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nois, de façon à ce que le Tsong-Li-Yamen ne garde aucun doute sur la réalité de son existence. J'écris dans ce sens à l'amiral Duperré.

Le Gouvernement chinois a parfaitement vu que nous étions. décidés à profiter des avantages conquis au Tonkin, et j'ai lieu de croire qu'il n'agirait qu'avec une très grande prudence; le jour où ils seront persuadés qu'avec ou sans leur consentement nous ouvrirons le Yunnan, ils cèderont, préférant un état régulier qui assure leurs revenus de douane à un état de désordre où ils perdraient tout.

ROCHECHOUART.

ANNEXE A LA DÉPÊCHE POLITIQUE DE PÉKIN, EN DATE DU 19 JUIN 1875.

Le prince Kong au comte de Rochechouart,
Chargé d'Affaires de France en Chine.

Pékin, le 15 juin 1875.

J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire à la date du 25 mai, et dans laquelle vous me faisiez part de la ratification du traité entre l'Annam et la France. En me donnant communication d'une copie de ce traité, vous exprimiez le désir de voir le Gouvernement chinois envoyer des ordres précis aux autorités du Yunnan, leur enjoignant d'empêcher les bandes chinoises d'entrer sur le territoire annamite et de rappeler les bandes qui s'y sont introduites; « de cette façon, dites-vous, nos bonnes relations seront maintenues et affermies. Vous m'entretenez également de la communication qui existe entre l'Annam et la Chine par le moyen du Song-Koï, qui, après avoir traversé le Tonkin, pénètre dans la province du Yunnan. Ce point, me dites-vous, ne se trouve pas indiqué dans le traité, parce qu'on ne pouvait prévoir alors la situation actuelle; mais, maintenant que cette question se présente, il importe qu'elle soit réglée dans le plus bref délai. Le Gouvernement français vous a chargé de vous entendre avec nous sur ces deux questions: 1° l'anéantissement des bandes chinoises qui désolent l'Annam; 2° l'ouverture d'un port du Yunnan où vos steamers puissent atterrir et se livrer à des transactions commerciales régulières.

Dans la onzième lune de la douzième année du règne de Tongtche, j'ai reçu une lettre de M. de Geoffroy, contenant la copie d'une lettre adressée par ce dernier au Gouverneur du Yunnan, dans laquelle il était question des avantages que recueillerait le commerce de l'ouverture de cette province. J'ai répondu à M. de Geoffroy que

le Yunnan n'était pas ouvert au commerce étranger, et j'ai écrit au Gouverneur de cette province de conformer sa conduite aux stipulations du traité. Maintenant que votre Gouvernement réclame l'ouverture d'un port sur le Song-Koï, je suis obligé de répondre également que le Yunnan est fermé au commerce étranger, et que dès lors, dans votre traité, ni dans celui d'aucune nation, il ne saurait y avoir de stipulation relative à l'ouverture d'un port de commerce dans le Yunnan.

L'Annam est la contrée appelée également Yué-nan; elle a été tributaire de la Chine, et les habitants de la frontière chinoise ont eu de tout temps avec les habitants des États tributaires voisins des rapports commerciaux, dont la nature varie suivant les provinces. Il est nécessaire que j'envoie une dépêche pour ordonner une enquête au Yunnan à ce sujet; dès que la réponse me sera parvenue, nous nous occuperons de délibérer sur cette affaire.

D'un autre côté, l'Annam était jadis infesté de brigands, et son Gouvernement a, à plusieurs reprises, demandé du secours à la Chine. La Chine ne pouvait refuser aide et protection à un pays tributaire: aussi envoya-t-elle des troupes pour poursuivre ces brigands; les troupes qui se trouvent dans l'Annam y sont donc sur la demande du Gouvernement annamite, et dans le but de protéger la frontière; ce but une fois atteint, leur présence sur le territoire annamite n'avait plus de raison d'être, et on les a rappelées.

Dans le douzième mois de la douzième année du règne de Tongtche, et dans le troisième mois de l'année dernière, j'ai écrit à M. de Geoffroy que, dans un rapport présenté par le gouverneur du Yunnan, il était dit que, sur la frontière qui sépare le Yunnan de l'Annam, le chef de brigands Houanstgoung-in et plusieurs autres troublaient profondément l'Annam, qu'ils voulaient bouleverser de fond en comble, qu'il avait envoyé des troupes pour s'opposer à cette dévastation, et que le plan de campagne avait été très bien exécuté; il priait le Tsong-Li-Yamen d'écrire aux Consuls français résidant dans l'Annam pour leur dire que les troupes du Yunnan qui ont passé la frontière n'ont pas d'autre destination que d'arrêter les dévastations des brigands et qu'ils n'ont rien à voir avec les troupes françaises.

L'Empereur donna l'ordre au Tsong-Li-Yamen de se conformer à ce rapport.

La Chine a envoyé des troupes dans l'Annam sur la demande du Gouvernement de ce pays, et dans le but de détruire le brigandage. Les soldats chinois qui se trouvent sur la frontière du Yunnan sont là dans le but de protéger l'Annam contre les attaques des brigands et, en même temps, d'assurer la sécurité du Yunnan. Quant aux bandes

qui passent la frontière, les autorités provinciales ne peuvent les laisser faire sans manquer à leur devoir; elles doivent les poursuivre et les punir. Après ce que vous nous avez dit, nous nous croyons tenu d'écrire de nouveau au gouverneur du Yunnan pour l'engager à arrêter sévèrement les bandes qui tenteraient de pénétrer dans l'Annam. Tel est le but de la présente communication spéciale.

KONG.

L'amiral Fourichon, Ministre de la Marine et des Colonies, à l'Amiral Duperré, Gouverneur de la Cochinchine française (1).

