Imágenes de páginas
PDF
EPUB

gique d'Amsterdam, que Jan retrouvera son fils, et il ne les reverra qu'au milieu d'un incendie où le mal. heureux homme-singe périra. Jan Maas, devenu pour tous complètement fou, traîne une existence semigâteuse et satisfaite dans une maison d'aliénés.

Tel est le résumé de ce roman extraordinaire où l'auteur a dépensé une grande somme de talent à peindre des choses qu'il ignorait et à étudier un insoluble problème. Nous avouons préférer de beaucoup à cette composition bizarre les livres précédents de M. Émile Dodillon, qui portaient la marque d'une plume hardie et analysaient des choses plus réelles et plus tangibles.

[blocks in formation]

Ah! l'étonnante magie que celle du style! comme elle vous ensorcelle, s'enroule dominatrice à vos pensées, à votre corps, finissant par faire accepter les choses les plus antinaturelles! On dirait une musique qui grise, se glisse en vous, dénoue vos résistances, amollit votre austérité et vous amène doucement, mollement, d'une manière presque irrésistible, aux lâchetés de conscience, aux concessions, à l'admission des circonstances atténuantes pour ce que, de prime abord, on se refuserait énergiquement à admettre. Et quel maître écrivain que celui qui sait se servir de cette arme redoutable, même quand il l'empoisonne des sucs les plus vénéneux !

C'est sous l'obsession de Zo'har, l'étrange et dangereux roman de Catulle Mendès, que ces réflexions nous assiègent avec une violence toute-puissante, Zo’har, le grand poème terrifiant de l'inceste, l'histoire charnelle et passionnée des amours d'un frère et d'une sœur. Assurément la morale est sauve, ou tout au moins semble sauve, puisqu'aux dernières pages du livre la mort vient désunir les deux coupables, et que leur dépouille est jetée au gré des flots et des vents par le justicier Cardenac; mais à lire ce roman tout vibrant de luxure, tout parfumé de la senteur des chairs amoureuses, on ressent moins l'indignation du crime épouvantable commis par ces deux êtres, Léopold et Stephana, que la curiosité malsaine de leurs ivresses et de leurs étreintes. On devine que l'écrivain, emporté lui-même par le tourbillon sensuel qu'il avait évoqué, a pour ainsi dire peu à peu oublié la grandeur du forfait, pour ne plus se complaire que dans la peinture brûlante de cette passion fougueuse. Comme lui, on en arrive à ne plus se souvenir que ces deux amoureux si beaux, si tendres, si séduisants, sont le frère et la sœur, et que leurs amours, leurs baisers, leur mariage sont autant de crimes monstrueux. Un véritable souffle de flamme passe à travers les pages de cette œuvre, d'une conception extraordinaire, d'un style entraînant, et qui, tout en vous saisissant parfois d'horreur, se fait lire sans révoltes jusqu'au bout. Le roman est-il vraisemblable? N'est-ce que la fiction fantastique d'un poète ? On l'ignore et on ne songe

pas un moment à le savoir, tant on se trouve dominé par l'entraînement de l'action, par la furie passionnelle des événements et par la vibration aiguë des baisers furieux se heurtant sans cesse entre les héros du livre. La femme surtout, un monstre complet, absolu, entier depuis la première jusqu'à la dernière ligne, est une conception au-dessus de l'humanité, et c'est à peine si l'on parvient à se raisonner assez froidement pour la détester, tant l'écrivain l'a faite pleine de séduction. Elle charme comme le gouffre béant, et son attrait a le tourbillon aspiratoire du vertige, auquel on cède presque avec volupté, sans se défendre.

[blocks in formation]

Ce qui donne au livre de M. Jules Lemaître son grand parfum d'originalité, c'est un mélange de haute philosophie littéraire et d'émotion naïve, tempérées par une certaine dose de scepticisme parisien. Serenus, la nouvelle par laquelle débute le volume, est une de ces études archéologiques, au travail minutieux et difficile desquelles ne se plaisent que les esprits délicats, chercheurs, les gourmets de lettres, versés dans la science ardue et intéressante de l'antiquité. Cette reconstitution d'un coin de vie romaine sous Diocletien est faite avec une connaissance approfondie des mœurs de l'ancienne capitale du monde. On voit que l'écrivain s'est complu dans ces fouilles curieuses, pénétrant le plus avant possible dans l'intimité des individus qu'il voulait replacer sous nos yeux dans leur mouvement et dans leur vie ; il en a tiré une légende savamment ciselée en une langue pure et harmonieuse, donnant bien l'illusion de ces lointaines époques.

