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tant, en 1858, le site d'Engaddi, M. Rey a retrouvé des réservoirs et des traces de conduits destinés à l'irrigation des cultures étagées en gradins... Burchard de Mont-Sion signale dans la relation de son voyage en Terre-Sainte une méthode de taille, qu'il trouva en usage à Tortose, et par suite de laquelle certaines vignes portaient trois récoltes la même année. Il existait encore des vignobles à Engaddi au xv siècle; Hasselquist, qui visita les ruines de ce village en 1739, y vit encore des vignes. En 1858, pendant mon séjour à Engaddi, ajoute M. Rey, je n'en trouvai plus aucune. »

Il en sera bientôt de même en France. La Bretagne produisait anciennement beaucoup de vin ; on prétend même que, comme le bordeaux, il avait la propriété de s'améliorer en voyageant sur mer. Dans le mémoire sur l'état de la Généralité de Bretagne, fourni en 1697 au duc de Bourgogne par l'intendant de cette province, on lit que les vins, et les eaux-de-vie qu'on en distillait, formaient en grande partie le commerce des Bretons; qu'il sortait de Nantes, année commune, 8.000 tonneaux de vin et 7.000 pipes d'eau-de-vie; et que les étrangers surtout estimaient beaucoup cette dernière liqueur, parce qu'elle avait la propriété de conserver toute sa force sur mer. Est-ce le climat qui a changé en Bretagne? Comme en Syrie.

Nous voyons encore, dans le livre de M. Rey, que la condition des paysans était très aisée dans les colonies franques de Syrie. « Les serfs ne portaient que le joug d'un servage très adouci et pouvaient, grâce aux profits de l'agriculture, étendre leur aisance, et relever, peu à peu, leur condition morale... Les actes qui nous sont parvenus paraissent établir que les produits des cultures étaient partagés de la manière suivante : une part, variant du quart au tiers, était prélevée pour le seigneur, et le surplus appartenait aux serfs. » Les produits de la vigne étaient partagés de la même manière. Il faut se rappeler qu'à cette condition le seigneur défendait le serf.

On croira peut-être que les croisades ont au moins été profitables à la religion et au clergé catholique, puisqu'elles ont été entreprises dans ce but. Mais on reviendra de cette erreur si l'on veut lire le chap. XIII du livre de M. Rey. Le clergé latin de Syrie fut très riche dans les commencements, puisque le pays était riche et qu'il le pillait sous la protection des croisés; mais quand on récolte sans semer, on ne va pas loin. « Les exigences pécuniaires des gens d'église furent au nombre des principales causes d'affaiblissement des colonies franques. Les critiques les plus vives qui aient été dirigées contre le clergé se rencontrent dans les œuvres de Jacques de Vitry, évêque d'Acre, qui l'accuse hautement de

1 Legrand d'Aussy. Histoire de la vie privée des Français.

rapacité, d'avarice, de simonie, etc. Il dit encore que le triste exemple qu'il donnait en célébrant des mariages à des degrés prohibés, sans tenir compte des canons de l'Eglise, ou en se livrant à la captation près des mourants, enfin, en ne conservant aucun respect pour les décisions patriarcales, avait ôté aux laïques tout respect des choses divines. » Les conciles de France et de toutes les églises catholiques, où l'Église a été unie à l'Etat, ne disent jamais autre chose.

Avec une foule de renseignements intéressants sur les colonies de Syrie, le livre de M. Rey contient un grand nombre de cartes et de figures représentant des sceaux, des monnaies, des villes, des châteaux, et il se termine par une géographie historique de la Syrie au temps des croisades.

ROUXEL.

LA SCIENCE NOUVELLE, revue hebdomadaire, dirigée
par M. ADOLPhe Bitard.

Nous avons sous les yeux plusieurs numéros d'un recueil que publie chaque semaine, sous le nom de la Science nouvelle, M. Adolphe Bitard, connu déjà par de nombreux travaux de vulgarisation scientifique et l'un de nos plus sympathiques confrères de la presse parisienne.

