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pour, soit contre; dix, au contraire, ont montré que cet emploi produit un excès de poids souvent très considérable.

III.-Effet de l'emploi du sel sur la production

du lait.

C'est une opinion bien généralement répandue aujourd'hui que le sel ajouté à la ration alimentaire des animaux exerce une influence favorable sur la production du lait. Cette opinion date d'une époque reculée; mais il est vrai de dire que c'était surtout les brebis que les anciens avaient en vue lorsqu'ils recommandaient l'usage du sel. La race ovine ayant, en effet, besoin plus spécialement d'une nourriture sèche, et une abondante production de lait exigeant au contraire une alimentation aqueuse, le sel corrige les défauts de cette dernière alimentation. Il ne faut donc pas s'étonner de voir les anciens, et notamment Virgile1, vanter l'emploi du sel donné aux chèvres et aux brebis dans le but d'augmenter la quantité et d'améliorer la qualité du lait; mais on doit se tenir en garde contre la généralisation d'un fait particulier à une race, et, par exemple, dire que le sel n'est pas moins utile à l'abondance de la production du lait pour les vaches que pour es brebis et les chèvres, c'est peut-être al(1) Voir précédemment, p. 350.

ler au delà de la vérité, car le régime ali mentaire n'est pas le même. Aussi M. Boussingault a-t-il rendu service en soumettant à l'expérience directe1 la question de savoir si le sel ajouté à la ration des vaches exerce une influence sur la quantité de lait qu'elles produi

sent.

La vache sur laquelle ont été faites les observations de M. Boussingault était considérée comme bonne laitière. Le 1er mars 1847, elle a fait deux veaux et a été saillie le 21 mai. A partir du 29 avril, on l'a rationnée avec du foin de bonne qualité donné à discrétion, et jusqu'au 19 mai, c'est-à-dire durant 21 jours, elle n'a pas reçu de sel. Durant cette première série,

Le foin consommé par jour a été 19k.57.
Le lait obtenu par jour a été 7lit.90.
100 kil. de foin ont produit 40lit.39 de lait.
Le poids de la vache s'est maintenu à 493 kil.

A partir du 20 mai, à la ration de foin donnée à discrétion, on a ajouté par jour 60 grammes de sel, et l'expérience a duré jusqu'au 15 juin, c'est-à-dire pendant 27 jours. Cette seconde série a donné les résultats suivants :

Foin consommé par jour, 19k.85.

Lait obtenu par jour, 7lit.93.

100 kil. de foin ont produit 40lit.04 de lait.
Le poids de la vache, à la fin de l'expérience,
était de 498 kilogr.

(1) Ann. de chimie et de physique, 3a série, t. XXII, p. 503.

Dans cette expérience, dit M. Boussingault, l'influence du sel a donc été nulle tant sur la production du lait que sur la consommation du fourrage.

Mais, d'un autre côté, M. Becquerel1 rapporte le fait suivant : « Le lait des vaches soumises au régime salé est considéré, par les fruitiers chargés de la fabrication des fromages, comme de qualité supérieure. Il est plus gras et pèse 1 degré de plus au lactomètre. Cette appréciation est celle des nourrisseurs du Jura.

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Il est bien évident que dans l'expérience de M. Boussingault il eût fallu analyser le lait produit avant l'addition du sel à la ration de la vache laitière et ensuite après cette addition, pour que la conclusion donnée par l'habile chimiste et agronome pût être admise sans contestation.

On doit donc, selon nous, regarder comme encore indécise la question de savoir si le sel exerce une influence quelconque sur la production du lait. Et à cette occasion nous ne pouvons nous empêcher de remarquer combien il est important de ne rien négliger dans une expérience, et surtout de ne pas omettre des chiffres auxquels il est toujours nécessaire de s'en rapporter en dernier ressort. L'appréciation des nourrisseurs du Jura, rapportée par M. Becque

(1) Des engrais inorganiques en générai, et du sel particulier, p. 239.

marin en

rel, ne peut être adoptée définitivement, parce qu'elle n'a pas le caractère précis d'une observation scientifique. L'expérience de M. Boussingault, excellente en ce sens qu'elle prouve que la quantité du lait produit n'a pas augmenté sous l'influence du sel, est tout à fait insuffisante pour décider la question de la supériorité de qualité admise dans la pratique du métier.

IV.— Influence de l'emploi du sel sur la qualité
de la chair.

Il est difficile de ne pas rencontrer des contradictions nombreuses chaque fois que l'on cherche à apprécier une qualité qui dépend du goût et qui d'ailleurs ne peut pas être exprimée numériquement. On ne doit donc pas être étonné de voir des personnes regarder comme l'effet d'un préjugé la préférence que l'on donne toujours en boucherie aux moutons dits de pré salė, qu'on engraisse sur les côtes de la Charente-Inférieure et de la Basse-Normandie avec l'herbe d'excellente qualité des anciens marais salants de ces localités. Toutefois, comme il est impossible de ne pas reconnaître la supérieure qualité de la chair de ces animaux, on a prétendu qu'elle n'était point due à l'influence de l'emploi du sel, mais bien à celle d'une meilleure nourriture, de soins hygiéniques mieux entendus, du climat, de la science des éleveurs, etc.

Mais attendu que la bonne opinion que l'on a sur la qualité de la chair des moutons qui reçoivent du sel avec leur ration et qui n'ont pas seulement la portion de sel naturellement contenue dans les fourrages (nous avons vu que dans certaines localités cette portion se réduit à une quantité infiniment petite), attendu que cette bonne opinion se résume en définitive, non pas seulement pour le consommateur vulgaire, mais encore pour le boucher lui-même, à payer une plus-value constante de 10 cent. par kilogramme, nous persisterons à la regarder comme digne de quelque examen, malgré tout le scepticisme des con tradicteurs. D'ailleurs l'expérience directe est déjà intervenue dans cette question. On a servi, sur la table de plus d'un agriculteur, à la fois du mouton nourri avec du sel et du mouton nourri sans sel, et toujours la préférence des personnes non prévenues a été donnée au premier.

Nous n'avons parlé que de la race ovine;

question ne change pas de solution lorsqu'on l'applique à la race bovine. M. Boussingault, en effet, termine par ces mots caractéristiques sa troisième Note relative à ses recherches faites comparativement sur le développement de deux lots de trois taureaux chacun pour déterminer l'action du régime salé : « Nul doute que, sur le marché, on eût obtenu un prix plus

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