Passant ensuite de l'antiquité aux temps modernes, l'écrivain nous montre une face toute nouvelle de son talent dans les Contes d'autrefois et d'aujourd'hui. Quelques-uns dénotent une sensibilité profonde, bien sincère et que ne peuvent effacer les symptômes d'incrédulité parisienne qui se glissent entre les lignes à certains endroits, comme pour laisser voir une certaine défiance de l'auteur contre les emballements de sa propre émotion. La Mère sainte Agathe, originalement contée, détaille avec une rare souplesse d'analyse la différence qu'il peut y avoir entre l'amour né d'une simple surprise des yeux et l'amour plus sérieux, plus solide, né d'une communauté continue des idées, des goûts, d'un commerce assidu des intelligences. Dans l'Aînée, cette amusante histoire du ministre protestant Franck Pétermann, la larme se trouve là toute perlée, sous l'enveloppe de douce raillerie. Avec En nourrice, le lamentable récit de la mort d'un petit Parisien élevé à la campagne, la note émue vibre plus développée, plus poignante, tout près, tout près de notre cœur. Les Trois Manières de Garnoteau, la Grosse Caisse, sont des peintures d'une observation très heureuse, prouvant la souplesse d'écriture de l'auteur, qui sait aborder avec un même

[blocks in formation]

J. Metton de la Perrière est une femme; la petite fille des châtelains n'est autre qu'elle-même, et les confidences d'une modiste sont sa propre autobiographie.

Mise en apprentissage chez différentes maîtresses qui la maltraitent et dont la plus cruelle est sa tante, repasseuse, connue sous l'élégant sobriquet de la Grande Bique, abandonnée par sa mère, servant dans une famille bourgeoise où le mari veut la corrompre, réfugiée chez son père, homme violent et dénaturé qui la roue de coups et d'injures, elle le sauve de la prison en se livrant à un individu qui a été le témoin d'un quasi-assassinat commis par Metton et qui lui vend son silence à ce prix. Une nuit, à moitié assommée elle-même par ce père féroce, elle prend la fuite, et finit par arriver à Paris où elle retrouve sa mère, qui ne l'aide qu'autant qu'elle ne peut pas faire autrement. C'est là qu'elle devient modiste. Nous ne la suivrons pas à travers toutes ses aventures et mésaventures. Tantôt gagnant assez d'argent pour vivre heureuse, tantôt dans une misère noire, elle est toujours suivie d'une meute d'hommes qui, pour employer sa propre comparaison, courent après elle comme des chiens après une chienne au printemps. Elle a grandi dans les taudis les plus infects, souffrant la faim, le froid, les intempéries, recevant plus de horions que de morceaux de pain; toute jeune, elle a eu les écrouelles; elle a failli perdre la vue, et ses yeux sont restés rouges et dégarnis de cils. Malgré cela, la voilà, plantureuse beauté, blonde, allumant et attisant le désir. Mais elle joue avec le feu sans se brûler, et nul ne sait mieux qu'elle bafouer les amoureux timides et déconcerter les audacieux. Malade, dégoûtée et découragée, elle finit cependant par écouter les propositions d'un jeune Brésilien, au moment même où elle se sent prise d'amour pour le médecin qui la soigne. Cette nouvelle période de l'existence de la jeune modiste sera racontée dans un autre volume, intitulé: Monsieur Azédo.

Je n'éprouve, au point de vue littéraire, qu'une sympathie très médiocre pour l'écrivain, quel qu'il soit, qui nous donne les Mémoires de Mademoiselle J. Metton de la Perrière. Son œuvre est pleine de longueurs, de rabàchages, d'incohérence et d'obscurité. Mais on n'y trouve pas moins une peinture prise sur le vif de tout un monde mal observé, bien qu'il nous entoure, - ce monde d'ouvrières, de petits com

mis, de boutiquiers, de filles et de patronnes d'ateliers, de bourgeoises et bourgeois de mauvais aloi. Les couleurs sont crues, mais vraies; rien n'est adouci, ni le langage, ni les mœurs. Je ne saurais mieux comparer ce livre, en dépit de la différence des temps, des pays et des civilisations, qu'aux grands romans autobiographiques de Daniel Defoe, tels que vient de nous les faire connaître la traduction française de Lady Roxana.

