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Il existe cependant des faits contradictoires, démontrant que chez les grenouilles dont le bulbe est coupé, l'action du cœur se maintient plus longtemps que chez celles dont la moelle est intacte (LABBÉ), ce qui accorde assurément une certaine importance aux influences du chloral sur les centres modérateurs bulbaires. De son côté, D. CERNA (1891) explique la diminution de fréquence du pouls par une double action sur le cœur lui-même, d'abord, dont le chloral diminue fortement l'excitabilité, puis en stimulant les centres nerveux inhibitoires du cœur.

B. Modifications du cours du sang dans les vaisseaux. Les expérimentateurs et les observateurs sont unanimes pour reconnaître que, sous l'influence du chloral, la pression sanguine diminue très notablement, au point même d'arriver parfois jusqu'à un degré voisin du zéro.

Les opinions contraires (BOUCHUT, ANSTIE et BURDON-SANDERSON, DAVREUX) sont rares et constituent des exceptions, qui ne sauraient avoir de signification qu'en faveur de l'influence variable des doses.

Sous l'influence des doses faibles ou au début de l'action des doses modérées ou fortes, la pression peut être peu modifiée ou légèrement augmentée; mais, dans la chloralisation confirmée, l'hypotension vasculaire est la règle.

C'est l'opinion exprimée dans les travaux de CL. BERNARD, VULPIAN, NAMIAS, Cantani, OFFRET, F.-FRANCK, TROQUART, ARLOING, etc.

ARLOING, notamment, a étudié ce phénomène de très près, et force nous est de recourir encore aux résultats qu'il a obtenus, pour apporter ici des faits décisifs et bien acquis.

En recueillant la pression latéralement sur le trajet d'un gros vaisseau, la carolide par exemple, on observe, peu de temps après l'injection du chloral, une augmentation de pression, qui dépasse rarement trois à quatre minutes et est suivie d'un abaissement, qui se prolonge jusqu'au réveil.

Les pulsations artérielles sont aussi modifiées; au début, pendant l'élévation de la tension, leur force est accrue, tandis qu'après elle est constamment diminuée. Leur force varie également et, chez les solipèdes, en particulier, pendant la chloralisation avancée, le pouls devient polycrote, ce qui coïncide avec la phase pendant laquelle la pression est très basse.

ARLOING croit que les changements de caractères du pouls sont constants, et déclare que si LANGLET, DEMARQUAY et NAMIAS ne les ont pas vus, c'est qu'ils n'ont pas employé des moyens assez délicats pour les observer, ou bien qu'ils ne les ont pas étudiés dans une chloralisation très avancée.

Très intéressantes aussi sont les modifications de la vitesse du courant sanguin, telles qu'on peut les étudier à l'aide de l'hémodromographe de CHAUVEAU; elles apportent des éclaircissements précieux à la compréhension de l'ensemble des phénomènes circulatoires qui accompagnent la chloralisation. ARLOING les a enregistrées chez le cheval et chez l'âne, et voici ce qu'il a constaté.

Quelques secondes après l'introduction lente du chloral dans une veine, la vitesse systolique et la vitesse diastolique du sang diminuent, et ceci coïncide avec le ralentissement du cœur, l'élévation de la pression artérielle et l'augmentation de la force du pouls. Il est donc certain qu'à cette phase l'écoulement du sang à la périphérie diminue, de telle sorte qu'on peut affirmer que l'élévation de la pression artérielle, au début de la chloralisation lente, provient de deux causes : 1° l'augmentation de l'énergie systolique du cœur et 2o la diminution du débit des artérioles.

Cependant, en continuant l'étude des tracés recueillis pendant l'injection de nouvelles doses de chloral, ou pendant que la première dose produit ses effets, ARLOING a noté une légère augmentation de la vitesse diastolique (2′ et 2", fig. 109); quant à la vitesse systolique, elle revient peu à peu vers son point de départ, puis le dépasse d'une manière très notable.

Dès que commence la chute de la pression artérielle, la vitesse augmente, et ceci persiste pendant toute la durée du sommeil.

Ces renseiguements, combinés à l'observation de la forme des pulsations hémodromographiques, amènent à conclure que, pendant la chloralisation confirmée, le sang s'engage et circule dans les vaisseaux avec la plus grande facilité. Mais ces données, quoique très

complètes et parlant déjà en faveur d'un relâchement des vaisseaux et de leur dilatation considérable, ne sont pas suffisantes pour répondre à toutes les objections que l'on pourrait faire à cette conclusion vraie. C'est celle à laquelle se sont rattachés cependant la presque universalité des expérimentateurs et des cliniciens; nous la confirmerons

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FIG. 109.

