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sa dignité dans les églises auxquelles elles sont attachées, soit en réglant les dépenses qui y sont nécessaires, soit en assurant les moyens d'y pourvoir (décret précité, art. 1er et 37);

Que le chef de la commune est de droit membre du conseil de fabrique (même décret, art. 2);

Que l'article 36 accorde à la fabrique la jouissance de certains biens et revenus;

Que, d'après l'article 59, tout acte contenant des dons ou legs à une fabrique est soumis à l'autorisation du pouvoir supérieur; que, d'après l'article 60, les maisons et biens ruraux appartenant à la fabrique sont affermés, régis et administrés par les bureaux des marguilliers, dans la forme déterminée pour les biens communaux;

Que l'autorisation du pouvoir supérieur est nécessaire pour disposer des mêmes biens (art. 62);

Que les procès à soutenir au nom de la fabrique, soit en demandant. soit en défendant, sont également soumis à l'autorisation (art. 77); qu'enfin, d'après les articles 92 et suivants du décret, les communes sont obligées de suppléer, pour certaines charges, à l'insuffisance des revenus de la fabrique après avoir examiné et fait examiner le budget de celle-ci par les autorités supérieures ;

Attendu que ces principes ont été maintenus sous le régime de la Constitution belge et mis en harmonie avec nos lois politiques, ainsi qu'il ressort des articles 76, 77 et 81 de la loi communale combinés avec l'article 60 du décret du 30 décembre 1809, spécialement en ce qui concerne le changement du mode de jouissance de tout ou partie des biens et les actes de locations et adjudications qui doivent être soumis à l'approbation de la députation permanente; de l'art. 131, no 90, de la loi communale, relativement aux secours à accorder aux fabriques d'église et aussi de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, qui soumet les budgets et les comptes des fabriques à l'avis du conseil communal et à l'approbation de la députation permanente, et sanctionne, en son article 15, par la déchéance de tout subside de la commune, de la province et de l'Etat, l'omission ou le refus de remettre lesdits budgets et comptes à des époques fixées ou de fournir les pièces et explications demandées par la députation; qu'ainsi encore, en vertu de l'article 10 de la même loi, le trésorier de la fabrique est réputé comptable public pour tous les actes ou faits se rapportant à sa gestion financière;

Attendu que la loi du 4 mars 1870 n'a abrogé ni expressément ni tacitement les articles 110, 127 de la loi provinciale et 88 de

la loi communale, lesquels peuvent parfaitement subsister concurremment avec l'art. 15 de la loi en question et recevoir leur application non seulement dans les cas prévus, mais surtout, comme cela se présente au procès, dans les cas non prévus par cet article; que semblable abrogation ne saurait résulter de ce que lors des travaux préparatoires de la loi certains orateurs auraient à tort exprimé l'avis que l'institution des commissaires spéciaux créés par des lois antérieures ne concernait pas les fabriques d'église;

Attendu qu'en présence des deux avertissements donnés inutilement tant au conseil de fabrique de l'église de Julémont qu'au bureau des marguilliers, la députation permanente avait évidemment le droit, dont elle a usé, de déléguer un commissaire à l'effet d'exécuter jusqu'au bout les mesures prescrites, de représenter entièrement la fabrique, et, selon les nécessités, de remplacer à la fois le conseil de fabrique, le bureau des marguilliers et le trésorier;

Qu'il suit de là que le demandeur a qualité pour ester en justice au nom de la fabrique; Au fond:

Attendu que la défenderesse ne justifie vis-à-vis de la fabrique d'église de Julémont d'aucun titre à l'occupation des lieux litigieux appartenant à celle-ci;

Qu'elle reconnaît même n'avoir contracté aucun lien de droit avec ladite fabrique et se borne à alléguer, sans même en apporter la preuve, que la chambre où elle tient l'école serait mise à sa disposition par le sieur Péters, sacristain;

Attendu que si la fabrique n'a pu légalement concéder aucun droit à la jouissance de l'immeuble sans autorisation de la députation permanente, à plus forte raison en est-il ainsi de Péters qui, prétend-on, jouirait de la maison en question à titre d'acompte à valoir sur son traitement de sonneur de cloches, de nettoyeur de l'église et de sacristain;

Attendu qu'il n'a pas été contesté que la défenderesse occupe les lieux depuis le mois de décembre 1879; que cette occupation peut être évaluée à la somme de 500 francs;

Par ces motifs, de l'avis conforme de M. Nicolaï, substitut du procureur du roi, condamne la défenderesse à vider les lieux et à les rétablir dans leur état primitif, dans le délai de deux jours à dater de la signification du présent jugement, sous peine d'y être contrainte;

La condamne, en outre, à 500 francs de dommages-intérêts, aux intérêts légaux et aux dépens.

