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Les Colonies sont régies par des lois. »

Plus d'article 16, plus de règlemens, mode unique'; nous rentrons dans le droit commun.

Or, le droit commun public des Français est d'avoir une représentation dans la Chambre. Pour savoir si nous avons droit à cette représentation; la seule questión est claire, une question de nationalité. Voyons, sommesnous Français, oui ou non ?....

Depuis long-temps on a cessé de fait de nous traiter comme tels, l'habitude en est prise; mais il faut qu'on en revienne. Le titre de Français est assez beau pour que nous tenions à le revendiquer, avec la gloire qui l'environne et les prérogatives qui y sont attachées..

Et que l'on ne croie pas que chez nous, au sentiment du droit, ne se joignent pas toutes les convictions!... L'intérêt que nous avons à la chose ne nous donne pas une habileté privée; la seule bonne foi, chez nous, pouvait suffire à démontrer qu'il est de notre devoir, comme de cet intérêt, de conserver à la France ses belles et florissantes Colonies dans nos mers. Anathème aux perfides qui cherchent à les lui faire perdre!.... ceux-là ne sont ni colons, ni Français.

En résumé, sous le mécanisme de la constitution de 1814, s'il pouvait suffire à nos intérêts comme à nos besoins que nous fussions représentés auprès du ministère, c'est-à-dire du seul pouvoir législatif dont nous dépendissions alors; ce pouvoir ayant changé sous l'influence de la Charte de 1830, pour passer tout entier dans la Chambre, doit y être suivi par notre représentation.

Mais, nous dira-t-on, vos lois doivent être particulières; elles sortent de la commune catégorie. Non;

le caractère que donne à ces lois le mot particulières ne touche point à la forme, encore moins à la seule manière dont en France, désormais, on puisse faire des lois, sans soulever une seconde fois tous les pavés de Paris!

Par des lois particulières, le législateur a voulu que l'on entendit des lois proposées, discutées comme toutes celles qui se font aujourd'hui, et dont elles ne doivent pas perdre le caractère général; seulement elles seront appropriées aux localités des Colonies: c'est là sa pensée, il n'en a pas eu d'autre.

Il n'a pas voulu que les Colonies, si différentes de la France par le sol, le climat, les habitudes, les besoins et les urgences administratives, reçussent des lois communes, c'est-à-dire, conçues sur une échelle tout-à-fait étrangère à leurs proportions, à leur nature et à leur situation transatlantique.

Il n'a pas voulu qu'une société composée d'élémens hétérogènes, et, en quelque sorte, d'incompatibilités essentielles, comme l'est la société aux Colonies, fût administrée comme le reste de la France; et nous tirons de cette distinction judicieuse, de cette prévoyante sollicitude de sa part, la plus puissante induction de la nécessité où se trouve la Chambre d'appeler aux débats de nos lois des mandataires capables de l'éclairer, et d'opposer les vérités fondamentales d'une organisation conservatrice à toutes les erreurs, les préventions et les inepties de ceux qui, ne connaissant rien au mécanisme de la machine coloniale, tendraient indubitablement à la détruire.

Le législateur a donc, avec autant de bienveillance que de sagesse, pressenti le danger de lois qui ne seraient

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pas en rapport avec le pays qui devait les recevoir; il a donc reconnu la susceptibilité de la société à laquelle on les imposait, et la juste conséquence, la conséquence nécessaire d'une défense pareille, était de recommander un soin particulier dans la rédaction de ces lois.

Et c'est en privant ces lois de l'une des plus puissantes garanties de la loi; c'est en les dépouillant de l'un des élémens constitutifs des bonnes lois, c'est-à-dire, la participation à leur discussion de ceux qui doivent en être tenus. que l'on veut comprendre la pensée du législateur !.... Mais, en vérité, le bon sens a-t-il pris congé de toutes les têtes et la bonnefoi de tous les cœurs? Quoi! cette pensée si explicitement renfermée dans l'expression de lois particulières, peut-elle être en conscience interprétée autrement qu'en esprit de faveur pour nous? De là n'est-il done plus de principe, que lorsqu'une disposition législative a pour but de favoriser quelqu'un, on doit, dans l'interprétation, éviter à l'égard de celui-là tout ce qui pourrait tendre à préjudice et sévérité (*).

