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venons d'inscrire les titres, et les accusations injustes, les malveillances, les jugements passionnés qui y pullulent n'enlèvent pas leur mérite aux pages où l'auteur a su abandonner ses préventions contre nous. « Si les Français étaient de bons chrétiens, écrit naïvement le colonel Kottschau, on pourrait essayer de les ramener au bien par les enseignements de la doctrine du Christ qui veut qu'on pardonne; on pourrait leur prouver qu'ils doivent pratiquer le pardon des of fenses... mais il est inutile de tenter cette voie. >>

Eh bien! nous montrerons au colonel Kottschau qu'il a mal jugé, sinon tous les Français, au moins les rédacteurs du Polybiblion, et nous lui pardonnerons ses offenses en profitant de ses avis. C'est une rectification que nous lui signalons pour sa prochaine édition.

A. DE S.

La Russie juive, par KALIXT DE WOLSKI. Paris, A. Savine, 1887, in-12 de xx1-336 p. Prix 3 fr. 50.

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L'Algérie juive, par GEORGES MEYNIE. Paris, A. Savine, 1887, in-12 de XVIII-320 p. Prix: 3 fr. 50.

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Le bruyant succès des ouvrages de M. Drumont sur la question juive ne pouvait manquer de tenter d'autres plumes: divers auteurs ont effectivement essayé de glaner sur ce champ fécond et qui semblait inépuisable.

La Russie juive est l'œuvre posthume d'un écrivain slave qui a étudié très consciencieusement l'organisation de la Société israélite dans les provinces polonaises où elle a trouvé, pour ainsi dire, une seconde patrie. Il s'est aidé, dans cette étude un peu aride, de documents qui paraissent fort sérieux, notamment du Livre sur le Kahal, par Brafmann, un juif converti. L'auteur déclare que les législateurs chrétiens du XIXe siècle, à commencer par Napoléon Ier, se sont montrés fort ignorants de cette organisation, notamment en attribuant aux rabbins une autorité religieuse qu'ils sont loin de posséder. En fait la Société juive est régie par deux conseils tout-puissants : le Kahal, qui connait de toutes les questions administratives et s'immisce tyranniquement dans les actes de la vie privée la plus intime, et le Bet-Dine, sorte de tribunal dont les sentences sont sans appel. Ces conseils veillent avec un soin jaloux à l'observation par tous les membres de la communauté juive des préceptes du Talmud; ils frappent des impôts dont le produit est destiné à soudoyer les représentants du pouvoir civil et à les rendre favorables aux intérêts communs ; ils vendent impudemment à tel ou tel juif les propriétés et le droit exclusif d'exploiter tel ou tel chrétien; ils poursuivent, en un mot, avec persévérance et avec une absence absolue de préjugés, le but constant de la société juive qui est d'atteindre à la domination et à la possession univer

selle de la terre. Vainement le czar Alexandre II a-t-il tenté de faire une enquête sur les agissements des juifs dans ses vastes États; ceux-ci ont réussi à corrompre les enquêteurs et l'entourage même du souverain, en sorte qu'ils ont pu détourner le coup qui les menaçait. La conclusion de M. Kalixt de Wolski est qu'un grand péril juif menace la Russie et le monde entier, et qu'il ne peut être conjuré que par des mesures énergiques: il faut, suivant lui, « reviser les fortunes juives, déclarer toutes les ruches chrétiennes en faillite, et inviter les frelons à composer. Et cela avant peu. » La lecture de ce livre n'est pas sans intérêt, bien qu'un peu ardue, d'autant plus que le style en est généralement lourd et plus allemand que français; on ne peut méconnaître que ce ne soit un document de valeur pour l'étude de la question juive.

On n'en pourrait dire autant de l'Algérie juive. C'est avant tout la paraphrase et l'exaltation des œuvres de M. Drumont, dont il est dit un peu témérairement qu'il n'a jamais reçu le moindre démenti. Mais tout en se modelant le mieux possible sur l'auteur de la France juive, M. Meynié ne sait lui emprunter ni son érudition, ni ses chroniques scandaleuses. Il s'étend très longuement sur les nombreuses lois qui ont régi successivement la constitution de la propriété en Algérie, pour montrer comment les juifs s'y prennent pour arriver à la dépossession des colons; ces détails sont très diffus et ennuyeux. Se bornant à des généralités sans intérêt, M. Meynié nous annonce pour un autre volume de piquantes révélations sur des juifs algériens dont il donne la liste; on se demande dans quel but il les ajourne, n'ayant rien à dire pour le moment que des banalités qu'il répète sans cesse dans un style médiocre. Sans doute, il est bien vrai que le gouvernement de la Défense nationale a commis une révoltante injustice en naturalisant Français d'un trait de plume tous les juifs algériens alors qu'on refusait la même faveur aux Arabes qui se faisaient tuer pour la France sur le champ de bataille de Froschwiller; mais était-ce bien la peine d'écrire un livre pour exposer cette vérité qui n'est contestée par personne ? COMTE DE BIzemont.

