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cheval tué sous lui. Le général Ferrand a eu une forte contusion à une jambe et un cheval tué sous lui ; l'adjudant général, Mousoi, a eu la bouche percée d'une balle qui lui a enlevé sept dents; le colonel, Dubouret, du 104° régiment, a été grièvement blessé, ainsi que le citoyen Bertiche, lieutenant de la gendarmerie nationale, blessé de quarante et un coups de sabre, après avoir tué sept hommes ; le citoyen Lafosse, lieutenant-colonel des deux bataillons des Deux-Sèvres, a eu un bras cassé d'une balle. Beaucoup d'autres officiers et soldats ont été tués ou blessés.

> Je ne sais pas encore au juste quelle est notre perte; mais je l'estime à trois cents morts et six cents blessés : je vous en enverrai l'état dès que j'aurai pu le recevoir des différens corps. Les ennemis ont perdu huit canons, dont cinq pris par l'avant-garde du général Beurnonville, et trois à notre attaque de gauche. L'artillerie a servi avec son courage, son habileté ordinaire, si redoutés de nos ennemis. La perte des ennemis, tant tués, blessés ou déserteurs, monte au moins à quatre mille hommes, sans compter presque autant d'hommes égarés, débandés et perdus, que nous ramassons tous les jours. Tel est le détail de cette bataille, qui est décisive pour la conquête de la Belgique, car les Autrichiens n'oseront plus se mesurer en bataille rangée, et nous avons prouvé dans celle-ci qu'aucun obstacle, même en réunissant les ressources de l'art à celles du terrain, n'arrête le courage des troupes françaises. Le général en chef, DUMOURIER,

Cette bataille donna la Belgique à la révolution; on ne vit que cela, et la gloire et la popularité de Dumourier s'en accrurent. Le succès avait été brillant; mais il avait été plus chèrement acheté que le général ne l'avait dit. Servan évalue notre perte à plus de deux mille hommes, dont treize à quatorze cents blessés ; et les tacticiens prouvaient que la conquête des Pays-Bas eût pu être obtenue d'une manière aussi sûre et par des manoeuvres, moins brillantes il est vrai, mais moins meurtrières pour nous et peut-être plus destructives pour l'ennemi. Aussi concluaient-ils que Dumourier avait plus en vue sa gloire personnelle que l'avantage de la France

et le soin de ses soldats. Quoi qu'il en soit, à peine Mons fut-il au pouvoir des Français, que le peuple fut convoqué et appelé à élire ses magistrats. Voici le premier acte politique des nouveaux

élus.

VIVE LA LIBERTÉ, L'ÉGALITÉ.

Promulgation des administrateurs provisoires, élus provisoirement par le peuple de Mons, en suite de la déclaration du général Dumourier, en date du quartier-général en ladite ville, le 8 novembre, l'an 1er de la République.

AU NOM DU PEUPLE SOUVERAIN,

Nous déclarons, à la face du ciel et de la terre, que tous les liens qui nous attachaient à la maison d'Autriche-Lorraine sont brisés; jurons de ne plus les renouer, et de ne reconnaître en qui que ce soit aucun droit à la souveraineté de la Belgique ; car nous voulons rentrer dans nos droits primitifs, imprescriptibles et inaliénables.

> Tout pouvoir émanant essentiellement du peuple, nous déclarons que le corps des états, toute judicature supérieure et subalterne cessent, d'autant qu'ils n'ont pas été constitués par le peuple; leur défendant expressément, en son nom, d'exercer aucune fonction, à peine d'être poursuivis comme usurpateurs du pouvoir souverain.

› Fait en assemblée générale, tenue en la ville libre de Mons, ce 8 novembre 1792, an 1er de la République belgique. ›

Le même jour, une société des amis de la liberté et de l'égalité s'établit, à l'imitation des Jacobins de Paris. Dumourier assista à l'ouverture de sa première séance. Le président lui adressa un discours qu'il termina en lui offrant un bonnet rouge, comme gage de leurs sentimens républicaius. Dumourier répondit que, • dévoué sans réserve à la cause sublime des peuples, rien ne pourrait changer ses sentimens, et qu'il acceptait avec reconnaissance la couronne civique qu'on voulait bien lui offrir. ›

Cependant les Autrichiens se concentraient sur Bruxelles ; ils

évacuaient Nieuport, Ostende, Bruges, Menin, Tournai, Gand: le général Labourdonnaye occupa toutes ces villes sans difficulté, et marcha sur Anvers.

Le 13, Dumourier attaqua et emporta le village d'Anderlecht à la vue de Bruxelles; le 14, il y mit une garnison française, et le reste de l'armée se porta en partie sur Malines, qui se rendit le 16 à discrétion, et sur Louvain, suivant les Autrichiens, qui prenaient le route de Liége.

En même temps, l'armée des Ardennes s'était mise en mouvement; elle entra le 10 dans Charleroi, le 12 à Nivelle, elle eut un engagement avec le corps de Clairfait à Mazi le 17, et se présenta le 18 aux portes de Namur. La ville capitula et se rendit le 20; mais la citadelle tint jusqu'au 1er décembre, et arrêta ainsi le général Valence qui, de cette position, s'il eût pu marcher, eût pu couper la route de retraite des Autrichiens par Liége. Aussi ce ne fut que le 27 qu'ils passèrent la Meuse, moins pour sortir d'une situation dangereuse, que forcés par l'armée de Dumourier qui, après avoir traversé derrière eux Louvain, Tirlemont, Saint-Tron, les atteignit et les attaqua le 27 dans les faubourgs de Liége. L'arrière-garde autrichienne tint toute la journée, et put le soir traverser la Meuse sans avoir été entamée. Ce fut la dernière action de la campagne; car Anvers s'était rendu le 26 au général Miranda.

