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exactions d'un despote peuvent arracher d'un pays quelques millions; sous un gouvernement sage, dans un état de liberté, ce même pays en produirait mille fois davantage.

III. LE BÉNÉFICE QUE FAIT UN CITOYEN profite A TOUS LES AUTRES. La plus douce satisfaction qu'un prince puisse éprouver, c'est de voir ses sujets accroître progressivement leur aisance et assurer celle de leurs enfants, par le travail. Or, plus un métier profite à celui qui l'exerce, plus il atteint ainsi son but, et plus il prospère. Et, sous le règne de la liberté, un bienfait admirable de l'ordre social, c'est que, par un enchaînement vraiment merveilleux, le succès, la fortune de l'un, loin de porter préjudice à la fortune des autres, lui est au contraire favorable. Car, lorsque tous les membres d'une société peuvent librement exercer leur industrie, comment l'un d'eux s'enrichirait-il au détriment d'autrui? Nul ne peut gagner dans la profession qu'il exerce, qu'autant qu'il est utile par cette profession à ses concitoyens; et ceux-ci n'ont recours à lui, que parce qu'ils en retirent de leur côté un avantage réel. Au contraire, lorsqu'un absurde système de banalité investit quelques privilégiés du droit exclusif de pourvoir à tous les besoins des autres habitants du pays, de s'en

hasard, assez de grains pour que l'on pût penser ensuite qu'une partie était venue naturellement. Quelques personnes ont avancé aussi qu'on trouvait du seigle sauvage au pied du Caucase; mais la plupart des voyageurs affirment, au contraire, que le seigle ne peut supporter le climat de ce pays, et que, par ce motif, on ne l'y cultive même pas. Enfin, on a prétendu que le blé venait des Indes, mais rien n'atteste qu'il y croisse sans culture. L'existence du blé est donc aussi la preuve d'une ancienne civilisation de nos pères. Après en être déchus, leurs descendants y tendent de

nouveau.

Ainsi, on peut déja entrevoir, et nous le reconnaîtrons mieux encore par la suite, que l'agriculture est le premier fondement de toute industrie.

Il faut entendre ici, par agriculture, tout ce que nous avons compris précédemment sous le nom d'Économie rurale, et par conséquent non pas seulement l'agriculture proprement dite, mais encore le jardinage, l'entretien du bétail, l'économie forestière, la chasse, la pêche, les mines, et généralement toute exploitation immédiate des productions de la terre. Mais, pour considérer et apprécier, sous le rapport de la richesse nationale, le bénéfice provenant de ces diverses bran

ches de l'économie politique, l'agriculture proprement dite, comme la principale et la plus compliquée, nous servira de type; et ce que nous en aurons dit pourra s'appliquer par la suite aux autres branches.

II. LA PROPRIÉTÉ DE LA TErre s'acquiert par LA CULTURE ET LE TRAVAIL. Les hommes ayant incontestablement un droit égal à la jouissance des productions brutes de la nature, on ne peut se faire une idée juste de la propriété, qu'en la considérant comme la conséquence du travail appliqué à quelqu'une de ces productions naturelles. Sans doute, les hommes ont un droit égal sur la matière; mais la forme nouvelle qu'un être raisonnable lui donne est sa création, sa chose, sa propriété; elle lui appartient autant que sa personne même; elle est inviolable comme sa liberté. Ainsi, ce n'est pas l'abus de la force, mais le travail, qui a donné naissance au droit de propriété.

La propriété du sol n'a pas non plus d'autre origine. C'est par les travaux qu'exige sa culture, c'est en arrosant une prairie, en labourant un champ, en l'entourant de palissades, que l'homme en a fait sa propriété. L'union d'un grand nombre de propriétés particulières ainsi acquises a formé le territoire national, et c'est à cette union que

l'on peut attribuer la cause première de la société. L'agriculture est donc le fondement de cette société et de sa législation. Elle est aussi la base de son économie politique; et cet ouvrage le démontrera.

III. AVANCES QUE L'AGRICULTURE EXIGE. Tout commencement d'agriculture suppose la propriété antérieure d'objets mobiliers sans lesquels la terre ne peut être cultivée, et des soins, des avances, qu'il faut sans cesse renouveler. Ces avances, c'est-à-dire tout ce que l'on consacre à la culture de sa propriété, doit avoir pour but de forcer la nature à produire, et à produire même au-delà de ce qu'on y emploie : car, comment et à quoi bon y appliquer des fonds, si elle ne devait restituer que ce qu'on lui donne? Les avances que réclame l'agriculture peuvent être rangées en deux classes les avances foncières ou premières, et les avances périodiques ou annuelles.

:

1o Avances foncières. Les avances premières ou foncières sont celles qui, une fois faites, subsistent, et contribuent à rendre la terre susceptible d'une culture plus utile.

Il faut regarder comme telles : 1° les bâtiments nécessaires pour garantir les hommes et le bétail de l'intempérie des saisons et pour con

server les produits exploités; l'habitation du propriétaire, les étables et les granges. 2° L'achat du bétail nécessaire pour l'engrais et pour l'exécution des travaux. 3° L'achat des outils destinés à travailler la terre et à recueillir les fruits. 4° Le salaire des journaliers qui enlèvent les broussailles, aplanissent le sol, détournent les eaux, défrichent, labourent le champ, transportent l'engrais et charrient des terres de meilleure qualité. L'avance de ce salaire dure jusqu'à l'époque où l'on ensemence enfin pour recueillir. Car, souvent, dans les premières années, on ne sème que pour laisser pourrir le produit et pour bonifier la terre. 5o La nourriture et l'entretien du propriétaire pendant la durée des premiers travaux, qui présentent une multitude d'obstacles à surmonter et qui donnent beaucoup de peine. Le possesseur de la métairie doit vivre sur les lieux. La terre nouvellement défrichée ne rend pas encore assez pour qu'il doive en agir autrement. Or, il peut considérer sa consommation comme une sorte de salaire gagné par lui-même à la sueur de son front. C'est une sorte de capital placé sur son fonds, et qu'il se paie par avance sur son économie future.

Ces avances foncières ne servent qu'à rendre la propriété susceptible d'une meilleure culture;

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