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l'appareil de réfraction oculaire, le cristallin, a la propriété de changer son rayon de courbure de telle sorte que les rayons tombent toujours sur la rétine.

Si la convergence des rayons lumineux ne se fait pas exactement sur la rétine, mais en avant ou en arrière, chaque point de l'objet placé devant l'œil donnera sur cette membrane l'image non pas d'un point, mais d'un petit cercle correspondant au plan de section par la rétine du cône convergent que forment ces rayons avant leur réunion, ou du cône divergent qu'ils constituent après leur réunion (voy. fig. 201). Appelons cóne objectif le cône des rayons lumineux partant du point lumineux et venant tomber en divergeant sur la cornée, et cón eoculaire celui que représentent ces rayons après avoir subi l'action convergente de la lentille oculaire (fig. 201); si le

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Fig. 201. Cônes oculaires et cones objectifs.

A, B, points lumineux considérés ; CC, cornée ; DD, iris ; EE, cristallin.

Les rayons lumineux, partis des points A et B, sont brisés par la cornée CC et par l'humeur aqueuse comprise entre cette membrane et le cristallin, c'est-à-dire rapprochés du rayon médian qui marche parrallèlement à l'axe. Une seconde réfraction s'opère à travers la lentille du cristallin, et il en résulte finalement les cônes oculaires, qui ont leurs sommets en a et en b, c'est-à-dire exactement sur la rétine; mais on voit que, si la rétine, au lieu de correspondre exactement au sommet des cònes oculaires, venait les occuper soit plus en avant (en H), soit plus en arrière (en G), l'image qui se peindrait sur cette membrane ne serait plus un point, mais un petit cercle (cercle de diffusion).

point lumineux est situé très loin, si les rayons lumineux viennent, par exemple, de l'infini, d'une étoile, le cône objectif a sa longueur maxima, tandis que le cône oculaire est le plus court possible. Si, au contraire, les rayons lumineux viennent d'un objet très rapproché de l'œil, le cône objectif est très court, mais produit dans l'œil un cône oculaire beaucoup plus long que précédemment. Dans ces conditions, ce ne serait que pour une seule distance de l'objet lumineux que le cône oculaire présenterait exactement la longueur nécessaire pour que son sommet vînt tomber sur la rétine; dans tous les autres cas, que le point lumineux fût plus loin ou plus près de l'œil, il donnerait un cône oculaire ou trop court ou trop long et dont le sommet se trouverait par conséquent en avant ou en arrière de la rétine; le point lumineux, en un mot, se peindrait sur la rétine, non par un point, mais par un petit cercle, dit cercle de diffusion, et les images obtenues dans ces conditions seraient confuses.

Ce qui se passerait ainsi dans un appareil de physique, comme celui de la figure 201, n'a pas lieu dans un œil normal. Quelle que soit (dans de certaines limites) la distance du point lumineux, nous pouvons toujours faire en sorte que le sommet du cône oculaire, produit par ses rayons, vienne tomber précisément sur la rétine; nous pouvons regarder alternativement, et voir presque avec une égale netteté, une étoile et le bout de notre nez. En un mot, nous pouvons adapter, accommoder notre œil aux distances.

La preuve de l'existence de cette fonction peut être donnée par plusieurs expériences.

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Fig. 202.Expérience de Scheiner.

AB, diaphragme avec deux ouvertures, Mm et Nn.

a, point pour lequel l'œil est adapté et dont l'image vient de se faire en a' (sur la rétine); b. point pour lequel l'œil n'est pas adapté; les rayons lumineux qui en partent, après s'être rencontrés en b' (en avant de la rétine), divergent de nouveau et rencontrent la rétine en b",b", de sorte que le point b est vu double.

Si l'on place, par exemple, en face de soi deux doigts l'un derrière l'autre à une certaine distance et qu'on fixe son attention sur l'un d'eux, on s'aperçoit que l'on ne voit distinctement que celui-ci, c'est-à-dire que l'œil n'est adapté que pour voir l'un des doigts, et ne l'est point pour l'autre, qui paraît vaguement dessiné; c'est qu'en ce moment l'un des deux doigts se peint régulièrement sur la rétine, et les divers points de l'autre n'y produisent que des cercles de diffusion.

