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magnifique palais, si riche en souvenirs des siècles passés, est littéralement un monceau de ruines. Le bois de Boulogne, dépouillé de ses arbres, offre un triste spectacle, rappelant le sort qu'il a éprouvé dans des circonstances à peu près semblables en 1815. L'intérieur de Paris n'est pas beaucoup changé. Beaucoup de beaux et grands arbres ont été coupés sur les boulevards et avenues, mais les plus petits sont intacts, de sorte que le changement est presque imperceptible. J'ai, etc.

Signé: WASHBurne.

N° 1128.

LORD A. LOFTUS AU COMTE DE GRANVILLE.

Berlin, le 28 février 1871.

Mylord, j'ai l'honneur de vous accuser réception de la dépêche de Votre Seigneurie, en date du 24 courant, qui m'a été remise hier matin par le courrier Harbord.

Je me suis rendu, aussitôt sa réception, chez le baron de Thile et je lui en ai donné connaissance.

Le baron de Thile m'a demandé si j'étais autorisé à lui laisser une copie de la dépêche de Votre Seigneurie. Je lui ai répondu que je n'étais pas chargé de le faire officiellement, mais que je lui laisserais la copie demandée.

Le baron de Thile m'informa qu'il avait quelques raisons de croire, d'après un télégramme qu'il avait reçu du comte de Bernstorff, qu'une copie de cette dépêche avait été dejà envoyée à Versailles, mais que néanmoins il la transmettrait immédiatement au comte de Bismarck. Son Excellence ajouta que, naturellement, il ne pouvait exprimer aucune opinion sur le sujet auquel la dépêche se référait, sa position ne lui permettant que de servir d'intermédiaire pour la transmettre au chancelier.

J'ai, etc.

Signé A. LOFTUS.

N° 1129.

NOTE DU Journal officiel RELATIVE A L'ENTRÉE DES DÉTACHEMENTS DE L'ARMÉE PRUSSIENNE DANS PARIS.

Paris, le 1er mars 1874.

Aujourd'hui, à dix heures du matin, aux termes des stipulations arrêtées entre l'autorité militaire française et l'autorité militaire allemande, des détachements de l'armée d'investissement sont entrés dans Paris, ont descendu l'avenue des Champs-Élysées, et occupé l'espace expressément déterminé par la convention.

Les officiers et les soldats de ces détachements ont été logés dans le palais de l'Industrie, dans le Cirque, dans la rotonde du Pano

rama.

A ceux qui n'ont pas trouvé place dans ces édifices, des maisons particulières ont été assignées. Il n'a pas été possible d'affranchir de cette charge les appartements des étrangers, très-nombreux dans le quartier des Champs-Élysées et du faubourg Saint-Honoré.

Un cordon de nos troupes marque la limite dans laquelle les troupes allemandes sont tenues de se renfermer.

L'accès des points occupés par elles n'est point interdit; mais la population presque tout entière s'est d'elle-même imposé la loi de ne pas user de la liberté de circulation qui lui a été laissée.

La Bourse n'a point ouvert ses portes. Sur les quais, sur les boulevards, dans les quartiers les plus reculés, les magasins et les boutiques sont fermés. Paris a volontiers suspendu sa vie.

Il sent la responsabilité qui pèse sur lui en ces jours douloureux. Il comprend qu'il dépend de lui de ne pas ajouter aux malheurs qui accablent la patrie des malheurs plus terribles et peut-être irréparables; il comprend qu'il se doit à lui-même et à tous ceux qui, dans le monde entier, lui ont témoigné et lui témoignent tous les jours tant de respect et de si touchantes sympathies de supporter avec une dignité fière cette nouvelle épreuve; il comprend enfin qu'après ces derniers mois, où il a été héroïque devant le danger, devant la faim, devant les misères de toutes sortes, il lui restait à se montrer capable d'un courage plus difficile encore: Paris est calme.