Antiquités grecques, par G.-F. SCHMANN, trad. de C. GALUSKI. Tome II. Paris, Alph. Picard, 1885-1887, 1 tome en 2 vol. gr. in-8 de 732 p. Prix: 3 fr. 50 et 5 fr. 50.

Nous avons rendu compte ici même (t. XLI, p. 255) du premier tome de cette publication, destinée à rendre aux lettres et aux érudits français d'incontestables services. Le second qui nous occupe en ce moment complète les antiquités civiles, et contient le tableau extrêmement détaillé des antiquités religieuses.

La Grèce n'a pas eu de droit public reposant sur des maximes ou des

traditions consacrées d'ailleurs, tandis qu'à Rome un peuple dominateur impose sa volonté à toutes les nations dont il fait successivement la conquête, les cités helléniques, alliées la veille, le lendemain rivales ou ennemies, n'ont jamais conclu entre elles des rapprochements durables. Les villes soumises par les armes sont traitées avec une sévérité souvent barbare; il était établi en principe que le vaincu avec tous ses biens devenait la chose du vainqueur. Cependant, depuis les temps homériques, l'hospitalité n'a pas cessé d'être en honneur, et, sauf à Sparte, l'étranger pouvait compter sur un bienveillant accueil. M. Schoemann va même jusqu'à soutenir « qu'entre les différentes parties de la Grèce existait un échange de voyageurs dont rien ne troublait la confiance et qui pour le nombre ne le cédaient pas à ceux que l'on voyait circuler dans nos contrées avant l'invention des chemins de fer. » Circonstance à coup sûr remarquable, le monde hellénique a connu, sous le nom de « proxénies, » une institution toute semblable à nos consulats. « On peut affirmer sans crainte qu'il n'existait pas d'État grec où un citoyen d'un autre État ne trouvât quelque personnage officiellement obligé à le protéger toutes les fois qu'il réclamerait à bon droit son assistance » (p. 25).

D'après M. Schoemann, il n'y aurait trace nulle part de traités de commerce: l'assertion paraît contestable s'il ne s'agit pas exclusivement de la période antérieure au Ive siècle : l'auteur allemand ne reconnaît-il pas lui-même que le plus grand nombre des colonies durent leur naissance à une préoccupation commerciale?

L'un des moyens les plus puissants imaginés pour éveiller et entretenir chez tous les membres de la grande famille hellénique le sentiment de l'unité nationale, ce fut la création des associations à la fois politiques et religieuses appelées « amphictyonies. » Il est vrai que leur prestige déclina rapidement: au temps de Démosthène, le conseil de Delphes, jadis si respecté, n'était plus qu'une «< ombre. »>

Au nombre des pages les plus intéressantes de ce volume, il faut compter celles que l'auteur a consacrées aux principaux oracles, ainsi qu'aux grands jeux solennels où les Grecs se donnaient rendez-vous pour applaudir aux triomphes de l'adresse ou de la vigueur. N'est-ce pas d'ailleurs aux fêtes olympiques qu'Hérodote lut une partie de son œuvre et qu'aimaient à se faire entendre les plus brillants orateurs? On sait que les fouilles récemment entreprises à Olympie sur l'emplacement même occupé par ces fêtes, ont rendu à la lumière des débris artistiques d'un prix inestimable.

Chez une nation qui met en pratique l'esclavage, nous n'avons pas à chercher l'égalité sociale; quant à l'égalité politique, Athènes peut-être l'a connue, mais partout ailleurs éclate l'opposition d'une classe dominante et d'une classe subordonnée. M. Schoemann entre dans de grands

détails sur les fédérations plus ou moins éphémères dont parle l'histoire de la Grèce, depuis les symmachies rivales d'Athènes et de Sparte jusqu'au complet développement des deux ligues étolienne et achéenne. Enfin, on ne lira pas sans curiosité le chapitre relatif à la politique coloniale de la race hellénique.

On se rappelle que dans son discours à l'Aréopage, saint Paul fait l'éloge du sens religieux des Athéniens. Ceux que cette parole étonne en trouveront dans M. Schoemann à la fois le commentaire et la démonstration. Chez aucun autre peuple la vie n'a été rattachée à la religion par des liens plus étroits et plus multiples : des prières, des sacrifices, des serments, des libations en l'honneur des dieux précèdent ou accompagnent tous les grands événements de la vie sociale. Ajoutons que sur certains points, tout au moins, la mythologie grecque était si corrompue que l'idée religieuse non seulement n'excluait pas, mais qu'elle encourageait même l'immoralité. Quoique le paganisme nous apparaisse singulièrement épuré sous la plume des poètes et des philosophes du siècle de Périclès, M. Schoemann accorde que le niveau moyen des croyances était fort peu élevé.

