Imágenes de páginas
PDF
EPUB

DES MOUVEMENTS.

Si les mouvements des animaux varient dans leur but et dans leur essence, les organes chargés de les accomplir offrent eux-mêmes une texture variable. On peut, en ayant égard à cette dernière considération, admettre cinq ordres de mouvements dus: 1° à l'épithélium vibratile; 2° au tissu cellulaire contractile ; 3° au tissu élastique; 4° au tissu érectile; 5° au tissu musculaire.

I. MOUVEMENTS DUS A L'ÉPITHELIUM VIBRATILE.

Avant Purkinje et G. Valentin (1), déjà d'autres observateurs les avaient aperçus, mais sans leur donner leur véritable interprétation, dont la science est redevable à ces deux habiles micrographes.

Fig. 1.

Les organes spéciaux de ces mouvements constituent une variété d'épithélium cylindrique, qu'on désigne sous le nom d'épithélium vibratile, et qui se compose de cellules coniques, cylindriques ou ovalaires, surmontées de poils courts, hyalins, terminés en pointe ou par un renflement (fig. 1). Ces poils, dits cils vibratiles, en général au nombre de trois à huit pour chaque cellule, cgaux ou inégaux en hauteur, sont larges et plats chez les animaux vertébrés, tronqués ou arrondis à leur extrémité libre dans l'homme et les mammifères, un peu moins obtus dans les oiseaux, pointus et aplatis dans les reptiles et les poissons, cylindriques et pointus chez les animaux sans vertèbres.

[graphic]

La surface du corps des planaires, des paramécies et de beaucoup d'autres infusoires, est entièrement revêtue de cils vibratiles épars ou disposés en rangées régulières. Un grand nombre d'embryons, ceux des acalèphes, par exemple, ceux des éponges, des actinies, des distomes, des mollusques, sont également tout couverts de cils vibratiles durant une certaine période. La plupart des animaux inférieurs, s'ils ne sont pas ainsi totalement ciliés, ont au moins quelques parties, quelques organes pourvus de ces appendices microscopiques: ainsi, les franges qui

(1) De phænomeno generali et fundamentali motus vibratorii continui in membranis, etc. Breslau, 1835. De motu vibratorio animalium vertebratorum, in Act. Acad. nat. cur., vol. XVII, p. 11, avril 1835.

LONGET, PHYSIOL, T. I.

C. 1.

accompagnent les ovaires, chez les méduses, les festons élégants qui bordent les bras, chez les pélagies, montrent bien le mouvement vibratile. L'intérieur des tentacules des alcyons et de plusieurs autres zoanthaires, l'extérieur des tentacules de tous les polypes bryozoaires, comme les alcyonelles, les flustres, etc., la membrane qui tapisse les épines et le têt des oursins et des astéries, la partie antérieure des mollusques d'eau douce, les branchies de tous les mollusques univalves ou bivalves, etc., sont munis de cils vibratiles (Dujardin). Chez les animaux vertébrés eux-mêmes, on observe le mouvement vibratile sur plusieurs parties, notamment sur la muqueuse des cavités nasales et sur les organes génitaux femelles, sur toute la muqueuse de la bouche des batraciens, sur la surface respiratoire de presque tous les vertébrés à poumons, etc.

Dans l'homme, l'épithélium vibratile tapisse d'abord les voies aériennes. Existant presque dès l'orifice antérieur des fosses nasales, il recouvre la membrane pituitaire, la muqueuse des sinus frontaux, sphénoïdaux, ethmoïdaux et maxillaires; se prolonge dans le canal nasal, dans le sac lacrymal et à la face interne des paupières; s'étend jusque dans le cul-de-sac supérieur du pharynx, dans le pourtour de la trompe d'Eustache, pour disparaître alors, faire place à de l'épithélium pavimenteux et reparaître à la base de l'épiglotte; puis il se continue sur la paroi antérieure du larynx, et, à partir des cordes vocales supérieures, tapisse toute l'étendue des canaux aériens jusqu'aux dernières ramifications bronchiques.

