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personne appartenant à notre monde politique, parfaitement apparentée et qui verrait d'un bon œil le déploiement de mon activité. Puissent les dieux supérieurs, les médians et les inférieurs, veiller à la réalisation de cette conjonction! Comme de juste, vous serez dans les premiers, mon cher ami, à recevoir cet euangile... Écr. l'inf.! »

<< Mardi, 10 nov... Mes projets connubiaux marchent de mieux en mieux. J'entre dans une famille ennemie des dieux et des aristocrates, lettrée et pratiquante. Faites des vœux pour moi! »

<< Mercredi, 9 déc... Vous ai-je dit qui j'épouse? C'est la fille de M. Beaujean, nièce de Laurent-Pichat avec qui d'ailleurs ils vivent en commun. Centre excellent sous tous les rapports; je ne pouvais mieux espérer et n'ai pas perdu pour attendre. »

C'est surtout au Conseil municipal de Paris que l'œuvre politique d'Hovelacque doit être étudiée. En 1877, Gambetta et Laurent-Pichat l'avaient engagé à se présenter aux électeurs. Élu le 6 janvier 1878 conseiller municipal pour le quartier de l'École-Militaire (7e arrondissement) par 1091 voix sur 1406 votants, réélu le 9 janvier 1881 par 1035 voix sur 2000 suffrages exprimés, il prit place dès le premier jour parmi les membres les plus avancés de notre assemblée communale. Son rôle y est admirablement exposé dans les vers, médiocres d'ailleurs, que son collègue C. Henricy consacra aux quatre-vingts élus de Paris en 1879 (Les

Quatrains municipaux, rôle d'équipage du vaisseau de Paris. Paris, Dentu, s. d., 55 p. pet. in-8, avec cette épigraphe: «Dans la galère capitane Nous étions quatre-vingts rameurs. Victor Hugo >>):

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Hovelacque est actif au travail, à l'étude;
D'arriver des premiers il a pris l'habitude;
Il écrit des rapports courts, lumineux, corrects,
Et s'il porte des coups, ils sont toujours directs.

Aussi fut-il constamment en butte aux attaques passionnées de la réaction cléricale. Après lui avoir opposé en 1881 un candidat qui ne réunit que 876 voix, ils réussirent à le battre en 1884, au second tour. Au premier tour, le 4 mai de cette année, Hovelacque avait encore l'avance: il obtenait 995 voix contre 985 accordées à M. Lerolle, avocat, politicien incolore, mais clérical acharné. M. Lerolle fut élu le 11 mai par 1084 voix contre 961 qui étaient restées fidèles à Hovelacque; son succès était dû à deux causes tout à fait particulières et accidentelles : la maladresse de certains amis d'Hovelacque qu'une délicatesse excessive l'empêcha de désavouer; une campagne d'abstention faite sournoisement par une personnalité politique jalouse que nous avons vue depuis échouer misérablement en police correctionnelle. Quoi qu'il en soit, les électeurs de Paris ne pouvaient laisser Hovelacque en dehors du Conseil où il avait si bien rempli son mandat; il y rentra triomphalement le 31 janvier 1886, élu dans le quartier de la Salpé

trière par 917 voix contre 430 à deux concurrents réunis; il y fut réélu le 8 mai 1887 sans concurrent, par 2043 voix, c'est-à-dire la presque unanimité des suffrages. Il présida deux fois le Conseil municipal, du 17 février 1886 au 7 février 1887 et du 1er juin 1887 au 27 février 1888; il apporta dans ces délicates fonctions un talent et une mesure remarquables, et il présida avec une impartialité rare, un tact parfait, une modération voulue, qu'on n'a pas retrouvés depuis.

Les dix années qu'il passa à l'Hôtel de Ville furent bien remplies. Paris doit à son initiative et à ses efforts trop de bienfaits pour que nous puissions les énumérer ici. Nous ne mentionnerons que les principaux: poursuite de la laïcisation des écoles et des hôpitaux, organisation des écoles primaires supérieures, augmentation du traitement des instituteurs, concours pour le choix des institutrices, création de l'École Estienne où sont groupées toutes les industries du livre, etc., etc.

Malgré tout ce qu'Hovelacque a pu faire, il y a beaucoup de projets qu'il n'a pu mener à exécution, tant les résistances à vaincre étaient obstinées. Il y a plus de quinze ans par exemple qu'il souleva la très importante question de la reprise des nombreux immeubles appartenant à la Ville de Paris et détenus par des congrégations religieuses en vertu de tolérances injustifiables. Il aurait désiré notamment qu'on pût installer au moins deux écoles primaires supérieures et l'École

Estienne dont je viens de parler, dans l'immeuble considérable occupé rue Oudinot par les Frères de la doctrine chrétienne. Rien n'a pu être encore obtenu; les préjugés, les influences occultes, les agissements ténébreux, ont su si bien embrouiller les choses et fait méconnaître les principes les plus élémentaires du droit. Hovelacque était trop populaire à Paris, je ne crois pas le mot excessif, - pour n'avoir vite acquis une grande influence sur le personnel des comités républicains avancés. On vint souvent le consulter pour des candidatures à des élections municipales ou autres : plusieurs hommes politiques qui sont devenus plus tard députés, sénateurs, ministres même, doivent à sa désignation pour une première candidature leur ascension et leur fortune. Quoi qu'il en soit, aux élections du 20 août 1881, Hovelacque fut lui-même candidat à la députation; les comités parisiens, réalisant les prévisions de Gambetta dans son discours du 26 juin 1871 à Bordeaux, résolurent d'opposer au parti républicain conservateur que l'avènement de Jules Ferry avait porté au pouvoir un parti républicain progressiste; ils opposèrent aux députés républicains sortants des candidats plus avancés: Sigismond Lacroix et Tony Révillon contre Gambetta au 20°, Jules Roche contre Greppo au 12o, Darlot contre Spuller au 3o, Henri Maret contre Pascal Duprat au 17, A. Humbert contre G. Casse au 14, Yves Guyot contre Tirard au 1er, Hovelacque enfin au 15e contre Farcy. Ce dernier fut

réélu par 8087 voix; Hovelacque en obtint 3427, ce qui était dans les circonstances un succès relatif. Il semblait donc tout indiqué que quatre ans plus tard, lors du rétablissement du scrutin de liste, Hovelacque fût porté sur la liste radicale; mais, par son honnêteté et son indépendance, il avait choqué trop de médiocrités jalouses, et les journalistes ne voulurent pas ratifier le choix des comités. Trois ans plus tard, lorsqu'il s'agit de combattre la candidature du général Boulanger, ce fut encore Hovelacque que les comités désignèrent pour porter le drapeau de la République et ce fut encore le mauvais vouloir des journaux qui fit substituer à son nom celui de Jacques, à ce moment président du Conseil général de la Seine; on sait que le résultat de l'élection du 27 janvier 1889 fut lamentable: le « Saint-Arnaud de café concert >> obtint 245,246 voix et Jacques n'en eut que 162,875. Je crois encore aujourd'hui qu'avec Hovelacque l'écart eût été moins considérable. Mais, cette même année 1889, on ne put l'empêcher d'être le candidat des républicains de principe dans la première circonscription du 13e arrondissement (Salpêtrière et Croullebarbe), et il fut élu député au second tour, le 5 octobre, par 2,978 voix contre 2,562 obtenues par le boulangiste Planteau. Le 24 août 1893, il fut réélu sans concurrent par 3,046 suffrages sur 5,000 votants. Il donna sa démission, pour raison de santé, le 23 octobre 1894.

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