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Les deux grands segments des canaux ou tubes qui composent le parenchyme rénal (tubes de Bellini1 et tubes de Ferrein 2) sont unis entre eux

non pas directement, mais par l'intermédiaire de canaux à forme d'anses, et qu'on nomme canaux en anse de Henle 3. D'autre part, chaque tube se termine par une dilatation ampullaire dans laquelle fait hernie un peloton sanguin (glomérule de Malpighi), formé par la capillarisation d'une artériole (vaisseau afférent) (fig. 166,a). Ces capillaires pelotonnés se réunissent en un petit tronc efférent qui sort du glomérule par le même point ou par un point voisin de celui par où est entré l'afférent (fig. 166, pV). Ce qu'il y a de remarquable, c'est que le vaisseau afférent ne va pas tout de suite se réunir à ses congénères pour constituer la veine rénale. Presque immédiatement après sa sortie -du glomérule, il se divise de nouveau, se capillarise et

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forme dans le parenchyme Fig. 167.- - Schéma du tube urinifère (d'après Ludwig). rénal un réseau capillaire 1, glomérule; 2, tube contourné ; 3, anse des5, pièce (RC, fig. 166) dont les mailles cendante; - 4, anse ascendante de Henle; d'union; 6, tube collecteur; 7, artère afférente; - 8, artère efférente du glomérule.

s'entrelacent avec les canaux urinifères. Ce tronc efférent (PV) ne mérite donc pas le nom de veine pure et simple; c'est un système à part qu'on peut considérer comme un vaisseau porte, puisqu'il est inter1. Bellini, anatomiste italien (1643-1704); c'est à dix-neuf ans qu'il publia sa découverte des tubes urinifères, à Pise, où il fut professeur dès 1663.

2. Ferrein (Antoine), médecin français (1693-1769), fit ses études à Montpellier et devint professeur à Paris.

3. Les canaux en anse de Henle sont la suite des tubes de Ferrein, qui, à un moment donné, s'amincissent considérablement, deviennent rectilignes et descendent dans la substance médullaire des pyramides (à côté des tubes de Bellini), puis se recourbent en se dilatant de nouveau pour remonter dans la substance corticale; là ces canaux s'infléchissent de nouveau, puis se continuent finalement avec le commencement du vrai tube de Bellini (voy. fig. 167). En un mot, les tubes de Henle constituent des anses, en forme de siphons renversés, entre le tube de Ferrein et le tube de Bellini. Leur épithélium est clair et transparent dans la branche étroite et descendante, foncé, trouble et granuleux dans la partie large et ascendante.

F. G. J. Henle (1809-1885), très célèbre anatomiste et histologiste allemand.

médiaire entre deux systèmes capillaires, celui des glomérules et celui du parenchyme rénal; c'est à ces derniers capillaires que succèdent les vraies origines de la veine rénale (fig. 166, V).

Cette disposition du système vasculaire dans le rein doit être prise en sérieuse considération dans toute explication du mécanisme de la sécrétion urinaire. Il en résulte, en effet, que le sang des capillaires du glomérule est soumis à une pression plus forte que celui des capillaires généraux. Cette pression capillaire spéciale ne réaliset-elle pas une condition très favorable à une filtration du liquide sanguin dans le glomérule? On verra tout à l'heure jusqu'à quel point on peut utiliser ces données pour comprendre le passage de l'eau et des sels du sang à travers le rein.

A. Phénomènes histo-physiologiques. — Comme la sécrétion urinaire est une sécrétion constante, il faut recourir à des artifices expérimentaux pour déceler la participation à ce processus des divers éléments cellulaires du rein.

Voici quelques expériences qui montrent le rôle important que jouent les cellules des tubes contournés.

1° Lorsqu'on injecte dans le sang d'un lapin 10 centimètres cubes environ d'une solution saturée de carmin d'indigo (sulfate de soude et indigo, sulfo-indigotate de soude), on voit que, une heure après l'injection, si on a eu soin de ralentir la sécrétion rénale (en sectionnant, par exemple, la moelle cervicale inférieure), les cellules des tubes contournés de l'anse de Henle sont remplies de granulations bleues, tandis que les glomérules restent incolores. Ainsi l'indigo injecté dans le sang est éliminé par l'épithélium tubulaire.

Depuis cette expérience célèbre de R. Heidenhain (1874), plusieurs autres du même genre ont été faites. Elles conduisent à une conclusion semblable.