On le trouve également sur la muqueuse des organes génitaux de la femme, depuis le milieu du col utérin jusqu'à la face externe de la portion frangée des trompes.

Enfin, d'après Purkinje et Valentin, il existerait aussi sur les parois des ventricules du cerveau.

L'épithélium vibratile présente, du reste, quelques variétés, suivant les régions : ainsi, les cylindres dont il se compose sont plus longs dans les trompes de Fallope que partout ailleurs, tandis que les plus petites cellules d'épithélium sont celles des ventricules cérébraux. Les cellules vibratiles des paupières sont munies de cils extrêmement fins, d'où la grande difficulté qu'on éprouve à reconnaître ces derniers, même peu d'heures après la mort.

Les cils qui garnissent l'extrémité libre des cylindres sont le siége de mouvements spontanés et perceptibles seulement à un assez fort grossissement. Purkinje et Valentin ont admis trois espèces de mouvements dans ces petits organes: ils appellent infundibuliforme celui dans lequel la base du cil tourne autour d'un centre et décrit le sommet d'un cône dont la base est circonscrite par l'extrémité libre du cil lui-même ; en second lieu, ils parlent d'un mouvement des cils consistant en flexions onduleuses comparables aux mouvements de la queue des spermatozoaires; enfin, une troisième espèce de mouvement se traduit, pour ces auteurs, en une sorte d'inclinaison que subit la pointe du cil et qui recourbe cette pointe en forme de crochet.

Henle (1) a comparé le mouvement vibratile, dans son ensemble, à l'ondulation d'un champ de blé ballotté par le vent, comparaison qui, en effet, rend assez bien T'aspect général que présente ce mouvement étudié au microscope.

Dans les animaux à sang froid, la grenouille, par exemple, les cils vibratiles con

(1) Anatomie générale, t. I, p. 263. Trad. de Jourdan.

servent leur motilité plus de vingt-quatre heures après la mort de l'animal, pourvu qu'on maintienne celui-ci dans son milieu ordinaire, à une température de 8 à 10 degrés centigrades. Dans les mammifères et les oiseaux, les cils vibratiles cessent de se mouvoir après un temps beaucoup moins long.

On a remarqué que les ébranlements et les attouchements rendent le mouvement vibratile plus vif, et même le raniment quand déjà il avait cessé complétement. D'ailleurs, pour qu'il ait lieu, la température ne doit être ni trop basse, ni trop élevée.

Les substances narcotiques n'exercent sur lui aucune action. L'acide acétique, les acides minéraux, quelques sels métalliques, le chlorure de mercure, le nitrate d'argent, etc., l'anéantissent rapidement; il en est de même de la bile. Le sérum du sang produit un effet opposé, il prolonge la durée du mouvement vibratile.

On a supposé que ce mouvement était sous la dépendance immédiate des nerfs mais une pareille hypothèse ne saurait être admise, car les nerfs ne vont pas jusqu'à l'épithélium vibratile, et, d'ailleurs, comme nous venons de le rappeler, les narcotiques sont ici sans la moindre action.

Quelques micrographes ayant signalé des stries à la surface des cylindres d'épithélium vibratile, on a pensé que ces stries étaient musculaires, et l'on s'est cru autorisé à admettre que le mouvement vibratile lui-même était de la nature du mouvement musculaire. Mais, d'une part, ces stries nè sont point constantes, et, de l'autre, rien encore ne démontre la réalité d'une pareille nature.

Les effets produits par le mouvement vibratile sont faciles à apprécier quand on examine au microscope une membrane muqueuse, pourvue de cils, qu'on a eu le soin d'humecter on constate alors, dans le liquide au sein duquel les cils se meuvent, un mouvement en sens opposé à celui qu'ils prennent en se courbant.

