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cerveau aux excitations. (Des mouvements de la grenouille consécutifs à l'excitat. électrique. A. d. P., 1881, vil, 828-837; Trav. du Lab. de Physiol., 1, 1893, 94-108; et Muscles et

nerfs de l'écrevisse. A. d. P., 1880, 573, et Trav. du Lab.1, 1893, 44.)

Le caractère général de toutes les excitations cérébrales est qu'elles semblent avoir des effets irréguliers, qui contrastent avec la régularité extrême des réponses que donne le muscle directement excité.

Les premières secousses, - ou plutôt la première secousse, sont en général très fortes, et suivies de secousses beaucoup plus faibles. Autrement dit le phénomène de la contraction initiale est très marqué, sans qu'on puisse expliquer le phénomène autrement que par un rapide épuisement de l'appareil cérébral.

Il faut, d'ailleurs, si l'on ne veut pas avoir les effets d'épilepsie corticale, opérer avec des excitations électriques peu fréquentes, une ou deux par seconde, ou trois tout au plus, et ne pas se servir d'excitations maximales, mais bien d'excitations d'intensité moyenne. Alors on voit les réponses se succéder avec régularité. Pourtant les premièresne sont pas suivies d'un relâchement complet; il y a comme une contracture après chaque excitation, qui, peu à peu, par l'épuisement sans doute, disparaît. Au bout d'un certain temps, il n'y a plus que la réponse motrice simple, sans contracture consécutive.

Si la circulation et la respiration sont intactes, on peut, pendant un temps très long, une demi-heure, une heure même, poursuivre l'excitation sans voir apparaître les symptômes de fatigue et d'épuisement, et la régularité des contractions est complète.

Prenons, au contraire, des excitations un peu plus fréquentes; nous verrons une irrégularité dans les réponses motrices qui paraît défier toute analyse méthodique. Le contraste est saisissant entre la régularité rigoureuse des réponses musculaires à l'excitation directe du muscle, et la variété, en apparence inextricable, des réponses motrices à l'excitation cérébrale.

Période réfractaire et synchronisation des oscillations nerveuses. Nous avons pu nous assurer que cette diversité des secousses musculaires consécutives à l'excitation cérébrale était sous la dépendance d'un phénomène qui jusque-là n'était connu que pour le muscle cardiaque, à savoir l'existence d'une phase réfractaire.

MAREY avait montré, en 1890, que le cœur de la grenouille, à certains moments de la systole, était inexcitable. Or nos expériences prouvent que l'appareil cérébral, un certain temps après l'excitation, cesse aussi d'être excitable: il a donc une phase réfractaire, et même cette phase réfractaire est beaucoup plus prolongée que celle du muscle cardiaque (ANDRÉ BROCA et CH. RICHET. Période réfractaire dans les centres nerveux. C. R., 1897, CXXIV, 573-577.

Nos premières expériences ont été faites sur un chien choréique, et c'est accidentellement, pour ainsi dire, que nous avons découvert ce phénomène de la phase réfractaire. Nous avons vu en effet que sur ce chien, immédiatement après qu'il avait donné sa secousse choréique, le cerveau était devenu inexcitable. Alors que la période qui sépare deux secousses choréiques est d'une seconde, pendant une demi-seconde environ, le tissu cérébral est réfractaire à l'excitation; puis survient une période de réparation qui dure un quart de seconde environ, pendant laquelle le cerveau est de plus en plus excitable, et enfin une période d'addition, pendant laquelle la secousse choréique vient s'ajouter à la secousse due à l'excitation électrique. Ce fait, constaté d'abord sur un chien choréique, a été nettement ensuite vérifié sur deux autres chiens atteints de la même affection.

Mais ce n'est pas seulement sur les chiens atteints de chorée qu'on observe cette phase réfractaire : nous l'avons constatée aussi sur des chiens normaux, et avec une netteté parfaite. Pour la mettre en lumière, il nous a suffi de prendre des animaux quelque peu refroidis (aux environs de 34° à 30°) et légèrement chloralosés. Le chloralose, tout en maintenant l'animal à peu près immobile, n'altère que faiblement l'excitabilité cérébrale, et l'abaissement de la température organique allonge la période réfractaire. C'est ainsi d'ailleurs que E. GLEY avait pu constater l'existence, dans le muscle cardiaque, d'une période réfractaire chez les chiens refroidis, alors qu'on ne peut pas la voir chez les chiens à température normale, probablement parce qu'elle est dans ce cas de trop courte durée (Inexcitabilité périodique du cœur des mammifères. A. d.. P., 1889, 499; et 1890, 436).