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Dans un acte de concession de chemin de fer, constitue une vente conditionnelle du droit de péages concédé ta clause par laquelle l'Etat se réserve, moyennant indemnité, de reprendre l'exploitation de la ligne (1). L'article 1615 du code civil ne se réfère pas au titre De la distinction des biens (2). En conséquence, lorsque l'Etat use de la faculté

qui lui est réservée, le concessionnaire doit lui livrer tous les accessoires du droit de péages; en d'autres termes, tout ce qui sert à l'exploitation, y compris le matériel roulant, l'outillage et le mobilier.

Si les parties ont fixé à l'avance le prix de rachat et que ce prix soit, au choix des concessionnaires, ou bien le montant du capital présumé nécessaire pour la construction de la ligne et l'achat du matériel, ou bien celui du capital du revenu de la ligne pendant une période déterminée, elles ont suffisamment manifesté que dans leur intention le matériel doit être livré sans indemnité supplémentaire.

(L'ÉTAT BELGE, -C. LA SOCIÉTÉ DU CHEMIN DE FER DE LIERRE A TURNHOUT.)

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Entendu les parties en leurs moyens et conclusions; Vu le jugement de compétence du tribunal de ce siège, en date du 20 août dernier, enregistré, sur expédition;

Attendu qu'il s'agit au procès d'interpréter la clause de l'article 51 du cahier des charges de la défenderesse, ainsi conçue: « Le gouvernement se réserve la faculté de racheter le chemin de fer. Il ne pourra être fait usage de la faculté de rachat qu'après que le chemin aura été exploité pendant vingt ans, et le rachat se ferait alors, au choix des concessionnaires, soit en capitalisant à raison de 4 p. c. le revenu garanti par l'Etat, soit en calculant le revenu net des sept dernières années d'exploitation dont on retranchera celui des deux

(1) Sur la nature du droit des concessionnaires, voy. app. Gand, 13 août 1874) (PASIC. BELGE, 1874, II, 33); cass. belge, 13 juin 1878 (PASIC. BELGE, 1878, I, 288); LAURENT, t. VI, p. 47 et suiv.

(2) Comp. LAURENT, t. XXIV, p. 180 et suiv. La proposition avancée dans le jugement ne paraît vraie qu'en ce sens qu'il faut avant tout s'en référer à l'inPASIC., 1882. - 3o PARTIE.

années les moins favorables et en capitalisant à raison de 5 p. c., plus une prime de 15 p. c., la moyenne du revenu des cinq années restantes >>;

Attendu que spécialement il y a lieu de décider s'il est vrai, comme le soutient le demandeur, que le matériel roulant, l'outillage et le mobilier de la ligne doivent être livrés à l'Etat avec les terrains, bâtiments, rails, billes, ouvrages d'art et matériel fixe;

Attendu que le rapport de droit que le susdit article 51, § 1er, établit entre les parties en cause est une vente éventuelle et conditionnelle; qu'en effet, tous les éléments essentiels de ce contrat se trouvent réunis en une chose, « un chemin de fer », dit le texte, un prix et le consentement des parties;

Attendu qu'en vertu de l'article 1602 du code civil, le vendeur est obligé d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige; que tout pacte obscur et ambigu s'interprète contre lui;

Attendu que cette règle prend un caractère absolu lorsque le doute s'applique à l'objet de la vente, à la chose vendue elle-même, parce que le vendeur est censé connaître parfaitement la chose qu'il vend avec tous ses accessoires;

