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Frédéric Cuvier est le premier peut-être qui, au rebours des autres naturalistes, ait compris l'intérêt et l'étendue du fait de ces diversités psychologiques des êtres étudiées en elles-mêmes : il est le premier du moins qui, à la suite d'une longue série d'observations, les ait regardées comme susceptibles d'offrir des caractères typiques plus fixes que ceux tires des organes extérieurs et la comparaison de la nature physique et de la nature morale d'espèces d'un même genre, dans une foule de genres, a conduit, après lui, d'autres savants de nos jours, à reconnaître à ces différences des instincts la même importance, et à les élever à la valeur de signes distinctifs des espèces.

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Chaque espèce d'animaux, dit le docteur Prichard, a un caractère psychologique bien défini, qui est au moins aussi typique, et aussi propre à la race, qu'aucun des caractères pris de l'organisation (1). Le loup et l'a

gneau ne sont pas, dit Wiseman, plus distingués l'un « de l'autre, par la différence de leur enveloppe exté«rieure et de leur physionomie que par le contraste de «<leurs dispositions (2), » et le premier de ces auteurs voulant remonter jusques à la raison de la signification de ces derniers caractères, nous montre dans le type dynamique des ètres, du moins en tant que lié à l'organisation, le résultat final, le résultat le plus élevé des dispositions organiques de chaque être (3).

qu'une espèce d'animaux est douée de facultés et de qualités dont une autre est privée, qu'il ajoute aussitôt, que ce serait inexplicable, si chaque fonction particulière du cerveau n'était pas propre à une partie cérébrale particulière (Gall, Sur les fonctions du cerveau, Paris, 1825, t. II, p. 411).

(1) Prichard, Histoire naturelle de l'homme, Paris, 1843, t. I, p. 93. (2) Wiseman, Discours sur les rapports entre la science et la religion révélée, tom. I, 3e dis., p. 151.

(3) Prichard, Histoire naturelle de l'homme, tom. I, p. 93.

Mais il existe un second et plus curieux degré, qui est précisément celui dont nous parlions, celui qui de toutes parts échappe au mécanisme, où l'on peut dire que, dans l'uniformité de tous les caractères de l'existence physique, dans l'insuffisance du squelette (1), de la structure, de la forme, et du pelage (2) pour distinguer l'espèce, les diversités des inclinations sont les seules expressions de la diversité spécifique qui restent (3), et ces signes suffisent. « Nous avons toute raison, dit le savant Wiseman, « de considérer comme d'espèces différentes des animaux << chez qui nous découvrons des mœurs et des caractères, je puis parler ainsi, d'une nature différente (4). ·

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Il n'existe point de type de l'animalité qui n'offre des exemples de ces deux degrés d'importance respective des caractères des formes, et de ceux des instincts.

On en trouve un grand nombre dans les mammifères ; quelles différences réelles séparent l'espèce du loup de l'espèce du chien? D'organisation? il n'en existe pas (5);

(1) « L'identité du squelette n'est pas une preuve absolue de l'identité « d'espèce: on n'a pu découvrir jusqu'ici aucune différence spécifique « entre le squelette de l'âne et celui du cheval, et cependant l'âne et le ⚫ cheval sont deux espèces bien distinctes et bien tranchées. » Flourens, ouv. cité, p. 201.

(2) Rien n'est plus sujet aux variations que la robe, dans les espèces les plus identiques. Indépendamment de l'albinisme et du mélanisme, si sujets à s'y produire, il suffit de la mue, ou de simples changements dans l'alimentation pour la modifier.

(3) Flourens, Résumé analytique des observations de Fréd. Cuvier, p. 116.

(4) Wiseman, ouv. cité, p. 151.

(5) « A ne considérer que l'organisation, le loup serait un chien, >> dit Flourens, dern. ouv. cité, p. 117. Voy. aussi Prichard, Hist. nat. de l'homme, p. 93. Nous devons dire toutefois que, d'après Marcel de Serres, il existerait entre les squelettes du chien, du renard et du loup des différences spécifiques appréciables : la principale serait l'ampleur de l'orbite, plus grande chez le chien que chez le renard, chez le renard que chez le loup.-Voy. Bibliothèq. universelle de Genève, 1835, t. XXXVIII.

teurs où il plane, jusqu'à la gracieuse hirondelle des blės qui effleure les épis ou glisse sur les clairières, et, comme le sansonnet, saisit sur les troupeaux les insectes qu'ils attirent.

