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Cette différence provient-elle exclusivement de conditions locales et climatériques? M. V. Ivanow ne le croit pas. L'état précaire dont notre industrie aurifère souffre est dû à la défectuosité des procédés techniques, à l'isolement des exploitations, à l'insignifiance relative des capitaux qui y sont affectés, à l'énorme développement des petites entreprises ainsi qu'à l'absence de publicité. On ne travaille que dans les terrains particulièrement riches en or, et là encore par suite des méthodes défectueuses on enterre une grande quantité du métal précieux. Il s'ensuit qu'un grand nombre de mines se trouvent dans un abandon complet et que des régions entières, comme le Caucase et le Turkestan, riches cependant en terrains aurifères d'une fécondité moyenne, restent inexploitées. Et cependant la quantité d'or contenue dans les terrains médiocres est bien supérieure à celle qu'on extrait actuellement dans les grandes exploitations.

Ce qui manque surtout au développement rationnel de notre industrie aurifère, c'est l'existence de grandes compagnies solidement constituées. L'introduction des travaux hydrauliques et l'exploration des terrains dans le but de découvrir de nouveaux gisements nécessitent des fonds considérables. Tout cela n'est guère à la portée d'un seul capitaliste et sans de grands capitaux une exploitation régulière donnant des revenus sérieux n'est guère réalisable. On l'a compris depuis longtemps en Amérique et en Australie.

Chez nous, au contraire, l'exploration des mines se trouve entre les mains de personnes isolées ou d'associations composées d'un petit nombre de capitalistes, n'ayant pas de capital de fondation et ne subsistant que de leurs revenus. Dans ces conditions, les innovations et les dépenses faites en vue de l'avenir ne sont guère possibles, du moins pas sur une grande échelle. Il faudrait que l'État encourageât la formation de sociétés d'actionnaires avec de grands capitaux de fondation et un plan d'exploitation dressé d'avance pour plusieurs années. C'est seulement ainsi que les terrains médiocres entreraient dans l'exploitation régulière, que des dépôts de machines et des ateliers mécaniques pourraient être établis, qu'il y aurait des routes, dont, en ce moment, on se voit presque entièrement privé. C'est ainsi seulement qu'on pourrait exploiter les gisements et les mines, au lieu de s'en tenir au sable aurifère, comme on le fait généralement à l'heure actuelle.

Les petites entreprises supplémentaires sont trop répandues et trop enracinées pour qu'on puisse chercher à les détruire; il serait bien plus rationnel de leur trouver un modus vivendi régulier. Là encore le plus grand mal est dans l'isolement : chacune de ces petites entreprises est composée d'une artelle de cinq à quinze personnes, travaillant chacune à ses risques et périls. C'est généralement une seule famille qui commence les travaux, sans un sou en poche. Le but de ces chercheurs d'or

est d'en trouver le plus possible dans le plus court espace de temps; aussi dévastent-ils à la lettre l'enclos qui leur est désigné et ils ne s'arrêtent qu'aux endroits qu'ils croient abondants, et sous ce rapport, il faut le dire, ils ont du flair. Pour bien explorer un de ces enclos, les forces d'une seule famille ne suffisent même pas ici encore il faudrait des associations de plusieurs artelles ou familles, après quoi le travail mécanique pourrait être appliqué.

L'industrie aurifère, outre son importance intrinsèque, se rattache intimement à la question ouvrière ainsi qu'aux questions forestière et agricole. (Journal de Saint-Pétersbourg.)

Les politiciens et bureaucrates grecs. Comme la forme du gouvernement, la forme sociale, en Grèce, semble arrêtée pour longtemps dans ses lignes actuelles; il n'y règne pas encore d'antagonisme entre les classes; c'est à peine si ces classes même existent en tant qu'individualités sociales, s'il est possible à l'œil le plus affiné par l'observation de discerner les barrières conventionnelles qui devraient les séparer; cette situation est due partie à la domination turque qui, au cours des siècles, a pénétré de ses principes orientaux d'égalité effective entre les hommes, les descendants des républicains aristocrates de la grande époque; partie à des besoins restreints chez la masse, plus pauvre qu'en France, malgré une moins inégale répartition de la richesse, mais qui sait du moins vivre pauvrement et sobrement du travail fécond de la terre, dans l'air pur et dans la lumière du ciel d'Orient que commence à peine à vicier aux abords des grands centres la fumée de quelques usines.

