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ces derniers temps, par la reconnaissance des rois et du peuple français, à Domremy même, son village natal. En 1819, le département des Vosges, après une résolution prise à l'unanimité, acheta la petite maison de la Pucelle à Domremy. Elle appartenait alors à un ancien dragon, nommé Gerardin, auquel un étranger en avait offert six mille francs pour avoir la statue de pierre placée au-dessus de la porte, et qui préféra la vendre deux mille cinq cents francs au département, afin qu'un souvenir si respectable ne fût pas enlevé à son pays. La ville d'Orléans, pour récompenser la noble action de Gerardin, a fait frapper une médaille en son honneur. Louis XVIII fit bâtir dans le voisinage de cette maison une école gratuite pour les jeunes filles de Domremy, de Greux et des environs, et affecta une rente à l'entretien d'une soeur institutrice. Ainsi, grâce à cette belle fondation, le souvenir de Jeanne d'Arc est encore aujourd'hui une source de bénédictions pour le lieu de sa naissance, et par là Louis XVIII a payé de nouveau la dette que son ancêtre Charles VII avait contractée à Château-Thierry. Outre l'école, Louis XVIII fit aussi ériger devant l'église de Domremy un monument avec un buste en pierre de la Pucelle.

Le 10 septembre, l'inauguration eut lieu avec une grande solennité, et, au milieu des députés de plusieurs autres villes, on vit ceux envoyés par Orléans pour assister à cette fête de son héroïne. Il s'y trouvait aussi un descendant de la famille de Jeanne d'Arc par les femmes, lequel prononça un discours en l'honneur de la Pucelle. Le curé de la pa

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roisse bénit, à cette occasion, une bannière faite sur le modèle de celle que Jeanne portait autrefois dans les batailles, et entre autres paroles il dit à ceux qui la portaient : « Ayez la foi et la piété « de la Pucelle; travaillez comme elle à mériter la grâce de Dieu, et vous trouverez toujours, comme « elle, secours et appui dans le bras du Tout-Puis<< sant. Jamais il n'a abandonné ceux qui se sont << adressés à lui dans la pureté de leur cœur. Si un «< jour la paix était rompue, et si cette bannière, qui est aujourd'hui un signe de fête, devait se « déployer sur le champ de bataille, rappelez« vous alors et répétez à vos frères d'armes cette « belle leçon que la Pucelle nous a donnée, à sa<< voir : que nous devons chercher la victoire dans << le secours de Dieu seul. »

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Ces paroles que le curé de Domremy a prononcées pour des Français, nous pouvons, nous, Allemands, nous les adresser aussi à nous-mêmes. Car la Pucelle n'a pas vaincu et souffert seulement pour la France, elle a souffert et vaincu pour tous les peuples. L'image de la bergère, avec sa bannière et son épée, avec les lis, emblème de sa pureté virginale, avec la double auréole de la victoire et du martyre, entourée de ses saintes, brille comme un signe éclatant dans les annales du passé, pour instruire et consoler les temps futurs : elle montre que la puissance et l'habileté des hommes ne peuvent pas disposer des peuples au gré de leurs caprices, et que le sort des nations repose dans une main plus haute, dont la justice punit l'orgueil des oppresseurs, dont la miséricorde écoute la prière

des opprimés, et dont la sagesse infinie gouverne le genre humain.

Sans doute une mort douloureuse fut la récompense donnée par le monde à la Pucelle pour ses grands services; mais c'est ainsi qu'elle obtint la couronne que ses saintes lui avaient promise dans sa captivité, sans qu'elle-même comprît une prédiction que l'examen attentif du procès nous fait regarder à bon droit comme un miracle. Or, en suivant, non pas des historiens éloignés d'elle par le temps et la distance, mais cent douze témoins oculaires qui l'ont vue dans toutes les circonstances de sa vie, elle nous apparaît, au village natal, parmi les pauvres gens de la campagne, comme une enfant pleine d'affabilité, de soumission et de modestie; dans les batailles, et au milieu des chevaliers, comme le modèle du courage le plus héroïque, de la pitié la plus compatissante, et de la plus sévère chasteté; dans l'éclat du triomphe, à Rheims, en présence du roi et des grands du royaume, elle donne l'exemple de l'humilité la plus profonde; enfin, à Rouen, dans ses souffrances, devant ses juges qui sont en même temps ses ennemis, et sur le bûcher, elle présente une image sublime de patience, de pardon, d'amour et d'inébranlable fidélité à son roi. En un mot, dans toutes les phases de son existence terrestre, elle se montre à nous comme l'idéal d'une âme pure entièrement attachée et dévouée à Dieu. C'est pourquoi puissent tous les yeux s'élever vers cette figure sainte, et tous les cœurs se laisser pénétrer de son éclat! Alors son souvenir deviendra pour

nousune source inépuisable de bénédiction, comme ses victoires l'ont été pour la France, et comme la vénération reconnaissante de la postérité le fut pendant quatre cents ans, et l'est encore aujourd'hui pour la vallée qui l'a vue naître,

L'antiquité grecque et romaine a inscrit sur les tables de l'histoire de grands noms des héros qui sacrifièrent avec joie leur vie pour le bonheur et l'honneur de la patrie, qui lui soumirent des pays et des peuples, et posèrent sur son front les lauriers sanglants de la domination universelle; ou d'autres qui offrirent généreusement leur poitrine au fer destiné au coeur de leurs concitoyens, et s'ensevelirent avec gloire sous des ruines croulantes mais pourrait-elle en citer un seul qui, comme la Pucelle, ne porta point le glaive pour son propre honneur et pour des avantages terrestres, mais uniquement pour le service de l'Éternel; qui, sur le champ de bataille, ne regarda jamais avec orgueil son épée, mais leva toujours avec humilité ses regards vers Dieu, auteur de la victoire, et les abaissa avec amour sur l'ennemi vaincu; qui, se déclarant indigne de la couronne, la déposa sur l'autel, et rendit ainsi dans les choses vaines et passagères un hommage à l'Être infini et éternel?

Autrefois la patrie reconnaissante donna à son brave chevalier du Guesclin le glorieux surnom d'Épée de la France : le surnom qui convient à sa pieuse héroïne, à Jeanne la Pucelle, est celui d'Épée de Dieu.

FIN.

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