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Les Expositions

En réponse à une question faite au gouvernement dans la séance du Reichstag du 11 décembre et ayant pour objet la probabilité de la participation de l'Allemagne à l'Exposition de 1889 à Paris et l'organisation de l'Exposition nationale allemande, M. de Boetticher a déclaré que le gouvernement français n'avait encore fait aucune communication à ce sujet et qu'on n'avait pas eu, en conséquence, de parti à prendre. Quant à l'Exposition de Berlin, le gouvernement ne pouvait encore intervenir, les avis qui lui étaient parvenus donnant des avis fort différents et l'opinion publique ne s'étant pas encore prononcée nettement.

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Dans la séance du Reichstag du 12 décembre, M. de Boetticher a fait la déclaration suivante :

En réponse à une observation du rapport de la commission du budget, je dois répéter ici la déclaration que j'ai déjà précédemment faite, à savoir que pour le moment il n'est pas possible de fixer l'époque à laquelle s'ouvrira le service régulier des bateaux à vapeur pour l'extrême Orient et l'Australie qui fait l'objet de la demande de crédits de 4,400,000 marcs portée au budget de l'empire. Le gouvernement espère, toutefois, qu'avant la troisième délibération sur le budget, il pourra communiquer à l'Assemblée une solution définitive. Pour le moment je crois pouvoir dire que le projet du gouvernement est d'ouvrir ces lignes postales le 1er juillet de l'année prochaine (1886); bien entendu, le gouvernement n'utilisera le crédit demandé qu'au prorata de la durée du service auquel il est destiné.

« Le chancelier de l'empire vient de prendre une décision au sujet de l'escale que les compagnies subventionnées se sont engagées à établir aux termes de la convention conclue avec elles. Le Llyod brémois a été prévenu que le port d'Anvers a été choisi à titre d'essai comme port d'escale à l'Ouest. (Applaudissements.)

« Le choix du port d'escale a été l'objet d'une étude attentive. Le gouvernement a, dès le début, reconnu que trois ports seulement pouvaient être pris en considération Rotterdam, Flessingue et Anvers.

« Rotterdam, qui se recommandait à différents titres, a été écarté, parce que ce port n'est pas toujours accessible aux bâtiments du tonnage de ceux qui auront à desservir les nouvelles lignes. Le tirant d'eau de ces bâtiments, dont le tonnage devra être d'au moins 3,000 tonnes, est en effet de 21 pieds. Or le canal qui conduit de la mer à Rotterdam n'est accessible en tout temps qu'aux bâtiments ayant un tirant d'eau de 19 pieds. D'autre part, ce canal est souvent obstrué par les glaces. Dans ces conditions, il a fallu renoncer au choix de Rotterdam, quelles que fussent d'ailleurs les raisons qui militaient en faveur de ce port.

« Quant à la préférence attribuée à Anvers contre Flessingue, je dois avouer que d'excellentes raisons nous avaient été données pour nous décider en faveur de ce dernier port: d'abord la longueur du parcours que les bâtiments auront à fournir avant d'atteindre le port d'Anvers; pour arriver à Anvers les bateaux devront passer devant Flessingue, d'où résultera une perte de temps de douze à dix-huit heures, sans compter le temps nécessaire pour opérer les chargements. Ensuite, en raison des intérêts de certaines industries allemandes qui sont exposées à rencontrer une plus vive concurrence dans le port belge, le choix d'un port néerlandais eût offert d'incontestables avantages. Mais je ne veux pas insister sur ce point de vue. Je me borne à l'indiquer.

« Quoi qu'il en soit, les vœux exprimés par le Norddeutsche Lloyd devaient être à nos yeux décisifs. Le chancelier de l'empire n'est pas seul à devoir décider en ces sortes d'affaires. En vertu des contrats passés avec le Lloyd brémois, cette Compagnie a le droit d'émettre, elle aussi, une appréciation dont le chan

celier doit nécessairement tenir compte. Or, le chancelier a été d'avis qu'il fallait se rallier aux vœux du Lloyd brémois si des raisons majeures ne s'opposaient pas à leur accomplissement.

« A ce point de vue, le chancelier avait aussi à prendre en considération les vœux de l'industrie de l'Allemagne du Sud qui penchait pour Anvers. Entre les ports d'Anvers et de Flessingue, il n'y a qu'une distance insignifiante par les voies fluviales. Mais tout le monde reconnaît qu'à Anvers il y a une activité commerciale infiniment plus grande qu'à Flessingue, et que les installations maritimes du port d'Anvers sont incontestablement supérieures.

» Du reste, nous avons formellement stipulé que le choix d'Anvers n'était que provisoire et ne devait pas avoir la durée du contrat passé avec le Lloyd brémois. C'est pourquoi la convention n'a provisoirement que la durée

d'un an.