Ces confidences sont écrites pour le meilleur ami de l'auteur, un négociant de Lyon, à qui elle a eu « le bonheur d'inspirer un profond amour, qui fut payé de retour ». L'excellent Antonin en voit rétros. pectivement de toutes les couleurs, et si, dans la femme aimée, la franchise est ce qui lui plaît le mieux, il est servi à tout souhait.

[blocks in formation]

Ceci est le second volume des Confidences d'une modiste, dont je rendais compte tout à l'heure. Le Brésilien Azédo est un type de névrosé jaloux fort réussi, et la vie en ménage qu'il mène avec Mlle Josephte Metton de la Perrière, est assez accidentée pour ne pas laisser languir l'intérêt. Cependant Azédo est rappelé dans son pays, et Josephte, pendant son absence, s'en va comme première chez une modiste de Francfort, dont le frère devient éperdument amoureux d'elle. Azédo revient à Paris, et Josephte revient à Azédo. Mais les beaux jours sont passés, et la fatale rupture arrive. Josephte, qui s'est établie à son compte, fait de mauvaises affaires, et est mise à Clichy. Un brave cousin la tire de là. Elle contracte un nouvel engagement pour l'étranger, et va à Vienne, non sans avoir des aventures pendant le voyage.

J'ai dit, à propos du premier volume, ce que je pense du genre choisi par l'auteur et de son talent. Je n'y reviendrai pas. D'ailleurs nous les retrouverons bientôt, car son éditeur nous promet, à bref délai, trois autres volumes, qui compléteront ces mémoires, et dont voici les titres: l'Exilée, les Euvres du destin, Un négociant de Lyon. Attendons sans impatience.

[blocks in formation]

-mal par un Parisien sceptique et sans cœur, employé sur la côte dans le service des ponts et chaussées. La pauvre enfant, fiancée à un jeune marin du pays qui fait son temps sur un navire de l'État, devient mère sans même avoir soupçonné sa faute; car Vidal, le conducteur des ponts et chaussées, s'est aperçu qu'il exerce sur elle un pouvoir magnétique, et il s'en est servi lâchement pour la posséder. Les deux coups terribles et rapprochés de la naissance et de la mort 'de son enfant rendent Yvonne folle. Le père, vieux matelot du bateau de sauvetage, finit par acquérir la certitude que Vidal est coupable, et il ne l'épargne que parce que celui-ci promet d'épouser sa victime. Cependant la folie d'Yvonne disparaît peu à peu, et fait place à une profonde tristesse, car elle ne comprend pas qu'il lui faille accepter Vidal et oublier Piarrick, son fiancé. Celui-ci arrive, apprend tout, et réclame, malgré ce qui est arrivé, la main de la jeune fille. Le jour même des noces, Vidal est surpris par la mer dans une grotte de la côte où il avait, quelque temps auparavant, donné l'ordre à Yvonne de la rejoindre. La suggestion opère à heure dite, et Yvonne, en dépit de la tempête, s'élance dans la nuit pour rejoindre le misérable magnétiseur. Ce n'est qu'à grand'peine qu'on l'arrête et qu'on la ramène, épuisée et inerte, à la maison nuptiale. Mais le sauveteur avait entendu les cris de Vidal, à demi noyé dans les roches. Suivi de son gendre, il se jette dans un bateau et arrive à temps pour l'arracher aux flots. Mais, au retour, comme le bateau passait près du Trou du Diable, le sauveteur saisit Vidal et se précipite avec lui dans l'abîme, pour qu'il ne soit pas dit « qu'un sauveteur a tué un homme sans mourir ».

Djina est aussi une touchante histoire d'amour où la double vue joue un très grand rôle. Mais elle n'est point tragique, comme l'autre. L'enseigne du Brézec et la belle Djina ou Jane d'Elien se rencontrent à Singapour pendant une minute, et se retrouvent à Paris au bout de trois ans, sans avoir cessé de penser l'un à l'autre et de s'aimer. Une vieille nourrice hindoue, du nom de Daïe, joue dans cette affaire le rôle de sybille, et meurt le jour où elle voit l'accomplissement de ses prophéties et le bonheur réalisé de celle qu'elle appelle son enfant.