2o On a montré, en effet, que beaucoup d'autres matières colorantes (rouge neutre, bleu de toluidine, bleu de méthylène, etc.), injectées dans le sang, s'éliminent par la voie des tubes contournés.

Mais il s'agit là de substances étrangères. A-t-on pu découvrir par où s'éliminent les éléments normaux de l'urine?

3o Quand, sur des Oiseaux, on lie les uretères, on trouve des cristaux d'urates dans les tubes urinifères et jamais dans les glomérules. Observation analogue sur des Mammifères (expériences de H. Anten [de Liége] sur des chiens, 1901) on fait circuler dans le rein une solution ammoniacale de chlorure d'argent, qui ne précipite ni les chlorures, ni les phosphates, mais qui précipite les urates, à l'état d'urate d'argent. Le rein est fixé, puis par exposition des coupes à la lumière l'urate d'argent est réduit. On trouve les tubes contournés et les branches ascendantes des anses de

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Henle remplies de grains noirs d'argent réduit. Les glomérules n'en contiennent point. Par un procédé semblable à celui de Anten, J. Courmont et Ch. André (de Lyon) ont décelé les bases xanthiques dans les mêmes parties du rein et aussi dans la branche descendante de l'anse de Henle (expériences sur des Batraciens, des Serpents, des Oiseaux et sur le rat et le chien, 1905).

Par analogie, on a pensé que l'urée passe aussi par cette voie.

4o On a pu, d'ailleurs, le démontrer sur la grenouille. Chez cet animal (chez les Amphibies en général [voy. fig. 168]) les tubes contournés

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Fig. 168.- La circulation rénale du Triton (d'après M. Nussbaum).

- va,

Ag, artère glomérulaire ; Gl, glomérule; -ve, vaisseau efférent du glomérule; vaisseau anastomotique avec les ramifications de la veine porte rénale; — e, capillaires du tube urinifère; - Vp, veine porte rénale; - T, tube urinifère.

reçoivent le sang d'une veine spéciale, la veine porte rénale, et les glomérules le reçoivent de l'artère rénale; il y a donc indépendance entre la vascularisation de ces deux parties du rein1. Or, si on lie l'artère rénale, les glomérules, ne recevant plus de sang, cessent de fonctionner; et la sécré

1. Cette indépendance n'est que relative, car il existe des anastomoses, comme on le voit sur la figure 168, entre ces deux systèmes vasculaires. C'est là un fait qui diminue quelque peu la valeur de l'expérience rapportée dans le texte.

tion urinaire s'arrête. Si alors on injecte dans une veine de l'animal une solution d'urée, la sécrétion se rétablit et l'urine contient de l'urée. Celleci n'a pu être excrétée que par les tubes contournés, puisque les glomérules ne fonctionnent plus ou du moins fonctionnent mal.

Restent l'eau et les sels. Très généralement pendant longtemps on a considéré que leur élimination se fait par le glomérule.

5o D'après une série de recherches, dues à H. Lamy, André Mayer et Rathery 1, les cristalloïdes (y compris l'urée) et l'eau elle-même passeraient aussi par les tubes contournés. En faisant ingérer à des chiens une grande quantité d'eau de façon à provoquer de la polyurie, ces auteurs ont constaté que l'épithélium des tubes contournés diminue de hauteur et que la lumière des tubes est très élargie. Dans le cas de polyurie produite par injection intraveineuse massive de cristalloïdes, on trouve dans les cellules des tubes contournés des vacuoles analogues à celles que l'on trouve dans les cellules glandulaires en activité.

Tout intéressants que sont ces faits, s'ensuit-il cependant que le glomérule ne soit à aucun degré perméable à l'eau et aux cristalloïdes du plasma? La conclusion irait à l'encontre de diverses expériences. Tout à l'heure déjà a été citée une expérience sur la grenouille qui montre l'importance de l'excrétion aqueuse par le glomérule. Nous allons en trouver d'autres.