« Nous espérons que les autorités belges combleront le Lloyd de faveurs et qu'elles lui faciliteront l'usage du port.

«Si, par la suite, nous devions reconnaître que l'intérêt général du commerce et de l'industrie allemande commande le choix d'un autre port, nous aurons réservé et pour nous et pour le Lloyd de Brême la liberté de revenir sur le choix que nous avons fait. »

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Le 24 décembre a été signé à Berlin un protocole concernant les possessions de l'Allemagne et de la France sur la côte occidentale de l'Afrique et dans l'Océan pacifique.

BELGIQUE

La convention monétaire

CHAMBRE DES REPRÉSENTANTS (Séance du 19 décembre 1885). - M. Frère Orban. J'aurais désiré que la discussion ne s'ouvrit pas aussi vite après le dépôt du projet. Je dois au gouvernement communication des procès-verbaux de la Commission monétaire, mais il eût été désirable que ces procès-verbaux fussent imprimés.

Vous savez l'appui sincère et loyal que j'ai donné au gouvernement quand il nous a fait connaitre son refus d'adhérer aux exigences de ses co-associés. Je regrette de ne pouvoir lui continuer mon approbation. Je ne méconnais ni les difficultés qu'il a rencontrées, ni le zèle, les efforts, je n'ai pas besoin de dire l'intelligence de mon honorable ami M. Pirmez, avec qui je suis habitué à marcher d'accord en matière économique.

Notre désaccord porte moins sur le but qui nous est commun que sur les moyens de l'atteindre. On a tenu trop de compte des difficultés. Les questions monétaires sont très simples. Deux ou trois notions, vérités mathématiques, suffisent à les résoudre l'or et l'argent marchandises, soumises comme les autres aux lois de l'offre et de la demande, impossibilité d'établir un rapport constant entre ces deux marchandises, la monnaie mesure des échanges, à raison d'un certain poids d'or ou d'argent, qui pour devenir monnaie n'en conservent pas moins leur caractère de marchandise. Telles sont ces vérités élémentaires.

Mais il s'en faut de beaucoup que ces notions soient acceptées par le plus grand nombre. Pour l'immense majorité, la monnaie ne tire pas d'elle-même sa valeur, elle la tire de la décision du législateur.

Et tout contribue à égarer les esprits : le papier, qui est une simple promesse de payement et qu'on prend trop souvent pour ayant une valeur propre. Pendant ces vingt-cinq dernières années, on a vu des différences s'établir entre les deux monnaies.

Il y a erreur manifeste à supposer identité là où il y a dissemblance.

Cette erreur générale est l'une des difficultés qu'a rencontrées le gouverne

ment.

Et pour accroître la confusion, voici des hommes distingués, des savants désintéressés qui prétendent établir la constance du rapport entre les deux monnaies. Derrière eux se groupent les habiles qui comprennent le parti qu'on peut tirer d'une pareille illusion, dont la conséquence est d'approuver la spéculation qui se fait sur la différence de valeur des métaux précieux, spéculation merveilleuse, sans risque, sans danger.

On crie contre le spéculateur, mais il serait plus logique de s'en prendre au législateur qui fait une loi insensée.

A côté des spéculateurs, viennent les gardes du corps, les thuriféraires à qui l'on donne les reliefs du festin, et qui se chargent d'exposer au public fes beautés de cette législation. Beaucoup se persuadent qu'ils sont des hommes d'affaires et qu'à ce titre ils connaissent la question.

Les préjugés, se coalisant avec certains intérêts, jettent naturellement la terreur dans l'esprit public au moindre changement. Les fantômes apparaissent crise monétaire, perturbation dans les changes. On oublie que le résultat serait le retour au régime antérieur à la convention de 1865, régime sous lequel nous avons si longtemps vécu.

De bons esprits s'effrayent, oublient que, fallût-il changer de monnaie, nous avons vécu pendant quinze ans avec le florin quand la France avait le franc, que du reste nous ne sommes pas une enclave de la France, que nous avons au Nord le florin, à l'Est le mark, et que nous ne sommes pas embarrassés de régler nos affaires avec les Pays-Bas et l'Allemagne.

pas de

Čertes, mieux vaudrait une monnaie universelle, mais il ne s'agit rêver. Prenons la réalité telle qu'elle est, et reconnaissons qu'elle n'a rien d'inquiétant.

On a parlé de représailles douanières. Je fais des vœux pour que notre rentrée dans l'Union latine les écarte. Des déceptions sont possibles à cet égard, mais je n'y insiste pas.

Nous avons approuvé le gouvernement de s'être retiré de la Conférence monétaire, sans se laisser intimider par les difficultés que je ne méconnais

pas.