Ce qu'il y a de bien remarquable dans le mouvement dont il s'agit, c'est une certaine constance dans sa direction d'après les recherches de Purkinje et de Valentin, le mouvement imprimé par les cils a généralement lieu de l'intérieur vers l'extérieur des membranes muqueuses. Notons, néanmoins, que la direction du courant a pu offrir parfois des alternatives telles, que tantôt celui-ci marchait dans un sens, tantôt dans un autre. On a avancé que la direction du mouvement ne correspondait pas toujours à celle que l'on pourrait présumer, en ayant simplement égard aux fonctions de l'organe, et l'on a cité les parties génitales de la femme, dans lesquelles, dit-on, il semblerait que le mouvement vibratile devrait être dirigé de dehors en dedans afin de favoriser l'introduction de la liqueur séminale; tandis que, conformément à la loi énoncée plus haut, il a lieu de dedans en dehors, c'est-à-dire de la trompe vers l'utérus. Mais le mouvement vibratile ainsi dirigé, ne peut-il donc encore remplir quelque usage important, celui, par exemple, d'aider à la progression de l'ovule à travers la trompe utérine?

Les cils vibratiles sont évidemment destinés à faire mouvoir les liquides qui baignent les surfaces pourvues de ces petits appendices, et à faciliter ainsi certaines fonctions, la respiration, l'olfaction, la fécondation, etc. Ces espèces de rames microscopiques servent aussi à la locomotion des animaux aquatiques dont le volume est assez peu considérable pour être ainsi mis en mouvement, comme cela s'ob

serve chez les infusoires qui, par la même action, se meuvent, respirent et excitent dans l'eau des tourbillons destinés à amener leur nourriture.

Fig. 2 (*).

Fig. 3.

Fig. 4.

II. MOUVEMENTS DUS AU TISSU CE, LULAIRE CONTRACTILE.

Ces mouvements ont pour agent un tissu spécial que J. Müller (1) a caractérisé, en le désignant sous le nom de tissu animal contractile susceptible de se résoudre en colle. Il n'est qu'une variété du tissu cellulaire proprement dit, non point du tissu cellulaire tel que le comprenaient Bichat, Béclard et d'autres anatomistes, mais tel qu'il est décrit par les micrographes allemands.

Rappelons d'abord, en quelques mots, les caractères physiques propres au tissu cellulaire. Réduit à ses derniers éléments, il se compose de filaments, de fibrilles ou de cylindres longs et très déliés, mous et hyalins, de grosseur à peu près uniforme, et dont le diamètre est de 0,0003 à 0,0008 de ligne. Ces filaments, qui décrivent des ondulations souvent fort régulières, se joignent pour former des faisceaux unis entre eux par une substance que l'on considère comme amorphe. Ils sont regardés par Henle (2) comme des fibres de cellules; de leur réunion résulte ce que cet anatomiste appelle des faisceaux primitifs. La plupart de ces derniers sont dépourvus d'enveloppe spéciale; mais, dans beaucoup de points, ils sont entrelacés et retenus par des filaments plus fins encore que les fibres de cellules, et remarquables surtout par des replis considérables. Ils offrent encore comme caractère essentiel d'être insolubles dans l'acide acétique. Ces mêmes filaments ne sont pas toujours disposés en forme de spirale autour des faisceaux des fibres du tissu cellulaire parfois ils marchent entre les faisceaux ; d'autres fois encore on trouve à leur place des corpuscules ovales, semblables à des cytoblastes, ou bien des granulations obscures serpentiformes ou anguleuses. A tous ces caractères, Henle reconnaît des fibres de noyaux (3). Pour le micrographe allemand, il y a donc dans le tissu cellulaire deux ordres de fibres: des fibres de cellules et des fibres de noyaux.

Quelle que soit, d'ailleurs, la structure du tissu cellulaire, ce tissu se présente dans les différents points de l'organisme où il a son siége, avec des propriétés bien différentes tantôt il n'offre pas la moindre trace de contractilité; tantôt au contraire il subit, sous l'influence de certains agents, un changement temporaire qui le fait se raccourcir. Dans le premier cas, il existe à l'état de tissu cellulaire non contractile; dans le second, à l'état de tissu cellulaire contractile. C'est de cette dernière espèce que nous devons maintenant nous occuper.

