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mon éternelle reconnaissance. Je vous remercie d'avoir si bien compris les angoisses de mon âme, et de n'avoir rien caché de l'inébranlable fermeté de mes résolutions.

Aussi ne me suis-je point ému quand l'opinion publique, emportée par un courant que je déplore, a prétendu que je consentais enfin à devenir le Roi légitime de la révolution. J'avais pour garant le témoignage d'un homme de cœur, et j'étais résolu à garder le silence, tant qu'on ne me forcerait pas à faire appel à votre loyauté.

Mais puisque, malgré vos efforts, les malentendus s'accumulent, cherchant à rendre obscure ma politique à ciel ouvert, je dois toute la vérité à ce pays dont je puis être méconnu, mais qui rend hommage à ma sincérité, parce qu'il sait que je ne l'ai jamais trompé et que je ne le tromperai jamais,

On me demande aujourd'hui le sacrifice de mon honneur. Que puis-je répondre? Sinon que je ne retranche rien de mes précédentes déclarations. Les prétentions de la veille me donnent la mesure des exigences du lendemain, et je ne puis consentir à inaugurer un règne réparateur et fort par un acte de faiblesse,

Il est de mode, vous le savez, d'opposer à la fermeté d'Henri V l'habileté d'Henri IV. La violente amour que je porte à mes sujets, disait. il souvent, me rend tout possible et honorable.

Je prétends, sur ce point, ne lui céder en rien, mais je voudrais bien savoir quelle leçon se fût attirée l'imprudent assez osé pour lui persuader de renier l'étendard d'Arques et d'Ivry.

Vous appartenez, monsieur, à la province qui l'a vu naître, et vous serez, comme moi, d'avis qu'il eût promptement désarmé son interlocuteur, en lui disant avec sa verve béarnaise: Mon ami, prenez mon drapeau blanc, il vous conduira toujours au chemin de l'honneur et de la victoire.

On m'accuse de ne pas tenir en assez haute estime la valeur de nos soldats, et cela au moment où je n'aspire qu'à leur confier tout ce que j'ai de plus cher. On oublie donc que l'honneur est le patrimoine commun de la maison de Bourbon et de l'armée française, et que, sur ce terrain-là, on ne peut manquer de s'entendre!

Non, je ne méconnais aucune des gloires de ma patrie, et Dieu seul, au fond de mon exil, a vu couler mes larmes de reconnaissance toutes les fois que, dans la bonne ou dans la mauvaise fortune, les enfants de la France se sont montrés dignes d'elle.

Mais nous avons ensemble une grande œuvre à accomplir. Je suis prêt, tout prêt à l'entreprendre quand on le voudra, dès demain, dès ce soir, dès ce moment. C'est pourquoi je veux rester tout entier ce que je suis. Amoindri aujourd'hui, je serais impuissant.

Il ne s'agit de rien moins que de reconstituer sur ses bases naturelles une société profondément troublée, d'assurer avec énergie le règne de la loi, de faire renaître la prospérité au dedans, de contracter au dehors des alliances durables, et surtout de ne pas craindre d'employer la force au service de l'ordre et de la justice.

On parle de conditions; m'en a-t-il posé ce jeune prince, dont j'ai ressenti avec tant de bonheur la loyale étreinte, et qui, n'écoutant que son patriotisme, venait spontanément à moi, m'apportant au nom de tous les siens des assurances de paix, de dévouement et de réconciliation?

On veut des garanties; en a-t-on demandé à ce Bayard des temps modernes, dans cette nuit mémorable du 24 mai, où l'on imposait à sa modestie la glorieuse mission de calmer son pays par une de ces paroles d'honnête homme et de soldat qui rassurent les bons et font trembler les méchants?

Je n'ai pas, c'est vrai, porté comme lui l'épée de la France sur vingt champs de bataille, mais j'ai conservé intact, pendant quarantetrois ans, le dépôt sacré de nos traditions et de nos libertés. J'ai donc le droit de compter sur la même confiance et je dois inspirer la même sécurité.

Ma personne n'est rien; mon principe est tout. La France verra la fin de ses épreuves quand elle voudra le comprendre. Je suis le pilote nécessaire, le seul capable de conduire le navire au port, parce que j'ai mission et autorité pour cela.

