Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Sa réhabili

ses derniers momens.

tation.

JEANNE D'ARC avait vu son père à Rheims, et y avait témoigné pour lui le plus tendre empressement et le plus profond respect. Comment aurait-elle manqué à ces deux devoirs de la piété filiale, la jeune héroïne qui prenait la vertu la plus sévère pour base de toutes ses actions, et qui se montrait même persuadée, qu'à l'exemple de ce qui se passait chez les anciens Israélites, la pureté des combattans pouvait seule, dans une action de guerre, assurer la victoire à leur courage et leur habileté ! Cet oubli coupable aurait-il pu devenir chez elle l'effet de cet éblouissement que causent quelquefois les grandeurs à ceux qui ont passé leurs premières années loin d'elles et de leurs vains prestiges? Jeanne d'Arc se croyant, dès son enfance, destinée à jouer le rôle brillant qu'elle soutenait avec tant de noblesse, ne s'etait introduite auprès du roi que par soumission aux décrets du

souverain Auteur de toutes choses, qu'elle lui donner sans

consultait sans cesse, pour

cesse aussi des marques de l'obéissance la plus absolne. Les honneurs ne parurent jamais la flatter, et il semblerait même qu'elle en portait le poids avec impatience. Du moins la vit-on, après le sacre et le couronnement du roi, solliciter comme un bienfait la permission de se retirer au sein de sa famille, prétendant au reste que sa mission était terminée, et que les plus grands malheurs fondraient sur elle si elle prolongeait au-delà sa présence à l'armée.

Il ne fallut rien moins que les sollicitations de tous les guerriers illustres qui avaient été ses compagnons d'armes, et même les ordres du roi pour la retenir. L'histoire nous apprend que, dans l'idée sans doute de l'enchaîner par l'intérêt, lien que les hommes croient généralement tout-puissant, parce que la plupart d'entre eux en peuvent être invinciblement attachés ; l'histoire nous apprend, dis-je, que ce ne fut que dans le mois de décembre; c'est-à-dire à un terme déjà éloigné du sacre de Char

les VII, qui s'était fait le 17 juillet, et après de nouveaux services,que Jeanne d'Arc reçut du roi des lettres de noblesse, récompense qu'on lui rendait commune avec toute sa famille, pour laquelle on connaissait sa tendre affection. Dès le mois de juillet, on avait cependant élevé à la dignité de bailli de Vermandois le chevalier la Hire, qui n'avait fait que lui prêter dans les combats le secours de son épée, qu'il sortait volontiers du fourreau.

« Forcée de céder aux volontés de son souverain, dit Villaret dans son Histoire de France, on la vit, depuis ce moment, s'abstenir d'opposer son avis à celui des ministres ou des généraux, liberté qu'elle s'était presque toujours donnée jusqu'alors. Elle se contenta dans la suite de partager les travaux des plus dangereuses expéditions, et de s'exposer la première. >>

Ainsi se montra-t-elle, par exemple (en août), à la bataille de Mont-Piloer, dont l'événement fut indécis. Accompagnée du chevalier Dunois, du comte d'Albret et de la Hire, elle se jeta plusieurs fois dans la

mêlée pour essayer de fixer la victoire du côté de ses compatriotès; tantôt ralliant les guerriers français, et les ramenant au combat, tantôt croisant sà lance avec celles des chefs ennemis, et les faisant reculer ou rouler sur la poussière.

Ainsi se montra-t-elle encore un peu plus tard, c'est-à-dire le 8 septembre, au siége de Paris. Ce jour-là, cette ville, que tenaient toujours les Anglais, étant attaquée avec succès par les guerriers fidèles à Charles VII, dans l'espace de terrein qui s'étendait entre la butte Saint-Roch ou des Moulins et la porte Saint-Honoré, placée alors où la rue Traversière vient aujourd'hui se joindre à la rue Saint-Honoré, Jeanne d'Arc fit particulièrement preuve de valeur, et l'on put croire un moment que la réduction de la capitale de la France allait devenir le prix de son courage et de son génie militaire.

Les Anglais, qui occupaient d'abord quelques ouvrages avancés, venaient d'être repoussés jusque dans la place, après avoir vu l'épée d'un de leurs chevaliers devenir la conquête de la libératrice d'Orléans,

H

lorsque celle-ci, jugeant avec raison que cet avantage, si l'on savait en profiter, pouvait se pousser jusqu'à la prise même de Paris, s'écria qu'il fallait monter à l'assaut, Ce coup de vigueur devait, à l'entendre, achever la défaite d'un ennemi déjà découragé et consterné, et pouvait aussi faire déclarer les partisans nombreux que le roi avait dans la ville. Il était, disent les chroniques du temps, environ deux heures après midi. Jeanne parut bientôt au bord du premier fossé (1), l'épée d'une main,

et la fascine de l'autre un grand nombre de guerriers de tous rangs la suivaient, armés comme elle. En un moment ce premier fossé eût été comblé. Jeanne d'Arc se précipita ensuite vers le second: mais les assiégés avaient eu la précaution de le tenir plein d'eau ; ce qu'elle ignorait. Elle ne se découragea cependant pas, et debout sur l'espace étroit qui séparait les deux fossés,

(1) Le fossé était double, c'est-à-dire que pour arriver aux remparts, il fallait nécessairement passer deux fossés séparés l'un de l'autre par une langue de terre.

« AnteriorContinuar »