J'ai quelque peine à croire que l'hypnotisme, la suggestion, la double vue aient, dans les événements de la vie, la part que M. Pierre Maël leur attribue dans ses deux récits, et j'avoue que ces questions me paraissent, jusqu'à nouvel ordre, relever du médecin plutôt que du romancier. Mais l'art est libre dans ses conceptions comme dans ses moyens, et il suffit que M. Maël conte avec charme, avec finesse, avec émotion, pour qu'on salue de sympathiques éloges ce

[blocks in formation]

Mr Isaacs, véritable coup de maître, fit une immé. diate réputation à M. F. Marion Crawford. De premiers et très grands succès ne sont pas d'une absolue rareté dans l'histoire des lettres et en particulier du roman. Le rare est que de tels succès aient un lendemain et que l'auteur se maintienne au rang où d'un seul bond il s'est placé. Si les lecteurs anglais de Mr Isaacs ont pu éprouver quelque doute à cet égard quand le livre parut en 1882, toute appréhension de cette sorte a été épargnée au lecteur français à qui l'œuvre fut révélee en 1885 sculement, alors que déjà elle avait été suivie de quatre nouveaux romans, le Docteur Claudius et Contre le vent (titre auquel le traducteur substitue le nom de l'héroïne, la Marchesa Carantoni) en 1883; Un chanteur romain et Un politicien américain, en 1884; eux-mêmes suivis de Zoroastre en 1885, de Une paroisse, isolée en la présente année 1886, où paraît dans le Blackwood's Magazine la dernière composition de M. Marion Crawford, Sarracinesca, non encore publiée en volume; ce qui porte à huit le nombre des ouvrages du brillant écrivain. Nous sommes donc pleinement rassurés désormais, tout au moins quant à sa fécondité. En outre, ceux de ces livres qui ont été traduits ont confirmé avec éclat et réalisé, bien au delà, toutes les généreuses promesses du début. Il nous est permis de dire que ceux qui n'ont pas encore paru en français sous la forme du livre réservent de belles surprises aux admirateurs des premiers romans : Zoroastre, par exemple, où l'auteur a encadré le plus noble drame d'amour dans les magnifiques somptuosités de la civilisation asiatique, reconstituée par lui, au temps de l'héroïque Darius, avec une puissanc de vie et une exactitude où il semble que seul eût pu viser et atteindre un membre de la mission Dieulafoy à Suse. La supériorité du mérite en cet ensemble d'œuvres tient à l'exceptionnel équilibre dont il témoigne des deux facultés maîtresses qui font le romancier, l'imagination et l'observation. Il s'y ajoute chez M. Marion Crawfort des dons tout personnels d'analyse psychologique pénétrante. En ses romans où l'action est le plus mouvementée, tel Un chanteur romain, comme dans ceux où elle est la plus simple, tel le Docteur Claudius, il ne nous laisse rien ignorer des plus secrètes émotions, des plus intimes pensées de ses personnages; mais ce n'est point seulement par ce qu'il nous en dit qu'elles nous sont révélees, c'est surtout par ce qu'ils disent eux-mêmes et par ce qu'ils font, à un geste, à un mot, à une détermination soudaine. Et c'est cela précisément qui donne une vie si puissante à l'œuvre de M. Marion Crawford.

L'amour, parfois même l'amour coupable, comme dans la Marchesa Carantoni, — est toujours le pivot de la situation en chacune de ses conceptions. Le fait n'est pas si commun dans le roman anglais que nous puissions nous abstenir de le signaler. Mais jusqu'en ses fautes les plus graves, même en ses plus évidents sophismes, la passion y parle une langue d'une absolue chasteté et pourtant singulièrement éloquente de tendresse exquise, d'ardeur intense contenue par une respectueuse adoration. Tous

ses héros partagent l'opinion du docteur Claudius et pourraient comme lui dire : « C'est à la femme que l'homme doit la vie, c'est à la femme qu'il devrait devoir le bonheur. Sans femme, la civilisation serait impossible et la société s'ébranlerait... J'adore la femme. Je révère sa mission et je glorifie les dons du ciel qui la rendent propre à l'accomplir... J'estime qu'il n'y a rien dans la création que l'on puisse comparer à la femme, pas même l'homme. Je crois que l'hommage et le dévouement à la femme sont les premiers devoirs de l'homme après l'hommage et le dévouement à l'Être suprême... » Mais, époux, amants, fiancés, soupirants, si, pour tous, la femme est l'objet d'un culte passionné, on aurait tort de conclure qu'ils sont tous coulés dans le même moule. C'est, au contraire, un des côtés précieux et charmants du talent de M. Marion Crawford que la variété des caractères qu'il met en scène en des milieux toujours

