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rendu un solennel hommage, en appelant autour de lui les représentants de la nation.

Le roi appelle de même, avec la certitude d'en être entendu, les hommes qui, à toutes les époques, ont versé leur sang pour la patrie, et ceux qui ont entouré la monarchie des sauve-gardes de la liberté, et les Français exilés auxquels il a rendu la terre qui les vit naître, et les nouveaux propriétaires dont il a sanctionné les acquisitions, et tous ceux qui pensent, et tous ceux qui sentent, et tous ceux qui chérissent les principes constitutifs de la dignité de

notre nature.

Il est question de défendre une constitution dont les avantages sont déjà connus, qui contient tous les moyens d'amélioration, et qui deviendra chaque jour plus chere au roi dont elle fait la sûreté, au peuple dont elle est la garantie; il est question de la défendre contre un régime d'usurpation 'qui a pesé sur toutes les classes, sur tous les individus, qui souleverait contre nous toute l'Europe, qui réunirait au-dehors et au-dedans tous les genres de honte et tous les genres de calamités.

Peut-être cet appel est-il superflu. Déjà peut-être le péril est conjuré. Mais s'il ne l'était pas, tous les Français courraient aux armes, défendraient leur roi, leur constitution et leur patrie; et ceux-là ne seront pas les derniers, qui, dans leur franchise et dans leur conscience, ont pu censurer quelques mesures ou quelques actes de l'autorité. Il se précipiteront au premier rang, car ils saven, que, plus la liberté leur est chere, plus il faut repousser Buonaparte, son éternel ennemi; et ils sont bien sûrs que le gouvernement qui même, dans un moment de crise, a donné une double preuve de sagesse et de force en respectant toutes les libertés, les chérirait encore plus après la victoire, s'enorgueillirait de régir un peuple libre, considérerait les droits de ce peuple comme la plus pieuse de ses propres garanties, et l'assentiment national comme la base et le salut du pouvoir,

BENJAMIN CONSTANT.

DES ARMES ET DU COURAGE.

Journal de Paris du 13, M. Salgues.

La fortune a couronné les premieres tentatives de l'ennemi public; il marche, et des perfides se joignent à ses drapeaux sacriléges; ses complices osent élever la voix jusques dans nos murs et se repaissent en imagination du spectacle de nos désastres. Mais croient-ils que notre courage soit éteint? que cent mille hommes de la capitale, que cinq cent mille hommes de nos provinces ont oublié l'honneur et le devoir, qu'ils soient disposés à trembler ?

Avons-nous tremblé quand soixante mille Prussiens inondaient les plaines de la Champagne? Avons-nous tremblé quand Condé, Valenciennes, Landrecies, le Quesnoy étaient entre les mains de l'ennemi, et que leurs coureurs s'avançaient presque aux portes de la capitale? Avonsnous tremblé quand l'Angleterre versa cinquante mille soldats à Flessingue?

Que fit alors notre belliqueuse patrie? elle se leva toute entiere. Des commissaires se rendirent sur tous les points de la France, et, en quelques jours, cinq cent mille hommes furent sous les armes.

Imitons ces exemples: que partout le cri de la guerre retentisse; qu'à la voix des envoyés du monarque chéri, la terre enfante des hommes. Qu'ils sortent tous armés du sein des villes et des campagnes.

Jamais plus belle cause ue mérita d'enflammer notre ardeur: car il s'agit de conserver notre Roi, nos lois, notre liberté, notre fortune, notre vie; il s'agit d'épargner les flots de sang que notre tyran, dans la fureur qui le consume, s'apprête à faire couler.

En quelques jours, cent mille hommes peuvent être sous les murs de Paris, et se porter en avant pour exterminer le Robespierre nouveau et les sacriléges avanturiers qui partagent sa révolte. La populeuse Normandie, l'Orléanais, la Champagne et la Bourgogne, qui ont tant de désastres à venger, nous enverront leurs belliqueux enfants.

Combien de villes animées d'un véritable esprit patriotique sont à dix, à vingt, à trente lieues de nous, et peuvent en deux jours venir avec nous protéger le genre humain!