Il a modifié son attitude. Il reconnaît la dette qu'il déniait. Il en obtient l'ajournement. Momentanément débarrassé de tout souci, laissant peut-être à des successeurs le payement de la dette qu'il contracte, le Cabinet croit avoir suffisamment sauvegardé nos intérêts économiques et moraux.

Je ne puis approuver ce revirement.

L'orateur rappelle sur quelles bases s'est fait l'accord de l'opposition, de la majorité et du gouvernement, au mois d'août dernier. Alors le gouvernement se plaçait résolument sur le terrain du droit. Il repoussait la clause de liquidation, en constatant que la valeur des monnaies n'avait jamais été garantie par l'Etat, mais seulement le titre et le poids. 11 affrontait la rupture de l'Union si regrettable qu'elle pût être, cette éventualité lui paraissant moins redoutable que l'acceptation d'une obligation illégitime.

L'honorable membre cite les paroles de MM. Beernaert, Pirmez et Malou. Il rappelle aussi l'attitude patriotique qu'il a prise lui-même avec une complète abnégation.

Mais il ajoute qu'il est impossible d'oublier d'où nous viennent nos embarras actuels et les pertes énormes que nous allons subir. Et il rappelle les efforts qu'il a faits en 1871 pour obtenir alors l'interdiction, tout au moins la limitation de la frappe de l'argent. Il a été raillé, bafoué. Et c'est de ce qui a été fait alors qu'est venu le mal. La frappe excessive de 1872 et 1873 a profité à nos alliés, et Voici que nous en sommes les victimes.

La première idée de la clause de liquidation date de 1878. L'Italie avait le cours forcé. Tous ses écus et son billon refluaient dans les autres pays. On prévoyait une indemnité. L'Italie protestait, appuyée par nous. Déjà en 1866 pareil phénomène s'était produit en Autriche, et même après Sadowa, l'Allemagne,

dont les caisses regorgeaient d'argent autrichien, ne songea pas à lui imposer la moindre indemnité. Eh bien! ce que le vainqueur de Sadowa ne songea pas à imposer à l'Autriche, on nous l'impose aujourd'hui.

C'est que si l'indemnité est de droit pour le billon, elle est inadmissible pour la monnaie pleine.

Aussi la clause de liquidation fut-elle écartée en 1878. Si elle avait été imposée, nous nous retirions de l'Union. Et parce que depuis sept ans l'argent a baissé de valeur, on nous impose cette clause de liquidation qui avait été formellement repoussée par le gouvernement français!

Et d'où provient l'excès d'argent qui a déprimé la valeur du métal? De ce que la Belgique seule a correctement et complètement exécuté la convention. Est-il possible, pour parler comme M. Beernaert, de rien imaginer de plus contraire au droit et à l'équité?

Oui, le gouvernement a commis une faute en tenant ses ateliers ouverts. Nous avons le droit de lui en faire un grief, nous surtout qui l'avions averti. Mais l'étranger ne saurait s'en prévaloir et moins que tout autre la France à qui nous avons rendu service alors que les circonstances paralysaient la monnaie de Paris.

Nous avons loué le gouvernement belge d'avoir dit: S'il y a une perte, elle doit être à la charge de la communauté; la Belgique en supportera sa part. A cette idée si juste on a substitué la clause de liquidation avec effet rétroactif.

La Belgique demandait une simple prorogation d'un an. Nouveau refus.

Dans le désir de n'apporter aucun trouble dans nos relations avec la France, ce qui est notre intérêt commun, un intérêt auquel nous devons même faire certains sacrifices, voulant d'ailleurs répondre par des actes à des paroles dont on retrouvait l'écho dans certains journaux français, qui allaient jusqu'à nous accuser de banqueroute, la Belgique a fait une concession énorme. Elle a consenti à s'interdire pendant un délai déterminé toute modification à son système monétaire.

Cette proposition a été dédaigneusement rejetée. Il importe d'en signaler l'importance. On l'a si bien comprise qu'on l'a insérée dans la convention actuelle, où l'on se prémunit pour cinq ans contre nous, contre la démonétisation possible de nos écus de cinq francs.

Quand un gouvernement démonétise, il n'est pas strictement obligé de subir la perte. La loi est formelle. Mais des raisons d'Etat et d'équité l'engagent dans la plupart des cas à faire intervenir les pouvoirs publics. Mais quand on ne démonétise pas, on ne doit rien. Eh bien! Îa clause de liquidation, c'est l'obligation de payer quand on ne doit pas.

On ne saurait imaginer conception plus bizarre.

Notre position était irréprochable.

En présence du refus qui nous était opposé, nous devions cesser de négocier. Le gouvernement ne l'a pas pensé. Il a continué. Et il transige. Et la transaction se fait non sur la perte, mais sur une simple formule. La perte nous incombe tout entière.