Attendu que c'est en vain que la défenderesse nie qu'il y a vente, alors que la lettre de la clause « faculté de rachat »>, faculté de racheter, affirme positivement le contraire; alors qu'il est évident que le consentement des parties a pour effet de faire passer une chose qui va être ci-dessous spécifiée du patrimoine de la défenderesse dans celui du demandeur, moyennant un certain prix; alors que l'article 1582 du code civil définit la vente << une convention par laquelle l'une des parties s'oblige à livrer une chose, et l'autre à la payer; alors, en un mot, que la nature du contrat se trouve clairement déterminée par la dénomination qui lui est donnée par les parties, par ses éléments essentiels et ses conséquences juridiques;

Attendu que puisqu'il y a vente, il convient, pour arriver à une solution, d'en fixer l'objet, en d'autres termes, de déterminer ce qu'il faut entendre par les mots « chemin de fer >> contenus dans l'article 51, § 1er;

Attendu que les mots « chemin de fer» sont employés par le cahier des charges dans des acceptions diverses; qu'ils désignent parfois

tention des parties. L'objet du contrat étant d'ailleurs, d'après le jugement, incorporel, les dispositions des titres De la distinction des biens et De la propriété relativement à ce qui doit être considéré comme l'accessoire des immeubles ou meubles corporels, sont par là même sans application possible.

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le chemin de fer, la voie ferrée, sous sa consistance matérielle; que dans d'autres dispositions, notamment dans les articles 20, 30, 41, 47, ils désignent un ensemble de choses, le matériel, l'outillage, le mobilier aussi bien que la voie ferrée; que, dès lors, pour fixer la portée de l'article 51, il faut recourir aux règles d'interprétation tracées par le code à la section V du livre III, titre III;

Attendu d'abord, dans cet ordre d'idées, qu'il est certain que l'interprète ne peut donner aux mots « chemin de fer » la signification de voie ferrée dans le sens restreint; qu'en effet, le chemin ainsi envisagé fait partie du domaine public, appartient à l'Etat ; que l'on ne peut supposer que l'Etat ait voulu racheter sa propre chose; qu'une telle interprétation serait contraire à la règle de l'article 1157 du code civil, qui dit que lorsqu'une clause est susceptible de plusieurs sens, il faut l'entendre de manière à lui donner quelque effet, plutôt que dans un sens où elle n'en aurait aucun;

Attendu, en second lieu, que l'article 1156 permet au juge de rechercher quelle a été la commune intention des parties, plutôt que de s'attacher au sens littéral des termes;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de la convention que cette commune intention a été nécessairement de transférer à l'Etat un droit de péages sur la ligne de Lierre à Turnhout moyennant un prix déterminé;

Qu'en effet c'est ce droit qui compète à la défenderesse en vertu de l'article 29 du cahier des charges, comme il compète à tout concessionnaire de chemin de fer, le contrat de concession étant une convention en vertu de laquelle le concessionnaire s'oblige à construire et exploiter un chemin de fer, suivant les clauses et conditions d'un cahier des charges, moyennant le droit de percevoir pendant un certain nombre d'années des droits ou péages;

Attendu que c'est ce même droit de péages qu'acquiert l'Etat par l'effet de la clause de rachat, ce même droit qui entre et subsiste dans son patrimoine comme entreprise de transport;

Attendu que ce droit de péages implique la nécessité de l'exploitation de la ligne (convention du 10 janvier 1853, art. 1er, 11, 19, 21, 50, 15, 49 du cahier des charges);

Attendu, dans le fait, que ce droit de péages est en état d'exploitation comme il le devait être dans l'intention de l'acheteur et de la venderesse au moment du contrat, puisque c'est un chemin de fer en exploitation que le gouvernement s'est réservé de racheter vingt ans après la concession de la ligne;

Attendu que le matériel roulant, l'outillage et le mobilier servent à l'usage constant de cette exploitation et, par conséquent, à l'exer

cice perpétuel du droit de péages; qu'en effet, ils sont dans leur ensemble les instruments au moyen desquels se transportent les voyageurs et les marchandises; qu'on ne saurait, en un mot, concevoir, dans les prévisions du contrat, de péages sans le matériel;