Avec de pareils éléments de stabilité, il y aurait lieu de s'étonner des fluctuations incessantes qui se produisent dans la politique intérieure de la Grèce si, comme compensation aux avantages que lui assure sa structure sociale, elle n'avait à compter avec deux légions d'ennemis intimes, les politiciens et les bureaucrates. Ici, pressés par le temps, nous ne pouvons qu'indiquer : l'Université d'Athènes fabrique et verse dans la circulation, chaque année, environ cinq cents avocats et médecins qui doivent s'ingénier à vivre sur une population déjà saturée de docteurs et de légistes sans emploi, et inférieure, jusqu'en ces temps derniers, à deux millions d'habitants.

Un certain nombre, il est vrai, s'en va chaque année exercer dans toutes les parties de l'empire turc habitées par les Grecs; mais cette exportation, forcément limitée par les besoins restreints des pays où elle se fait, est loin de compenser l'importation, le trop-plein de jeunes gens qui viennent de tous les points du monde grec chercher à Athènes, en même temps que la liberté, l'instruction et une situation. Or, les situations sont rares, et les fonctions publiques d'autant plus maigrement

rétribuées que l'on a dû les multiplier en dehors de toute proportion avec les besoins administratifs et les ressources du budget, pour tromper, sinon satisfaire le plus possible d'appétits; au sommet de la hiérarchie, un ministre reçoit 800 francs, un préfet 500, un archevêque 350 francs par mois. On croit rêver, en déduisant, d'après ces chiffres, un des mille employés faméliques qui grouillent dans les ministères et dans les administrations d'Athènes, et pourtant les plus brillants élèves de l'Université, une fois pourvus de leur diplôme de docteur, doivent se contenter d'un de ces emplois infimes, ou verser dans la politique, ce qu'ils font du reste presque tous. N'ayant pour la plupart souvent aucun intérêt positif à ménager, n'appartenant même pas, géographiquement parlant, au pays qu'ils aspirent à gouverner, ils prennent le plus court moyen d'arriver, ils agitent et, dans ce milieu de rhéteurs où une cadence harmonieuse de phrase aura toujours raison de la raison même, il leur est facile de créer dans la presse éphémère d'Athènes et sur le boulevard de Pâtissia, des courants factices d'opinion, auxquels la masse saine de la population sait rester étrangère.

Appuyées l'une sur l'autre, ces deux classes, les politiciens et les fonctionnaires sortis d'eux, se complètent, mènent le pays, et accaparent toutes les places à la table maigrement servie du budget.

Comme des passagers d'un paquebot trop chargé de monde, il leur faut même se résigner à dîner en deux bordées, les seconds attendant debout que les premiers aient fini, car depuis quarante-cinq années que fonctionne la machine universitaire, les choses sont allées de telle sorte que la Grèce possède aujourd'hui en double expédition un personnel administratif qui suffirait à la triture des affaires de tous les pays de langue grecque, s'ils venaient jamais à être réunis en un tout compacte. De là, nécessité pour ces employés de s'inféoder à un parti auquel ils rendent bien des services en raison de l'influence qu'ils exercent sur le contribuable, principalement dans les éparchies éloignées des grands centres, et qui leur distribue en retour la manne bénie des deniers publics. Mais, quand le parti adverse arrive aux affaires à son tour, il faut quitter la place, car il a, lui aussi, ses créatures à pourvoir : chaque changement ministériel entraîne donc le remplacement de tous les fonctionnaires, du haut en bas de l'échelle hiérarchique; et tandis que le vainqueur récompense ainsi les services rendus, les votes, les discours, les pressions exercées sur l'électeur, tandis que la série rentrante des employés cherche, au grand détriment et aux frais du contribuable, à reprendre le fil des affaires auxquelles elle était restée plus ou moins étrangère, les évincés se recueillent et emploient le reste d'influence que leur donne l'autorité acquise dans leurs fonctions fraîchement perdues, à miner le terrain sous les pieds de leurs adversaires.

Les crises ministérielles au Parlement sont à la fois la cause et la con

séquence de ce perpétuel chassé-croisé dans l'administration du pays; d'ordinaire, un cabinet ne tombe pas battu sur une question de principe, mais écrasé, lui et la masse de fonctionnaires de tout ordre qu'il remorquait, par une coalition d'appétits individuels. (Correspondance du Temps.)