Vous pouvez beaucoup, monsieur, pour dissiper les malentendus et arrêter les défaillances à l'heure de la lutte. Vos consolantes paroles, en quittant Salzbourg, sont sans cesse présentes à ma pensée : la France ne peut pas périr, car le Christ aime encore ses Francs, et lorsque Dieu a résolu de sauver un peuple, il veille à ce que le sceptre de la Justice ne soit remis qu'en des mains assez fermes pour le porter.

(L. S.) Signé: HENRI.

Saxe royale. MANIFESTE D'AVÈNEMENT AU TRONE DU ROI

ALBERT DE SAXE.

Pillnitz, le 29 octobre 1873. Nous, Albert, par la grâce de Dieu, Roi de Saxe, notifions par les présentes, savoir:

Il a plu à Dieu, dans sa volonté insondable, de rappeler de ce monde notre très-auguste souverain, Jean, Roi de Saxe, notre bienaimé père, à la très-grande douleur de sa famille et de tous ses sujets,

et nous avons pris le gouvernement du royaume de Saxe, en vertu

de notre droit de succession au trône garanti par la Constitution. Nous attendons ainsi de nos fidèles Chambres, des dignitaires royaux et de tous les fonctionnaires et employés publics, ecclésiastiques et civils, de même que de tous nos sujets et des habitants du royaume de Saxe, qu'ils nous accorderont, à notre titre de souverain légitime par droit d'hérédité, fidélité et obéissance, de bon gré et conformément à leur devoir.

Nous les assurons, en retour de notre constante sollicitude souveraine pour la sauvegarde du droit et de la justice et pour le développement de la prospérité et du bien-être du pays, tout comme nous observerons, maintiendrons et protégerons toujours, pendant notre règne, la Constitution du royaume dans toutes ses stipulations.

A l'effet de prévenir l'interruption de la marche des affaires publiques, nous ordonnons que toutes les autorités continuent jusqu'à nouvel ordre à exercer leurs fonctions.

Donné à Pillnitz, le 29 octobre 1873.

(L. S.) Signé: ALBERT.

Turquie.

CIRCULAIRE DE RACHID-PACHA AUX AGENTS DIPLOMATIQUES DE LA PORTE A L'ÉTRANGER, CONFIRMANT CELLE DU 15 ocTOBRE.

Constantinople, le octobre 1873.

Mon télégramme du 15 octobre vous a fait connaître en résumé l'ensemble des réformes financières et administratives que le gouvernement impérial vient de décréter. La mise à exécution aussi immédiate que possible de ces mesures constitue aujourd'hui la préoccupation principale de notre auguste souverain, qui les favorise de sa haute et toute-puissante initiative. Fermement décidée à écarter tous les obstacles qui pourraient en entraver la marche, Sa Majesté vient de donner une preuve éclatante des sentiments élevés qui l'animent en fournissant, par acte de générosité, au-dessus de tout éloge, au ministère des finances, sur sa cassette particulière, une sonime trèsconsidérable en consolidés.

Cette assistance, dont l'importance matérielle n'est surpassée que par l'importance morale, assure la réussite des opérations financières dans lesquelles le ministère des finances se trouve engagé.

En conséquence, un iradé impérial prescrit l'abandon du projet qui consistait à émettre de nouveaux consolidés en échange des bons du Trésor de 1872. Le gouvernement donnera, en échange, des bons estampillés, des consolidés de 1865.

Il dispose, à l'heure qu'il est, de la quantité nécessaire pour cette opération, et il a déjà pris des dispositions pour faire parvenir à

temps les titres sur les divers marchés européens, en vue de la liquidation prochaine.

Veuillez faire de la présente communication tel usage que vous jugerez convenable pour dissiper les préventions, édifier les esprits, et, en un mot, présenter la situation sous son véritable jour.

Roumanie.

CIRCULAIRE DE M. B. BOERESCO AUX AGENTS
DIPLOMATIQUES ROUMAINS.

Monsieur l'agent,

Bucharest, le octobre 1873.

Le gouvernement roumain a pris connaissance d'une circulaire datée du 24 septembre 1873, que S. Exc. M. le ministre des affaires étrangères de la Sublime-Porte a adressée aux grandes puissances, pour les entretenir des traités et conventions conclus ou à conclure par la Roumanie avec les différentes puissances.