Attendu qu'en vertu de l'article 1614 du code civil, la chose doit être livrée dans l'état où elle se trouve au moment de la vente;

Attendu qu'en vertu de l'article 1615 l'obligation du vendeur comprend les accessoires de la chose et tout ce qui sert à son usage perpétuel;

Attendu qu'il faut entendre par accessoires non seulement les accessoires proprement dits, tels qu'ils sont déterminés au titre De la distinction des biens, mais encore tous les droits généralement quelconques du vendeur sur la chose vendue;

Attendu que les règles de la vente sont applicables à la cession des droits dits « incorporels »; que cette cession est qualifiée à diverses reprises de vente par la loi, notamment dans les articles 1692 et 1693 du code civil;

Qu'au surplus, l'article 1692, sous la rubrique « Cession des créances et des droits », prescrit, en matière de cession, des principes identiques;

Attendu qu'il suit de ce qui précède que le matériel est légalement, juridiquement, l'accessoire du droit cédé; que l'on peut dire qu'il fait partie intégrante du droit de péages que la défenderesse s'est engagée à vendre à l'Etat;

Attendu qu'il n'est point contesté que ce matériel appartenait à la défenderesse au moment où l'Etat a manifesté, par l'intentement de l'action, la volonté d'exercer le droit qui lui compète en vertu de l'article 51 du cahier des charges;

Attendu que la vente est parfaite entre parties et la propriété transférée par le seul effet des conventions;

Qu'il en résulte, existente conditione, que le chemin de fer ou le droit de péages est la propriété de l'Etat avec tous ses accessoires, le matériel roulant, l'outillage et le mobilier, aussi bien que les terrains, billes, rails, ouvrages d'art, bâtiments et matériel fixe;

Attendu que, pour échapper aux conséquences déduites et démontrer que l'art. 1615 n'est pas applicable à l'espèce, la défenderesse objecte que le concessionnaire qui exploite lui-même n'est point forcé de se servir de son propre matériel, qu'il peut se servir du matériel d'autrui, d'un matériel loué, par exemple;

Attendu que cette objection repose sur une éventualité impossible dans les prévisions du contrat et contraire au texte de l'article 49 du cahier des charges, qui dit qu'à l'expiration

du délai fixé pour la concession, le gouvernement sera subrogé à tous les droits des concessionnaires et entrera immédiatement en possession du matériel, dont le prix sera fixé par expertise contradictoire et payé aux concessionnaires;

Qu'au surplus et à défaut de ce texte formel elle ne prouverait nullement que l'article 1615 n'est pas applicable; qu'il est bien vrai que dans de telles prévisions le matériel ne serait point acquis à l'Etat, mais en vertu d'un principe inhérent à la nature des choses, à savoir que le vendeur ne peut transférer à l'acheteur plus de droits qu'il n'en a lui-même;

Attendu que c'est également en vain que la défenderesse invoque un arrêt de la cour de cassation de Belgique du 13 juin 1878, qui décide que les règles du contrat de vente ne sont pas applicables aux concessions de péages;

Qu'il ne s'agit pas, en effet, de régler, dans l'espèce, d'après les principes de la vente, une concession de péages, mais bien de déterminer la portée d'une convention accessoire au contrat de concession, la portée de l'article 51 du cahier des charges qui, ainsi qu'il est établi ci-dessus, contient tous les éléments de la vente une chose, un prix et le consentement des parties;

Attendu, enfin, que c'est bien à tort que la défenderesse, pour démontrer que le matériel doit se payer à part et n'est point compris dans le prix fixé à l'article 51, § 2, argumente de l'article 49 du cahier des charges, aux termes duquel l'Etat, en entrant en possession du chemin de fer à l'expiration de la concession, est tenu de payer le prix du matériel à dire d'expertise;

Qu'assurément l'Etat doit, en cas de rachat, payer le matériel, mais qu'il ne faut pas en conclure que le mode de payement doit être le même qu'en cas d'expiration de la concession, alors que les parties ont fixé à l'article 51, § 2, deux modes de payement entièrement distincts de celui de l'article 49;

Attendu, au surplus, que l'Etat, en payant d'après l'un des deux modes fixés à l'art. 51, § 2, du cahier des charges, paye le matériel;

