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D'ailleurs, la production de chaleur étant un fait général qui se retrouve à des degrés divers dans toute la série des êtres vivants, comment les physiologistes n'ontils pas compris que, pour en découvrir la véritable cause, il ne fallait pas expérimenter sur un organe localisé dans telle ou telle classe d'animaux, ni même sur un système qui ne se retrouve que dans les animaux, mais s'adresser à une de ces grandes fonctions si indispensables à la vie qu'elles sont communes à tout être vivant, plante ou animal?

Idée proposée par de la Rive. En 1820, un physicien célèbre, de la Rive publia (1) une théorie de la chaleur animale qui eut peu de retentissement. Partant de ce fait bien connu, que le passage de l'électricité dynamique à travers des conducteurs de très petit diamètre détermine une élévation considérable de température, il se demande si les filets nerveux ne servent pas de moyens de communication à des parties constituées en état de polarité électrique opposée par le fait des combustions dont le sang est le siége. Ces filets nerveux alors seraient parcourus par des courants électriques, s'échauf feraient à cause de la résistance qu'ils opposeraient au passage de l'électricité en vertu de leurs faibles dimensions transversales, et il y aurait ainsi production incessante de chaleur dans toutes parties munies d'un réseau capillaire et d'un réseau nerveux, c'est à-dire dans toute l'économie. Loin de nous la pensée de révoquer en doute la production d'électricité comme un des résultats du

(1) Bibliothèque universelle de Genève, 1820, vol. XV, p. 46.

grand acte de la nutrition; mais, quant à cette circulation à travers les filets nerveux et à la chaleur qui en résulterait, rien n'autorise à admettre ni l'une ni l'autre : l'idée émise par de la Rive ne peut être considérée que comme un tribut payé à cette espèce de fascination qui poussait les esprits les plus distingués de cette époque à exagérer le rôle joué par l'électricité dynamique dans l'accomplissement des phénomènes de la vie.

Doctrine de la combustion respiratoire.

Travaux antérieurs à Lavoisier.

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Cependant un grand fait domine toute cette histoire de la calorification. Les animaux sont tous pourvus d'appareils qui permettent à l'air de pénétrer dans l'intérieur de leur corps et de se mêler à leurs humeurs. Les expériences de Boyle démontrèrent qu'aucun animal ne peut vivre dans le vide; que, par conséquent, l'action de l'air est nécessaire à l'entretien de la vie. Mayow, Hales, Boyle, Verrati et beaucoup de physiologistes, leurs contemporains, ne tardèrent pas à prouver qu'une bougie s'éteint et qu'un animal meurt quand on les laisse trop longtemps dans une même masse d'air confiné, et que, dans le second cas comme dans le premier, une certaine proportion d'air disparaît. On discuta beaucoup sur la question de savoir si l'air pénétrait dans le sang en nature, ou s'il lui cédait seulement quelque principe; on chercha aussi à découvrir la vraie cause de la mort des animaux dans l'air confiné. Mayow dit que, dans le poumon, l'air cède au

sang son esprit nitro-aérien, et produit ainsi la rutilance du sang artériel, une fermentation et la chaleur animale. Boyle prouva que l'air dans lequel ont séjourné des ani maux contient de l'air fixe (acide carbonique). Les iatromécaniciens ne manquèrent pas d'expliquer à leur manière le rôle de l'air introduit dans le sang. Pour eux, il agissait par son élasticité; il tenait les globules à distance; il conservait la fluidité, le mouvement intestin, la chaleur du sang, et s'opposait à sa coagulation; la mort des animaux dans l'air confiné dépendait surtout de la diminution de son élasticité. Ils invoquèrent aussi l'élévation de température et l'humidité de l'air confiné pour expliquer la mort des animaux maintenus en vase clos. Ces raisons ne parurent pas suffisantes à Haller qui, après avoir exposé ces diverses opinions, ajoute très judicieusement (1) Quare aut conjungere vires destructi elateris, et noxiorum vaporum oportet, aut omnino aliam causam, nondum satis notam, citæ mortis expectare.

