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« Au moment où vous allez quitter ce pays, dont un ciel clément semble avoir voulu vous étaler les splendeurs, la Suisse, messieurs, vous remercie. Elle comptera parmi ses gloires d'avoir été le berceau de l'Union postale universelle que vous venez de créer. Heureuse et reconnaissante du gage de confiance et de sympathie que vous lui avez donné en la chargeant d'organiser le bureau international des postes et en en plaçant le siége dans sa capitale, elle veillera avec une pieuse sollicitude à ce que cette institution réponde à la pensée qui a présidé à sa fondation et rende tous les services que l'on attend d'elle.

Quant à moi, messieurs, que, par une fortune imméritée, vous avez appelé à l'insigne honneur de diriger vos délibérations, je garderai des journées que nous avons passées ensemble, des agréables rapports que j'ai entretenus avec chacun d'entre vous et des témoignages de bienveillance dont vous m'avez comblé, un reconnaissant et ineffaçable souvenir. >>

Ce discours est accueilli par des applaudissements prolongés.

M. Page, délégué de la Grande-Bretagne, demande la parole et s'exprime comme suit :

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<< Messieurs,

Après avoir accompli notre tâche, nous ne voulons pas nous séparer sans exprimer au président et aux membres du Conseil fédéral suisse nos sincères remerciments pour leur bienveillante hospitalité.

<«< Ils ont pourvu à l'aménagement de cette vaste salle dans laquelle nos délibérations ont pu avoir lieu avec une parfaite aisance.

<<< Ils nous ont secondés par la nomination, comme représentants de la Suisse, de magistrats et de fonctionnaires doués de vues élevées et d'une grande expérience et parmi lesquels nous avons pu choisir notre président distingué, et ils ont désigné comme secrétaires deux fonctionnaires très-capables de l'administration des postes suisses.

« Nous devons une grande reconnaissance pour le bienveillant appui que l'administration suisse nous a prêté, et je sais que je ne suis que l'écho des sentiments qui animent tous les membres du Congrès en la priant d'accepter nos meilleurs remerciments.

« Messieurs, je ne doute pas que chacun de nous, en quittant Berne, ne soit fier d'avoir contribué à la bonne œuvre que nous venons de terminer.

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« Je suis persuadé que le traité de Berne c'est ainsi qu'on appellera la convention que nous avons signée aujourd'hui prendra son

rang parmi les plus grands traités de l'époque.

<«< Il deviendra un puissant levier pour développer la circulation et le

commerce, pour entretenir et augmenter les relations de famille, et pour établir des relations de bonne amitié entre toutes les nations du monde.

« J'espère que sa durée sera longue et son succès complet. »

(Applaudissements.)

M. le directeur général Stephan prononce ensuite le discours suivant :

<< Monsieur le président et messieurs,

<<< Je ne voudrais pas quitter cette salle, dans laquelle nous avons passé ensemble des journées si laborieuses, sans exprimer mes sentiments de vive reconnaissance pour les paroles si honorables pour l'Allemagne que vient de prononcer M. le président. Je ne puis être que profondément touché de ce témoignage de sympathie et de la manière si flatteuse pour nous avec laquelle toute l'assemblée a bien voulu s'y associer. Quant au mérite, permettez-moi de le décliner. Si l'Allemagne a pris l'initiative de notre œuvre commune, c'est un simple fait et non un mérite. La véritable cause des œuvres de cette espèce doit être attribuée à l'esprit de progrès de notre époque et au génie civilisateur de l'humanité tout entière. Tous ceux qui, dans les divers domaines du développement du genre humain, ont hâté le progrès, ont une part dans la perfection de l'œuvre que nous venons d'achever. Et, sous ce rapport, s'il peut être question de mérite dans cette occasion, je pense, monsieur le président et messieurs, qu'il nous convient de reporter nos regards sur ceux qui avant nous, il y a une trentaine d'années ( se tournant vers le plénipotentiaire de la Grande-Bretagne) ont commencé l'œuvre de la réforme postale (applaudissements) et sur ceux qui, en prenant l'initiative des conférences postales de Paris en 1863 (se tournant vers le plénipotentiaire des États-Unis d'Amérique) ont si bien préparé le terrain pour nos travaux communs. (Applaudissements réitérés.) Si nos efforts mutuels ont abouti dans un bref délai au résultat voulu, le mérite en est dû au concours actif et éclairé des Gouvernements représentés dans cette enceinte, lesquels se sont tous inspirés de la grandeur de la tâche qui nous était tracée. L'harmonie générale et parfaite qui a régné pendant le cours de nos délibérations et de nos négociations est du plus heureux présage, et l'on peut affirmer hardiment qu'une telle unanimité des Gouvernements de la grande majorité des peuples civilisés du globe constitue un fait jusqu'ici sans égal dans l'histoire! (Vifs applaudissements.)

« Si l'Allemagne a entrepris de soumettre aux différents Gouvernements les propositions qui ont servi de base à nos travaux communs,

elle a été guidée par la conviction intime que les sympathies de tous les États civilisés seraient acquises d'avance à une œuvre tendant à la paix, à la prospérité générale et à la confraternité des peuples (applaudissements), et elle était bien sûre que dans une œuvre de réforme de ce caractère-là chaque Gouvernement serait un allié. D'avoir pu contribuer, en pleine harmonie avec les Gouvernements participant à ce traité, à réaliser un pas dans cette voie, c'est le seul honneur auquel l'Allemagne aspire; et dans ce sens, monsieur le président et messieurs, je crois pouvoir accepter le témoignage de votre sympathie, qui nous sera toujours un précieux souvenir.» (Applaudissements prolongés.)