Qu'en effet, le susdit article réglant le premier de ces modes porte : « Le rachat se fera au choix des concessionnaires, soit en capitalisant à raison de 4 p. c. le revenu garanti par l'Etat »;

Attendu, pour l'intelligence de cette stipulation, que dans la convention du 10 janvier 1853, par laquelle les futurs concessionnaires s'engageaient à construire et à exploiter le chemin de fer, le gouvernement consentait leur garantir un intérêt annuel de 4 p. c. sur le capital affecté à la construction dudit chemin de fer; que tout en fixant ce capital à cinq

millions de francs, la convention disposait que l'Etat ne pourrait être tenu à payer une somme plus forte que celle représentant 4 p. c. de ce capital affecté à la construction de la ligne;

Attendu que lorsque cette convention fut soumise à l'approbation des chambres, il fut reconnu que le chemin ne pouvait coûter 5,000,000 de francs; que le lendemain, le ministre des travaux publics présenta un amendement, qui est devenu l'article 2 de la loi autorisant la concession, aux termes duquel la garantie d'intérêt ne pourrait porter que sur le capital que le ministre des travaux publics, à qui en appartiendra l'appréciation, aura reconnu nécessaire à l'exécution de l'entreprise et qui ne pourra dépasser cinq millions de francs;

Attendu que, dans ces circonstances, intervint, le 2 juin suivant, une convention nouvelle, disposant que le minimum d'intérêts ne porterait que sur un capital de 4,300,000 fr. affecté à l'exécution de l'entreprise et serait ainsi réduit à 172,000 francs de revenu annuel;

Attendu que le cahier des charges, disposant en l'article 51 que le rachat se fera en capitalisant à raison de 4 p. c. le revenu garanti par l'Etat, est annexé aux susdites conventions des 10 janvier et 2 juin;

Qu'il s'ensuit que ces mots de l'article 51 veulent dire que le prix de rachat sera égal au capital affecté à la construction du chemin de fer ou à l'exécution de l'entreprise;

Attendu que ledit capital affecté à la construction du chemin de fer, le capital sur lequel porte le minimum d'intérêts et qui est en même temps le prix de rachat, comprend le matériel;

Qu'en effet, les discours prononcés à la chambre des représentants par MM. Loos, Dechamps et Malou, au sénat par MM. Michiels-Loos, Van Havre et Spitaels, ce dernier rapporteur de la loi autorisant la concession, démontrent à l'évidence que le capital affecté à la construction du chemin de fer comprenait le coût de la voie ferrée et celui du matériel;

Attendu que les statuts de la société de Lierre à Turnhout ne sont pas moins décisifs; qu'ils prouvent suffisamment que le susdit capital de 4,300,000 francs comprenait le matériel, dans l'esprit des concessionnaires; qu'en effet, les statuts, après avoir fixé à 4,300,000 francs le fonds social représenté par 8,600 actions de 500 francs, portent dans leur article 8:

« Art. 8. De leur côté, MM. Masterman, Laing et Ashwell, par leur mandataire, ont fait apport à la société de la convention verbale par laquelle M. Wythe, entrepreneur à

Reigate, s'engage à construire le chemin de fer de Lierre à Turnhout, moyennant le produit de l'émission des 8,600 actions et des intérêts à en provenir, à satisfaire aux charges et obligations resultant de l'acte de concession et du cahier des charges, à faire l'avance du cautionnement, à payer aux actionnaires 4 p.c. d'intérêt sur les versements des actions, jusqu'à la mise en exploitation de la ligne de Lierre à Turnhout; à faire face aux frais d'administration de la société également jusqu'à la mise en exploitation et à fournir le matériel d'exploitation. En outre, MM. Masterman, Laing et Ashwell, par leur mandataire, ont garanti l'émission et la souscription des 8,600 actions mentionnées à l'art. 6 ci-dessus»;