N° 1130.

RAPPORT FAIT PAR M. VICTOR LEFRANC A L'ASSEMBLÉE NATIONALE DANS LA SÉANCE DU 4er MARS 1874, SUR LE PROJET DE LOI RELATIF AUX PRÉLIMINAIRES DE PAIX SIGNÉS A VERSAILLES (1).

Messieurs, la commission nommée par l'Assemblée, le 21 février dernier, avait été chargée par vous d'assister vos négociateurs, de recevoir les communications qui pourraient les éclairer, de donner son avis et de faire ensuite son rapport à l'Assemblée.

Malgré les loyales revendications de responsabilité si nettement exprimées alors, au nom du Gouvernement, par M. le ministre de l'instruction publique, notre mission n'en demeurait pas moins douloureuse et moins redoutable. Offerte, chacun de nous a fait effort pour la décliner; imposée, nul n'a pu la repousser; acceptée, nous avions tous à la remplir.

Choisi par la Commission pour être son organe, je viens, non sans une profonde émotion, vous communiquer les pensées sous l'empire desquelles elle s'est trouvée unanime.

Cette unanimité même est un signe de la gravité de la situation, elle est aussi un témoignage du dévouement que cette situation inspire aux patriotisme, c'est-à-dire à ce sentiment qui n'est connu tout entier que de ceux qui ont vu souffrir leur pays; car, Messieurs, les douleurs de la patrie sont nôtres, bien plus que sa gloire.

M. le Président du Conseil des ministres, chef du Pouvoir exécutif, et M. le ministre des affaires étrangères ont, sous nos yeux, conduit les négociations. Ils ont, chaque jour, rendu compte à la Commission de l'Assemblée des efforts qu'ils ont faits, des difficultés contre lesquelles ils ont eu à lutter, des résultats qu'ils ont successivement obtenus ou subis, des incidents qui ont bien des fois ravivé quelquesunes de nos espérances ou redoublé toutes nos angoisses.

Nous voudrions que l'Assemblée tout entière, le pays tout entier eussent, comme nous, entendu, ces récits et recueilli ces confidences. Le pays connaîtrait mieux encore les hommes qui le servent, et l'Assemblée se raffermirait dans la confiance qu'elle leur a donnée.

Vos négociateurs ont successivement appelé nos préoccupations

(1) Les conclusions de ce rapport ont été adoptées le même jour par l'Assemblée nationale; la loi de ratification a été promulguée à la date du 2 mars, dans les termes mêmes qu'énonce l'exposé des motifs.

sur les deux questions capitales, c'est-à-dire sur les questions de territoire et sur les questions d'indemnité de guerre.

Nous ne devons pas vous communiquer à cette tribune tous les détails que nous avons ainsi recueillis, heure par heure, de la bouche de vos négociateurs; cette discrétion, commandée par les plus graves motifs, comprise à la plus simple réflexion, n'est pas le côté le moins pénible de notre mission; chaque conscience a son secret, et, quelque unanime qu'ait été notre détermination, il y aurait un certain adoucissement pour chacun de nous à dire à ceux qui pensent d'ordinaire comme lui ce qu'il a cherché, ce qu'il a sacrifié, et les impulsions auxquelles il a cédé.

Messieurs, l'Assemblée fera comme nous et la France qui vous a donné sa confiance, le monde qui est attentif à vos malheurs, comprendront et approuveront notre réserve et la vôtre, après le dénoue ment de cette lutte dont toutes les amertumes auront été pour nous, mais dont les plus pures gloires ne seront pas pour le vainqueur.

Vous avez entendu hier la lecture des préliminaires de paix, signés par vos négociateurs, après avoir recueilli et obtenu l'avis unanime de votre Commission, et de la Convention spéciale qui prolonge l'armistice pour permettre la ratification du Traité par cette Assemblée. Le Gouvernement vous a remis en même temps un projet de loi portant ratification des préliminaires.

