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L'eau que le soufre avait incorporée ne se sépare en effet que lentement de la masse, et pendant cette séparation elle entraîne des particules de soufre en fusion. Il se forme de cette façon des cônes qui s'agrandissent de plus en plus et sur lesquels il se produit un petit cratère. Les éruptions deviennent alors plus fortes, des courants de soufre s'échappent du cratère et des gouttelettes fondues sont projetées dans l'air comme des scories.

Lorsque le phénomène tire à sa fin, la lave de soufre contenue dans le cône se solidifie et forme un noyau solide qui est enveloppé, comme d'un manteau, des couches du soufre écoulé.

Mais on peut aussi interrompre le phénomène en perçant une ouverture à la partie inférieure du vase dans lequel se trouve le soufre et en laissant écouler la partie encore en fusion qui se trouve sous l'écorce solidifiée. Les éruptions cessent alors immédiatement et la lave de soufre qui remplit les cratères retombe. L'examen démontre alors que les cônes sont creux à l'intérieur parce que le soufre liquide fond, en s'élevant, une partie du soufre qui remplissait le cône, de sorte qu'il en résulte une cavité vide entourée d'un manteau relativement peu épais.

Ces cônes de soufre, produits par des phénomènes éruptifs tout à fait analogues à ceux des volcans, peuvent être considérés comme des modèles de montagnes volcaniques. Ils nous permettent de maintenir l'hypothèse que nous avons proposée pour remplir les lacunes qui existent encore dans la science.

Nous pouvons cependant espérer, en suivant la voie de l'examen qui nous a fait connaître dans ces derniers temps la structure véritable des montagnes volcaniques, les réactions chimiques qui accompagnent les phénomènes de l'action volcanique et enfin la nature véritable de la lave, nous pouvons espérer, dis-je, de remplacer, dans un temps très-prochain, ces hypothèses par des faits réellement scientifiques.

LIVRE DEUXIÈME

LES TREMBLEMENTS DE TERRE

On donne le nom de tremblements de terre à des ébranlements de la masse solide du globe, qui ont leur siége sous la surface terrestre et qui sont produits par une cause in

connue.

Cette expression a été admise instinctivement par toutes les nations, et l'on s'en sert involontairement dans les circonstances qui produisent des effets semblables à ceux des véritables tremblements de terre. De grandes explosions ou des chutes de grandes masses de rocs produisent des ébranlements analogues s'étendant de tous côtés et ayant les mêmes effets qu'un véritable tremblement de terre. On croit facilement qu'il y a eu un tremblement de terre dans les endroits où l'on a ressenti des commotions du sol, sans savoir qu'il y a eu explosion ou avalanche de rochers. Les journaux ont souvent mentionné des tremblements de terre de ce genre, mais dès que la cause en était connue, la dénomination de tremblement de terre disparaissait des récits. Il résulte de ces faits qu'on n'a pas désigné sous ce nom un mode particulier d'ébranlement, ni des effets spéciaux produits par lui, mais qu'on n'a voulu désigner que la cause: celle-ci est souterraine dans le véritable tremblement de terre, et n'est pas artificielle (comme lorsqu'on fait sauter les roches dans les mines).

Il est nécessaire de bien comprendre le sens que toutes les nations attachent à l'expression de tremblement de terre, car c'est par ce sens que la science reçoit une tâche précise, puisqu'elle doit porter ses recherches sur l'objet que l'on désigne généralement sous ce nom de tremblement de terre. La

géologie doit étudier la forme sous laquelle apparaissent ces tremblements et leurs effets, puis en rechercher la cause.

NATURE DES TREMBLEMENTS DE TERRE.

Les tremblements de terre se présentent parfois comme de légers ébranlements ou frémissements à peine perceptibles, qui parcourent la partie solide du globe et lui font subir comme de petits tressaillements: mais souvent ils se font sentir avec une violence si épouvantable, que l'homme reste confondu et impuissant devant cette force écrasante. Ils produisent alors à la surface de la terre des changements durables qui ont une très-grande importance au point de vue de sa structure et de son relief.

En Europe, les tremblements de terre les plus renommés pour leur extraordinaire violence et pour les épouvantables destructions qu'ils ont produites sont, dans les temps anciens, celui qui eut lieu sous l'empereur Tibère, puis celui de 526, sous l'empereur Justin, qui coûta, dit-on, la vie à 120,000 personnes, enfin celui de 1693, en Sicile, qui fit périr plus de 60,000 hommes.

L'Europe a aussi éprouvé de violents tremblements de terre dans les temps modernes : en 1755 celui de Lisbonne, en 1783 celui de la Calabre, où il y eut de nouveaux et violents tremblements en 1854 et en 1870. Mais les tremblements de terre de l'Amérique méridionale surpassent de beaucoup en étendue et en violence ceux de l'Europe. Les plus renommés de ces tremblements sont ceux de Lima en 1746, de Riobamba (février 1797), de Caracas, en 1812, de Mendoza, en 1861, et celui du Pérou en 1868.

L'espèce de mouvement auquel la terre est soumise peut varier aussi bien dans les tremblements faibles que dans les tremblements violents.