Attendu qu'il résulte donc clairement de ce qui précède que le premier mode de rachat comprend la valeur du matériel; qu'en conséquence l'Etat payerait deux fois cette valeur si, comme le soutient la défenderesse, il était tenu, en exerçant la clause de rachat, de payer le prix de ce matériel fixé par expertise contradictoire; que vainement la défenderesse allègue que le cahier des charges ne détermine pas même approximativement ni la quantité, ni la qualité du matériel; que cette assertion est contraire au texte des articles 18 et 19 du cahier des charges qui fixent le minimum des convois, autorisant le gouvernement à fixer le nombre et la classe des voitures, stipulant que le nombre des convois sera toujours en rapport avec les besoins du commerce; au texte de l'article 21 qui oblige le concessionnaire à entretenir le matériel et à le maintenir en situation de remplir sa destination;

Que vainement aussi la défenderesse objecte que, pendant la durée de l'exploitation, le concessionnaire est très ordinairement tenu d'augmenter le matériel; que cette objection n'est qu'une simple allégation qui ne prouve rien contre la convention des parties, qui fixe à 4,300,000 francs le prix de rachat du chemin de fer, matériel compris;

Attendu que le second mode de fixation du prix consiste à calculer le revenu net des sept dernières années d'exploitation, dont on retranchera les deux années les moins favorables, et à capitaliser à raison de 5 p. c., plus une prime de 15 p. c., la moyenne des cinq années restantes;

Attendu que le revenu dont il s'agit ici est le revenu net de tout ce que produit le chemin de fer, y compris le matériel, et qu'ainsi le capital, qui, dans ce cas, forme le prix de rachat, comprend la valeur du matériel d'exploitation, de l'outillage, du mobilier, aussi bien que celle des terrains, billes, rails, bâtiments, ouvrages d'art et matériel fixe;

Attendu que vainement la défenderesse, pour prétendre que ce second mode de fixa

tion du prix ne contient pas le matériel, argumente de ce que ce mode entraînerait des conséquences absurdes, parce que d'un côté les lignes qui ont besoin de la plus grande somme de matériel sont souvent les moins productives, et d'un autre côté, parce que les produits d'un chemin de fer sont dus non seulement à l'usage de la voie et du matériel, mais encore à d'autres circonstances et, notamment, à l'organisation du service d'exploitation;

Attendu que ces allégations tombent en présence de cette considération que tout mode de fixation du prix de rachat, établi plus de vingt ans à l'avance, constitue nécessairement un forfait dont les conséquences ne peuvent être prévues que très approximativement;

Attendu donc, en résumé, que les deux modes de fixation de prix fixés en l'art. 51, §2, comprennent nécessairement la valeur en capital du matériel d'exploitation, de l'outillage et du mobilier, puisque le prix consiste ou dans le capital qui a été jugé à forfait nécessaire pour la construction de la ligne y compris le matériel, ou dans le capital qui représente, d'après les résultats acquis et avec une augmentation fixée à forfait, le revenu de la ligne y compris le matériel;

Attendu qu'il suit de ce qui précède que la défenderesse ne peut se refuser de livrer à l'Etat le matériel d'exploitation, l'outillage et le mobilier, pas plus que les terrains, rails, billes, batiments, ouvrages d'art, matériel fixe, moyennant la somme de 4,300,000 fr. qu'elle a déclaré accepter comme prix de rachat;

Par ces motifs, jugeant consulairement et statuant en premier ressort, condamne la défenderesse à faire remise au demandeur, moyennant payement ou versement à la caisse des dépôts et consignations à Turnhout de la somme de 4,300,000 francs, du chemin de fer de Lierre à Turnhout en l'état où il doit se trouver, aux termes des conventions de concession du 10 janvier et du 2 juin 1853, et du cahier des charges y annexé, avec les terrains, rails, billes, ouvrages d'art, bâtiments, matériel fixe et roulant, outillage, mobilier des stations, en un mot tout ce qui a été acquis et construit pour l'établissement du chemin de fer, en exécution des conventions et du cahier des charges prémentionné; Condamne la défenderesse aux dépens de l'instance;

Déclare le présent jugement exécutoire par provision, nonobstant appel et sans caution. Du 2 novembre 1881. Tribunal de Turnhout, jugeant consulairement. Prés. M. Caers, juge. Pl. MM. Demeur, Duvivier et Devolder (du barreau de Bruxelles).

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