Le Bureau international des

Les lignes télégraphiques de l'Europe. lignes télégraphiques d'Europe publie une statistique à laquelle nous empruntons les renseignements suivants :

Voici tout d'abord le nombre de lignes télégraphiques: Allemagne, 10,308 lignes, France, 5,885; Grande-Bretagne, 5,600; Russie, 2,731 ; Autriche, 2,604; Italie, 2,470; Suisse, 1,139; Hongrie, 1,069; Belgique, 827; Suède, 788; Pays-Bas, 418; Espagne, 385; Danemark, 387; Norvège, 260, Roumanie, 206; Portugal, 202; Grèce, 100; Bosnie, 69; Luxembourg, 64; Serbie, 60; Bulgarie, 37.

La longueur des fils télégraphiques est établie comme suit:

Allemagne, 260,636 kilomètres; Russie, 223,588; France, 211,607; Grande-Bretagne, 197,715; Autriche, 92,572; Italie, 89,150; Hongrie, 54,852; Espagne, 40,742; Suède, 29,879; Belgique, 27,922, Suisse, 16,155; Norvège, 15,601; Pays-Bas, 14,133; Portugal, 10,964; Roumanie, 8,662; Danemark, 8,450; Grèce, 4,614; Bulgarie, 3,400; Bosnie, 3,180; Serbie, 3,134; Luxembourg, 536.

La longueur des fils souterrains atteint en Allemagne, 37,604 kilomètres; dans la Grande-Bretagne, 17,700; en France, 11,656; aux PaysBas, 591; en Autriche, 571: en Suisse, 327; en Russie, 250; en Belgique, 232; en Danemark, 79; en Roumanie, 56.

Comparativement à l'importance de chaque pays et au nombre de ses habitants, voici en quelle proportion s'établissent les chiffres kilométriques :

Nombre d'habitants pour chaque station télégraphique : en Allemagne, 4,388; France, 6,442; Grande-Bretagne, 6,294; Russie, 27,091; Autriche, 8,504; Espagne, 43,358; Italie, 10,850; Suède, 5,794; Norvège, 7,411.

SOCIÉTÉ D'ÉCONOMIE POLITIQUE

REUNION DU 5 SEPTEMBRE 1883.

COMMUNICATIONS: Le Congrès des Sociétés savantes à la Sorbonne, en 1884. Section des sciences économiques et sociales. Questions proposées. DISCUSSION: Quels avantages le commerce, en France et en Angleterre, retirerait-il de l'ouverture d'un tunnel sous-marin?

OUVRAGES PRÉSENTÉS.

La séance est présidée par M. Léon Say, président.

Il donne communication à la réunion d'une lettre par laquelle le président du Conseil, ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, porte à la connaissance de la Société d'économie politique une instruction sommaire rédigée par la section des sciences économiques et sociales du Comité des travaux historiques et scientifiques.

Le ministre adresse en même temps le programme du Congrès de la Sorbonne en 1884. Dans ce programme figure, comme l'année passée, une « Section des sciences économiques et sociales », inscrite pour quatre groupes de questions, ainsi qu'il suit :

I.

1o La division de la propriété en France, avant et après 1789. 2o Étudier les mouvements de la population sur un point déterminé de la France rurale, soit sous l'ancien régime, soit depuis la Révolution.

3o Étudier sur un point quelconque de la France l'influence économique et sociale d'une voie de communication nouvellement ouverte : chemin de fer, canal, route, pont.

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II. 4° Les colonies françaises considérées au point de vue des conditions politiques et économiques dans lesquelles elles se sont formées et des moyens propres à en assurer le développement.

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III. 5o Étudier la situation légale des sociétés commerciales françaises à l'étranger et des sociétés étrangères en France.

6o De l'unification de la législation en matière de lettres de change; rapprocher les législations étrangères de la législation française et mesurer à ce sujet les besoins du commerce.

7o Rechercher s'il ne conviendrait pas, à l'exemple de certaines législations étrangères, d'accorder à la femme mariée, indépendamment de toute convention matrimoniale, l'administration et la libre disposition d'une partie de ses biens.

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