L'espèce de mouvement est très-peu apparente dans ces frémissements et ces tressaillements terrestres que l'on a désignés dans les régions de l'Amérique méridionale sous le nom de Tremblores, pour les distinguer des tremblements de terre véritables appelés Teremotes. Ces tremblores sont si fréquents et si inoffensifs dans ces pays que la plupart du temps on n'y fait point attention. Ils n'excitent l'intérêt que dans les pays où les tremblements de terre sont des phénomènes rares, comme dans les pays du nord et du centre de l'Europe, et cependant

il arrive rarement que l'on puisse obtenir de divers observateurs, des observations concordantes sur l'espèce de mouvement imprimé à la terre.

On a distingué les mouvements de la terre, qui se font remarquer dans les tremblements plus forts, en:

10 MOUVEMENTS DE SUCCUSSION, que l'on ressent comme un choc perpendiculaire donné de bas en haut. Lorsque ce mouvement est fort, on croit sentir d'abord un mouvement d'élévation puis un mouvement d'affaissement de la terre.

Le mouvement de succussion ne se produit qu'aux endroits qui sont le véritable siége du tremblement de terre : il passe graduellement au mouvement ondulatoire pour les endroits éloignés et même au point d'origine, lorsque l'effet de la secousse est passé. Les succussions peuvent cependant se répéter à différentes reprises, soit en se suivant coup sur coup, soit après de longs intervalles seulement. La première succussion est souvent la plus violente, mais d'autres fois c'est l'une des succussions suivantes : il n'y a point de règle à cet égard.

Les tremblements de terre à succussions sont les plus redoutés, et leurs effets, qui ressemblent souvent aux effets d'une explosion de mine, peuvent amener de terribles dévastations.

Des documents contemporains nous apprennent que pendant le grand tremblement de terre de la Calabre en 1783, les montagnes étaient si profondément ébranlées que leurs cimes semblaient sautiller en l'air. Certaines maisons furent soulevées avec une grande force et transportées en d'autres endroits sans qu'un certain nombre d'entre elles eussent éprouvé des dégâts sensibles; d'autres maisons au contraire furent violemment projetées en l'air avec leurs fondations, et détruites complétement. Le tremblement de terre de Riobamba, en 1797, montra une pareille force de projection, car un grand nombre de cadavres d'indigènes furent lancés sur une colline de plusieurs centaines de pieds de hauteur qui est située de l'autre côté de la rivière de Lican.

2° MOUVEMENTS ONDULATOIRES. La surface de la terre semble s'élever et s'abaisser régulièrement pendant que le mouvement se propage dans une direction déterminée. Pendant les forts tremblements de cette catégorie, la terre semble avoir perdu sa solidité et ressemble à un liquide en mouvement. Le mouvement ondulatoire ne se fait alors pas seulement sentir, comme si l'on était sur un bateau vacillant,

mais on peut quelquefois véritablement voir les mouvements du sol.

Dans les tremblements de terre violents c'est la forme ondulatoire qui se fait sentir le plus souvent et qui s'étend le plus loin. Dans certains cas, ces mouvements s'étendent sur des surfaces qui comprennent plusieurs centaines de lieues carrées. Souvent le tremblement de terre ondulatoire n'est que la conséquence d'une succussion, lorsque le choc produit par celle-ci se propage loin du siége primitif. Mais souvent aucun endroit précis n'est désigné comme ayant éprouvé une succussion, et comme servant de point de départ au tremblement, en sorte que l'on ne peut juger de l'approche du point central que par les mouvements ondulatoires plus ou moins prononcés.

Les mouvements ondulatoires sont moins redoutables dans les forts tremblements de terre que les succussions. Ce n'est que quand ils atteignent un degré de violence extraordinaire que leurs effets sont quelquefois terribles.

Les tremblements successifs qu'éprouva l'Etna pendant une petite éruption, le 2 septembre 1852, firent naître sur le géologue Gemellaro et sur son guide, qui se trouvaient en ce moment dans le Val del Bove, tous les symptômes du mal de *mer. Lors du tremblement de terre d'Ardebil, au mois d'octobre 1848, le sol resta pendant une heure soumis à des mouvements ondulatoires, et lors du célèbre tremblement de Caracas, le 26 mars 1812, le mouvement ondulatoire était si marqué, que le sol ressemblait à un liquide en ébullition. Des observations tout à fait récentes prouvent que ces récits ne sont point exagérés et que des mouvements aussi violents ne sont pas très-rares, quoiqu'ils nous paraissent tout à fait incompatibles avec l'idée que nous nous faisons ordinairement de la solidité de la terre. En avril 1871, la terre de Batlang, en Chine, éprouva un violent tremblement de terre. A des succussions violentes qui se firent sentir de temps en temps pendant plusieurs jours, succédèrent des mouvements si considérables que le sol ressemblait à un vaisseau ballotté par les vagues. Pendant la même année il y eut à l'Albay une éruption qui fut accompagnée d'un tremblement de terre si violent, que le 2 décembre, à 6 heures du soir, le sol des environs de CottaCato ondulait comme les vagues de la mer.

La transmission du mouvement ondulatoire se voit quelquefois très-bien aux arbres. Dolomieu rapporte que l'on vit, en 1783, pendant le tremblement de terre de la Calabre, des

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