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N° 20. -Le Baron de Courcel, Ambassadeur de la République française à Berlin, à M. Jules Ferry,

(Extrait.)

Berlin, le 26 avril 1884.

Le Gouvernement impérial donne la plus sérieuse attention à la question du Congo, et on s'occupe en ce moment même de réunir les éléments du travail devant lui permettre de se prononcer en connaissance de cause. M. de Hatzfeldt, tout en me disant qu'il n'était pas encore arrivé à des conclusions définitives, m'a fait connaître qu'il avait traité la question du Congo avec le Chancelier de l'Empire et que trois points pouvaient dès à présent être considérés comme, acquis.

En premier lieu, le Gouvernement allemand avait reconnu que ses nationaux avaient des intérêts importants impliqués dans la question, et que ces intérêts méritaient, de sa part, un sérieux appui.

Secondement, le Gouvernement allemand, avant de fixer ses propres résolutions, avait le désir d'échanger ses vues avec les autres Gouvernements intéressés, notamment avec la France, et le Prince de Hohenlohe serait invité à vous témoigner le prix que l'Allemagne attacherait à se concerter avec vous. Enfin, pour ce qui concerne spécialement l'acte diplomatique signé, mais non encore ratifié, entre l'Angleterre et le Portugal, quels que dussent en être le sort et la portée, l'Allemagne le regardait comme ne lui étant pas opposable et comme ne pouvant, en aucun cas, porter légalement atteinte à la situation de droit des tiers non intervenus à la négociation.

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J'ai reçu votre lettre du 29 mars et j'ai connaissance de la note qui vous a été remise par le Ministre des Affaires étrangères de Portugal, en réponse à la communication que vous aviez été chargé de lui faire au sujet du traité récemment signé à Londres.

Nous n'avons pas l'intention d'engager une discussion sur les divers points relevés dans cette réponse qui ne saurait infirmer

à nos yeux la valeur des déclarations transmises par vous, le 18 mars, au Gouvernement portugais. Toutefois notre réserve ne saurait aller jusqu'à laisser s'établir un malentendu touchant la portée des assurances que le Chargé d'Affaires de Portugal à Paris avait reçues, en 1882, de M. Duclerc et qui se trouvent reproduites dans la note de M. Barboza du Bocage.

Il n'existe dans nos archives aucune trace de pareilles déclarations, et j'ai dû faire appel aux souvenirs de mon prédécesseur pour savoir si M. d'Azevedo avait exactement saisi et déterminé, en en rendant compte à son Gouvernement, le sens du langage qui lui avait été tenu.

M. Duclerc a bien voulu, le 26 du mois dernier, préciser, dans une lettre dont vous trouverez ci-joint copie, la portée des déclarations qu'il a faites au Chargé d'affaires de Portugal à Paris. Ainsi que vous le verrez, le Chef du Cabinet du 7 août 1862 s'est maintenu dans la ligne de conduite constamment suivie depuis lors par le Gouvernement français, en se bornant à constater que notre action dans la région du Congo ne devait pas s'exercer au sud du 5° 12, sans que nous eussions à nous prononcer sur la valeur des titres invoqués au delà de cette latitude par le Gouvernement portugais.

La netteté du témoignage de M. Duclerc ne peut que contribuer à nous faire regretter que les dépêches de M. d'Azevedo aient été livrées à la publicité avant que nous en eussions préalablement reçu communication.

Nous ne voulons pas insister sur ce point; mais il est indispensable que l'erreur dans laquelle paraît avoir été induit M. Barboza du Bocage soit rectifiée. Vous en prendrez occasion pour confirmer dans une nouvelle communication écrite les résolutions. déjà indiquées dans notre note du 18 mars; vous déclarerez d'une façon formelle que le traitė anglo-portugais ne peut, à nos yeux, avoir pour effet de modifier, sans notre consentement, la situation acquise à nos nationaux dans la région du Congo, et que nous entendons maintenir intégralement à leur profit les franchises dont ils ont bénéficié jusqu'à présent, soit au point de vue de la liberté de la navigation et du commerce, soit en ce qui concerne les droits de douane, de balisage ou autres.

JULES FERRY.

ANNEXE A LA DÉPÊCHE DU 3 MAI 1884.

M. Duclerc, Sénateur, à M. Jules Ferry.
26 avril 1884.

Monsieur le Ministre,

J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire avanthier et par laquelle vous me communiquez la traduction de quatre dépêches adressées au Ministre des Affaires étrangères à Lisbonne, sous les dates du 24 novembre, 9 et 11 décembre 1882, et dans lesquelles M. le Chargé d'Affaires du Portugal à Paris rend compte de divers entretiens qu'il a eus avec moi, relativement aux affaires du Congo.

D'après les termes de ces dépêches, j'aurais seulement reconnu les droits légitimes du Portugal au sud du degré 5°12' de latitude, mais reconnu, en outre, la légitimité de ses prétentions dans toute l'étendue de ces vastes régions.

Quand j'ai quitté le Ministère des Affaires étrangères, je n'en ai emporté, ni en minute, ni en copie, aucun document officiel. Avant de m'écrire la lettre à laquelle je réponds, vous avez du nécessairement rechercher si, du 7 août 1882. au 25 janvier 1883, le dossier relatif aux affaires du Congo contient une déclaration, une phrase, un mot qui confirme la version de M. le Chargé d'Affaires portugais. Je pense que vous n'avez rien trouvé qui s'écarte de la ligne de conduite suivie, à la même époque, par le Cabinet que j'avais l'honneur de présider et qui n'est certes point celle qui ressortirait de la version de cet honorable agent.