Modification de la vitesse du cours du sang et de la pression dans l'artere carotide

pendant la chloralisation (âne).

1, 1, 1", lignes d'abscisse et secondes; 2, 2', 2", tracés de vitesse du courant sanguin (la sensibilité de l'hémodromographe était faible); 3, 3', 3", tracés de la pression moyenne (sphygmoscope peu sensible) 0, 0, 0, le cours du sang est arrêté dans la carotide, vitesse, 0.

2, 3, vitesse et pression à l'état normal; 2', 3', vitesse et pression après l'injection d'une certaine quantité de chloral (la pression diminue; les minima de vitesse s'élèvent au-dessus de 0); 2", 3", chloralisation plus avancée; la vitesse constante est encore plus grande, la pression plus faible.

beaucoup mieux en exposant les modifications du cours du sang dans les veines et dans les vaisseaux capillaires.

Si, comme l'a fait ARLOING, on place simultanément un sphygmoscope sur le bout central de l'artère faciale et un autre sur le bout périphérique de la veine de même nom, on peut inscrire les variations de pression qui se produisent dans chaque appareil, après la chloralisation; on constate alors que, tandis que la pression s'abaisse brusquement

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dans l'artère, elle s'élève, au contraire, notablement dans la veine. Il est même possible, avec un sphygmoscope très sensible, de voir, sur le tracé de la veine, une propagation des pulsations artérielles.

C'est ce que montre très distinctement le tracé de la figure 110. Ces constatations ont une importance capitale, car elles permettent d'affirmer que, pendant le sommeil chloralique profond, les voies d'écoulement périphériques sont dilatées, et renseignent ainsi sur les modifications du cours du sang dans les vaisseaux capillaires.

Par conséquent, pendant qu'au début de la chloralisation la pression artérielle monte et la vitesse de la circulation diminue, les vaisseaux capillaires se contractent, tandis qu'ils sont largement dilatés pendant la phase d'hypotension artérielle avec augmentation de la vitesse du courant sanguin et de la pression veineuse.

Cette action vaso-dilatatrice intense du chloral, qui domine et persiste pendant toute la durée du sommeil qu'il détermine, a pour conséquence des modifications apparentes bien connues; notamment, la congestion de la peau, des muqueuses et des parenchymes; la rougeur de la face, les exanthèmes cutanés, etc. Lorsqu'on fait une opération sur un sujet anesthésié par le chloral, on constate que les plaies faites saignent beaucoup; les hémorragies en nappe sont profuses, l'hémostase est difficile, ce qui constitue certaine

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FIG. 110.

Modifications simultanées de la pression dans les vaisseaux périphériques (artères et veines faciales) sous l'influence d'une injection de chloral (âne).

1, ligne d'abscisse et secondes; 2, tracé de la pression dans le bout central de l'artère faciale: 3, tracé de la pression dans le bout périphérique de la veine faciale; de i à i', durée de l'injection de chloral. ment un inconvénient assez sérieux, dans la pratique de certaines expériences de physiologie, et doit faire parfois renoncer au chloral.

A un autre point de vue, les modifications vasculaires et circulatoires de la chloralisation ont intéressé les physiologistes et les thérapeutes, et c'est à la recherche des causes immédiates du sommeil qu'ils se sont plus particulièrement attachés, à savoir quel est l'état de la circulation cérébrale pendant la narcose ou l'anesthésie. Or les uns ont prétendu que le chloral provoque le sommeil en anémiant le cerveau (HAMMOND), tandis que d'autres soutiennent, avec plus de raison certainement, que l'hypnose et l'anesthésie chloralique s'accompagnent d'hypérhémie cérébrale (GUBLER, BOUCHUT, LANGLET, LABBÉ, OFFRET, ARLOING, etc.).

Nous avons déjà dit plus haut qu'il n'y a pas lieu de rechercher, dans les modifications cérébrales produites par le chloral, la cause du sommeil qu'il détermine; les deux ordres de phénomènes sont concomitants, mais indépendants; l'un n'est pas la conséquence de l'autre.

Le chloral est un congestif, nous l'avons démontré, son action s'accompagne d'une vaso-dilatation générale avec hypérhémie des téguments et des organes parenchymateux; il est évident que la circulation cérébrale et le cerveau participent à ce mouvement d'ensemble et se congestionnent comme les autres parties et les autres organes. La question nous paraît donc tranchée.