La convention renferme un germe de mort. Elle périra dans cinq ans. du bénéfice à faire sur l'argent la rendra stérile.

L'appât

La Suisse passera à l'étalon d'or sans qu'il Ini en coûte rien. C'est aussi le but de l'Italie. Dans un espace de cinq ans, toutes les probabilités sont que l'argent baissera encore.

Les résolutions des Etats-Unis quant au Bland bill en donnent la quasi-certitude.

Le gouvernement, qui avait conservé sa liberté d'action, l'a aliénée par la convention. Il devra payer la différence. Il s'oblige vis-à-vis de l'étranger, à plus forte raison vis-à-vis de ses nationaux.

Enfin, au lieu de subir une injustice, il reconnaît une dette qu'il avait d'abord niée.

La différence est sensible.

C'est une capitulation, une capitulation inutile et sans compensation. Il en coûtera plus cher à la Belgique de transiger ainsi que de rompre.

Au même prix nous pouvions rester en dehors de l'Union monétaire.

La liquidation naturelle n'aurait eu que des inconvénients momentanés. Cette liquidation naturelle; vainement proposée à la Conférence, se fût accomplie si nous étions sortis de l'Union.

La Hollande, à uos portes, s'est trouvée dans la même situation. Nous aurions fait comme elle.

On ne devait pas soumettre cette proposition à la Conférence, ou bien il faut reconnaître qu'elle ne présente aucun danger.

Des lignes un peu vagues de l'exposé des motifs, il semble résulter que le gouvernement a l'intention de réduire immédiatement et successivement l'excès de notre circulation monétaire d'argent.

S'il procède ainsi, je le louerai moi-même. Je le féliciterai, s'il parvient à faire cesser les embarras, les pertes de tout genre qui résultent de notre détestable système monétaire, et je ne lui marchanderai pas mon concours.

M. Beernaert, ministre des finances. L'honorable M. Frère ne m'embarrasse point en me rappelant mes déclarations du mois d'août. Mes opinions d'alors sont mes opinions d'aujourd'hui. Mais nous croyons cependant que nous avons bien fait de signer la convention, et que nous en obtiendrons la ratification, sans enthousiasme, nous n'en demandons point, mais avec la conviction que nous sauvons le pays d'une situation dangereuse.

Après avoir exposé les principes constitutifs de l'Union latine, initiative et création de M. Frère-Orban, l'une des plus importantes d'une carrière politique qui en compte beaucoup, l'honorable ministre soutient que les difficultés actuelles proviennent de l'absence d'une clause de liquidation dans l'acte constitulif de l'Union et dans les actes qui l'ont renouvelée.

M. Frère-Orban. Il est contraire à l'essence d'une convention monétaire de prévoir une clause de liquidation pour les monnaies pleines.

M. Beernaert.

Pourquoi? J'estime qu'il ne faut pas se mettre en société sans régler ses intérêts communs au moment de la séparation.

L'Union étant dénoncée par la Suisse, il fallait ou sortir de l'Union ou négocier pour y rester.

L'honorable ministre remercie M. Pirmez du dévouement dont il a fait preuve pendant ces négociations. (Approbation unanime.)

Il estime qu'il n'y a pas eu capitulation.

Les gouvernements étrangers n'ont pas manqué de courtoisie à l'égard de la Belgique. Voilà pour la forme. Quant au fond, la transaction est essentiellement honorable. Quand on transige, on cède toujours quelque chose, et si M. Frère la réprouve, c'est que, par la nature de son esprit, il n'est guère porté aux transactions. (Sourires.)

Avons-nous eu tort d'abandonner en partie notre thèse du mois d'août, et valait-il mieux sortir de l'Union latine? Si nous en sortions, il fallait démonėtiser notre monnaie d'argent. C'est bien l'avis de M. Frère. Mais le passage à l'étalon d'or eût été une résolution très grave et j'aurais hésité à en prendre la responsabilité. M. Frère lui-même l'eût-il prise, s'il avait été au pouvoir? Partisan convaincu du monométallisme, il n'a pourtant rien fait pour l'établir. M. Frère. Pardon, je l'ai fait établir en 1850 et conserver jusqu'en 1861. Quand la Chambre a passé au bi-métallisme, je me suis retiré.

M. Beernaert.

Pendant si peu de temps. Et d'ailleurs, revenu au pouvoir, ▾ous avez institué l'Union latine sur les bases du bi-métallisme, opposant ainsi à votre principe une barrière infranchissable.

M. Frère. L'étalon d'or a été proposé dès 1865 à la Conférence monétaire. La question a été mise à l'étude. Posée de nouveau en 1867, elle a été ajournée.

ARCH. DIPL. 1886.

2o SÉRIE, T. XVII (79)

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