Le fait est encore bien mieux démontré par une expérience célèbre due à Scheiner et qui consiste à placer devant l'œil une carte percée de deux petits trous rapprochés l'un de l'autre, Mm, Nn (fig. 202) et à regarder deux points lumineux (deux têtes d'épingle, par exemple) placés l'un devant l'autre à une certaine distance (comme les deux doigts dans l'expérience précédente). Si l'on fixe attentivement l'un de ces points, on voit l'autre double. Voici la raison de ce fait. Si par les deux ouvertures Mm et Nn (fig. 202) on fixe le point lumineux a, il se passe dans l'oeil un phéno

1. K. Scheiner (1575-1650), jésuite et physicien allemand. L'ouvrage dans lequel est décrite son expérience est intitulé: Oculus seu fondamentum opticum, in quo radius visualis eruilur, ouvrage publié en 1619.

mène d'adaptation, à la suite duquel le cône oculaire est tel, que son sommet tombe sur la rétine; donc les sommets des deux cônes partiels passant par les deux ouvertures se confondent en un seul (en a'), puisque ces deux cônes font partie du cône total qui se produirait si l'on examinait le point lumineux avec l'œil découvert; mais cette disposition est uniquement relative au point o; et quant au point b, son cône objectif étant plus long, il a un cône oculaire plus court, dont le sommet sera en avant de la rétine, et qui n'ira frapper cette membrane qu'en divergeant, après qu'aura eu lieu l'intersection de ses rayons; si donc, comme dans l'expérience, on divise le cône en deux en regardant par deux trous, l'objet qui n'est pas fixé, l'objet b, viendra se peindre par deux cônes distincts (et sera vu double), puisque la rétine ne rencontre pas ces deux cônes au niveau de leur sommet commun (b'), mais plus en arrière, lorsqu'ils se sont de nouveau séparés (b", b′′). Il est donc évident que l'œil était adapté pour voir a et non pour voir b; l'inverse arriverait si l'on fixait attentivement b; ce serait alors a qui paraîtrait double.

Ces faits suffisent pour prouver que nous avons la faculté d'adapter notre vue aux différentes distances. L'expérience de tous les jours nous montre, du reste, que nous pouvons distinguer des objets placés pour ainsi dire à une distance infinie, et que nous apercevons de la façon la plus nette les objets placés à 12 centimètres. C'est, en effet, à cette distance que nous recevons la plus grande quantité de lumière, et en général la faculté d'adaptation oscille entre l'infini et 12 centimètres. C'est-à-dire qu'un œil normal, à l'état de repos, sans effort d'accommodation, est en état de distinguer nettement les objets situés à 65 mètres, distance telle que les rayons qui en partent peuvent être considérés comme parallèles, comme s'ils venaient de l'infini; on appelle cette distance le punctum remotum; puis, par un effort d'adaptation, nous pouvons arriver à voir distinctement des objets de plus en plus rapprochés jusqu'à une distance qui pour un œil normal est à 12 centimètres de l'œil; on appelle cette distance le punctum proximum. Le champ de l'adaptation ou accommodation, c'est-à-dire l'intervalle entre le point le plus rapproché de l'oeil pour lequel celui-ci peut encore s'adapter, et le point le plus éloigné pour lequel il y a encore vision distincte, est donc mesuré par la distance du punctum remotum au punctum proximum. On peut l'exprimer en valeur linéaire. I ne faut donc pas confondre ce champ de l'accommodation avec le pouvoir ou amplitude de l'accommodation, qui est représenté par une lentille convexe d'une force réfringente déterminée et s'exprime conséquemment par une valeur dioptrique. La situation du punctum remotum ne dépend que de conditions purement physiques, des propriétés des milieux transparents; dans la vision du punctum remotum il y a repos de l'accommodation; la situation du punctum

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proximum dépend, comme on va le voir tout à l'heure, des propriétés d'éléments anatomiques vivants, elle est fonction de la contraction du muscle ciliaire; dans la vision du punctum proximum, l'accommodation et le pouvoir réfringent de l'œil sont à leur maximum. Dans cette distinction se trouve toute la différence entre la réfraction statique, que nous avons étudiée, et la réfraction dynamique, dont nous nous occupons en ce moment.

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Nous savons que, à

A. Mécanisme de l'accommodation. mesure qu'un point lumineux se rapproche de l'œil, son foyer se fait en arrière de la rétine; la vision cesserait alors d'être nette; mais l'action d'un appareil intervient, qui augmente le pouvoir de réfraction oculaire, de manière que le foyer tombe sur la rétine. Ainsi, lorsque l'œil regarde de près, il n'est pas dans le même état que lorsqu'il regarde de loin.