Cependant, s'il y a lieu d'admettre l'hypervascularisation des organes, par vaso-dilatation, il faut bien se garder de croire à la possibilité de stases sanguines dans les vaisseaux capillaires, au moins dans tous les cas où le médicament est administré à dose thérapeutique.

La stase sanguine ne peut être admise et n'est possible que dans la dernière période de l'empoisonnement chloralique; on en trouve la preuve dans les tracés d'ARLOING,

En effet, l'augmentation de la vitesse du sang et l'élévation de la tension dans les veines sont deux phénomènes qui démontrent que, loin de s'accumuler, le sang traverse le réseau capillaire avec une grande facilité, il éprouve même si peu de difficulté à traverser certains systèmes, qu'on peut inscrire la pulsation artérielle dans le bout périphérique des veines.

Résumé. Au début de la chloralisation, la tension artérielle augmente, la vitesse du sang diminue, le pouls a plus de force, les artérioles sont contractées. Pendant l'hypnose ou l'anesthésie chloralique, au contraire, la pression artérielle baisse, tandis que la pression veineuse s'élève; la vitesse du courant sanguin est généralement accrue, le pouls devient filant, polycrote; les petits vaisseaux périphériques sont relâchés, et tous les organes sont congestionnés. Chez certains animaux chloralisés, cette congestion aurait été assez intense pour déterminer parfois l'augmentation de la tension oculaire et des hémorragies rétiniennes (ULRICH).

Cette dernière série de modifications, de beaucoup la plus importante, résulte probablement d'une paralysie des centres vaso-moteurs et des nerfs vasculaires périphériques; en effet, des excitations périphériques simples ou douloureuses sont de moins en moins perçues et arrivent même à ne plus déterminer le moindre mouvement ascensionnel de la courbe de pression (CYON, ROKITANSKY).

Nous disons le moindre mouvement ascensionnel, car, chez des animaux profondément chloralisés, nous avons vu certaines excitations du péritoine, légèrement irrité par le contact de l'air, déterminer des réflexes vaso-dilatateurs d'une grande intensité (L. GUINARD et TIXIER).

Enfin, à l'action déprimante du chloral sur le système nerveux vaso-moteur, on a ajouté, avec moins de raison suivant nous, la paralysie de la tunique musculaire des artérioles (D. CERNA).

Action du chloral sur la respiration et les échanges respiratoires. Pendant le sommeil chloralique, la mécanique respiratoire est notablement modifiée, chez tous les animaux. Les mouvements sont ralentis, parfois assez superficiels, avec pause en expiration, surtout lorsque le médicament a été donné à dose un peu forte, pour obtenir l'anesthésie profonde; dans ces cas, il y a lieu de s'attendre aussi à quelques irrégularités dans le rythme.

Ce n'est qu'au début de l'action ou à la suite de l'administration de doses faibles, que les mouvements respiratoires s'accélèrent un peu; mais ce n'est pas là l'effet dominant: le ralentissement succède à cette accélération et persiste.

Nous avons déjà vu plus haut qu'après l'injection des doses toxiques l'arrêt de la respiration précède l'arrêt du cœur, particularité vérifiée graphiquement par ARLOING, qui a confirmé ainsi les constatations de LIEBREICH et RICHARDSON.

Quant à l'origine des modifications et troubles mécaniques précédents, il n'y a pas lieu de la rechercher ailleurs que dans le pouvoir déprimant et parésiant du chloral sur les centres nerveux bulbo-médullaires; l'activité de ces centres est fortement atténuée et leur résistance considérablement amoindrie. C'est ce que démontrent les résultats suivants : Les nerfs pneumogastriques ayant été coupés, sur un animal médicamenté, on porte, sur les bouts centraux, une excitation; celle-ci produit alors un arrêt des mouvements respiratoires, qui, dans ce cas, ne se rétablissent plus, comme il est habituel de le voir chez les sujets non chloralisés (VULPIAN).

A ces influences nerveuses, le chloral joindrait-il une paralysie partielle des muscles inspirateurs? (RICHARDSON, KRISHABER, DIEULAFOY.) C'est beaucoup moins probable et, dans tous les cas, assez secondaire.

Mais l'action du chloral est encore plus intéressante à étudier sur les échanges respiratoires, au point de vue même de la question qui nous occupera ensuite, à propos de la calorification, car il s'agit là de la recherche des influences du médicament sur les combustions intérieures.