Nous avons remarqué dans les numéros divers articles, tels que les Insectes pasteurs, l'Origine des inventions (un ancêtre du téléphone), l'Alchimie et les alchimistes (Albert-le-Grand et Roger Bacon), une notice sur Vaucanson, notre célèbre mécanicien du XVIIIe siècle. M. Victor Chabert, son auteur y rappelle que les dispositions de Jacques de Vaucanson pour la mécanique se révélèrent de très bonne heure et d'une manière significative. Conduit par sa mère, tous les dimanches, chez certaines vieilles dames, celles-ci avaient l'habitude de s'en débarrasser en le relégant dans une chambre non habitée et qui avait pour principal meuble une grande et antique horloge. Frappé du mouvement égal et constant du pendule, l'enfant voulut en pénétrer la cause, et il y parvint au point d'exécuter, à l'aide de son couteau et de quelques morceaux de bois, une horloge qui ne laissait pas de marcher avec quelque régularité.

Vaucanson vint ensuite à Paris pour perfectionner son éducation scien. tifique, et il n'était encore âgé que de 32 ans lorsqu'en 1742 « le grand Frédéric, qui cherchait à s'entourer de tous les hommes illustres dispersés en Europe, lui fit faire des offres brillantes; mais Vaucanson ne voulut point quitter la France. Peu de temps après, le cardinal Fleury récompensa cet acte de patriotisme en attachant Vaucanson à l'administration et en lui confiant l'inspection des manufactures de soie. Parmi les nombreuses améliorations qu'il introduisit dans cette bran

che de l'industrie française, on doit signaler surtout la machine qu'il imagina pour fabriquer les chaînes sans fin des moulins à organsiner, dites chaînes de Vaucanson. Ses perfectionnements de machines entraînant une simplification de travail firent à Vaucanson des ennemis parmi les ouvriers lyonnais, qui se croyaient seuls capables d'exécuter certaines étoffes dont le dessin était alors à la mode. « Vous prétendez, leur dit-il, que seuls vous pouvez faire ce dessin.... Eh bien, je le ferai faire par un âne! » Et il construisit en effet une machine avec laquelle un âne exécutait une étoffe à fleurs. On voit encore aujourd'hui au Conservatoire des arts et métiers cette curieuse machine telle qu'elle fut construite, avec une partie du dessin exécuté. »

Ajoutons que l'homme dont le génie inventif, a dit un biographe, << avait créé tant de prodiges et ouvert aux mécaniciens une nouvelle et vaste carrière, ne vit point s'ouvrir pour lui les portes de l'académie des sciences »>. Il eut le chagrin de se présenter plusieurs fois sans succès comme candidat et Vaucanson mourut, le 24 octobre 1782, âgé de 74 ans, alors qu'il s'occupait ardemment de perfectionner, mais sans avoir été académicien, sa chaîne sans fin.

AD.-F. DE FONTpertuis.

CHRONIQUE

SOMMAIRE: La nouvelle politique coloniale et la coalition de l'Europe centrale. Clôture de la session du parlement anglais. Le traité de commerce hispano-allemand. La diminution de la population en Allemagne. — La situation des chemins de fer en Europe et les prix de transport des voyageurs. Vou de la chambre de commerce de Verviers en faveur de la suppression des douanes. La fête d'Ischia et les comités charitables. est-il contagieux? La quarantaine de Beyrouth.

Le choléra La récolte de 1883.

Les blés de l'Inde et l'agriculture américaine. La question du tarif aux Etats-Unis. La « réforme du service civil ». — Hommage à Joseph Garnier.

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La nouvelle politique coloniale menace d'amener des complications dangereuses entre la France et la Chine, tandis qu'une véritable coalition se forme au centre de l'Europe, entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et l'Italie, sans compter la Roumanie. Cette coalition a pour but, à la vérité, de mieux assurer la paix de l'Europe, mais nous ne pouvons nous empêcher de trembler quand nous voyons les hommes d'État et les diplomates travailler à assurer la paix, en ourdissant des coalitions politiques et militaires. Nous préférerions des unions douanières.