Ni dans mes souvenirs, ni dans mes notes, je ne trouve rien non plus qui justifie la traduction publiée par le Livre blanc portugais.

Voici maintenant ce qui s'est passé, lorsque le Gouvernement de la République, après en avoir reçu l'autorisation des Chambres, ratifia le traité conclu par M. de Brazza avec les chefs Batékés et manifesta par des actes significatifs la résolution d'en assurer l'exécution.

M. le Chargé d'Affaires du Portugal à Paris vint m'exprimer les inquiétudes de son Gouvernement. Je m'empressai de le rassurer. Tout d'abord je remis sous ses yeux les stipulations du traité de Brazza et nos déclarations devant le Parlement.

Jajoutai que ce traité, ratifié, allait être immédiatement exécuté; que l'expédition qui s'organisait avait pour instruction de ne pas dépasser le degré 5°12' de latitude; que, si quelque difficulté venait à s'élever (ce qui était certainement possible à de telles distances et sur tant de points divers), on nous trouverait toujours animés du désir de la résoudre dans un sentiment de loyauté et d'amitié.

Conclure de ces paroles amicales que j'ai reconnu non seulement les droits du Portugal, mais encore la légitimité de ses prétentions sur toutes les régions situées au delà de cette limite du 5°12', c'est là une interprétation tout à fait inadmissible. Outre que je n'avais pas qualité pour délivrer au Portugal un certificat de souveraineté ou de suzeraineté, je n'avais nul droit de supprimer à son profit les souverainetės indépendantes, si nombreuses dans ces régions, et enfin, considération plus forte que toutes les autres, ce n'est pas au moment où je voulais ouvrir à l'action de la France les régions et la navigation du Congo que j'aurais reconnu à une Puissance quelconque le droit de nous en fermer l'accès.

DUCLERC.

N° 22.

M. de Laboulaye à M. Jules Ferry.
Lisbonne, le 11 mai 1884.

La convention relative au Congo ne sera pas votée dans la session actuelle des Cortès, qui sera très probablement close le 17. Sur la demande du Gouvernement portugais, l'Angleterre a consenti à prendre l'initiative de modifications à apporter aux clauses qui ont soulevé les principales objections de la part des autres puissances intéressées dans le commerce du Congo.

DE LABOULAYE.

No 23.— M. Jules Ferry, aux Ambassadeurs de la République française à Berlin, Londres, Vienne, Saint-Pétersbourg, Madrid, Constantinople, Berne et Rome; aux Ministres de la République française à Copenhague, Stockholm, Belgrade, Bucarest, Athènes, Washington, Tanger, Tokio, Téhéran; aux Chargés d'Affaires de la République française à Munich, la Haye et Pékin.

Paris, le 31 mai 1884.

Le président de l'Association internationale du Congo m'a adressé le 23 avril dernier, une lettre dont j'ai l'honneur de vous envoyer ci-joint copie (1); vous trouverez également ci-annexé copie de la réponse que j'ai faite à sa communication.

Cette correspondance constate l'accord conclu avec nous par l'Association internationale et aux termes duquel cette Société s'engage à ne céder à aucune Puissance autre que la France les (1) Voir cette lettre plus haut, p. 326.

territoires et stations fondés par elle au Congo et dans la vallée du Niadi-Quillou. Nous promettons en retour de respecter les stations et territoires de l'Association et de ne pas mettre obstacle à l'exercice de ses droits.

L'entente ainsi intervenue aura donc pour effet immédiat de faciliter les opérations du Commissaire du Gouvernement français dans l'Ouest africain. Elle garantit pour l'avenir l'œuvre poursuivie dans ces régions par le Gouvernement de la République contre l'intervention d'une Puissance tierce qui se substi tuerait à l'Association; à ce double point de vue, je n'ai pas hésité à y donner mon assentiment. J'ai tenu à vous fixer sur la nature et sur l'objet de ces arrangements; rien ne s'oppose d'ailleurs à ce que, dans vos entretiens, vous fassiez usage des indications qui précèdent.

JULES FERRY.

N° 24. M. de Laboulaye à M. Jules Ferry.

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Lisbonne, le 4 juin 1884.

M. d'Andrade Corvo partira incessamment ponr rejoindre son poste. Ses instructions sont de déclarer à Votre Excellence que le Portugal admet une Commission internationale composée des délégués des Puissances intéressées, est prêt à faire de nouvelles concessions pour les tarifs, et assure à tous les étrangers un traitement égal à celui de ses nationaux. Le Marquis de Penafiel fera les mêmes déclarations au Cabinet de Berlin.

Lorsque l'opinion des divers Gouvernements intéressés sera connue, les Gouvernements anglais et portugais se mettront d'accord sur le meilleur moyen de constater l'entente générale, soit par une Conférence, soit par des échanges de notes.

DE LABOULAYE.

N° 25. S. A. S. le Prince de Bismarck, Chancelier de l'Empire allemand, au baron de Courcel, Ambassadeur de la République française à Berlin.

Berlin, le 13 septembre 1884.

Après avoir rendu compte à Sa Majesté l'Empereur et Roi des entretiens que nous avons eus à Varzin, j'en résume le con

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