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mise au même mode de gouvernement et a été régie absolument d'après les mêmes lois. Les protocoles de Londres eux-mêmes n'ont constaté qu'un fait, c'est que la Crète ne pouvait avoir le moindre rapport politique avec la Grèce, et qu'elle était maintenue sous l'autorité exclusive du Gouvernement impérial, engagé seulement, de la part des trois Puissances, à couvrir par une amnistie tous ceux des insulaires qui avaient participé aux événements antérieurs.

Cet acte mentionnait, il est vrai, des conseils que les Puissances donnaient et des vœux qu'elles formaient en faveur de l'amélioration du bien-être des populations de l'île; mais il serait puéril de s'y arrêter et de chercher à s'en prévaloir comme d'une obligation, et à les interpréter comme une prérogative de position.

Les affaires qui concernent la Crète sont purement du domaine de l'administration intérieure de l'Empire, et toute invocation d'intervention des Puissances ou de leur concours pour une solution ne saurait être qu'une violation des clauses expresses du pacte de 1856, et la consommation de ce qu'il a justement prévu et interdit comme étant une ingérance étrangère.

Nous repoussons donc d'une façon péremptoire, comme constituant une grave atteinte aux droits souverains de S. M. le Sultan, jusqu'à l'idée de la proposition d'intervention en Candie.

Les faits qui se passent en Crète sont simplement des actes de rébellion contre l'autorité légitime, commis par une minorité égarée par les intrigues et les menées d'agents venus de l'étranger, et au préjudice de la partie considérable et paisible de la population.

Vous n'ignorez pas, monsieur, combien a été grande à l'égard des Crétois la bonne volonté de notre auguste Maître, et combien son Gouvernement s'est montré prodigue envers eux de généreux avertissements, de sages conseils et de moyens de persuasion. Les rebelles ayant persisté dans les coupables desseins qu'on leur avait suggérés, S. M. le Sultan, dans sa sollicitude paternelle, leur a envoyé un haut Commissaire, porteur de ses volontés et muni des instructions les plus conciliantes; mais il a dû enfin, à son grand regret, ordonner, pour assurer l'ordre et la sécurité de ses sujets fidèles, faire appel à la rigueur à l'égard de tous ceux qui, restant inaccessibles à la voix de la raison, ne rentreraient pas dans l'obéissance.

Agréez, etc.

Signé: AALI.

No 7. Aali pacha aux Représentants de la Sublime Porte à Londres, Paris et Saint-Pétersbourg.

(Extrait.)

Constantinople, le 26 décembre 1866.

Monsieur, des meneurs venus de l'étranger ne cessent, par de coupables incitations et de violentes menaces, d'influencer les habitants de Crète et de contribuer à prolonger l'insurrection et à augmenter le nombre des malheureuses victimes.

Convaincus maintenant de l'insuccès de leurs coupables projets à l'égard de la Crète, les Hellènes se sont appliqués et travaillent ouvertement à troubler la tranquillité de l'Épire et de la Thessalie.

Mettant toute retenue de côté, ils viennent d'organiser des bandes de brigands qui, sous la protection de la force armée réunie par le Gouvernement hellénique du côté de Lamie et de Carvassara, franchissent la frontière, assassinent ceux de nos sujets chrétiens qui leur ayant résisté ont le malheur de tomber entre leurs mains, et pillent leurs biens. Des préparatifs considérables sur terre et sur mer sont entrepris en même temps en vue d'une action plus énergique au printemps.

Nous nous trouvons donc, à l'heure qu'il est, non pas vis-à-vis d'une intervention intérieure, mais en face d'un Gouvernement qui s'efforce et se prépare ostensiblement à révolutionner notre pays. Je suis heureux de pouvoir constater que, malgré les menées les plus acharnées de la Grèce, la plus parfaite tranquillité règne dans toutes les parties de l'Empire.

