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de la loi; mais si la déportation n'est pas perpétuelle, le criminel dans ce cas se trouve dans la situation du prisonnier.

L'exilé ne peut demeurer dans son propre pays; mais il n'est pas contraint d'en habiter un autre de préférence; et de sa résidence dans un pays étranger, on ne doit pas présumer qu'il ait l'intention d'y établir son domicile, surtout s'il nourrit l'espoir de rentrer dans sa patrie.

Domicile des femmes

§ 659. Le domicile de la femme mariée est celui de son mari. Seulement, dans le cas où la femme intente un procès en sé- mariées. paration de corps ou en divorce selon le pays, on prend pour base de la juridiction le dernier domicile conjugal, sans s'inquiéter désormais des nouveaux domiciles que pourrait acquérir le mari pour déjouer les calculs de sa femme et se soustraire à ses poursuites; autrement la loi qu'elle invoque pour obtenir justice pourrait être sans force.

Quand la séparation ou le divorce a été prononcé, ou bien quand le mari est mort, la femme recouvre la faculté de changer de domicile; mais elle conserve le dernier domicile conjugal jusqu'à ce qu'elle en ait changé effectivement animo et facto, d'intention et de fait. Toutefois certains auteurs, se fondant sur la généralité des termes de l'article 108 du Code civil, ont soutenu que la femme qui a obtenu ou contre laquelle a été rendu un jugement de séparation' de corps ne peut se choisir un domicile distinct de celui de son mari. Nous leur répondrons avec Demolombe que l'article 108 n'étant que le corollaire des articles 214 et 102 dont les prescriptions s'effacent devant le jugement de séparation, ne doit plus mettre obstacle au libre choix d'un domicile par la femme. L'équité d'ailleurs impose cette solution; innocente ou coupable, la femme une fois séparée ne doit plus être à la discrétion du mari*.

§ 660. Le domicile de l'enfant légitime est celui de ses parents ou de ceux qui les remplacent suivant la loi. Les enfants naturels ont le domicile de celui de leurs parents, père ou mère, qui les a reconnus. Si l'on se trouve en présence d'une double reconnaissance, celle du père attribue à l'enfant un domicile à l'exclusion de celle de la mère.

Si l'enfant n'est reconnu ni par son père ni par sa mère, il a son domicile dans l'hospice où il est reçu (art. 15 du décret du 19 jan

* Merlin, Rép., t. XVI, vo Domicile, §5; Dalloz, Rec. alph., t. II, p. 375, ° Domicile, no 9; Zacharice, t. I, p. 280; Demolombe, t. I, pp. 568 et suiv., n° 358.

Domicile des enfants.

Domicile des domestiques.

vier 1811) ou chez la personne qui a pris à sa charge ses frais d'éducation (art. 347 du Code pénal)*. Ainsi, si lorsque l'enfant est né, les parents étaient en voyage ou absents temporairement de leur domicile, c'est ce domicile, et non le lieu fortuit ou accidentel de la naissance, qui est le domicile de l'enfant.

Les enfants nés sur mer sont considérés comme appartenant au même pays que leurs parents et comme y étant domiciliés.

Jusqu'à ce que l'enfant ait atteint sa majorité, ou tant qu'il n'est pas émancipé, ou tant qu'il n'est pas marié, son domicile passe par tous les changements de celui de l'auteur duquel il a reçu son domicile d'origine. Il suit aussi celui de la mère ou du tuteur après la mort du père, et celui du tuteur après la mort du père et de la mère.

Nous lisons à ce sujet dans Pothier: « Les enfants suivent le domicile que leur mère établit sans fraude, lorsque ce domicile lui est propre et que, demeurant en viduité, elle conserve la qualité de chef de famille; mais lorsqu'elle se remarie, quoiqu'elle acquière le domicile du second mari en la famille duquel elle passe, ce domicile de son second mari ne sera pas celui de ses enfants, qui ne passent pas comme elle en la famille de leur beau-père; c'est pourquoi ils sont censés continuer d'avoir leur domicile au lieu où l'avait leur mère avant que de se remarier, comme ils seraient censés le conserver, si elle était morte (1). »

Wharton ajoute que le domicile de l'enfant qui habite avec sa mère quand elle est veuve, est le domicile de sa mère plutôt que celui de son tuteur; mais son domicile n'est pas changé par un nouveau mariage de sa mère.

