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les forti par le défaut de proportion entre les cordes, les cuivres et la batterie qui s'en donne à cœur joie.

Quand on a entendu la musique des concerts, qu'on a pris son bain, qu'on s'est restauré comme il convient au restaurant de l'hôtel Kurhaus, et qu'on a lu les journaux au club, on peut suivant les circonstances, aller un moment à l'opérette ou déployer ses grâces au bal; car en vérité rien n'est négligé en ce charmant endroit pour tenir enchaînés au rivage par des plaisirs variés les étrangers et les habitants de La Haye en villégiature. Tous les soirs, de grands tramways à vapeur déversent à Scheveningue un nombre considérable d'habitants de La Haye qui vont passer là deux ou trois bonnes heures à prendre l'air de la mer et à entendre de la musique. Le trajet se fait en quinze ou dix-huit minutes.

Vous le voyez, on ne s'ennuie pas en Hollande, à La Haye surtout, d'où le touriste ne peut rapporter que d'agréables impressions. Je ne me pique pas d'être un grand clerc en matière de modes, de toilettes de femmes; j'oserai pourtant affirmer que les dames en grand nombre que j'ai vues dans la salle de concert étaient mises avec goût. Elles m'ont paru jolies pour la plupart, et sans avoir fait acte de curiosité, sans avoir tendu l'oreille outre mesure, j'ai entendu entre deux gentlemen à propos d'une dame un peu excentrique dans sa toilette, mais particulièrement belle et qu'on

m'a dit être la femme d'un très riche banquier d'Amsterdam, le petit dialogue suivant :

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Elle est toujours bien belle.

Elle est surtout très coquette.

Elle est l'un et l'autre. Quel âge a-t-elle au juste?

Au juste, il m'est impossible de vous le dire. Ce que je sais, c'est qu'il y a huit ans, elle avait vingtsix ans.

Eh bien, alors, elle a trente-quatre ans.

Ce n'est pas une raison. Quand une femme jolie, riche et coquette atteint vingt-cinq ou vingt-six ans, il se passe ordinairement de huit à dix ans avant qu'elle en ait trente.

J'ouvris le calepin spirituel que tout voyageur porte en sa cervelle, et j'y notai cette amusante saillie d'un gentleman qui connaît les femmes de Hollande... et d'ailleurs.

Harlem n'est qu'à douze kilomètres d'Amsterdam; j'aurais bien voulu visiter cette ville qui vit naître plusieurs hommes célèbres, entre autres Laurent Koster que les Hollandais tiennent pour le premier inventeur de l'imprimerie. J'aurais bien voulu m'arrêter aussi, ne fût-ce que quelques heures à Utrecht où je n'aurais pu trouver une seule fabrique de ce gros, bon et vieux velours d'Utrecht, par la raison bien simple qu'il n'en existe plus aucune. Il m'eût été aussi bien agréable de visiter à Leyde l'église de Saint-Pierre qu'on m'a dit être la plus belle de toute la Hollande et où se

seraient élevées dans ma mémoire les immortelles harmonies du quatrième acte du Prophète, à cause de Jean de Leyde, bien que dans l'opéra de Meyerbeer la scène splendide du prophète devant sa mère se passe en Allemagne, à Munster. Mais le moment de la retraite avait sonné pour moi. Mes vacances étaient terminées et comme dit quelque part Shakespeare, il n'est pas de vertu comme la nécessité. Je pris le train et en quelques heures, je me retrouvai à Paris, où j'allai m'occuper du concert néerlandais.

CHAPITRE IV

Retour à Paris. - Appel aux compositeurs et aux éditeurs hollandais. Fixation de la date du Concert. - Formation d'un Comité chargé d'examiner la musique et d'arrêter le programme. Première séance du Comité.

-

Une lettre de J. Massenet. · Lecture des morceaux de piano. Un mot de Victorin Joncières. Deux autres séances du Comité. Organisation du Concert. Le programme est enfin arrêté. Le programme.

Dès mon retour à Paris, j'allai voir mes distingués confrères, M. A. Obreen, correspondant du Nieuwe Rotterdamsche Courant de Rotterdam, et M. de Meester, correspondant du Algemeen Handelsblad d'Amsterdam. Je leur exposai mon plan et leur demandai leur appui. Ils accueillirent mon idée avec enthousiasme et se firent dans leurs correspondances parisiennes, mes interprètes auprès des compositeurs et des éditeurs de musique de Hollande. Ils leur donnèrent l'avis que je recevrais avec reconnaissance toute la musique, de chambre, qui voudrait

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