Entre les parties de l'organisme où se trouve le tissu cellulaire contractile, nous (*) Fig. 2, Cils vibratil & des Mammifères. Fig. 3, ibid. des Reptiles. Fig. 4, ibid, des Oiseaux.

(1) Manuel de physiologie, t. II, p. 21. Trad. de Jourdan.
(2) Anatomie générale, t. I, p. 377. Trad. de Jourdan.
(3) Ouv. cit., p. 380.

remarquons d'abord la peau : cette membrane présente, en effet, des fibres de tissu cellulaire dont la contraction devient bien manifeste dans le phénomène connu vulgairement sous le nom de chair de poule. Vient ensuite le dartos, membrane subjacente au scrotum et formée par des faisceaux longitudinaux de tissu cellulaire anastomosés entre eux ces faisceaux forment un réseau à mailles rhomboïdales, allongées, dont le plus grand diamètre est perpendiculaire aux plis transversaux du scrotum froncé sur lui-même.

Le tissu cellulaire contractile se trouve encore dans les corps caverneux de la verge et peut-être aussi dans leur gaîne fibreuse.

En quelque endroit de l'économie qu'on le rencontre, il jouit de la propriété de se raccourcir sous l'influence de certains agents. Ce raccourcissement est bien apparent pour le dartos, car c'est lui qui détermine le froncement de la peau des bourses. Il n'est pas moins évident sur la peau des différentes parties du corps où il produit le phénomène désigné plus haut sous le nom de chair de poule. Il se manifeste encore dans la saillie et la dureté momentanée du mamelon, aussi bien chez l'homme que chez la femme.

Le mode de contraction du tissu cellulaire diffère complétement de celui du tissu musculaire. La contraction du premier ne s'opére que peu à peu, plus lentement encore que dans les muscles de la vie organique; elle diffère encore de celle de ces muscles en raison de sa durée, qui est plus grande. La volonté est dépourvue d'influence sur sa production; les irritations immédiates n'ont aucun effet sur son développement.

Pour que cette contraction ait lieu, il est nécessaire que les organes centraux du système nerveux soient dans un état déterminé, et c'est ainsi qu'apparaît le phénomène de la chair de poule dans la crainte ou la frayeur. L'électricité, qui agit si puissamment sur les muscles pour produire leur contraction, est sans effet sur le tissu cellulaire contractile. Une pile de soixante-cinq paires de plaques n'agit pas sur la face interne du scrotum, tandis qu'elle fait instantanément soulever le testicule par la contraction du crémaster (1).

Il en est de même des irritations mécaniques: l'excitation directe du tissu cellulaire contractile, au moyen d'instruments piquants, n'est suivie d'aucun effet appréciable; tandis que le chatouillement, l'application externe du froid, provoquent instantanément la contraction du tissu du dartos.

Il semble pourtant que le système nerveux périphérique n'est pas tout à fait sans influence sur la réaction du tissu cellulaire contractile; du moins est-il permis de le présumer d'après l'expérience suivante de Guenther (2): Si l'on coupe les nerfs dorsaux de la verge, les corps caverneux deviennent flasques, en sorte que, chez le cheval, la verge s'imprègne d'une plus grande quantité de sang et sort du fourreau sans être capable d'entrer en érection.

III. MOUVEMENTS DUS AU TISSU ÉLASTIQUE.

La plupart des tissus de l'économie jouissent d'un certain degré d'élasticité ; mais nulle part cette propriété n'est plus marquée que dans les points où existe un tissu spécial connu, en anatomie générale, sous le nom de tissu élastique.

(1) Manuel de physiologie de J. Müller, t. II. p. 25. Trad. de Jourdan.

(2) Untersuchungen und Erfahrungen im Gebiete der Anatomie, etc. Hanovre, 1837,

« AnteriorContinuar »