Paris, 1er juin 1876.

Dans une note que vous m'avez remise au mois d'avril, vous faites ressortir les difficultés que rencontre l'exécution des traités récemment conclus entre la France et le royaume d'Annam et l'incertitude qui plane sur le caractère que nous voulons donner à notre intervention au Tonkin.

Vous insistez surtout, au cas où nous renoncerions, tout au moins pour le moment, à toute pensée d'extension de nos possessions actuelles en Cochinchine, sur la nécessité de donner au Gouvernement annamite des assurances positives que le Gouvernement français ne poursuit aucune pensée de conquête. A cet effet, vous demandez que les traités soient révisés et que l'on ne conserve que les dispositions relatives à l'ouverture des ports au commerce et au pavillon étrangers dans les conditions qui nous lient, sous ce rapport, avec la Chine et le Japon.

Vous proposez la suppression des compagnies de marins, servant de garde aux Consuls, que nous entretenons au Tonkin, afin de faire cesser les inquiétudes que la présence de ces troupes entretient chez les Annamites.

Vous pensez également que, pour éviter des difficultés graves avec la Chine, il conviendrait d'abolir la clause qui interdit à l'Annam de rien changer à l'état actuel de ses relations diplomatiques avec les Puissances étrangères.

Vous demandez enfin que, suivant les prévisions de l'article 6 du traité de commerce, on concède dès aujourd'hui au Gouvernement annamite l'administration des douanes au Tonkin. Il ne serait ainsi maintenu que: 1° la reconnaissance de notre (1) Livre jaune, no 19.

souveraineté sur les trois provinces annexées dans la BasseCochinchine; 2° l'ouverture des ports du Tonkin au commerce étranger; 3° les garanties stipulées en faveur des chrétiens.

J'ai été, comme vous, frappé des inconvénients que présente notre situation actuelle vis-à-vis de la Cour de Hué, et j'ai provoqué un examen approfondi de la question. Il résulte de la conférence que j'ai eue à ce sujet, en votre présence, avec le Ministre des Affaires étrangères, que le Gouvernement admet qu'il soit donné l'assurance la plus positive à la Cour de Hué que nous ne songeons à aucune intervention au Tonkin, si le Gouvernement annamite exécute fidèlement les clauses relatives à l'ouverture des ports du Tonkin au commerce étranger et aux garanties qui ont été stipulées en faveur des chrétiens.

Quant à la révision des traités dont la mise à exécution soulève constamment des difficultés entre la Cour de Hué et le Gouvernement de la Cochinchine, le Gouvernement est d'avis que leur dénonciation immédiate ou éventuelle présenterait de graves inconvénients et qu'il y a lieu de les simplifier par voie d'interprétation et sans abandonner une œuvre que nous avons longtemps poursuivie et qui a à peine reçu un commencement d'exécution..

Les escortes des Consuls pourront être retirées de manière à rassurer complètement le Gouvernement annamite, mais vous conserverez le droit de les rétablir au cas où le Gouvernement de la Cochinchine le jugerait nécessaire à la sécurité de nos agents.

A partir du 1er janvier 1879, nous cesserions d'entretenir des détachements armés dans les ports ouverts.

A la même époque, le Gouvernement annamite aurait seul la direction du service des Douanes et la perception des droits, sous la condition de payer au Gouvernement français une somme annuelle dont le chiffre sera déterminé jusqu'à parfait acquittement de l'indemnité espagnole et des dépenses faites pour l'installation du service douanier. La Direction du service des Douanes serait maintenue à un fonctionnaire français dont les attributions et la situation seraient conformes à celles du Directeur des Douanes chinoises.

Il sera expressement stipulé que la France reviendrait à la stricte exécution du traité si la sécurité des étrangers réclamait

la présence d'une force armée dans les ports ouverts, ou si, le Gouvernement annamite n'exécutant pas fidèlement les engagements contractés, il devenait nécessaire de reprendre la direction et la perception des droits, de concert avec les fonctionnaires annamites.

Pendant le congé que doit prendre M. Rheinart, M. Philastre sera chargé de le remplacer comme Résident à Hué.

M. Philastre fera verbalement à la Cour de Hué, dès son arrivée, les communications qui précèdent.

En exigeant la stricte exécution des clauses du traité qui garantissent aux chrétiens le libre exercice de leur culte, le Gouvernement s'est engagé à faire respecter l'autorité de S. M. Tu-Duc. Vous devrez, en conséquence, déclarer de la manière la plus formelle aux évêques et faire connaître aux chrétiens de la France qu'il ne donnera aucun encouragement à des tentatives de révolte contre le Gouvernement annamite, ainsi qu'à des projets de restauration de l'ancienne dynastie nationale.

En ce qui concerne l'article 16, vous indiquerez aux Consuls des Puissances étrangères à Saïgon l'interprétation qui lui a été donnée, et vous leur demanderez de vous faire connaître leurs intentions.

Ils devront déclarer s'ils entendent en profiter, ou s'ils réclament, en faveur de leurs nationaux, l'appui de notre juridiction consulaire.

Je compte sur votre intelligente fermeté pour tenir la main à ce que la nouvelle ligne politique que le Gouvernement a adoptée soit rigoureusement poursuivie, en vous laissant le soin, si le Gouvernement annamite ne reconnaissait pas la loyauté de nos intentions par une attitude sincère, de reprendre les garanties que nous ne lui concédons qu'à titre d'essai.

MONTAIGNAC.

Le duc Decazes, Ministre des Affaires étrangères, à M. l'amiral Gicquel des Touches, Ministre de la Marine et des Colonies (1).

Paris, le 7 septembre 1877.

. J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 31 juillet dernier, et par laquelle vous m'annonciez la nomina(1) Livre jaune, no 24.

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