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XVI

DÉPOSITIONS DE TROIS GENTILSHOMMES

Noble homme sire AUBERT D'OURCHES, chevalier, seigneur d'Ourches près Commercy, âgé de soixante ans, dit :

Toutes les fois que j'ai entendu parler des parents de Jeanne, je les ai entendu citer comme de braves gens.

Je me souviens d'avoir vu Jeanne à Vaucouleurs, quand elle demandait qu'on la menât au roi. Je lui ai entendu dire plusieurs fois qu'elle voulait aller au roi et qu'elle voudrait bien qu'on l'y conduisît, « Ce sera pour le plus grand profit du dauphin », ajoutait-elle.

La Pucelle me parut être imbue des meilleures mœurs. Je youdrais bien avoir une fille aussi brave qu'elle.

Plus tard j'ai retrouvé Jeanne dans la société des gens de guerre. Je l'ai vue se confesser au frère Richard, devant Senlis, et communier deux jours de suite avec les ducs de Clermont et d'Alençon. Je suis absolument convaincu que c'était une bonne chrétienne.

J'ai entendu parler de l'arbre des Dames. On dit que

4. « Pro maximo Delphini proficuo, »

2. « Et bene vellet habere unam filiam ita bonam. »

les fées avaient anciennement coutume d'y aller se promener. Pourtant je ne sache pas que personne les y ait vues. Je ne sache pas non plus que Jeanne soit jamais allée sous cet arbre.

Comme je vous l'ai dit, Jeanne, étant à Vaucouleurs, demandait aux uns et aux autres qu'on la menàt au roi. Elle parlait moult bien 1.

Enfin elle fut menée au roi par Bertrand de Poulengy, Jean de Metz et leurs servants.

Je ne sais rien autre.

Noble homme GEOFFROY DU FAY, àgé de cinquante ans, dit:

Je me souviens d'avoir connu le père et la mère de Jeanne. Je ne sais pas leurs noms; mais ce que je sais bien, c'est qu'ils étaient bons chrétiens et vrais catholiques, comme le sont les laboureurs : jamais je n'ai ouï dire le contraire.

:

Autrefois j'ai vu Jeanne venir à Maxey-sur-Vayse (près Vaucouleurs), et il était assez fréquent qu'elle vint chez moi. Elle me paraissait bonne, simple, pieuse.

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1. « Multum bene loquebatur. Au surplus, chez Jeanne, rien de ce vain babil qu'on reproche à maintes femmes. Dans la Chronique de la Pucelle, à propos des antécédents de Jeanne avant son apparition à Orléans, il est dit « qu'elle parlait peu », et, dans. le Registre delphinal, il est dit : « Quand elle estoit » sur faict d'armes, elle estoit hardye et courageuse, et parlait haultement du faict de guerre. Et quand elle estoit sans » harnoys, elle estoit moult simple et peu parlant.

2. « Ut laboratores sunt. »>

Plusieurs fois je l'ai entendue parler. Elle disait que sa volonté était d'aller en France.

J'ai su qu'elle fut conduite au roi par trois cavaliers, Jean de Metz, Bertrand de Poulengy et Julien. Néanmoins je ne vis pas alors Jeanne elle-même. Ce sont ses compagnons qui me dirent qu'elle devait faire route

avec eux.

Je ne sais rien autre.

Noble homme LOUIS DE MARTIGNY, écuyer, demeurant à Martigny-les-Gerbonveaux, près Neufchâteau, âgé de cinquante-quatre ans, dit:

Je ne sais rien sur l'enfance de Jeanne sinon par ouïdire. Mais j'ai entendu assurer qu'elle était une brave fille et aimait à se confesser.

Il m'a été dit aussi que, quand elle voulut venir en France, elle alla trouver le bailli de Chaumont et puis le seigneur duc de Lorraine. Le seigneur duc lui donna un cheval et de l'argent. Ensuite les nommés Bertrand de Poulengy, Jean de Metz, Jean de Dieuleward et Colet de Vienne la conduisirent au roi.

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XVII.

DÉPOSITIONS DE DEUX CURÉS

ET D'UN SERGENT

Discrète personne messire JEAN LEFUMEUX, de Vaucouleurs, chanoine de la chapelle SainteMarie de Vaucouleurs et curé de l'église paroissiale d'Ugny, âgé de trente-huit ans,

dit:

Je me souviens d'avoir vu jadis le père et la mère de Jeanne venir à Vaucouleurs. J'ai aussi souvenir de la venue de Jeanne à Vaucouleurs. Elle disait qu'elle voulait aller trouver le dauphin 1. En ce temps-là j'étais tout jeune et j'étais attaché comme clerc à la chapelle Sainte-Marie de Vaucouleurs dont je suis aujourd'hui chanoine. Je vis souvent Jeanne venir à cette église avec grande dévotion 2. Elle y entendait les messes du matin et restait longtemps en prière. Je l'ai vue aussi, sous la voûte en berceau, dans la chapelle souterraine de Sainte-Marie de Vaucouleurs, se tenir à genoux devant la Vierge, le visage tantôt baissé, tantôt levé vers le ciel. Selon ma croyance, c'était une bonne et sainte fille. Je ne sais rien autre.

1. « Dicebat quod volebat ire ad delphinum.

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2. On voit encore à Vaucouleurs la chapelle où Jeanne allait prier. Avec la porte dite la porte de France, cette chapelle est tout ce qui reste du vieux château.

Discrète personne messire JEAN COLIN, curé de l'église paroissiale de Domremy, et chanoine de l'église collégiale de Saint-Nicolas de Brixey, près Vaucouleurs, âgé de soixante-six ans, parla ainsi :

Jeanne, pendant son séjour à Vaucouleurs, vint deux ou trois fois se confesser à moi, J'ai donc deux ou trois fois entendu sa confession. Eh bien, mon impression, en conscience, est que c'était une bonne fille, donnant tous les signes d'une excellente chrétienne, vraie et parfaite catholique.

J'étais présent quand Jeanne monta à cheval pour quitter Vaucouleurs et prendre la route de France. Avec elle il y avait, également à cheval, Bertrand de Poulengy, Jean de Metz, Colet de Vienne et autres servants de Robert de Baudricourt.

Je ne sais rien autre.

Pour en finir avec les trente-quatre témoins qui furent interrogés à Domremy et à Vaucouleurs, il nous reste à entendre la déposition, d'ailleurs insignifiante, d'un sergent du roi, âgé de trente-six ans, GUILLOT JACQUIER, d'Andelot. Il borna son témoignage à ces quelques mots :

Je ne puis parler que par ouï-dire. Il m'est notamment revenu que Jeanne était une brave fille, de bonne renommée et de conduite honnête.

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