Dans la thèse d'ARLOING, ce point particulier a été directement abordé, et non seulement nous trouvons des chiffres qui nous renseignent sur l'état des gaz pulmonaires, pendant la chloralisation, mais, parallèlement, sur l'état des gaz du sang.

Et d'abord, dans les expériences qu'il rapporte, ARLOING constate nettement qu'après l'usage du chloral la proportion d'acide carbonique diminue et la proportion d'oxygène augmente dans les gaz de l'expiration; de telle sorte que l'animal, qui est sous l'influence de ce médicament, emprunte moins d'oxygène à l'atmosphère et exhale moins d'acide carbonique qu'à l'état normal, quel que soit le nombre des mouvements respiratoires.

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Le chiffre absolu d'acide carbonique exhalé diminue cela est certain; mais il y a CO2 aussi une modification notable du rapport qui, pendant la chloralisation, s'élève d'une façon appréciable; de telle sorte que, par rapport à l'oxygène absorbé, l'acide carbonique exhalé augmente pendant le sommeil chloralique; on peut donc conclure que la diminution de ce gaz est proportionnellement moins grande que la diminution de l'oxygène absorbé. L'influence du chloral sur les actions chimiques respiratoires, chez le chien, a été étudiée encore par CH. RICHET, à un point de vue un peu différent, mais non moins intéressant.

Une conclusion essentielle ressort d'abord de ses recherches, c'est que, chez les chiens empoisonnés par le chloral, l'influence du système nerveux régulateur des échanges gazeux étant abolie, ils produisent des quantités d'acide carbonique exactement proportionnelles à leur poids. Chez le chien chloralisé, la taille ne modifie plus, comme chez le chien normal, la production d'acide carbonique par kilogramme. Les gros chiens et les petits chiens produisent, les uns et les autres, à peu près autant.

Sous l'influence du médicament, le système nerveux central est tellement affaibli qu'il ne peut plus lutter contre le froid extérieur. « En fait d'échanges chimiques, il ne reste, dit CH. RICHET, que ceux qui sont indispensables à la vie normale des tissus, et cette activité chimique devient proportionnelle, non plus à la surface, mais au poids même de l'animal, qui produit par kilogramme un minimum d'acide carbonique; à peu près 05,660 par kilogramme et par heure. Un gros chien chloralisé ne diminue ses échanges que de 30 p. 100, tandis qu'un petit chien chloralisé diminue ses échanges de 70 p. 100. »

En somme, pendant le sommeil chloralique, l'analyse des gaz de l'expiration accuse une diminution de leur chiffre absolu; il était intéressant de rattacher ces modifications à celles des gaz du sang.

C'est ce qui a été fait par ARLOING. Cet expérimentateur a constaté d'abord que, pendant la chloralisation, la quantité d'acide carbonique diminue, tandis que la quantité d'oxygène augmente dans le sang artériel; si parfois on constate une diminution CO2 dans le chiffre absolu de l'acide carbonique et de l'oxygène, l'examen du rapport -dans 0

les gaz du sang montre qu'il y a toujours, proportionnellement à l'acide carbonique, une accumulation d'oxygène dans le sang artériel.

Cependant, il peut arriver parfois qu'on trouve, dans le sang artériel des animaux chloralisés, une augmentation réelle du chiffre de l'acide carbonique et du chiffre de l'oxygène.

C'est une particularité fort intéressante que nous nous gardons de négliger, car elle parait différencier, à cet égard, l'état de simple hypnotisme et l'état d'anesthésie. Le fait est vérifié dans une expérience où, se servant de doses progressivement CO2 croissantes, ARLOING a vu, chez un chien, le rapport varier avec l'état de l'animal. 0

Si on l'examine aux différentes phases de la chloralisation, on observe que, pendant l'hypnose, ce rapport grandit: de 2,30, à l'état normal, il devient 2,49; tandis qu'il diminue à partir du moment où s'établit le sommeil anesthésique; de 2,30, à l'état normal, il devient successivement 2,16 et 2,03.

Par conséquent, on arrive à conclure que les doses faibles, simplement hypnotiques, de chloral, produisent une augmentation relative de l'acide carbonique dans le sang artériel, tandis que les doses fortes, anesthésiques, produisent au contraire une diminution de l'acide carbonique et une augmentation de l'oxygène.

Si alors, se limitant aux résultats des doses fortes, on compare les chiffres de l'oxygène, dans les produits de l'expiration et dans les gaz du sang artériel, on est frappé

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