Par la susdite Note, la Sublime-Porte croit pouvoir contester aux Roumains le droit de traiter directement avec les puissances étrangères. Le ministre de S. M. le Sultan fait des réserves formelles contre tout acte ayant un caractère international émanant des Principautés, et il considère l'exercice de ce droit comme une infraction aux conditions de l'autonomie des mêmes Principautés.

Pour arriver à contester ce droit, de même que son exercice, S. Exc. Rachid-Pacha se base sur le traité de Paris, par lequel les puissances, est-il dit dans sa Note, «ont reconnu que les traités internationaux conclus par la cour suzeraine seraient également obligatoires pour les Principautés, et qu'ils continueront à y recevoir leur pleine application. »

Je regrette d'abord que S. Exc. ait donné à l'article 8 de la convention de Paris de 1858 un sens plus absolu que sa lettre même ne le comportait, car la fin de cet article, que S. Exc. a omis de citer, dit catégoriquement que ces traités « seront applicables aux Principautés dans tout ce qui ne portera pas atteinte à leurs immunités. »

Or, il y a loin, de la lettre de cet article, à la conclusion à laquelle S. Exc. veut arriver par sa circulaire du 24 septembre.

Mais, indépendamment de la rédaction de cet article, il y a bien d'autres faits et actes qui prouvent l'existence et l'exercice du droit que la Sublime-Porte veut aujourd'hui contester à la Roumanie.

En effet, la convention de 1858, de même que le traité de Paris de 1856, n'ont pas créé les immunités, ou, plus exactement parlant, les droits souverains de la Roumanie; ils n'ont fait que garantir et sanctionner de nouveau « ces priviléges et immunités dont les Principautés étaient en possession. »

Et d'où dérivent ces droits que les Principautés possédaient déjà en 1856 et en 1858? Ils dérivent des anciennes capitulations, des traités que les princes des deux Principautés ont conclus du quatorze au seizième siècle avec les Sultans Bajazed Ier, Mahomed II, Sélim Ier et Soliman II.

C'est la source vraie et légitime des droits souverains, des priviléges et immunités des Principautés, que les grandes puissances ont bien voulu garantir en 1856.

L'origine de ces droits a été reconnue par les grandes puissances elles-mêmes; car, dans l'article 2 de la convention de 1858, elles font une nomenclature spéciale et une mention expresse des anciennes capitulations qui constituent l'autonomie de la Roumanie et qui règlent ses rapports avec la Sublime-Porte.

Par conséquent, l'acte même sur lequel s'appuie le gouvernement ottoman pour nous contester l'exercice d'un droit souverain constate l'existence de ce droit; par ses dispositions, il fait, de plus, voir que les droits qui constituent l'autonomie roumaine n'ont pas leur origine dans un acte de générosité gracieuse qui pourrait les rendre révocables ou les faire restreindre à volonté, mais qu'ils dérivent de traités qui contiennent des stipulations synallagmatiques également obligatoires pour les deux parties.

En vertu de ces anciennes capitulations, que les actes internationaux de 1856 et de 1858 ont de nouveau confirmées, les principautés de Valachie et de Moldavie ont la plénitude de tous les droits souverains que possède un Etat autonome.

Certes, l'exercice de ces droits est limité par les rapports que ces mêmes capitulations ont établis avec la Sublime-Porte, et que nous maintenons et respectons religieusement; mais nous étions en droit d'attendre que la Sublime-Porte, de son côté, respectât tous les droits que les Roumains se sont conservés par leurs capitulations et qu'elle ne cherchât plus à paralyser ni à amoindrir l'exercice de ces droits. Elle nous conteste aujourd'hui le droit de conclure des traités avec les autres puissances, ou tout autre acte ayant un caractère international, comme autrefois elle nous a contesté l'exercice d'autres droits souverains. Cependant, par nos anciennes capitulations, nous n'avons nullement renoncé au droit de traiter, comme à un autre droit qui constitue la souveraineté d'un Etat. Nous possédons, en principe, tous ces droits, et nous les avons exercés, en fait, pendant des siècles. Nous entendons les conserver intacts aussi dans l'avenir.

Si, par l'exercice du droit de conclure des traités, nous avions détruit ou modifié les rapports que nos anciennes capitulations ont créés avec la Sublime-Porte, nous aurions alors compris que le gou

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