M. Blackfan, délégué des États-Unis, demande aussi la parole et s'exprime ainsi :

<< Monsieur le président, messieurs les délégués,

« Après avoir entièrement accompli l'œuvre pour laquelle il s'était réuni, le Congrès postal international va se séparer. Je saisis ce moment pour exprimer les remercîments du Gouvernement, et surtout de l'administration des postes des États-Unis, à l'État auquel nous devons l'initiative de ce Congrès et au chef de l'administration qui a contribué si puissamment par ses efforts à réunir dans une union postale la grande majorité des peuples civilisés.

« Monsieur le président, messieurs les délégués,

« Je ne doute pas que vous ne compreniez que je fais ici allusion à l'administration des postes de l'Empire d'Allemagne et à M. le directeur général de cette administration.

« On ne peut apprécier entièrement aujourd'hui tous les avantages de cette œuvre de paix et de progrès. Cependant on peut dire que nonseulement l'Union offrira aux peuples de tous les pays de nouvelles facilités dans les relations postales, par des taxes réduites et uniformes, mais qu'elle sera le point de départ d'autres réformes internationales indispensables et qu'elle contribuera à amener la fraternité universelle.

« La conception d'un système postal universel est une grande et noble idée et, quoique l'administration postale des États-Unis ait été la première à appeler l'attention des autres pays sur la nécessité d'adopter un port international réduit et uniforme, je me plais à reconnaître que l'administration postale qui a proposé le projet de l'union postale, et qui a su le faire aboutir par les efforts intelligents de son chef, mérite à un haut degré nos félicitations. (Applaudissements.)

M. le directeur général Mansi, délégué de l'Espagne, prononce les paroles ci-après :

<<< Messieurs,

«< Arrivés au terme de nos travaux, nous avons la satisfaction d'avoir conclu et signé un traité qui nous permettra de réaliser des réformes vivement réclamées par l'opinion publique. Le sentiment du bien général qui a toujours présidé à nos débats, l'attention qui a été accordée aux opinions les plus diverses, l'aménité qui a caractérisé dès le début nos relations mutuelles, sont, je dois le dire, une preuve des nobles intentions du Congrès, auquel, je l'espère, tout le monde rendra justice.

<«<L'estime de l'humanité sera sa récompense. - Les relations entre les divers pays deviennent tous les jours plus intimes, et l'on peut prévoir qu'elles feront disparaître les haines et les rivalités entre les peuples, et nous pouvons espérer que nous nous acheminons vers la paix universelle, que la marche de l'intelligence ne sera plus entravée et que nous pourrons aller de progrès en progrès.

<< Si nous sommes arrivés à un résultat aussi heureux, vous reconnaitrez avec moi, messieurs, que nous le devons en grande partie à notre honorable président, qui a su diriger nos débats avec une habileté, une intelligence et un esprit de conciliation que je me plais à constater.

« Nous devons l'en féliciter et je le fais de tout mon cœur, au nom de la nation espagnole, dont je suis sûr d'être l'interprète.

<«< En terminant, je dois exprimer encore ma reconnaissance à la ville de Berne. Nous conserverons toujours un vif souvenir de son hospitalité cordiale et je la salue avec toute l'effusion dont est capable un Espagnol reconnaissant. » (Applaudissements.)

Après ces paroles, M. le directeur général Mansi communique au Congrès le télégramme suivant, qu'il a reçu aujourd'hui de M. le ministre de l'intérieur :

M. Mansi, directeur général des postes et télégraphes,

<<< Berne.

« Je reçois avec la plus vive satisfaction votre télégramme d'hier. Je félicite sincèrement le Congrès pour le grand et remarquable résultat auquel il est parvenu, en faveur des pays représentés à Berne.» (Applaudissements.)

« Madrid, 9 octobre 1874. »

Sur la demande de M. le président, le Congrès décide d'autoriser son bureau à approuver le présent procès-verbal.

M. le président lève la séance à trois heures en déclarant close la session du premier Congrès postal international.

Au nom du Congrès, le président,

EUGÈNE BOREL.

Les Secrétaires,

E. HÖHN. C. DELESSERT.

TRAITÉ concernant la création d'une union générale des postes, conclu entre l'Allemagne, l'Autriche - Hongrie, la Belgique, le Danemark, l'Égypte, l'Espagne, les États-Unis d'Amérique, la France, la GrandeBretagne, la Grèce, l'Italie, le Luxembourg, la Norwége, les Pays-Bas, le Portugal, la Roumanie, la Russie, la Serbie, la Suède, la Suisse et la Turquie.

Les soussignés, plénipotentiaires des Gouvernements des pays cidessus énumérés, ont d'un commun accord, et sous réserve de ratification, arrêté la convention suivante :

Art. 1. Les pays entre lesquels est conclu le présent traité formeront, sous la désignation de Union générale des postes, un seul territoire postal pour l'échange réciproque des correspondances entre leurs bureaux de poste.

Art. 2. Les dispositions de ce traité s'étendront aux lettres, aux cartes-correspondance, aux journaux, aux livres et autres imprimés, aux échantillons de marchandises et aux papiers d'affaires originaires de l'un des pays de l'Union et à destination d'un autre de ces pays. Elles s'appliqueront également à l'échange postal des objets ci-dessus entre les pays de l'Union et les pays étrangers à l'Union toutes les fois que cet échange emprunte le territoire de deux des parties contractantes au moins.

Art. 3. La taxe générale de l'Union est fixée à 25 centimes pour la lettre simple affranchie.

Toutefois, comme mesure de transition, il est réservé à chaque pays, pour tenir compte de ses convenances monétaires ou autres, la faculté de percevoir une taxe supérieure ou inférieure à ce chiffre, moyennant qu'elle ne dépasse pas 32 centimes et ne descende pas au-dessous de 20 centimes.

Sera considérée comme lettre simple toute lettre dont le poids ne dé

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