nourris, le foie se charge de graisse. De cette observation est née, au détriment des Oiseaux de basse-cour, Canards et Oies, l'industrie des « pâtés de foie gras >> 2. - Chez les animaux hibernants, avant l'hibernation, le foie s'enrichit en graisse. — Chez les Poissons, le foie contient aussi de grandes quantités de graisse (huile de foie de morue, par exemple); celui de la Loche n'est qu'une masse graisseuse.

2o Pendant la grossesse, et surtout durant la lactation, les cellules hépatiques sont remplies de gouttelettes graisseuses et cette graisse est identique à celle du lait.

3o Dans l'intoxication aiguë par l'alcool, par l'arsenic, etc., mais surtout dans l'intoxication par le phosphore, le foie se transforme en une masse de graisse (sléatose hépatique). A la vérité, on a soutenu (A. Lebedeff, 1884; Athanasiu, 1899) que la totalité de cette graisse provient de celle des tissus, transportée au foie et retenue par cet organe. Mais on a montré (expériences sur des cobayes) que, chez les animaux ainsi empoisonnés, la quantité totale de graisse de l'organisme est à peu près le double de celle des animaux témoins; il y a donc eu formation de graisse.

Aux dépens de quelles substances la cellule hépatique fabriquet-elle des matières grasses?

or,

La transformation des hydrates de carbone en graisse est très probable. Nous avons cité plus haut l'observation de Boussingault sur le foie d'oie; le gavage des oies se fait surtout avec des féculents. Chez les chiens, nourris exclusivement de féculents, Cl. Bernard a trouvé beaucoup de graisse dans le foie. Des observations plus méthodiques ont été faites sur le type suivant: on donne à des animaux une alimentation riche en hydrates de carbone et trop pauvre en graisse et en albuminoïdes pour que la formation de matières grasses puisse être attribuée à la fixation des

--

1. Physiologiste russe contemporain.

2. D'après Boussingault, une oie forme 17 grammes de graisse par jour, avec des aliments autres que la graisse.

graisses alimentaires ou à la destruction des albuminoïdes; et l'on constate que le foie s'enrichit en graisse.

La production de graisses dans le foie peut-elle se faire aux dépens des matières protéiques? Voici quelques arguments en faveur de cette opinion. On remarque que les Poissons et les Crustacés, dont le foie est si riche en graisse, ont une nourriture exclusivement azotée; cette graisse hépatique ne peut donc provenir que de l'albumine, soit directement, soit indirectement, après qu'une partie de l'albumine s'est transformée en hydrates de carbone. On a soumis à l'intoxication phosphorée des animaux recevant une alimentation aussi pauvre que possible en hydrocarbonés et graisses; la surcharge graisseuse du foie ne s'en est pas moins produite.

C. Le foie, organe destructeur de graisse et d'acides gras. Fonction cétogène. Que la graisse du foie ait été fixée ou formée dans cet organe, elle ne s'y emmagasine pas pour jamais. Mais est-elle utilisée dans le foie lui-même, ou est-elle de nouveau mobilisée ? Est-ce une réserve où l'organisme peut puiser pour ses besoins alimentaires? Les deux processus, d'ailleurs, pourraient coexister. Ainsi, pendant le sommeil hibernal, la graisse accumulée dans le foie des animaux hibernants disparaît peu à peu, tout comme le glycogène ; ces deux éléments remplacent le matériel alimentaire que les animaux ne se procurent plus. D'autre part, chez le nouveauné, dont le foie est surchargé de graisse (accumulée pendant la vie intra-utérine), cette graisse hépatique disparaît en quelques jours, et l'on a constaté que le foie, déjà très riche en glycogène, s'enrichit encore. S'agit-il là d'une d'une transformation in situ de la graisse en glycogène ?

Des expériences directes montrent que la cellule hépatique peut manifester une action lipolytique.

Quand on injecte une quantité donnée de graisse neutre dans une branche de la veine porte (expériences de F. Ramond sur des chiens, 19041905), le tissu hépatique de l'animal sacrifié plus ou moins longtemps après l'injection manifeste une acidité très nette. Cette décomposition intrahépatique de la graisse paraît due à l'action d'une lipase, car elle diminue par le chauffage du tissu.

Le foie agit aussi sur les acides gras. Aux dépens de ces acides se forment en effet dans cet organe les corps acétoniques, acide acétylacétique et acétone, auxquels il faut rattacher l'acide ẞ-oxybutyrique en raison de sa signification physiologique et quoique chimiquement il ne possède pas la fonction cétonique. Les faits qui démontrent ce rôle du foie sont exposés p. 663. La même fonction cétogène du foie s'exerce sur divers acides aminés (voy. aussi p. 663).

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