Ne nous abusons point sur les dangers de la patrie. Nous avons affaire à un ennemi actif, entreprenant, aussi

habile artisan de fraudes et de mensonges qu'audacieux dans ses résolutions.

Ce n'est pas le moment de nous assoupir dans une mortelle et stupide inquiétude, de perdre un temps précieux dans de froides et lentes combinaisons, de mesures tardives et impuissantes. Il faut dans les grands périls des remedes proportionnés aux dangers. Hommes contre hommes, baïonnettes contre baïonnettes, canons contre canons, voilà ce qui doit sauver la patrie. Tout est prêt pour un mouvement spontané, national, universel. Toutes nos volontés, tous nos sentiments, tout ce que nous avons de courage, d'indignation, d'énergie est réuni vers le même but, tout près d'éclater; semblable à ces matieres inflammables qui n'attendent qu'une étincelle pour détonner.

Imprimons la terreur aux méchants; que la loi saisisse et frappe les traîtres qui ont appelé sur leur patrie ce fléau de la guerre civile. Ils sont parmi nous, au milieu de nous, ils conspirent presque sous nos yeux, et nous souffrirons plus long-temps leurs coupables attentats; et les ministres de la justice ne s'armeraient pas de leur glaive pour les punir!

Lorsque Catilina s'arma contre sa patrie, lorsque les brigands de Rome se précipiterent dans son camp, lorsque ses légions menaçaient les murs du capitole, Rome ne trembla pas. Ses magistrats parlerent, ses soldats agirent, et par l'énergie de son caractere, et la promptitude de ses mesures, un seul homme sauva la patrie.

Nous sauverons la nôtre aussi, nous n'attendrons pas que le tyran vienne insulter nos murailles, nous outrager jusques dans la capitale. Il la brûlerait, il la couvrirait de cendres, de ruines, et de cadavres ; il savourerait à longs traits l'atroce plaisir de la vengeance: marchons donc, marchons de tous les points de la France; que devant lui, en arriere, sur ses côtés, partout il trouve des ennemis. Marseille, Lyon, Toulouse, sont derriere lui. Cent mille hommes peuvent sortir de ces grandes cités; cent autres mille de la capitale et de nos provinces du centre; et la tête de l'impie, pressée de tous côtés, tombera ; et la terre respirera, l'Europe et l'humanité seront vengées.

L'Europe et l'humanité! oui, c'est leur cause que nous sommes appelés à défendre. Le tyran les menace comme nous; le sort des peuples tombera-t-il de nouveau entre ses mains? une nouvelle confédération sera-t-elle obligée de se précipiter sur nos contrées pour y poursuivre, y traquer, y percer l'Attila dont l'existence agite, trouble, depuis quinze ans le monde entier

Et de quel espoir se flattent les insensés qui, dans l'excès de leur fanatisme révolutionnaire, ont passé dans le camp du tyran! Quand la fortune seconderait ses armes, quand il parviendrait à s'asseoir de nouveau, à s'élever au trône sur des monceaux d'ossements humains, croit-on que l'Europe restât tranquille spectatrice de son triomphe ? qu'elle n'armât pas toutes ses légions, ne rassemblat pas tout ce qu'elle a de bras pour exterminer l'ennemi commun? Non, jamais Buonaparté ne régnera sur les Français ; mais s'il était posssible que le courroux du ciel nous frappât encore de ce fléau, les foudres du nord, du midi, de l'orient, du couchant, se rassembleraient pour le frapper, et frapper avec lui la ligue parricide qui se serait associée à son crime.

Mais ne perdons plus de temps et que nos résolutions se forment, tonnent et éclatent comme la foudre elle-même. Salgues.

Journal des Débats du 9 Mars.