Mais c'est surtout chez les animaux inférieurs, c'est dans ces mêmes classes, et parmi ces espèces où la nature nous montre une diversité du type mécanique qui semble croître en raison de l'imperfection, et de l'infériorité de l'organisme animal, c'est, dis-je, dans ces mêmes êtres, que sous l'analogie de la configuration et de la structure intime, les types dynamiques, ou les caractères spécifiques des instincts, arrivent à un degré de multiplicité et de métamorphose qui touche, par l'infini, à l'incompréhensible :

Dans les arachnides, parmi les araignées, ce sont des espèces fixes, ce sont des vagabondes; c'est l'araignée tendeuse dont les toiles se composent de réseaux réguliers, formés de fils concentriques, coupés par des rayons qui partent tous du centre; l'araignée tapissière, dont les toiles sont serrées en tube ou en nasse; l'araignée sauteuse qui ne se tient qu'à un fil, d'où elle saute sur sa proie; l'araignée loup, qui vague et ne peut que courir; la mygale maçonne qui se creuse des terriers qu'elle tapisse de soie. Dans les hexapodes, chez les lépidoptères, ce sont les mille instincts et les mille industries des espèces de sphinx, de celles de papillon, de celles de phalène, insectes du crépuscule, du jour et de la nuit, dont chaque espèce de larve a son espèce de feuille, le fenouil (1), le chou (2), la rave (3), l'ortie (4), le caille-lait, le liseron, la vigne, le

(1) Le grand porte-queue.

(2) Le papillon du chou. (3) Gelui de la rave.

(4) Le paon du jour.

et sa façon de nid, et sa nature de mœurs. Parmi les alouettes, une première espèce, l'alauda vulgaris, celle de toutes dont le chant est le plus étendu, ne perche nulle part, n'habite que les plaines et court parmi les chaumes et les champs labourés; une seconde espèce, l'alauda cristata, aime la poussière des chemins, se pose sur les fumiers, sur les murs, ou les toits, gazouille plus qu'elle ne chante, et seule de son genre, elle vole contre le vent; une troisième espèce, l'alauda sepiaria vit dans les broussailles et jette un cri bizarre qui ressemble l'hiver au bruit de la sauterelle; une quatrième espèce, l'alauda sylvestris, préfère les terres incultes et les bruyères des bois, perche sur les branches des arbres, et, comme le rossignol, dans les plus belles nuits, elle fait entendre son chant que l'on prendrait de loin, pour le chant du merle; une autre espèce enfin, non moins mélodieuse, mais qui ne perche point, se complaît au bord des eaux et court sur les grèves.

Et, parmi les oiseaux de plumage plus brillant, ou plus varié, que de contrastes analogues ne nous offriraient pas les espèces d'hirondelles, l'hirondelle de cheminée, l'hirondelle de fenêtre, l'hirondelle de rivière, l'hirondelle des murs, etc., charmants oiseaux nommés des noms des lieux qu'ils aiment, et dont chaque espèce a son lieu de séjour, son moment d'arrivée, son moment de départ (1), ses habitudes, ses mœurs, et sa région de l'air, depuis le fier martinet qui ne s'abaisse jamais, et qui laisse, dans son vol, tomber son cri strident des hau

(1) L'hirondelle de cheminée (hirundo vulgaris), arrive la première : elle devance de 15 jours, l'hirundo agrestis qui arrive en même temps que l'hirundo riparia; l'hirundo muraria, ou le martinet, arrive la dernière des hirondelles de France et part la première, dès le 15 juillet.

teurs où il plane, jusqu'à la gracieuse hirondelle des blės qui effleure les épis ou glisse sur les clairières, et, comme le sansonnet, saisit sur les troupeaux les insectes qu'ils attirent.

Mais c'est surtout chez les animaux inférieurs, c'est dans ces mêmes classes, et parmi ces espèces où la nature nous montre une diversité du type mécanique qui semble croître en raison de l'imperfection, et de l'infériorité de l'organisme animal, c'est, dis-je, dans ces mêmes êtres, que sous l'analogie de la configuration et de la structure intime, les types dynamiques, ou les caractères spécifiques des instincts, arrivent à un degré de multiplicité et de métamorphose qui touche, par l'infini, à l'incompréhensible :

Dans les arachnides, parmi les araignées, ce sont des espèces fixes, ce sont des vagabondes; c'est l'araignée tendeuse dont les toiles se composent de réseaux réguliers, formés de fils concentriques, coupés par des rayons qui partent tous du centre; l'araignée tapissière, dont les toiles sont serrées en tube ou en nasse; l'araignée sauteuse qui ne se tient qu'à un fil, d'où elle saute sur sa proie; l'araignée loup, qui vague et ne peut que courir; la mygale maçonne qui se creuse des terriers qu'elle tapisse de soie. Dans les hexapodes, chez les lépidoptères, ce sont les mille instincts et les mille industries des espèces de sphinx, de celles de papillon, de celles de phalène, insectes du crépuscule, du jour et de la nuit, dont chaque espèce de larve a son espèce de feuille, le fenouil (1), le chou (2), la rave (3), l'ortie (4), le caille-lait, le liseron, la vigne, le

(1) Le grand porte-queue:

(2) Le papillon du chou. (3) Celui de la rave.

(4) Le paon du jour.

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