C'est dans ce domaine surtout que l'on peut admirer la surprenante érudition du savant allemand: aucune des parties de ce vaste sujet ne lui a échappé : édifices consacrés par la piété publique, offrandes de tout genre, sacrifices, prières, imprécations, oracles et divination, conjurations et sortilèges, purifications et expiations, il a tout exploré, tout approfondi. Le seul chapitre des fêtes religieuses, au nombre de cinquante à soixante par an dans l'Attique et dans d'autres contrées grecques, ne contient pas moins de cent onze pages. Donnons ici une mention spéciale aux « mystères, » dont le principal rôle, au témoignage unanime des anciens, était de soutenir les courages en les fortifiant par l'espérance d'une autre vie : quant à savoir la raison véritable du secret dont s'entourait cet enseignement réservé dès l'origine aux seuls initiés, nous sommes réduits à des conjectures.

Les derniers chapitres nous décrivent le culte domestique. Il n'est ni nécessaire, ni possible, dit l'auteur, de signaler toutes les circonstances de la vie commune qui pouvaient devenir l'occasion d'actes religieux accomplis soit au foyer de la famille, soit dans les sanctuaires publics. Nous voyons en particulier qu'en ce qui touche le monde à venir, « à la confiance populaire dans les récompenses et les châtiments proportionnés aux œuvres se joignait la conviction que les morts n'étaient pas indifférents aux honneurs dont ils étaient l'objet, de même qu'ils s'irritaient de se voir négligés. »

On ne peut que remercier sincèrement traducteur et éditeur d'avoir mis à la disposition des lecteurs français un répertoire aussi riche et aussi autorisé de toutes les indications relatives à la civilisation hellé

nique, considérée au double point de vue religieux et social. Sans doute, depuis un demi-siècle, nos érudits commencent à soutenir victorieusement la comparaison avec leurs rivaux d'outre Rhin, et la suite de leurs travaux, à laquelle un double index est consacré à la fin de ce volume, est bien faite pour rassurer notre amour-propre national; mais pour les ouvrages d'ensemble, nous sommes encore tributaires de l'Allemagne, au moins jusqu'à l'achèvement du Dictionnaire des antiquités, de M. Saglio.

Pour finir ce compte rendu par une observation critique, il semble que ce qui manque à l'œuvre de M. Schoemann, c'est une distinction mieux gardée entre l'important et l'accessoire. Tous les détails (et ils sont innombrables) sont trop sur le même plan: parmi ces pratiques, ces institutions, ces solennités qui nous sont décrites, les unes sont locales, les autres appartiennent à la race hellénique: celles-ci n'ont eu qu'une existence éphémère, celles-là ont persisté à travers les siècles de telles différences méritaient, croyons-nous, une plus sérieuse considération. C. HUIT.

Dictionnaire biographique de l'ancien département de la Moselle, contenant toutes les personnes notables de cette région, par NÉRÉE QUÉPAT. Paris, A. Picard; Metz, Sidot, 1887, gr. in-8 de v1-624 p. · Prix: 20 fr.

Le dictionnaire biographique d'une province est toujours un livre utile et digne d'éloges, mais une œuvre de cette nature, traitant de l'époque contemporaine et ayant pour sujet l'ancien département de la Moselle, a une valeur toute particulière; elle groupe des hommes disséminés et, sur bien des points et par la puissance des souvenirs, doit exciter l'intérêt même au dehors de la contrée qui l'a inspirée. Depuis la Biographie de la Moselle, de M. E. Bégin (1829-1832), il n'avait été composé sur ce département aucun livre de ce genre. M. Nérée Quépat (conservons à l'auteur un pseudonyme auquel il paraît tenir, mais qui n'a plus rien de mystérieux), voulant donner un complément à l'ouvrage de M. Bégin, a dû recueillir de minutieux renseignements sur tous les hommes qui, depuis plus de cinquante ans, ont, dans cette région, acquis une certaine notoriété. M. Nérée Quépat a parfaitement rempli cette tâche si difficile; ses nombreuses notices ont été composées avec le soin le plus scrupuleux. Quand il parle d'un écrivain, par exemple, il ne se contente pas d'indiquer ses ouvrages principaux, il va rechercher les plaquettes, les tirages à part les plus oubliés, il feuillette les revues, les journaux, pour y découvrir des articles fugitifs, souvent de simples comptes rendus, dont il donne exactement la date. A ce mérite d'informations si précises, M. Nérée Quépat joint celui d'une impartialité qui a manqué à son prédécesseur.

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