La session du parlement anglais a été close le 25 août. Le bilan économique de cette session comprend : 1o une loi destinée à assurer une compensation aux fermiers d'Angleterre et d'Écosse ayant amélioré leurs terres; 2° un acte ayant pour objet d'améliorer la législation des brevets d'invention; 3° un autre acte relatif à l'amélioration de la loi sur les faillites; 4° des mesures prises pour assurer l'amortissement continu de la Dette publique; 5o l'acte ayant pour objet l'encouragement de l'industrie et des entreprises dues à l'initiative irlandaise par l'amélioration des voies de communication ainsi que pour le soulagement de certains districts par l'émigration. Enfin la reine se plaît à constater que la situation des classes de la population qui souffrent de la dépression de l'industrie agricole s'est améliorée dans la plupart des districts, et que l'état général de l'industrie et du commerce est satisfaisant ».

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En Allemagne, le Reichstag a été convoqué extraordinairement pour discuter le traité de commerce et de navigation conclu avec l'Espagne. Ce traité qui accorde aux produits de l'industrie allemande des réductions importantes à leur importation en Espagne, a été ratifié sans opposition.

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L'état presque stationnaire de la population en France a fait, dans ces derniers temps, pousser des cris d'alarme patriotiques et suscité divers projets de loi ayant pour objet d'établir une taxe sur les célibataires et d'instituer des primes en faveur des époux prolifiques. Les auteurs de ces projets apprendront avec satisfaction que l'accroissement de la population en Allemagne a fait place à un ralentissement notable: du 1er décembre 1880 au 6 juin 1882, le chiffre de la population allemande est tombé de (45.234.061 à 45.213.907. On voit que les effets du militarisme et des gros budgets ne se font pas sentir seulement en France.

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Le Journal officiel a publié dans son numéro du 25 août, un relevé de la situation des chemins de fer en Europe au 31 décembre 1882. La longueur totale du réseau européen était de 178.225 kilomètres ainsi répartis Allemagne 34.988, AutricheHongrie 20.010, Belgique 4.231, Danemark 1.762, Espagne 7.848, France 28.880, Grande-Bretagne et Irlande 29.814, Grèce 10, Italie 9.038, Pays-Bas et Luxembourg 2.393, Portugal 1.471, Rou

manie 1.470, Russie et Finlande 24.453, Suède et Norvège 7.775, Suisse 2.698, Turquie, Bulgarie et Roumélie 1.394. Au 31 décembre 1881, la longueur totale était de 172.607. L'accroissement dans l'année a donc été de 5.628 kilomètres, soit 3,26 0/0.

D'un autre côté, nous empruntons au Correspondant de Hambourg, le tableau comparatif des prix de transport des voyageurs (billets simples) par kilomètre dans les divers pays de l'Europe.

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Tandis que les 300 millions d'habitants de l'Europe n'avaient encore à leur service au 31 décembre 1882 que 178.235 kilomètres de chemins de fer, malgré l'intervention et les subventions des gouvernements, les 50 millions d'habitants des États-Unis en avaient 155.810, auxquels il faut ajouter 34.000 kilomètres pour voies de garage, etc., au 31 décembre 1880 et ils en construisaient environ 10.000 kilomètres par an, sans l'intervention du gouvernement.

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Les douanes ne sont-elles pas un anachronisme barbare et une anomalie presque ridicule à une époque ou l'on ne recule devant aucune dépense pour faciliter les communications internationales, en multipliant les chemins de fer, en perçant des tunnels, en creusant des canaux, en subventionnant des lignes de navigation à vapeur, etc., etc.? C'est l'avis de la Chambre de commerce de Ver

1 Y compris 23.3 0/0 d'impôt.

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