En présence des circonstances qui se déroulent actuellement sous les yeux du monde entier, les Puissances amies n'hésiteront pas, nous en avons l'intime conviction, à convenir que la conduite ouvertement hostile adoptée et suivie par le Gouvernement hellénique, tant par rapport aux affaires de Crète qu'à l'égard de la tranquillité générale des autres Provinces de l'Empire, est sans exemple entre deux États qui entretiennent des rapports de paix. Elles reconnaîtront également que la S. Porte a fait preuve d'une abnégation également sans précédent, dans l'unique désir de maintenir la paix.

Mais à toute chose il est une limite qui ne peut et ne doit être dépassée, et S. M. le Sultan, notre auguste Maître, ne saurait rester longtemps indifférent à ce qu'une partie considérable de ses sujets, désireux de vivre tranquilles et de jouir de la protection et de la sécurité qui leur sont garanties, deviennent victimes des passions et des projets subversifs d'aventuriers hellènes, et que la tranquillité de son Empire soit troublée et compromise.

Dans le cas donc où le Gouvernement hellénique continuerait, au mépris des obligations qui lui sont imposées par les traités, à persister dans sa conduite actuelle, le Gouvernement impérial se verrait dans l'obligation d'adopter les mesures qui lui seraient dictées par le devoir de sa propre sécurité, laissant, comme de juste, aux Hellènes l'entière responsabilité des conséquences que ces mesures pourraient entraîner.

Nous pensons, monsieur, que les trois grandes Puissances protectrices de la Grèce, si sincèrement désireuses de voir la paix et la tranquillité régner en Orient, et de préserver de toute atteinte les traités qui garantissent l'intégrité de l'Empire, peuvent seules prévenir cette éventualité, en rappelant, par une démarche collective et efficace, le Gouvernement hellénique dans la voie de la légalité et de ses devoirs internationaux, et en lui déclarant catégoriquement qu'elles désapprouvent sa conduite actuelle.

C'est dans cette démarche, je le répète, monsieur, que nous voyons l'unique moyen de faire modifier au Cabinet d'Athènes sa conduite agressive, de le mettre à même de faire entendre raison aux partis révolutionnaires hellènes, et de conjurer enfin une rupture entre les deux Gouvernements, la S. Porte ayant déjà épuisé en vain tous ses efforts pour éviter d'en venir à cette extrémité.

Je vous invite, monsieur, à exposer franchement cet état de choses au Gouvernement de Sa Majesté et à le prier instamment de vouloir bien adresser au Cabinet d'Athènes des conseils énergiques dans le sens qui précède.

Agréez, etc.

Signé AALI.

No 8. Aali pacha aux Représentants de la Sublime Porte à Londres, Paris, Vienne, Berlin, Saint-Pétersbourg et Florence.

Constantinople, le 30 janvier 1867.

Monsieur, j'ai l'honneur de vous transmettre ci-après la traduction du Firman que notre auguste Souverain vient d'envoyer, par l'entremise de Server Effendi, à S. A. Mustapha Naïli pacha, Commissaire impérial en Crète.

Ainsi que vous le relèverez de la lecture de ce document, S. M. I. le Sultan, mû par le désir de donner une nouvelle preuve de ses sentiments généreux à l'égard de ses sujets crétois, a daigné ordonner la formation dans la capitale d'une commission qui, de concert avec un

certain nombre de notables musulmans et non musulmans choisis en cette île, aura à examiner et à élaborer le mode d'après lequel celleci sera administrée par le nouveau gouverneur qui doit être envoyé. Je me dispense, monsieur, de m'étendre sur la haute valeur de cet acte, qui témoigne d'une manière si éloquente de la clémence et de la sollicitude toute paternelle de notre auguste Souverain envers la population crétoise, et qui ne manquera pas d'être apprécié comme il le mérite par le monde impartial.

Agréez, etc.

Signé: AALI.

Firman impérial adressé à Mustapha Naili pacha,
commissaire en Crète.

ANNEXE.

