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ainsi. Edwards a étudié comparativement des animaux adultes, et de jeunes animaux de même espèce qui ne se refroidissaient plus quand on les isolait; il les a placés les uns et les autres dans des atmosphères artificiellement maintenues à une basse température. Dans une enceinte à 4 degrés, de jeunes pies perdirent, en une heure, 14 à 16 degrés de leur température; tandis que des pies adultes ne se refroidirent que de 3 degrés, dans les mêmes circonstances et dans le même temps. Un résultat identique fut obtenu avec des mammifères; en une heure de séjour dans une enceinte à zéro, un cochon d'Inde de deux jours se refroidit de 11 degrés, un cochon d'Inde de un mois perdit 9 degrés, tandis que la température d'un cochon d'Inde adulte ne s'abaissa que de 2o,5. Après tous ces faits, nous pouvons dire avec Edwards:

<«< En prenant donc une vue générale de toutes ces >> expériences sur les animaux à sang chaud, nous arri>>vons à cette conclusion que la faculté de produire de la >> chaleur est à son minimum à l'époque de leur nais»sance et qu'elle s'accroît successivement jusqu'à l'àge >> adulte. >>

En même temps que, chez les très jeunes animaux, la puissance de calorification est incomparablement moindre que chez les adultes de même espèce, l'observation et l'expérience nous enseignent que, chez eux aussi, la fonction pulmonaire est moins active et la consommation d'oxygène moins considérable. Buffon a consigné, dans son Histoire naturelle de l'homme, une expérience très remarquable éminemment propre à démontrer avec

quelle énergie les mammifères résistent à l'asphyxie, au moment de leur naissance.

« Je fis, dit-il, il y a environ dix ans, une expérience » sur de petits chiens; j'avais pris la précaution de » mettre la mère, qui était une jeune chienne de l'espèce >> des grands lévriers, dans un baquet rempli d'eau >> chaude, et l'ayant attachée de manière que les par»ties de derrière trempaient dans l'eau, elle mit bas >> trois chiens dans cette eau, et ces petits animaux se » trouvèrent au sortir de leurs enveloppes dans un liquide >> aussi chaud que celui d'où ils sortaient; on aida la >> mère dans l'accouchement, on accommoda et on lava » dans cette eau les petits chiens, ensuite on les fit pas>> ser dans un petit baquet rempli de lait chaud, sans >> leur donner le temps de respirer. Je les fis mettre dans » le lait au lieu de les laisser dans l'eau, afin qu'ils pus>> sent prendre de la nourriture s'ils en avaient besoin; » on les retint dans le lait où ils étaient plongés, et ils y » demeurèrent pendant plus d'une demi-heure, après >> quoi les ayant retirés les uns après les autres, je les >> trouvai tous trois vivants; ils commencèrent à respirer >> et à rendre quelque humeur par la gueule; je les >> laissai respirer pendant une demi-heure, et ensuite on >> les replongea dans le lait que l'on avait fait réchauffer >> pendant ce temps; je les y laissai pendant une seconde » demi-heure, et les ayant ensuite retirés, il y en avait >> deux qui étaient vigoureux et qui ne paraissaient pas >> avoir souffert de la privation de l'air, mais le troisième » me paraissait être languissant; je ne jugeai pas à pro»> pos de le replonger une seconde fois, je le fis porter

» à la mère. Ce petit chien, qui était né dans l'eau, qui >> d'abord avait passé plus d'une demi-heure dans le lait » avant d'avoir respiré, et encore une autre demi-heure >> après avoir respiré, n'en était pas fort incommodé, car >> il fut bientôt rétabli sous la mère, et il vécut. Je conti>> nuai ces épreuves sur les deux autres, qui étaient dans >> le lait; je les laissai respirer une seconde fois pendant >> une demi-heure environ; ensuite je les fis mettre de >> nouveau dans le lait chaud, où ils se trouvèrent plon»gés pour la troisième fois; je ne sais s'ils en avalèrent » ou non; ils restèrent dans ce liquide pendant une demi>> heure, et lorsqu'on les en tira, ils paraissaient être >> presque aussi vigoureux qu'auparavant; cependant, >> les ayant fait porter à la mère, l'un des deux mourut » le même jour; mais je ne pus savoir si c'était par >> accident ou pour avoir souffert dans le temps qu'il » était plongé dans la liqueur et qu'il était privé de l'air; >> l'autre vécut aussi bien que le premier, et ils prirent >> tous deux autant d'accroissement que ceux qui » n'avaient pas subi cette épreuve. Je n'ai pas suivi ces >> expériences plus loin, mais j'en ai assez vu pour être >> persuadé que la respiration n'est pas aussi absolument » nécessaire à l'animal nouveau-né qu'à l'adulte. »

Des faits du même genre ont été constatés par Legallois. Cet habile physiologiste a cherché combien de temps les jeunes lapins peuvent vivre sous l'eau à des époques diverses de leur naissance. Les résultats de ses recherches sont consignés dans le tableau suivant (1) :

(1) OEuvres de Legallois, t. I, p. 93.

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Ces faits démontrent d'une manière incontestable que, chez les mammifères, la résistance à l'asphyxie diminue à mesure que, s'éloignant de l'époque de leur naissance, ces animaux résistent mieux aux causes extérieures de refroidissement et produisent plus de chaleur.

L'expérience de Buffon et celles de Legallois portent sur cette catégorie de mammifères qui naissent les yeux fermés et qui, pendant les quinze premiers jours de leur vie, ne peuvent pas maintenir leur température quand ils sont séparés de la mère. Le tableau de Legallois prouve d'ailleurs qu'à partir du quinzième jour, âge auquel nous savons qu'ils commencent à vivre comme des animaux à température constante, les jeunes lapins ne résistent à l'asphyxie qu'une ou deux minutes de plus que les adultes de même espèce. Edwards, en reprenant ces recherches (1), a constaté que le cochon d'Inde, à sa naissance, ne résiste guère que cinq à six minutes à l'asphyxie par submersion; tandis qu'il a vu, exceptionnellement il est vrai, les jeunes chiens vivre

(1) Influence des agents phys. sur la vie, p. 170.

cinquante-quatre minutes sous l'eau (1). Ce fait, rapproché de cette circonstance que le cochon d'Inde appartient à la catégorie des animaux qui, dès leur naissance, ont la propriété de conserver leur température constante, est une preuve évidente de la liaison intime qui existe entre l'activité de la fonction respiratoire et l'intensité de la production de chaleur. Edwards a soumis des oiseaux aux mêmes expériences; il a trouvé que, en général, la résistance à l'asphyxie est d'autant plus prononcée que l'animal est pris à une époque plus rapprochée de l'éclosion, et que, toutes choses égales d'ailleurs, les oiseaux nés sans plumes vivent sous l'eau beaucoup plus longtemps que les autres.

Les faits précédents suffisent pour démontrer que, dans un temps donné, le jeune animal consomme réellement moins d'oxygène que l'adulte; cependant il était désirable que l'expérience directe vînt confirmer cette déduction. Edwards a fait, à ce sujet, une série de recherches (2).

Les animaux, placés dans un vase de verre de la capacité d'un litre et renversé sur une dissolution de potassé afin d'absorber l'acide carbonique à mesure qu'il était exhalé, étaient maintenus au-dessus du liquide par un diaphragme de gaze. Il commença par expérimenter sur des moineaux de huit jours, c'est-à-dire pris à un âge tel qu'ils se refroidissent quand on les sépare de leur mère; en moyenne, la quantité d'oxygène con

(1) Loc. cit., p. 268. (2) Loc. cit., p. 189.

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