Soit, pour exciter le cerveau, une excitation a, et une autre excitation b, identique à la première; si l'espace qui sépare a et b est d'un centième de seconde environ, c'est l'addition qu'on observe; mais si, au contraire, l'intervalle qui sépare a et b est d'un dixième de seconde environ, b tombera dans la phase réfractaire et sera inefficace. Si l'intervalle entre a et b est de plus d'un dixième de seconde, l'excitation b sera suivie d'une secousse; mais cette secousse sera faible, si b est proche de a : elle sera d'autant plus forte que l'on s'éloigne davantage de la première excitation a.

Il s'ensuit que, chez des chiens refroidis, avec des excitations cérébrales ayant un rythme plus fréquent que une ou deux excitations par seconde, on devra observer une

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FIG. 1. Excitations électriques égales et rythmées. Chien à 32°. On voit qu'après une première période de discordance le rythme 1/2 finit par s'établir. Au début la seconde secousse est assez forte, mais elle devient de 2 en 2, de plus en plus faible, et finalement nulle, tandis que les secousses 1, 3, 5, 7, 9, 11 vont en grandissant de plus en plus. C'est l'établissement de la synchronisation. Figure réduite aux deux tiers.

inégalité dans les réponses. Qu'on excite un muscle par des excitations de 3 par seconde, je suppose, le muscle va répondre par des secousses très régulières; mais qu'on excite le cerveau par des excitations rythmées à 3 par seconde, on aura des secousses alternativement grandes et petites; car la seconde excitation tombera précisément sur la période réfractaire. Même, dans certains cas tout à fait particuliers, nous avons pu arriver à un rythme régulier, qui était dans une certaine mesure indépendant du rythme excitateur; soit de 1 sur 2, et plus rarement de 1 sur 3. Certains graphiques nous ont donné pendant un temps très long, durant plusieurs minutes, un rythme absolument régulier de 1 sur 2. C'est là assurément une démonstration irréprochable de l'existence d'une phase réfractaire.

L'excitabilité cérébrale, par suite de ce phénomène, est donc différente de l'excitabilité musculaire; elle a une période, et il est impossible, quand on emploie des excitations

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FIG. 2.- - Excitations électriques égales et rythmées. Chien à 32°. On voit aussi, comme dans la figure pré cédente, la synchronisation s'établir: les petites secousses interposées entre les grandes secousses deviennent de plus en plus petites. Figure réduite aux deux tiers.

fréquentes, d'avoir le tracé régulier que donnent les secousses musculaires du muscle directement excité. Les secousses de l'excitation cérébrale sont tantôt fortes, tantôt

faibles, parce qu'il y a des excitations qui tombent dans la période réfractaire. Ce sont celles-là qui alors produisent une secousse. faible.

En outre, à un certain rythme de l'excitation, le cerveau tend à répondre par un rythme, soit identique, soit différent, mais différent toujours dans un rapport simplede 1 à 2, ou de 1 à 3, ou de 1 à 4. Tout se passe comme s'il faisait effort pour se rythmer et s'accorder avec le rythme des excitations. Au début il y a discordance; puis peu à peu la régularisation se fait; les grandes secousses deviennent de plus en plus grandes; les petites s'affaiblissent pour devenir de plus en plus faibles, et le rythme nouveau s'établit. Mais à ce rythme relativement simple viennent s'ajouter des rythmes plus longs, dont la détermination exacte est presque impossible à établir. Déjà Mosso avait montré qu'il

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y avait dans le tissu cérébral des périodes de conflagration interstitielle, caractérisées par de subites et partielles élévations de température (Temperatura del cervello, 1895). TANZI a aussi découvert des phénomènes analogues en appréciant les variations thermiques du cerveau par des mensurations thermo-électriques; périodes qu'il appelait périodes d'oscillation. De même, nous avons vu que le retour à l'excitabilité normale, après toute cause qui a diminué l'excitabilité cérébrale, se fait par poussées successives, et non régulièrement. Décroissance ou retour de l'excitabilité, ce n'est jamais régulièrement que le phénomène se produit, c'est toujours par des alternatives d'excitabilité plus grande ou d'excitabilité plus faible. Avec des excitations de très faible intensité, on observe pendant une ou deux minutes d'assez notables secousses, puis peu à peu le silence se fait; mais, si l'on continue l'excitation, de nouveau les secousses reparaissent, de plus en plus fortes, pour passer par un maximum et ensuite disparaître graduellement.