Cigna, de Turin, publia deux mémoires sur la respiration, insérés dans les Miscellanea Taurinensia et analysés dans le Journal de physique, introduction, t. II, p. 84. Cigna démontra par de très bonnes expériences que la couleur rouge du sang artériel est due à l'action de l'air; il répéta toutes les expériences de Hales, de Boyle et de Verrati, et prouva après eux que:

1° Les bougies s'éteignent et les animaux meurent dans l'air confiné.

2° L'air vicié soit par une flamme, soit par la respira

(1) Elementa physiologiæ, t. III, p. 210.

tion d'un animal, est impropre à entretenir la combustion et suffoque les animaux qui le respirent.

3o La durée de la vie des animaux ainsi renfermés est en raison directe du volume de l'air et inverse du nombre des animaux ; les mêmes lois régissent la durée de la flamme d'une bougie dans l'air confiné.

Il admit que l'air introduit dans le sang par le chyle sert par son élasticité aux phénomènes de la vie, et s'échappe ensuite par le poumon, emportant avec lui des exhalaisons toxiques. La respiration n'était à ses yeux qu'un moyen d'exhalation et de rafraîchissement. Il rapporta à deux causes la mort des animaux dans l'air confiné: 1 La cessation de la transpiration empêchée par les vapeurs dont l'air est chargé et comme saturé.

2o L'irritation que les vapeurs infectées déterminent dans les bronches et le poumon, qui alors se contractent et refusent de céder à l'air qui doit les dilater.

Priestley, qui a jeté de si grandes lumières sur l'histoire des gaz, fit, dès avant 1772, de très belles recherches sur la respiration des animaux (1). Il prouva que l'air fixe (acide carbonique), l'air commun qui a servi à transformer en chaux (oxyder) les métaux, l'air vicié par la combustion d'une bougie, par la fermentation, par la putréfaction, par la combustion du charbon, font périr les animaux, comme l'air commun altéré par leur respiration. Il fit voir, en outre, que l'air commun vicié par la combustion d'une bougie, par la fermentation, par la putréfaction, par la combustion du charbon et par la

(1) Expérinces sur les gaz. Paris, 1777, t. I.

respiration, contient de l'air fixe (acide carbonique), et que, pour lui enlever ses propriétés délétères, le rendre respirable, il suffit de le tenir pendant quelques jours en contact avec une plante en pleine végétation.

Il comprit toute la portée de cette belle expérience et développa des idées très justes sur l'antagonisme des animaux et des végétaux répandus à la surface du globe considéré comme cause de l'invariabilité de composition de l'atmosphère.

Plus tard, Priestley découvrit l'oxygène, qu'il appela air déphlogistiqué. Il montra que ce gaz n'est pas nuisible aux animaux, et que, à volume égal, il entretient leur respiration plus longtemps que l'air commun; il fit voir aussi que l'air déphlogistiqué (oxygène) dans lequel ont été enfermés des animaux contient de l'air fixe (acide carbonique), et ne peut plus servir à leur respiration (1).

Plus tard encore, dans une série d'observations sur la respiration et sur l'usage du sang, lues à la Société royale de Londres, le 25 janvier 1776 (2), Priestley démontra, par des expériences très concluantes et très bien instituées, que l'air commun et l'air déphlogistiqué (oxygène) jouissent sculs de la propriété de rendre aut sang veineux la couleur rutilante du sang artériel, et que cette action s'exerce même à travers une membrane organique humide, tandis que du sang rutilant artériel prend la couleur noirâtre du sang veineux quand on le met en contact avec de l'air phlogistiqué (azote),

(1) Expériences sur les gaz, t. II.

(2) Expériences sur les gaz, t. II, p. 260 et suiv.

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