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SUR LA

RÉVOLUTION FRANÇAISE

DE 1789

PAR UN ÉTRANGER.

Ce n'est pas d'un fait lointain qu'il s'agit, c'est
de nous-mêmes, c'est de notre situation présente
et de notre avenir.

(Revue des Deux-Mondes, 1880, t. IV.)

TOME TROISIÈME.

ODLET

PARIS,

LIBRAIRIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET C1E,

IMPRIMEURS DE L'INSTITUT IMPÉRIAL DE FRANCE,

RUE JACOB, 56.

234. a. 125.

དང་

SUR LA

RÉVOLUTION FRANÇAISE

DE 1789.

LIVRE V.

CONVENTION.

A peine l'assemblée législative avait-elle clos ses séances le 21 septembre, que la Convention nationale se constitua dans la même salle, avant qu'elle eût transporté ses séances dans une autre qu'on lui préparait aux Tuileries.

L'assemblée législative avait décrété que le peuple français serait invité à former une Convention nationale pour prononcer sur les mesures qu'on croirait devoir adopter pour assurer la souveraineté du peuple, le règne de la liberté et de l'égalité (1); par le même décret, tout Français âgé de vingt-cinq ans et vivant du produit de son travail était électeur et éligible à cette nouvelle assem

(1) Moniteur, t. XIII, p. 381.

mêlée d'un sentiment de compassion, c'est le paralytique Couthon, au front calme, serein parfois, au cœur de tigre; qui, ne pouvant faire usage de ses jambes, se faisait porter jusque dans la salle. On est bien loin d'imaginer que de ce corps si frêle, inspirant à tous la compassion, les motions les plus atroces vont partir dans les jours les plus mauvais de la république.

Les députés de ce parti extrême vont s'emparer bientôt des bancs les plus élevés du côté gauche qu'on appellera la Montagne, à laquelle ses enthousiastes les plus forcenés ajouteront l'épithète de sainte.

Vergniaud, Guadet, Brissot et leurs amis, tous empressés de se détacher de leurs autres collègues, qu'au fond ils détestent, vont se retirer sur les bancs où siégeaient naguère leurs premiers adversaires : ce sera le côté soi-disant modéré de la Convention.

Pétion est élu président, et les secrétaires sont aussi choisis parmi les girondins : ce parti jouit encore de quelque crédit.

A la suite des discours d'ouverture et de quelques délibérations à peu près insignifiantes, Collot-d'Herbois obtient la parole, monte à la tribune : « Il est une délibéra« tion, » dit-il, « que vous ne pouvez remettre à demain, « que vous ne pouvez différer un seul instant, sans être « infidèles au vou de la nation : c'est l'abolition de la « royauté. » Des applaudissements retentissent dans toute la salle en signe d'une totale adhésion. Bazire néanmoins fait remarquer qu'il serait d'un exemple effrayant pour le peuple de voir une assemblée chargée de ses intérêts les plus chers opiner, par acclamation, dans une question

d'une si haute portée. « Eh! qu'est-il besoin de discuter, << quand tout le monde est d'accord? » réplique vivement Grégoire, évêque constitutionnel de Blois. « Les rois sont << dans l'ordre moral ce que sont les monstres dans l'ordre

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physique. L'histoire des rois est le martyrologe des na<< tions. Dès que nous sommes tous pénétrés de cette vérité, qu'est-il besoin de discuter? Je demande que la prc«< mière proposition soit mise aux voix, sauf à la rédiger << ensuite, avec un considérant digne de la solennité du « décret. » — « Le considérant de votre décret, » dit de suite le girondin Ducos, « ce sera l'histoire des crimes de << Louis XVI, histoire déjà trop connue du peuple français. Il n'est pas besoin d'explication après les lumières « qu'a répandues la journée du 10 août. » La proposition de Grégoire, mise aux voix, est adoptée en ces termes : « La Convention nationale décrète que la royauté est abo<< lie en France. » Les acclamations de joie, les cris de vive la nation! partant à peu près de tous les bancs des députés, répétés par la foule qui se pressait dans les tribunes et les couloirs, se prolongèrent longtemps après. — C'est ainsi que sur la proposition d'un vil histrion, complice des massacres de septembre, appuyée par un prêtre apostat, la royauté fut abolie en France et la république proclamée (1). Le même jour un officier municipal lut à haute voix ce décret de la Convention sous les fenêtres mêmes de la tour du Temple (2).

A cette séance Danton résigna ses fonctions de ministre de la justice. Principal ordonnateur des journées de sep

(1) Moniteur.

(2) Bertrand de Moleville, t. X, p. 77-79.

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