Lorsque le mineur a perdu ses parents, il a pour domicile celui de son tuteur, qui peut changer ce domicile; mais, selon les lois de quelques pays, il ne le peut sans la permission d'un tribunal.

Les aliénés sont regardés comme des mineurs ils ont le domicile du curateur que la loi leur a choisi.

En règle générale, les personnes dépendantes, tant qu'elles le demeurent, et l'enfant jusqu'à sa majorité conservent leur dernier domicile jusqu'à ce qu'ils le changent de leur propre gré.

§ 661. Le domestique a le même domicile que son maître. L'article 109 du Code civil français porte que « les majeurs qui servent

* Cf. Jugement du tribunal civil de Rouen, 13 nov. 1877, journal le Droit du 28 décembre 1877.

(1) Pothier, Introduction aux Coutumes, p. 7, § 19.

ou travaillent habituellement chez autrui ont le mème domicile que la personne qu'ils servent ou chez laquelle ils travaillent, lorsqu'ils demeurent avec elle dans la même maison ou dans des dépendances de cette maison ». Cet article est introduit d'un droit nouveau *.

Dans ce cas, la loi argentine fait une exception pour la femme mariée qui, comme ouvrière ou domestique, habite une autre maison que son mari. Cette exception n'est que trop juste; elle ressort en effet de l'esprit même de la loi, qui ne donne à la femme mariée d'autre domicile que celui de son mari, bien qu'elle séjourne dans un autre endroit avec sa permission. Beaucoup d'auteurs français sont d'avis qu'à défaut de terme exprès, l'article 109 rapproché de l'article 108 contient virtuellement cette exception. Ces jurisconsultes assimilent même à la situation de la femme mariée en service chez une tierce personne celle de l'interdit au service d'autrui. Cet interdit conserve son domicile chez son tuteur, comme la femme conserve le sien chez son mari.

Domicile des fonctionnaires

§ 662. Les fonctionnaires publics ont de plein droit leur domicile dans le lieu de l'exercice de leurs fonctions, si ces fonctions sont publics. stables, non simplement provisoires ou périodiques; mais quand ils sont appelés à une fonction publique purement temporaire ou révocable, ils conservent le domicile qu'ils avaient antérieurement, s'ils n'ont pas manifesté d'intention contraire. Pour parler d'une manière plus précise, il est généralement admis qu'un emploi qui rend la résidence indispensable confère le domicile dans l'endroit ou le fonctionnaire est tenu de résider. Ainsi les prêtres ont leur domicile au siège de leurs cures; le domicile réel d'un évêque est au chef-lieu de son diocèse. En pareil cas, l'acceptation de la fonction, la prestation de serment par exemple équivaut à la fixation de son domicile dans le lieu d'exercice des fonctions. Pas n'est besoin de la double déclaration dont parle l'article 104 du Code civil. Les termes de l'article 107 ne sauraient à cet égard laisser subsister le plus léger doute, et la théorie de Pothier d'après laquelle celui qui est pourvu d'un emploi inamovible n'est domicilié dans le lieu de l'exercice de ses fonctions que lorsqu'il y est arrivé, n'est plus vraie de nos jours. M. Demolombe regrette cette modification apportée par l'article 107 à l'ancien droit **.

En Angleterre, il a été jugé qu'une fonction dans le gouvernement des Indes, de nature à imposer la résidence dans le pays, crée un

* Merlin, Répert., v. Domicile, t. IV, § 4, no 2 ct t. XVI, § 2.

Cf. Rapport fait au Tribunal par M. Mouricault, le 18 ventòse an II; Pothier, Introd. génér, aux Coutumes, n° 15; Demolombe, t. I, no 364.

Cas d'un attaché de la

domicile indien; et, malgré le retour dans sa contrée d'origine avec l'espoir de ne plus la quitter, le fonctionnaire conserve néanmoins ce domicile indien tant qu'il est sujet à être appelé à remplir de nouveau la fonction qui le lui avait conféré.

Les ambassadeurs et les consuls conservent le domicile du pays qu'ils servent ou qu'ils représentent.