L'expérience a montré que cette adaptation consiste dans un changement de courbure, et, par suite, dans un changement de force convergente d'un seul des milieux de l'oeil, du cristallin1 (Cramer 2, Helmholtz). C'est donc à un fait physique très simple qu'a pu être ramené l'un des phénomènes essentiels de la vision. Il y a là une des plus belles découvertes physiologiques du XIXe siècle.

1° Quand le cristallin est enlevé (aphakie), on constate que l'œil n'accommode plus.

2o La preuve du changement de courbure du cristallin est due surtout à l'étude des images fournies par les diverses surfaces des milieux réfringents. C'est l'expérience dite des images de Purkinje (images catoptriques, ou images par réflexion). Si on place une lumière, une bougie par exemple, devant un ceil dans une pièce obscure, on voit, en regardant cet il latéralement, trois images de la bougie. C'est que les rayons lumineux venus de cette lumière sont en partie réfléchis sur chacune des surfaces réfringentes de l'oeil qui agit comme un miroir. Ainsi se produit à la surface de la cornée, miroir convexe, une image droite et brillante de la bougie ; à la face antérieure du cristallin, autre miroir convexe, une deuxième image, droite également, plus grande que l'image cornéennne, mais beaucoup moins bien éclairée ; et enfin, à la face postérieure du cristallin, miroir concave, une troisième image, renversée, plus petite que la première et moins brillante, mais plus brillante que la deuxième3. Il y a donc autant

1. L'explication de l'accommodation par une augmentation de courbure du cristallin fut proposée pour la première fois par Descartes.

2. A. Cramer, médecin hollandais (1822-1855).

3. Il y a une quatrième image, droite et à éclat plus faible que celui des images de la cornée et de la cristalloïde postérieure, égal à peu près à celui de l'image fournie par la cristalloïde antérieure. Purkinje avait dessiné cette image et l'avait attribuée à la surface postérieure de la cornée. Mais Helmholtz

d'images formées qu'il y a de surfaces réfléchissantes 1. Or, si l'on commande à la personne, sur laquelle on observe ce phénomène, de fixer l'objet lumineux placé à des distances différentes, on voit que le seul changement

Fig. 203.

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- Images catoptriques dans l'œil non accommodé A
et accommodé B.

a et a', images cornéennes; b et b', images sur la face antérieure du cristallin; e et e', images sur la face postérieure du cristallin.

qui s'opère dans les trois images se fait dans l'image fournie par la face antérieure du cristallin; cette image devient plus petite quand on accommode pour voir de plus près, tandis que l'image cornéenne ne change pas et que l'image de la face postérieure du cristallin, l'image renversée, devient un peu plus petite, cette va

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riation étant d'ailleurs tout à fait minime (voy. fig. 203). La conclusion s'impose : c'est surtout la face antérieure du cristallin qui, dans la vision de près, devient plus convexe; et, dans la vision de loin, le cristallin s'aplatit.

On peut mesurer la grandeur des images de Purkinje et, étant données la grandeur de l'objet et sa distance à l'œil, calculer de là les variations de courbure des surfaces réfringentes. C'est ce que Helmholtz a fait. Voici les moyennes qu'il a obtenues;

Rayon de courbure de la cornée....

de la face antérieure du cristallin.
de la face postérieure......

Maximum Repos. d'accommodation.

8 millim. 8 millim.

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MUSCLES ET NERFS DE L'ACCOMMODATION. · Comment la courbure du cristallin se modifie-t-elle ? Quel est l'agent de cette modification? C'est le muscle ciliaire qui détermine l'adaptation de l'œil à la vision des objets rapprochés.

Ce muscle, développé dans la partie antérieure de la choroide et annexé à des prolongements érectiles (procès ciliaires), se compose de fibres longitudinales et de fibres circulaires. Les premières (muscle de Brücke), qui forment un plan superficiel et externe, paraissent avoir leur point d'insertion fixe à l'union de la sclérotique et de la cornée (au niveau du canal de n'avait pu la retrouver; il en avait conclu que les deux surfaces cornéennes sont à peu près partout parallèles. Tscherning (1891) a retrouvé cette image sur tous les yeux qu'il a examinés à ce point de vue.

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1. Dans l'aphakie (absence du cristallin) la première image persiste seule. Ophtalmologiste contemporain, directeur du Laboratoire d'ophtalmologie à l'École des Hautes-Études.

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