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]
[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

D'entre ces boutades, l'une témoigne, chez le jeune écrivain, d'une générosité sincère: M. Noël Gontran prend la défense des employées de magasins qu'on empêche de s'asseoir et de croquer, à la dérobée, une tablette de chocolat; et une autre, d'un souci de la décence que M. Grammont, de l'Intransigeant, jugera assez ridicule, nous, au contraire : · Une grille, s. v. p., pour cette partie du jardin des Tuileries qui est dite réservée. Nous aimons moins ces pages dans lesquelles l'auteur, exprimant le regret qu'on ait cru devoir placer les restes de Victor Hugo au Panthéon, s'écrie: « Le tombeau du poète de qui la religion était une religion de foi, d'amour, d'égalité, près du tombeau d'un athée, près de celui d'un courtisan égoïste et sceptique! Oui, Voltaire fut un courtisan égoïste et sceptique, il ne faut pas être, toutefois, trop sévère à son égard; et Rousseau ne fut pas un athée, quoi qu'en pense M. Gontran, même la religion de Hugo ne diffère pas de beaucoup de celle de Rousseau. Des pages que nous détestons absolument sont celles qui sont écrites à l'adresse de l'Académie française; elles ne sont même pas spirituelles.

Dans les notes critiques, quelques jugements tou

chant le caractère de la Théodora de Sardou et touchant la collaboration de Corneille et de M. Gallet, sur les Onze mille vierges, de M. Arsène Houssaye; sur la Femme à Paris, de M. James Tissot, laquelle n'est pas la Parisienne; la Marcelle, de M. Daniel Lesueur; sur le Mandement de Me Zola après l'interdiction de Germinal.

Une seule des Histoires brèves se laisse lire avec plaisir; elle est intitulée : Un bracelet de Me Rachel ; les autres ne méritaient certes pas d'être imprimées.

Hommage à M. Chevreul à l'occasion de son centenaire, 31 août 1886. Un vol. in-4° sur papier de Hollande. Paris, Félix Alcan, 1886. — Prix : 5 francs.

L'hommage est délicat, l'illustre centenaire a dû en être touché. A leur doyen, - car, eux aussi, ils ne prennent d'autre titre que celui d'étudiant laborieux, - MM. Berthelot, E. Demarçay, Dujardin-Beaumetz, E. Gautier, Ed. Grimaux, G. Pouchet, Ch. Richet, dédient, en témoignage de leur reconnaissance, de celle des hommes de notre génération, des mémoires ayant trait à des investigations poursuivies sous l'inspiration même du savant. Ces mémoires ont pour sujets celui de M. Berthelot, la préparation du gaz ammoniac; celui de M. Demarçay, la sensibilité de quelques réactions spectroscopiques; celui de M. Du

jardin-Beaumetz, la formule atomique du corps et leurs effets thérapeutiques; celui de M. Gautier, le mécanisme de la variation des êtres vivants, et M. Grimaux publie et commente deux lettres encore inédites de Lavoisier, et M. Pouchet traite des « produits » en anatomie générale, et M. Richet argumente à propos de certains mouvements dits inconscients. Sur la première page, à côté des noms autorisés de ces étudiants, le nom de M. Félix Alcan: le très sympathique éditeur a pris soin que le volume fût digne à tous égards d'être offert à M. Chevreul.

Lettres du fond des bois, par FRÉDÉRIC COUSOT. Brochure in-12. Paris, Alphonse Lemerre, 1886.

Vivre et se multiplier, c'est la grande loi qui régit le monde des bois, comme elle régit le monde de la plaine, comme elle régit le monde de la mer, — et, nous autres hommes, nous n'échappons pas à son empire: il nous faut vivre, vivre et aimer. Cela, l'auteur ne le dit pas à sa cousine, sa mignonne correspondante, mais, lui parlant avec complaisance des amours, des fleurs, des insectes, des oiseaux, il semble bien l'inviter à faire ainsi que font les oiseaux, les insectes et les fleurs; il semble bien, invoquant Darwin au lieu de la muse, lui chanter, sur un mode nouveau, le fameux Carpe Beni. Les lettres adressées à la cousine du fond des bois sont finement écrites.