Il est superflu de te dire que nous sommes profondément affligé de l'insurrection provoquée en Crète par les gens mal intentionnés, des dommages qui en sont résultés pour les habitants, et du sang qu'une cruelle nécessité a fait couler. Si, malgré tous ses efforts, notre Gouvernement n'a pu prévenir tous ces malheurs, si les conseils paternels qu'il a adressés aux habitants égarés pour les ramener dans la voie du devoir sont restés sans résultat, la responsabilité doit en retomber tout entière, devant Dieu et le tribunal de l'opinion publique, sur les fauteurs de ces calamités. Cependant la sage conduite. des insulaires qui, comprenant la vraie situation des choses, nous sont restés fidèles, et, d'un autre côté, la bravoure dont notre armée impériale a donné des preuves irrécusables en combattant contre les insurgés, ainsi que les sages mesures que tu t'es empressé de pren dre, ont contribué puissamment au rétablissement de la tranquillité et de la sécurité dans toutes les parties de l'île, à l'exception de celles qui sont infestées par les brigands venus de l'étranger. Ceux des insulaires qui, cédant à des instigations coupables et séduits par de fausses promesses, ont suivi pendant quelque temps ces séditieux, se sont empressés de profiter de l'amnistie générale accordée précédemment, et sont retournés à leurs travaux. C'est pourquoi une Commission vient d'être nommée dans notre capitale à l'effet d'examiner et d'élaborer le mode d'après lequel l'île sera administrée désormais par le nouveau Gouverneur qui doit y être envoyé aussitôt que les choses seront rentrées dans leur état normal. Ainsi la Commission aura à s'occuper des moyens propres à réparer les domma

ges que le pays a éprouvés, à perfectionner l'administration conformément aux besoins légitimes et indispensables des habitants, et à apporter ainsi la prospérité qui résulte du développement de l'agriculture et du commerce; en un mot, à procurer l'amélioration générale de l'état du pays. Mais pour que ces mesures relatives au Gouvernement de l'île puissent réussir, et que le bien-être et la prospérité puissent se réaliser, il a été jugé nécessaire de consulter aussi quelques-uns des principaux de l'île jouissant de la confiance des habitants. C'est pourquoi, sur la proposition de notre Gouvernement, nous avons approuvé et ordonnons que tu fasses procéder par les habitants au choix d'un ou de deux notables, mahométans ou non, pris dans chaque district, et que tu envoies ici le plus tôt possible ceux qui auront été désignés. Prends soin de porter à la connaissance du public notre présent Firman impérial, et d'être en même temps auprès des habitants de l'île l'interprète des bonnes intentions impériales dont nous sommes animé envers eux.

N° 9. Fuad pacha1, ministre des affaires étrangères,

aux ambassadeurs du Sultan à Londres et à Paris.

Constantinople, le 27 février 1867.

Monsieur, depuis le jour où éclata l'insurrection candiote, le Ministère impérial s'est fait un devoir de vous tenir au courant, aussi bien des diverses phases qu'elle a traversées que des questions auxquelles elle a donné lieu.

Le bruit qu'on a fait autour de cette malheureuse échauffourée est inouï. Jamais événement n'a été à ce point exagéré dans sa portée et dénaturé dans son origine et ses causes. Les faits sont venus un à un rectifier ces rumeurs publiques et faire tomber les illusions. J'aurais donc jugé superflu de revenir aujourd'hui là-dessus, si l'influence exercée par ces rumeurs n'avait pris dans ces derniers jours une importance tout exceptionnelle, et si le courant de l'opinion publique, adroitement travaillée jusqu'ici, n'avait atteint les plus hautes régions. C'est cette circonstance qui m'impose le devoir de rétablir encore une fois la vérité et de repousser les conséquences qu'on tire de faits exagérés.

Résumons d'abord ce que nos adversaires prétendent. Ils cherchent

1. Remplace le 11 février 1867, comme ministre des affaires étrangères, Aali pacha nommé grand vizir.

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