L'Assemblée a renvoyé d'urgence, pour les graves motifs que vous connaissez, le projet de loi dans ses bureaux, qui, après de longues et vives discussions, ont nommé les mêmes commissaires, ajoutant ainsi à la preuve de confiance qu'ils leur avaient donnée la manifestation de leur assentiment.

Le rapporteur de la première Commission s'est vu imposer encore ce nouveau fardeau. Il demande à l'Assemblée de le soutenir dans l'accomplissement d'une tâche au-dessus de ses forces et où il ne peut mettre que ce courage dû par les plus humbles aux intérêts de leur pays, à ce moment où les devoirs ne se comptent que par les sa

crifices.

Vous ne me demanderez pas de relire ici les clauses du Traité et de l'armistice, ni le texte du projet de loi portant ratification. Vous les avez eus sous les yeux. Il suffira de les considérer dans leur ensemble.

Il n'en est pas, en effet, d'un traité comme d'une loi, surtout quand il est signé dans les circonstances où nous sommes. L'armistice est prolongé jusqu'au 12 mars, mais il peut être dénoncé le 3, et les hostilités en ce cas reprendraient le 6, en attendant la ratification, si elle n'était pas intervenue avant cette date. Il faut donc ne pas

perdre un instant. De là l'urgence, commandée plus encore par la situation de Paris et par le souvenir de nos prisonniers. De là l'impossibilité d'attendre les rappports et les débats sur les travaux de vos Commissions sur l'état de la France. De là la nécessité de vous en remettre comme toujours à l'étude de vos Commissions et aux résultats, que vous connaissez bien, de travaux qui ne peuvent entrer dans le débat actuel que comme documents à consulter, et non comme éléments du débat lui-même.

D'un autre côté, la nature même de ces études n'en permet ni la publication, ni l'analyse. Enfin, les préliminaires d'un Traité de paix, laborieusement et courageusement débattus par les négociateurs, sont acceptés ou rejetés par le souverain; ils ne sont pas amendés. Ils le seront dans le Traité définitif, non-seulement dans le tracé des lignes territoriales, mais aussi dans les procédés de paiement, dans les clauses relatives aux individus, aux propriétés, et surtout dans la marche de l'évacuation, qui ne laissera ni durer ni s'étendre cet éparpillement des forces ennemies dans les pays occupés, qui peut être un des calculs de l'occupation hostile, qui serait la violation de l'esprit dans lequel doit se maintenir l'occupation après la paix.

Nous ne vous proposons non plus aucun changement au texte et au préambule succinct du projet de loi. Nous conjurons l'Assemblée de le voter tel qu'il est. Le patriotisme l'exige. Et la Commission s'expliquerait peu votre confiance si elle n'allait pas jusqu'à comprendre et accepter ce conseil.

Messieurs, il faut regarder ce qui est soumis à votre conscience en face, de haut et du fond de votre cœur. On souffrira, mais on verra la vérité, et on ira à elle.

Je m'occupe d'abord des préliminaires de l'armistice, et je les examine à la fois au double point de vue des négociations dont nous vous devons compte et du projet de loi sur lequel nous vous devons notre avis.

En portant votre attention sur la clause relative au territoire, la douleur que vous partagerez avec nous ne vous rendra pas injustes envers les efforts accomplis et les dangers conjurés; ce serait là une faiblesse et une méconnaissance absolue de la réalité des choses.

Sans doute, nos frontières atteintes, notre Alsace, une partie de notre Lorraine, notre Metz arraché à la vieille patrie, et surtout cet oubli du droit des populations, dont nous ne sommes pas responsables, ce sont là des sacrifices qui brisent le cœur de tout Français et dont nous avons les premiers senti le poids et tous les déchirements.

Mais nous n'avons pu oublier, et vous n'oublierez pas les sinistres

ARCH. DIPL. 1873.

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