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Il est probable qu'il s'agit là de phénomènes de catabolisme et d'anabolisme (destruction et réparation), qui sont lents. L'excitation amène le catabolisme. de certains éléments nécessaires, puis l'anabolisme ramène le tissu cérébral à son point de départ. Il se passe sans doute dans le cerveau des phénomènes d'anabolisme, grâce auxquels la reconstitution de la matière organique nécessaire à la libération de l'énergie peut s'opérer; et alors l'excitabilité première reparaît complètement.

Fic. 4.-Schéma pour montrer la période de la vibration nerveuse. L'amortissement paraît être analogue à celui qu'on obtient avec les signaux bridés de Thomson. La période d'addition est le temps pendant lequel la vibration est au-dessus de la ligne d'équilibre. La période réfractaire, dure tant que la vibration est au-dessous de cette ligne d'équilibre.

Mais, quelque nettes que soient ces périodes dans l'excitabilité cérébrale, nous ne croyons pas qu'elles soient suffisantes à expliquer le phénomène de la phase réfractaire. Le fait d'un rythme régulier de 1/2, de 1/3, nécessite une autre hypothèse.

Supposons, en effet, que le retour à l'équilibre, après une excitation, se fasse par uue sorte de vibration plus ou moins analogue à celle d'un pendule écarté de så position primitive le retour ne pourra s'opérer que par une sorte d'onde d'amortissement, de sorte que, dans la période négative, toute excitation aura forcément un effet nul ou faible. Tel est au moins le sens que nous croyons pouvoir donner à la période réfractaire des centres nerveux.

En effet, quelle que soit la cause qui détermine la rupture d'équilibre d'un corps qui doit revenir à son état primitif, pour qu'il y ait retour à l'équilibre, le mouvement de retour ne peut se faire que par une sorte de vibration pendulaire. Or la mécanique générale

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FIG. 5. Synchronisation des oscillations nerveuses. Les excitations (sur un chien chloralosé) sont les ébranlements de la table. On voit sur les lignes intérieures la réponse à 1/2; pour les lignes moyennes à 1/2 aussi, mais avec un rythme un peu plus resserré; pour les lignes supérieures, les réponses sont à 1/4; le rythme des excitations s'étant accéléré. En commençant vers le bas, les lignes 1, 3, 5, indiquent les mouvements musculaires; les lignes 2, 4, 6 sont l'enregistrement graphique des ébranlements de la table, fortement ébranlée par un marteau.

enseigne que le retour à l'état initial doit prendre certaines formes bien déterminées, dont la plus favorable (au point de vue de la rapidité du retour) est la forme dont nous donnons ici le schéma graphique. Cette forme ressemble tout à fait au système d'amortissement, imaginé par THOMSON pour le retour à l'équilibre du galvanomètre dans la transmission électrique à travers les câbles télégraphiques sousmarins (fig. 4).

Ces données mécaniques sont indépendantes de la nature de la force ou de la durée de l'oscillation pendulaire. Nous pourrions donc, a priori, supposer que le retour du système nerveux à l'équilibre, après une oscillation, prendrait une forme analogue; car il n'en est pas de plus avantageuse pour un retour rapide à l'état initial.

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Évidemment ces considérations a priori, si elles nous font pressentir la forme même de cette oscillation élémentaire, pendulaire, ne peuvent. nous donner aucune indication sur sa rapidité même, durant peut-être un millionième de seconde, ou une seconde; mais ce que l'expérience nous apprend, c'est que cette période vibratoire dure, chez le chien, à la température normale, environ un dixième de seconde.

La courbe de la figure 4 nous donne la représentation schématique du phénomène, et nous trouvons dans les éléments de cette courbe l'explication très satisfaisante des phénomènes de l'addition, et de la phase réfractaire. Soit le système nerveux écarté de son équilibre par une excitation; pendant la période d'ascension, d'un centième de seconde environ, il est en phase d'addition, pendant la période de descente d'un dixième de seconde, il est en phase réfractaire; et enfin il revient à son équilibre normal.

Nous proposons d'autant plus volontiers cette hypothèse qu'elle n'est aucunement en contradiction avec l'hypothèse d'une passagère perte d'activité par épuisement. Au contraire, il est assez rationnel d'admettre que, pendant cette phase négative, il y a reconstitution chimique des matériaux nécessaires à la dépense d'énergie que la seconde excitation va provoquer.

