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LIVRE II

PARTI FRANÇAIS.

LA LIBÉRATRICE D'APRÈS LES CHRONIQUES PLUS SUIVIES

ET PLUS ÉTENDUES.

LIVRE II

PARTI FRANÇAIS.

LA LIBÉRATRICE D'APRÈS LES CHRONIQUES PLUS SUIVIES
ET PLUS ÉTENDUES.

LA CHRONIQUE DE LA PUCELLE

REMARQUES CRITIQUES

LES DEUX COUSINOT

Denys Godefroy fut le premier qui, dans la Collection des historiens de Charles VII, imprima en 1661 la Chronique connue depuis lors sous le nom de Chronique de la Pucelle. Il n'en disait pas l'auteur. Réputée une des meilleures sources de l'histoire de l'héroïne, elle a été largement mise à profit par les historiens subséquents.

Quicherat crut devoir en rabaisser la valeur. D'après lui, c'était une compilation faite avec le Journal du siège d'Orléans, la Chronique de Jean Chartier, et une autre Chronique peu connue, portant ce long titre : Geste des nobles François, descendus de la royalle lignée du noble roy Priam de Troye jusques au noble Charles fils du roy Charles, le sixyesme, qui tant fut aimé des nobles et tous autres. Elle renfermait, d'après lui, des marques d'emprunts faits aux dépositions de Dunois et du duc d'Alençon, lors du procès de la réhabilitation; ce qui prouvait que l'écrit avait été composé après 1456.

Vallet de Viriville combattit ce sentiment dans un long Mémoire, dont la lecture occupa durant six séances l'Académie des inscriptions et belleslettres. L'auteur l'a imprimé dans la suite, en tête de son édition de la Chronique de la Pucelle et de la Chronique normande du notaire (et pas l'évêque) Pierre Cauchon'. C'est une œuvre de longues, de minutieuses,

1. ADOLPHE DE LA HAYE, Paris, 1859.

de

de patientes recherches, de grande sagacité paléographique, par laquelle le professeur de l'École des chartes a bien mérité des amis de la Pucelle, heureux de l'applaudir, s'il ne les avait pas contristés par les creuses et extravagantes divagations que, pour expliquer la céleste envoyée, ila imaginées dans son Histoire de Charles VII. Il fait justement observer qu'entre la Chronique et les dépositions entendues pour la réhabilitation, l'on ne trouve d'autres similitudes que celles qui doivent exister entre des témoins véridiques déposant sur un même fait. Quant au Journal du siège, et à la Chronique de Jean Chartier, ces œuvres sont postérieures, et dans les endroits où elles ne copient pas, elles abrègent.

Il est incontestable que la Chronique de la Pucelle puise dans la Geste des nobles; les passages sont parfois identiques; mais la Geste des nobles était un bien de famille pour l'auteur de la Chronique de la Pucelle. Le critique, en effet, établit, d'une manière fort remarquable, par une suite d'observations qu'il serait trop long de rapporter, mais qui semblent probantes, d'abord que l'auteur de la Geste est Guillaume Cousinot, chancelier du duc d'Orléans, et, en second lieu, que l'auteur de la Chronique est un autre Guillaume Cousinot, seigneur de Montreuil, neveu du précédent. Vallet ne le faisait que le neveu; M. Boucher de Molandon a établi, dans un travail postérieur, que Cousinot de Montreuil était plus que le neveu, que c'était le fils du chancelier'. Le père et le fils furent des personnages importants et fort remarquables à leur époque.

Guillaume Cousinot I était, au commencement du xve siècle, un avocat distingué du parlement de Paris. En 1408 il fut choisi par Valentine de Milan afin de défendre et de venger la mémoire du duc d'Orléans, son époux, que l'assassin Jean sans Peur faisait si cruellement outrager. Cousinot répondit si bien à la confiance qui lui était témoignée, qu'il devint dès lors le conseiller préféré de la maison d'Orléans, honneur qu'il dut payer de la confiscation de ses biens, aux jours de triomphe de Jean sans Peur. Charles d'Orléans, quelques mois avant d'être le prisonnier d'Azincourt, fit de Cousinot son chancelier; c'était lui confier l'administration de son duché, toutes les affaires, surtout durant l'interminable captivité, devant passer par les mains de ce premier représentant du pouvoir dans la seigneurie. Charles VII, en dédommagement des confiscations subies comme Armagnac, donna à Cousinot des biens confisqués sur des Bourguignons, soit en Beauce, soit à Orléans même, où il reçut en don l'hôtel du Grand-Saint-Martin, situé dans la rue de la Clouterie. Il l'habitait lors de la délivrance de la ville. Cousinot conserva jusqu'à sa mort le titre de chancelier, mais, dès 1439, l'âge l'empêchant d'en remplir 1. Voir la brochure : Jacques Boucher, trésorier du duc d'Orléans, extrait du tome XIII des Mémoires de la Société archéologique de l'Orléanais.

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