Les Euvres de Hugues de Saint-Victor, essai critique, par B. HAURÉAU, membre de l'Institut. Nouvelle édition. Un vol. in-8°. Paris, Hachette et Cie, 1886.

La dernière édition des œuvres de Hugues a été donnée en 1854 par M. l'abbé Migne dans les tomes CLXXV-CLXXVII de sa Patrologie, et dans ces trois volumes figurent, disposées toutefois dans un ordre différent, les mêmes pièces qui avaient été publiées, en 1648, par les chanoines de Saint-Victor.

Le très érudit historien de la philosophie scholastique s'est appliqué à rechercher quels morceaux sont encore aujourd'hui attribués à tort au représentant le plus éminent de l'école de Saint-Victor, et quels morceaux, attribués à d'autres auteurs, parfois même . à un personnage fictif, comme l'Abrégé de la philosophie à Didyme, l'un des trois amis du dialogue, devaient être, par contre, restitués au théologien.

M. Hauréau sait ses manuscrits, il sait les controverses des critiques, et son essai bibliographique est pour faire autorité.

F. G.

Disons des monologues, par PAUL LHEUREUX. Un vol. in-18 jesus. Paris, Paul Ollendorff, éditeur, 1886. - Prix: 3 fr. 50.

Ah! Dieu, non, n'en disons pas !

Ils sont parvenus, en quelques années, à user et à discréditer la poésie récitative, comme la nouvelle : deux genres charmants, qui exigent les qualites les plus subtiles du conteur, les mérites les plus délicats

de la langue et les finesses sans affectation du style.

M. Lheureux serait bien surpris si nous découvrions tout cela dans son recueil, et il penserait qu'on le lui a changé en route.

Hélas! on ne l'a pas changé. Il ne contient autre chose que ce qu'y déposa l'auteur: quelques idées drôles délayées en langue vulgaire, ou des vers qui ne sont pas de la poésie, et ressemblent souvent à de la prose mal chaussée et boiteuse. Le chef-d'œuvre de la collection, c'est encore la Source, et il faut n'avoir jamais entendu Galipaux pour ignorer quel goût M. Lheureux a montré dans cette source. Il est vrai que le public ne manque jamais de rire quand on la lui sert. Alors M. Lheureux a raison, et notre manque d'enthousiasme lui paraîtra bien pédantesque.

Essai sur l'instruction populaire, dans ses rapports avec l'éducation économique et sociale, par ÉMILE COSSON, avocat à la cour d'appel de Paris. Une brochure in-12. Paris, Durand et PédoneLauriel, éditeurs, 1886.

L'idée que préconise l'auteur de cet opuscule, c'est la création d'un enseignement supérieur populaire. Il retrace les efforts tentés et les progrès réalisés par les diverses sociétés d'éducation et d'instruction populaires, les comparant à celles des pays étrangers.

M. Cosson partage l'illusion commune à ceux qui n'abordent l'enseignement que par hasard, de façon intermittente, en dilettanti, avec les meilleures intentions du reste: il croit que tout esprit est capable d'être enseigné, et il place assez haut le minimum d'instruction accessible à tous les individus.

PZ.

Bibliothèque d'éducation moderne : l'Infirmière, par Louise de LASSERRE. Un vol. in-8°. Paris, 1886. Charavay frères.

« Qui veut trop prouver... » Mile de Morcez, vingt ans, admirablement belle, prodigieusement et virilement instruite, châtelaine aux environs de Metz, cuisinière incomparable, agronome distinguée, écuyère accomplie, de première force au billard, tirant le lapin « comme le meilleur chasseur du département », la simplicité même et la modestie en personne, sollicite à la page 120 du volume et obtient du directeur de l'assistance publique d'être admise comme fille de salle laïque à la Salpêtrière. Ce modèle de toutes les vertus, type achevé de toutes les perfections physiques, morales et intellectuelles, a reconnu sa vocation sur les champs de bataille de la Lorraine. Chassée de son pays par la défaite, elle se sent pénétrée par le dégoût du monde et du mariage, mais disposée à « s'enfermer dans un monastère », à « porter un costume des plus déplaisants » en aucune façon. Cependant, elle veut remplir le rôle sublime de sœur de charité laïque et son désir est satisfait. Cette singulière affabulation est cousue de fil blanc, et ce fil, pour le faire plus apparent encore, a été pris de la grosseur d'un câble. « Nous souhaitons, dit l'au

« AnteriorContinuar »