Hélas! nous le craignons bien, on a judaïquement étouffé l'esprit avec la lettre; mais l'on rendra à la Charte son essence vitale, sa bienveillante intelligence. Impossible que la Chambre, avertie, souffre que son œuvre d'hier soit aujourd'hui violée, même à l'égard des Colonies. Législateur elle-même, elle comprendra que jamais, dans son sens, les Colonies n'auront de lois particulières que lorsqu'elles en auront débattu et dirigé l'esprit et la rédaction.

(*) Nulla juris ratio æquitatis benignitas patitur quæ salubriter pro utilitate hominum introducta sunt, ea nos duriore interpretatione contra ipsorum commodum producamus ad severitatem. L. 25, ff., de legibus.

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Il en est de même des autres objections, disons mieux, des autres prétextes. Quoi qu'il en soit, parcouronsles; car, par cela seul qu'ils sont possibles, ils deviennent probables contre nous.

1°. Sur cent projets offerts à la discussion dans la Chambre, à peine y sera-t-il question une fois des Colonies.

Qu'importe; il suffit d'une seule fois pour admettre la députation coloniale. Cette seule fois détermine l'admission, en donnant lieu à l'exercice du droit.

Et d'ailleurs, qui prouve que la plupart des lois proposées dans la Chambre pour la France, et même que la somme entière des intérêts qui y sont débattus, soient si étrangères à l'intérêt colonial? Les lois fiscales, celle de la douane, par exemple, le tarif des droits à l'importation et l'exportation, le budget, la paix, la guerre, tout, ou presque tout, offre une connexité parfaite avec les intérêts des colonies. Enfin, chaque jour, Dieu merci, l'on s'occupe dans la Chambre de ces derniers intérêts, et cette intermission se justifie par le droit né de la nationalité.

Eh bien! nous le demandons à notre tour: si la seule nationalité donne aux uns le droit de se mêler des affaires des autres, comment se ferait-il que cette même nationalité ne valût pas à ceux-ci le droit réciproque de s'intéresser aux affaires des premiers, notamment sur des questions ayant trait aux avantages généraux que peut procurer, aux uns comme aux autres, la prospérité du commerce et de la marine?

Il serait donc plus que rigoureux d'exclure la représentation coloniale du débat des intérêts généraux : Summum jus, summa injuria!..... Il est conséquem

ment odieux qu'elle ne soit pas encore admise à faire apprécier et valoir ses intérêts particuliers.

2°. La distance où les mandataires se trouveront des mandans, rendra illusoire la présence, dans la Chambre, des députés coloniaux. Pourquoi compliquer le personnel et les ressorts de la discussion, par une représentation qui, la plupart du temps, flottera incertaine entre l'opportunité ou l'inopportunité, quant aux Colonies, de presque toutes les mesures législatives débattues dans la Chambre?

Qu'importe encore? La Chambre, la Nation et le Roi ont créé un droit; en le créant, ils se sont obligés solidairement par la Charte, d'aider aux voies par lesquelles il peut être exercé; de se soumettre aux conséquences de l'exercice qui en aurait lieu. A nous seuls appartient d'y

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A nous aussi d'en user dans les bornes du possible. Elles sont larges en effet; qu'on distingue. S'agira-t-il de matières évidemment étrangères aux Colonies? leurs mandataires trouveront dans la pratique ordinaire des convenances, une sage et discrète réserve; leur rôle sera déterminé par les circonstances. Et d'ailleurs, encore une fois, pourquoi leur refuserait-on dans la chose française cette active sollicitude qu'inspire à tous les cœurs bien nés l'amour de la patrie? C'est un sentiment qu'ils savent éprouver.

S'agira-t-il, au contraire, d'une matière spéciale aux Colonies ? ces mêmes mandataires, hábiles à la discuter, seront au moins sur le terrain de l'attaque. Que l'on ne craigne point de se commettre là, aux violentes clameurs d'une aveugle prévention, au fiel amer d'une haine systématique, aux passions tumultueuses de l'esprit de parti, à l'ignorance enfin qui éclate sur les choses

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