Finalement ce phénomène peut être considéré à trois points de vue différents, parfaitement concordants entre eux; au point de vue physiologique, phase d'addition, phase réfractaire, phase de retour; au point de vue chimique, épuisement des réserves d'énergie, puis reconstitution de ces réserves; au point de vue physique, écart de la position d'équilibre, et retour à l'état normal suivant les lois de l'oscillation pendulaire la plus rapide.

Ce ne sont pas seulement les excitations électriques, mais encore les excitations mécaniques et les excitations acoustiques qui peuvent produire l'ondulation nerveuse avec sa période réfractaire. Avec ANDRÉ BROCA, nous avons pu, chez des chiens chloralosés, reproduire, par des succussions de la table sur laquelle repose l'animal, tous les faits caractéristiques indiqués plus haut comme dépendant de l'excitation électrique cérébrale (Période réfractaire et synchronisation des oscillations nerveuses, C. R., 1897, cxxiv, 697-700; et B. B., 1897).

Nous donnons ici des figures qui établissent nettement ce phénomène. Elles fournissent un bon exemple de la synchronisation des oscillations excitatrices avec ses oscillations de réponse, musculaires, réflexes (cérébro- ou médullo-réflexes). Ce phénomène prouve, semble-t-il, en toute évidence, qu'il s'agit bien d'un phénomène physique analogue à une oscillation vibratoire, puisqu'il se fait manifestement une synchronisation entre l'excitant et la réponse.

Ainsi le phénomène de la synchronisation des vibrations cérébrales avec les vibrations électriques excitatrices fait rentrer le système nerveux dans les lois de la dynamique générale. M. CORNU, dans ses belles études sur la synchronisation des oscillants, avait d'ailleurs prévu l'application à la physiologie des données de la mécanique mathématique.

De l'unité psychologique du temps.

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Le fait d'une période réfractaire, succédant à chaque excitation, peut donc nous indiquer la durée d'une vibration cérébrale. Mais, pour connaître cette durée, nous avons d'autres phénomènes, qui concordent d'une manière éclatante avec les expériences précédentes.

Nous avons dit que la période réfractaire était d'environ un dixième de seconde. Or il est assez remarquable de voir ce chiffre de dix par seconde coïncider très bien avec certains phénomènes moteurs et sensitifs.

D'abord, pour les incitations volontaires, rappelons le fait bien connu du son musculaire correspondant par sa tonalité au nombre des excitations électriques qui font contracter le muscle, soit par l'excitation du nerf, soit par l'excitation du muscle luimême (HELMHOLTZ).

Mais si, au lieu d'agir directement sur le nerf ou sur le muscle, on agit par l'intermé diaire du cerveau, on aura des résultats tout différents.

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SCHÄFER (On the rhythm of muscular responses to volitional impulses in man. J. P., vil, 114.) et, indépendamment de lui, KRIES (Zur Kenntniss der willkürlichen Muskelthätigkeit, A. P., 1886,) et plus tard HORSLEY et SCHÄFER (Experiments on the character of the muscular contractions which are evoked by the excitation of the various parts of the motor tract. J. P., vii) ont pu constater que l'excitation volontaire, ou l'excitation électrique de l'encéphale donnaient un rythme de contraction qui ne dépassait pas 14 par seconde; et qui le plus souvent arrivait à 10 par seconde. C'est aussi à ce chiffre de 8 par seconde qu'est arrivé LOVEN, mesurant avec l'électromètre capillaire de LIPPMANN les variations négatives électro-motrices d'un muscle qui est contracté par la volonté.

D'autre part, j'ai montré (CH. RICHET, Le frisson comme appareil de régulation thermique, Trav. du Lab., 1895, II, 17) que le nombre des secousses du frisson par seconde ne dépassait pas 12 ou 13, étant en général de 10 et de 11. HERRINGHAM (On muscular tremor. J. P., 1896, x1, 481) a trouvé un rythme de 9, 10, 11, 12, pour les différents tremblements de cause pathologique. W. GRIFFITHS (On the rhythm of muscular response to volitional impulses in man. J. P., x1, 1888, 38) a trouvé un chiffre notablement plus fort; et, quoiqu'il admette le chiffre moyen de 10 pour les muscles du pouce, de 14 pour le biceps; il a pu trouver des excitations volontaires ayant une fréquence de 21 par seconde dans quelques cas, ce qui nous paraît dû à une vibration pendulaire du muscle, plutôt qu'à une secousse volontaire. B. HAYCRAFT (Voluntary and reflex muscular contraction. J. P., x1, 1890, 366) arrive à cette conclusion que, dans le cas d'excitation de la

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