B. Phénomènes physico-chimiques. — Plusieurs facteurs sont à considérer ici, l'influence de la pression sanguine et plus généralement de la circulation du sang, les qualités des parois perméables (endothélium capillaire, membrane de Bowman, épithélium des tubuli), l'activité chimique des éléments cellulaires.

a. INFLUENCE DE LA CIRCULATION DU SANG SUR LA FORMATION DE L'urine. La pression élevée du sang dans l'aorte abdominale se transmet par l'artère rénale jusque dans le glomérule; on sait, de plus, que l'étroitesse du vaisseau glomérulaire efférent et du réseau capillaire qui suit doit faire obstacle à l'écoulement facile et rapide. du sang arrivé dans le glomérule. Ce sont là des conditions favorables à une filtration. La rapidité de la filtration doit donc dépendre des pressions qui s'exercent de part et d'autre du filtre.

En fait, il y a augmentation de la quantité d'urine (donc de l'eau urinaire), toutes les fois qu'il se produit une élévation de la pression aortique, par accroissement de la masse du sang (par exemple, à la suite de boissons abondantes), par augmentation de l'énergie des contractions cardiaques, par la ligature de l'aorte au-dessous des artères rénales. Dans le cas où l'élévation de pression s'accompagne d'un resserrement des vaisseaux du rein, c'est-à-dire est liée à des phénomènes de vaso-constriction rénale, elle ne détermine pas une augmentation de la sécrétion urinaire; ainsi l'excitation 1. J. de physiol. et de pathol. générale, 1906, t. VIII, p. 624-634.

électrique de la moelle dorsale supérieure élève la pression artérielle (voy. p. 476) et supprime du même coup la sécrétion urinaire. Au contraire, si l'urée est un excellent diurétique, c'est que, en même temps qu'elle excite les centres vaso-constricteurs et par suite élève la pression aortique, elle dilate les vaisseaux du rein (voy. p. 479). Inversement, toutes les fois que la pression aortique s'abaisse, par saignée abondante, par ralentissement du cœur (sous l'influence, par exemple, de l'excitation du bout périphérique d'un pneumogastrique), par section de la moelle cervicale (d'où paralysie vasculaire généralisée), par injection de peptone, etc., la sécrétion urinaire diminue. Une expérience entre autres, qui n'est qu'une application de la méthode de l'élimination des matières colorantes (voy. plus haut, p, 732), montre bien le rôle respectif des glomérules et des tubes contournés dans la formation de l'urine; après section de la moelle dorsale à la partie supérieure, sur un lapin, on injecte dans une veine de cet animal du sulfoindigotate de soude: le lapin étant sacrifié au bout d'une dizaine de minutes, l'épithélium seul des tubes contournés apparaît coloré en bleu ; c'est que l'indigo est nécessairement resté là où il a été sécrété, la section de la moelle ayant supprimé la sécrétion de l'eau qui aurait pu entraîner la matière colorante en d'autres points du rein.

Les variations de pression qui se passent de l'autre côté du filtre glomérulaire ne sont pas moins importantes.

Si on pose une ligature sur l'uretère, on constate que, quand la pression à l'intérieur de ce conduit s'est élevée à 4-6 centimètres de mercure, la sécrétion urinaire s'arrête. Ou suppose par suite que la pression sanguine, dans les capillaires glomérulaires, ne dépasse pas cette valeur.

Quant à la ligature de la veine rénale, bien qu'elle ait pour effet d'aug‐ menter la pression du sang dans les vaisseaux de l'organe, loin d'augmenter la sécrétion urinaire, elle la diminue ou l'arrête. C'est que, dans ce cas, le sang ne se renouvelle plus guère et que, par suite, la paroi glomérulaire doit être dans de mauvaises conditions de fonctionnement ; d'autre part, en raison même de la dilatation de tout le réseau veineux, les canaux urinifères peuvent se trouver comprimés, et alors la pression de l'urine s'élèverait, deviendrait égale à celle du sang, et par cela même la filtration s'arrêterait.

Tous ces faits établissent la réalité d'une relation entre les variations de la pression artérielle et la quantité d'urine émise. Sans doute, cette relation n'est point parfaite; et même il n'y a pas de rapport exact entre la hauteur de la pression et le volume de l'urine; pour de faibles modifications de l'une (ne dépassant pas 1 ou 2 centimètres de mercure) on voit souvent de grandes variations de l'autre. Il n'en reste pas moins que la perméabilité du rein paraît toujours être d'autant plus grande que l'organe est traversé par une quantité de sang plus considérable. Et c'est là en vérité le facteur qui règle la sécrétion aqueuse beaucoup plus que la pression sanguine même; si, avec une pression aortique forte, la vitesse du sang

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