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son armée d'archers retranchés derrière leurs épieux; les chevaux et les bagages furent placés par derrière, sous la garde de deux mille archers. Le régent parla ensuite aux Anglais; il leur rappela leurs anciennes victoires, et la glorieuse conquête qu'ils venaient de faire du royaume de France; il leur dit qu'il était temps de rabattre l'orgueil du Dauphin et de ses partisans, et que s'ils laissaient s'allumer le feu, l'incendie ne pourrait plus s'éteindre.

Le conseil du roi de France n'avait pas voulu qu'il fût de sa personne à cette bataille; tout eût été perdu avec lui, et il était sage d'en agir ainsi. Toutefois cette prudence faisait dire prince n'aimait pas tant la guerre que que ce les rois ses pères; sans douter de son courage, on croyait qu'il aimait mieux le repos et la paix. Le duc d'Alençon était le seul prince de la maison de France qui fût présent; il s'adressa aux Français il les exhorta à se conduire en gens de cœur, et leur rappela qu'il s'agissait de savoir s'ils s'affranchiraient de la plus honteuse servitude, ou subiraient. pour toujours le joug des anciens ennemis du

royaume.

TOME V. 4. ÉDIT.

:

I 2

L'ardeur était extrême. Bientôt, contre la volonté du comte Douglas, qui voulait attendre l'attaque, et non la commencer, le vicomte de Narbonne, à la tête de ses gens, marcha sur les Anglais, aux cris de « Montjoye! SaintDenis!» Il fallut suivre un mouvement qui n'avait point été prévu. Lorsqu'on arriva devant l'ennemi, déjà l'on était lassé, déjà l'armée n'était plus en bon ordre. Les Anglais reçurent le choc en criant d'une voix terrible, selon leur coutume: << Saint-George à Bedford! » De part et d'autre il n'y avait ni avant-garde ni réserve; toute l'armée donnait à la fois. La bataille fut rude. Pendant plus de trois heures l'avantage ne se déclara pour aucune des deux armées; mais les Lombards, pendant ce tempslà, ayant passé derrière les Anglais, tombèrent sur les bagages. Ils y furent vigoureusement reçus par les deux mille archers; cependant ils parvinrent à jeter le désordre parmi les pages et les valets qui gardaient les chevaux. Ce fut la perte des Français; les cavaliers lombards se mirent à piller; et, pour mettre à couvert leur butin et les chevaux dont ils se saisissaient, ils laissèrent le champ de bataille, comme si tout

combat eût été terminé. Alors les deux mille archers, libres de l'attaque, se portèrent au secours du corps d'armée. Ils arrivèrent comme une réserve de troupes fraîches. Les Français ne purent résister à ce nouvel effort; la bataille fut perdue, malgré les prodiges de valeur des chevaliers de France et d'Écosse, qui vendirent chèrement la victoire aux Anglais. Le comte Douglas, messire Jacques son fils, le comte de Buchan, et beaucoup d'autres Ecossais, furent tués. La perte fut plus grande encore parmi les Français, et ce jour fut presque aussi funeste à la noblesse que Crecy, Poitiers ou Azincourt; Jean de Harcourt, comte d'Aumale, le comte de Tonnerre, le comte de Vantadour, le sire de Roche-Baron, le sire de Gamaches, et une foule de vaillans chevaliers, périrent dans la bataille. Le corps du vicomte de Narbonne fut reconnu parmi les morts; on lui trancha la tête, et son corps fut suspendu à un gibet, parce qu'il avait été un des meurtriers du duc Jean. Le duc d'Alençon, le maréchal de la Fayette, et plusieurs autres, furent faits prisonniers. Le sire de Maucourt et le sire Charles de Longueval, qui avaient,

ainsi que nous l'avons dit, laissé le parti anglais, ayant été pris, furent décapités, ainsi que quelques chevaliers de Normandie, qui, la veille de la bataille, avaient passé avec les Français.

Verneuil, où s'était enfermé le sire de Rambures, ne put résister; le duc de Bedford accorda à la garnison la permission d'emmener ses chevaux et de se retirer en Berri; mais les Anglais, dont les Lombards avaient pillé les chevaux, ne voulaient pas reconnaître cette condition; il fallut que le comte de Salisbury tuât de sa main deux ou trois de ses gens, pour faire rentrer les autres dans le devoir.

Le duc de Bedford revint tout aussitôt à Paris; le bruit y avait couru qu'il avait été défait; une conspiration avait été découverte : elle fut sévèrement punie, et la ville, en réjouissance de la bataille de Verneuil, donna de superbes fêtes au régent.

LIVRE SECOND.

Guerres du Hainaut et de Hollande contre madame

Jacqueline et le duc de Glocester.

Tentatives

pour faire la paix entre la France et la Bourgogne. Le connétable se rend maître des conseils du roi. Meurtre du sire de Giac.

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Siége d'Orléans.

Délivrance d'Or

JAMAIS la cause du roi Charles n'ayait paru en si mauvais point; ce fut surtout alors que les Anglais, par raillerie, le nommèrent le roi de Bourges, ou le comte de Ponthieu. Une seule chose consolait les seigneurs de France de la journée de Verneuil, c'est que les Écossais y avaient été exterminés. Ils disaient que la France était heureuse de se voir délivrée de ces alliés insolens et barbares : que, s'ils eussent gagné la victoire, ils se seraient trouvés maîtres de tout, et que leur projet était de s'emparer des seigneuries, des manoirs et même

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