Imágenes de páginas
PDF
EPUB

industriel. On est frappé et, le plus souvent, on ignore même d'où est parti le coup.

Si un tarif est abaissé, la production générale étant augmentée, il y a bénéfice définitif; mais si un tarif est relevé, il y a, de même, perte définitive. Cette perte se résout en une diminution des profits et des salaires. Le capitaliste perd son capital, le travailleur perd son travail; l'un est inévitablement voué à la ruine, l'autre à la mort.

C'est affreux.

LE SOCIALISTE.

L'ÉCONOMISTE.

Tout en produisant de ces résultats d'un côté, la loi enrichit de l'autre, rapidement, comme d'un coup de dé, les industriels devenus maîtres du marché. A la vérité, leur prospérité ne dure guère. Les capitaux et les bras se portent en foule vers les industries protégées. Souvent même, ils s'y portent avec excès. Autres perturbations, autres ruines!

Sous ce régime, l'industrie n'est plus qu'un jeu de basard où les uns s'enrichissent, où les autres se ruinent selon les caprices de la fortune; où le laborieux entrepreneur, naguère ouvrier, voit se dissiper soudainement le fruit de toute une vie de travail et d'épargne, tandis qu'ailleurs de riches capitalistes voient se doubler ou se tripler leurs capitaux.

Mais on ne meurtrit jamais impunément l'humanité. Un long cri d'amertume, de colère retentit, un jour, aux oreilles des rares privilégiés de ce système. Malheureusement ceux qui le poussèrent et ceux qui s'en firent les échos n'aperçurent point la cause du mal. M. de Sismondi

[ocr errors]

qui, le premier, exprima éloquemment la plainte universelle, ne sut point remonter à la source de tant de perturbations désastreuses. Ses successeurs socialistes firent pis encore ils attribuèrent le mal à des causes apparentes qui étaient précisément l'opposé des causes réelles; ils imputèrent à la propriété des maux qui provenaient précisément d'atteintes portées au libre exercice ou à la libre disposition de la propriété.

LE SOCIALISTE.

Oui, ce système a dû causer de grands maux, n'en avons, peut-être, pas assez tenu compte.

LE CONSERVATEUR.

et nous

On aurait mieux fait de s'en passer, j'en conviens. Mais puisqu'on l'a adopté ne faut-il pas bien le conserver? La plupart de nos industries ont grandi sous l'aile de la protection, ne l'oublions pas? Ne serait-il pas imprudent de la leur ravir?

L'ÉCONOMISTE.

Si le système protecteur est mauvais, il faut évidemment y renoncer. Déjà l'Angleterre nous a donné l'exemple du retour à la liberté commerciale. Imitons-la!'

LE SOCIALISTE.

Par quoi remplaceriez-vous les tarifs protecteurs?

On sait que c'est principalement aux efforts de la Ligue contre les lois-céréales, dirigée par M. Cobden, que l'Angleterre doit la conquête de la liberté commerciale. Voir, pour l'histoire de cette adınirable association, le livre de M. Bastiat, Cobden ou la Ligue et l'Association anglaise; les Études sur l'Angleterre, de M. Léon Faucher; Richard Cobden ou les Ligueurs, par M. Joseph Garnier, et surtout les esquisses pittoresques et colorées de notre excellent et regrettable ami A. Fonteyraud, dans la Revue britannique et dans l'Annuaire de l'Économie politique.

LE CONSERVATEUR.

Par des tarifs fiscaux, sans doute ?

LE SOCIALISTE

Au point de vue de la stabilité de la production, les tarifs fiscaux ne sont guère préférables aux autres. On les modifie tout aussi fréquemment. En outre, un tarif fiscal est toujours plus ou moins protecteur.

L'ÉCONOMISTE.

Je ne l'ignore pas. Aussi n'accepterais-je un tarif fiscal que comme un pis-aller. C'est moins mauvais qu'un tarif protecteur, mais c'est encore mauvais. Il faut arriver à la suppression de toute espèce de tarifs, à la pleine liberté des échanges, au respect absolu du droit d'échanger, si l'on veut donner à la production toute la fécondité et toute la stabilité possibles.

Remarquez bien, du reste, que ce résultat ne pourra être complétement atteint avant la suppression entière de toutes les douanes. Aussi longtemps qu'une douane restera debout, elle occasionnera des perturbations et des ruines dans toute l'étendue de l'arène de la production.

Cependant, que les principales nations industrielles renoncent à ces vieux instruments de guerre, et l'amélioration sera déjà sensible.

LE SOCIALISTE.

Que de réformes à faire !

L'ÉCONOMISTE.

Oui, que de réformes véritables!

HUITIEME SOIRÉE.

SOMMAIRE: Atteintes portées à la propriété intérieure.

l'État. par

[blocks in formation]

Fabrication de la

monopolisées ou subventionnées monnaie. Nature et usage de la monnaie. - Pourquoi un pays ne saurait être épuisé de numéraire. Voies de communication.-Exploitées chèrement et mal par l'État.-Transport des lettres.—Maitres de postes. Que l'intervention du gouvernement dans la production est toujours nécessairement nuisible. Subventions el priviléges des théâtres. · Bibliothèques publiques. · -Subvention des cultes. nopole de l'enseignement.

[ocr errors]

Ses résultats funestes.

Mo

L'ÉCONOMISTE.

On n'atteint pas seulement la propriété extérieure, on atteint encore la propriété de l'homme sur sa personne, sur ses facultés, sur ses forces, la propriété intérieure.

On viole la propriété intérieure, lorsqu'on défend à l'homme d'utiliser ses facultés comme bon lui semble, lorsqu'on lui dit : Tu n'exerceras point telle industrie, ou, si tu l'exerces, tu seras assujetti à certaines gênes, tu seras tenu d'observer certains règlements. Le droit naturel que tu possèdes d'employer tes facultés de la manière la plus utile à toi et aux tiens, ce droit sera diminué ou réglementé. En vertu de quel droit? En vertu du droit supérieur de la société. Mais si je ne fais de mes

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

facultés aucun usage nuisible? La société est convaincue que tu ne saurais exercer librement certaines industries sans lui nuire. Mais si la société se trompe? Si en appliquant librement mes facultés à n'importe quelle branche de la production je ne lui porte point dommage? Eh bien, tant pis pour toi! la société ne

saurait avoir tort.

Cependant, en se trompant ainsi, la société ne s'infliget-elle pas, à elle-même, un dommage? Des règlements qui entravent l'activité du producteur n'ont-ils pas pour résultat inévitable, certain, de diminuer la production en augmentant le prix des produits? Si une industrie est réglementée, vexée, en présence d'autres industries demeurées libres, ne se portera-t-on pas de préférence dans celles-ci? ou, si l'on se résigne à exercer l'industrie réglementée, ne rejettera-t-on pas sur les consommateurs une partie du fardeau des vexations et des règlements?

Laissons de côté les régimes où toutes les industries sont réglementées, ceux encore où aucun travailleur ne peut disposer librement de ses facultés, où le travail est encore esclave. Grâce à Dieu, ces monstruosités commencent à devenir rares. Occupons-nous seulement de ces régimes bâtards où certaines industries sont libres, d'autres sont réglementées, où d'autres encore sont accaparées par l'Etat.

ой

Tel est le régime déplorable qui prévaut actuellement en France.

LE CONSERVATEUR.

Vous prétendez que le gouvernement nuit à la société en réglementant certaines branches de la production, et en exerçant, lui-même, certaines industries?

« AnteriorContinuar »