Voici ce qu'on lit dans le Numéro du Censeur qui a paru le 5 Mars, jour auquel la nouvelle du débarquement de Buonaparté s'est répandu dans Paris :

"On sait que notre Almanach Royal ne reconnaît point la légitimité du Roi actuel de Naples, et que pour désigner le chef légitime de cet état, il renvoie le lecteur au royaume des Deux-Siciles. Cette impertinence de notre Almanach Royal nous a attirés, dit-on, de la part de celui de Naples, la mortification la plus humiliante. On assure que ce dernier, usant de représailles, et ne comptant pour rien, comme le nôtre, les sentiments et le vœu des peuples, a refusé de reconnaître Louis XVIII pour notre légitime Roi; et que, pour désigner notre chef véritable, il renvoie le lecteur à l'île d'Elbe. Il nous semble qu'aucun bon Français ne doit pardonner à une pareille injure."

Certes! nous ne pouvons être suspects lorsqu'il s'agit de la liberté de la presse; nous l'avous défendue tant qu'il a été possible de la défendre; nous disions alors, vous ne voulez point de la liberté, vous aurez la licence." Notre prédiction ne s'est malheureusement que trop accomplie, et les événe ments n'ont que trop justifié nos craintes. Hélas! il faut le dire; elles les ont de beaucoup dépassées. Jamais nous n'aurions pu croire que sous l'autorisation des lois on pût impunement manifester par écrit des opinions aussi scandaleuses, des provocations aussi criminelles contre l'autorité légitime, que celle qu'on lit depuis quelques temps dans le Censeur, et même dans le Nain Jaune, quoique ce dernier Journal paraisse sous l'approbation spéciale de la censure.

Dans quel pays, füt-ce en Angleterre, où la liberté de la presse est, comme en France, une des lois fondamentales de l'Etat, serait-il permis à des écrivains de représenter même indirectement et par d'odieuses comparaisons le gouvernement établi comme un gouvernement usurpateur, et de désigner un vil banni comme le chef de l'autorité legitime ! L'homme qui aurait osé insulter avec cette impudence aux lois de son pays, ne serait-il pas immédiatement relégué à Botany-Bay? Mais enfin ne pourrait-on pas dire aux partisans de la censure: Vous avec craint la liberté de la presse, vous en avez demandé la suspension, vous avez voulu être investis temporairement d'un droit de censure, vous vous êtes réservé la faculté de déférer aux tribunaux les écrits qui par leur volume échappent à votre répression, quel usage avez-vous fait de cette autorité ? Pourquoi le Nain Jaune a-t-il reçu de vous le privilége des injures et des plus odieuses personnalités ? L'honneur des

familles, celui des femmes est chaque jour insulté par ces folliculaires qui pourtant ne peuvent rien sans vous: qui doit en répondre ? Le Censeur tourne eu dérision les droits héréditaires de Louis XVIII, les immole aux droits de l'île d'Elbe: pourquoi vous taisez-vous? Pourquoi n'avoir pas déféré les coupables aux tribunaux ! Quel est votre but? Les excès des uns, la foiblesse des autres sont un sujet de triomphe pour les ennemis d'une sage et innocente liberté. Serait-ce là qu'on voudrait en venir? et ne lâcherait-ou la bride aux méchants et aux perturbateurs que pour se réserver le moyen d'enchaîner la vérité modeste et toujours utile? La voilà, disent nos adversaire, cette liberté de la presse! Voyez que de maux elle enfante, même dans l'état de gêne et de restriction ! Que ne ferait-elle pas si elle était dégagée de toute espece d'entraves? Misérables! Qui vous parle de liberté illimitée? Ou demande seulement que la limite ne soit pas livrée au eaprice d'un homme, qu'elle soit fixée par des lois sages et modérées qui proportionnent les peines aux délits. Les méchants seuls ont besoin de l'impunité: or, l'impunité est toujours facile sous le pouvoir arbitraire, elle est impossible sous le régime de la loi, de la loi qui, snivant la belle expression de Tite-Live, est sourde et inexorable.

Sur l'Attentat du Corse.

Si la France doit être indignée de l'opiniâtre ambition du féroce usurpateur dont elle est délivrée, elle doit être encore plus étonnée de l'extravagance d'une entreprise sans but et sans moyens, qui, en admettant toutes les chances du succès le plus improbable, n'aboutirait qu'à perdre son auteur, et à compromettre le repos de la France, encore froissée des secousses violentes qu'il lui a fait éprouver.

Aurait-il porté le mépris du nom français, jusqu'à comp

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