ARMÉE DU RHIN.

L'armée prussienne, qui venait d'évacuer la France, se trouvait, le 4 novembre, concentrée à Coblentz, où son avant-garde était arrivée le 1er, ainsi que nous l'avons vu. Pendant ce temps, Custine semblait occupé à surveiller les progrès des orateurs qu'il payait pour proposer dans les clubs la réunion à la France; mais en réalité, si nous en croyons Servan, c'était dans des débauches qu'il oubliait le soin de son armée. On lui proposa une entreprise sur. Hanau, mais il resta sourd. Enfin, le 7, des rapports d'espions vinrent le réveiller, en lui apprenant que les Prus

siens, après avoir laissé une forte garnison à Coblentz, s'approchaient de la Lahn, dans l'intention de la passer, et de forcer par suite les Français à évacuer Francfort et à repasser le Rhin. Alors Custine envoya au colonel Houchard l'ordre de se porter sur Limbourg, qui était déjà occupé par les Prussiens, et luimême se porta, avec une douzaine de mille hommes, sur Kœnigstein. Houchard exécuta avec vigueur l'ordre qu'il avait reçu ; il surprit les Prussiens et les chassa de Limbourg, après un combat de moins d'une heure. Ils se retirèrent sur Montabaur. Quant à Custine, au lieu de pousser en avant, il se borna à lever des réquisitions sur les habitans des rives de la Lahn, et, le 17, il se rapprocha de Francfort en se repliant sur Hambourg.

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Le 25, l'armée ennemie se mit en mouvement sur quatre colonnes les deux de la droite, aux ordres du prince HohenloheIngelfingen, partirent de Coblentz et côtoyaient les deux rives du Rhin; une troisièmé, commandée par le roi de Prusse en personne, marcha sur Limbourg, et la quatrième, sous les ordres de Kalkreuth, s'était jetée sur la gauche, pour marcher sur Francfort, par Butzbach. Ainsi, l'armée française était menacée de flanc sur toute la ligne qu'elle occupait depuis Mayence jusqu'à Francfort. Custine se replia donc encore, et vint occuper une ligne qui s'étendait de Hochst à Oberursel, entre Mayence et Francfort, et il donna l'ordre au général Van-Helden, qui commandait dans cette dernière ville, de ne l'évacuer qu'à la dernière extrémité. Celui-ci n'avait que trois bataillons et deux pièces de canon; il était dépourvu de munitions, et, de plus, la ville n'était entourée que de mauvais fossés. Il adressa donc les représentations les plus vives pour obtenir l'ordre de faire retraite; mais, selon Servan, Custine désirait que Van-Helden prît sur lui cette démarche, qu'il sentait pouvoir devenir un sujet d'accusation; et, en conséquence, il persista. Cependant, le roi de Prusse arriva le 28 à Hambourg, et le général Kalkreuth à Bergen, d'où il envoya sommer Van-Helden de se rendre prisonnier de guerre avec sa garnison. Celui-ci adressa cette sommation à Custine, qui se chargea d'y répondre. Il le fit, et sa lettre,

pleine de jactance et de plaisanterie, effraya le général prussien en lui faisant craindre une résistance sérieuse soutenue par toute l'armée de Custine, au point de le déterminer à suspendre sa marche et à opérer sa jonction avec le corps commandé par le roi. Il y eut donc un instant de suspension dans les hostilités que la garnison de Francfort était destinée à subir; et ce ne fut que le 1er décembre que l'ennemi se décida à l'attaquer, ainsi que nous le verrons dans la narration militaire du mois prochain.

ARMÉE DU MIDI.

Les opérations militaires furent à peu près nulles de ce côté; elles se bornèrent à quelques combats auxquels donna lieu une forte reconnaissance poussée par les Piémontais pour tåter l'armée qui occupait le comté de Nice. Dans la nuit du 17 au 18, huit mille Autrichiens et Piémontais débouchèrent de Saorgio, se partagèrent en divers corps, et replièrent d'abord tous les détachemens français, non sans leur faire éprouver quelques échecs; mais ils furent bientôt obligés de se retirer à leur tour devant le nombre, et le 19, ils étaient rentrés dans leur première position, à Saorgio. Ce fut à cette petite escarmouche que se bornèrent, au pied des Alpes, les hostilités pendant ce mois. Mais le comté de Nice fut plus ravagé par les dilapidations, les concussions et les vols, selon l'expression de Servan, que se permirent les officiers et les agens de l'administration militaire, qu'il ne l'eût été par la guerre la plus active. Ce fut plus tard le sujet d'une accusation contre le général Anselme.

Nous terminerons ce court récit en rendant compte des opérations maritimes de l'amiral Truguet dans les derniers jours d'octobre. On avait résolu de s'emparer de la principauté de Monaco, et d'y porter un corps de troupes destiné à prendre à revers l'armée qui défendait Nice. Dans ce but, deux mille hommes avaient été embarqués. Cette mesure était devenue inutile, grace à la prompte évacuation du comté; mais l'opération n'en fut pas moins continuée. Nous avons vu qu'en conséquence

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