<< L'envoyé d'un prince étranger, dit Vattel, n'a point son domicile à la cour où il réside. »

D'ailleurs nous verrons plus loin que la maison d'un ambassadeur est considérée comme faisant partie du territoire de son souverain. Mais, comme le même principe ne s'applique pas au domicile des consuls, il faut chercher une autre base à la règle, et on la trouve dans le devoir qu'ont ces fonctionnaires publics d'agir dans l'intérêt et de se conformer aux sentiments de l'État qui les accrédite; c'est pourquoi la doctrine se borne à la conservation du domicile national par ces fonctionnaires lorsqu'ils sont envoyés hors de leur pays.

Mais si un gouvernement emploie dans cette capacité les services d'une personne qui réside déjà à l'étranger, ce qui est fré– quemment le cas pour les consuls, le domicile de cette personne n'est pas changé par le fait de l'emploi qui lui est ainsi confié.

§ 663. Les règles qui précèdent ne paraissent pas absolues, car légation du les annales judiciaires y mentionnent plusieurs exceptions.

Portugal à

Londres.

Phillimore cite entre autres le cas d'un sujet portugais mort à Londres alors qu'il remplissait les fonctions d'attaché à la légation de son pays d'origine, et dont la succession a été régie par la législation anglaise, c'est-à-dire la législation du pays de résidence. Ce Portugais résidait depuis plusieurs années en Angleterre comme agent d'une compagnie faisant le commerce des vins, lorsqu'il fut nommé attaché à la légation du Portugal. Il continua de résider en Angleterre, où il mourut quand il occupait encore le poste d'attaché. Il n'existait point de preuve qu'il fût jamais retourné en Portugal ou qu'il eût eu des rapports avec quelqu'un dans ce pays; seulement dans son testament, il déclarait être étranger et de plus attaché de légation et avoir toujours eu l'intention de revoir son pays, de sorte qu'il estimait que ses biens n'étaient pas sujets au droit imposé sur les legs. Or il fut établi d'abord qu'il avait acquis un domicile anglais avant d'être devenu attaché de légation, ensuite que sa nomination d'attaché ne lui avait point fait recouvrer son domicile d'origine, il fut décidé en conséquence que ses biens personnels étaient passibles du droit de legs.

du soldat et

§ 664. Un soldat n'acquiert pas un domicile dans le lieu où il est Domicile en garnison; mais il conserve son domicile sur le territoire du sou- du marin. verain au service duquel il est engagé. Ainsi un soldat anglais, qui sert au Canada, n'est pas censé domicilié dans ce pays, quelle que soit la durée de son séjour.

Le soldat conserve le domicile qu'il avait lors de son entrée au service; mais s'il s'engage au service d'un souverain étranger, il acquiert domicile dans le pays de ce souverain.

La position du marin au service de l'État est analogue: ce n'est pas le navire sur lequel il se trouve, mais le territoire de l'État qu'il sert, qui constitue son domicile.

§ 665. Un être collectif ou moral peut avoir un domicile généralement on considère comme le domicile d'une société le lieu où est le siège de son établissement.

C'est ce qui est clairement défini par l'article 3 du titre 6 du Code civil de la République Argentine, lequel dit que « le domicile des corporations, des établissements et des associations autorisés par les lois et par le gouvernement est l'endroit où est située leur direction ou leur administration, si dans leurs statuts ou dans l'acte qui a autorisé leur création, il n'est pas fait mention d'un domicile déterminé ».

Ainsi, d'après la législation anglaise, si une Compagnie, incorporée en vertu des lois de 1862 et de 1867, pour exploiter des fabriques aux Indes, a un bureau en Angleterre et la direction de ses affaires en Angleterre, cette Compagnie est considérée comme domiciliée en Angleterre et non aux Indes.

Si la société a plusieurs établissements ou succursales, chacun de ces établissements peut être considéré comme une sorte de domicile distinct pour les affaires spéciales qui y sont directement traitées. Il en est ainsi des Compagnies de chemins de fer, elles ont toutes, en France, leur siège à Paris, néanmoins elles peuvent être assignées devant d'autres tribunaux pour opérations faites dans les gares ressortissant à ces tribunaux (art. 69, Code proc. civ.)

Toutefois s'il s'agit de prononcer leur faillite, un seul tribunal est compétent, celui du domicile social (1).

Le domicile d'une société cesse d'exister avec la dissolution et la liquidation de la société.

Il est bien entendu que le domicile d'une corporation ou société est entièrement distinct du domicile des personnes qui la com

(1) Cf. Duvivier, op. cit., pp. 68 et suiv.

Domicile des corporations.

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