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et sur terre et sur mer. Vous n'avez point d'alliés, ou plutôt tous les peuples le sont, mais ces peuples ne peuvent rien pour vous; ils sont dans les fers, et ces fers doivent tomber auparavant. Tous vos moyens sont donc dans vous, dans vous seuls : il faut que votre sol, votre industrie, votre courage suppléent à tout ce que la nature et les circonstances vous refusent; il faut que le commerçant oublie son commerce pour n'être plus qu'armateur; que le capitaliste consacre enfin ses fonds à soutenir les assignats et à subvenir aux besoins du numéraire ; que le propriétaire et le laboureur, renonçant à toute spéculation, portent l'abondance dans nos marchés; il faut que le citoyen soit prêt à marcher comme un soldat romain, c'est à dire non seulement avec ses armes, mais avec des provisions pour un temps déterminé; et par là vous déjouerez les calculs de vos ennemis sur le vide de vos magasins; il faut que la grande famille des Français né soit plus qu'une armée, que la France ne soit plus qu'un camp, où l'on ne parle que de guerre, où tout tende à la guerre, où tous les travaux n'aient pour objet que la guerre; il faut surtout s'attendre aux revers, se préparer à l'infortune par les privations, par une vie simple et frugale; il faut enfin que bientôt ce soit un crime pour un citoyen d'avoir deux habits si un seul de ses frères est nu!

» O vous qui calculez pour l'avenir, abjurez vos inquiétudes! Vaincus, vos richesses ne seront que trop tôt la proie de vos maîtres; vainqueurs, l'univers est à vous: votre industrie aura bientôt réparé toutes ses pertes sous les auspices de la liberté. » Ce n'est que par suite de ces sacrifices, ce n'est des que par efforts surnaturels que vous pouvez espérer de vaincre, d'abattre ce colosse plus imposant que terrible de l'Angleterre, le dernier appui de la coalition couronnée.

» Le cabinet de Saint-James parle en riant du discrédit de nos assignats qu'il tremble pour sa banque! Ou sous un an votre liberté ne sera plus, ou elle régnera en Angleterre, ou la banque royale de Londres sera anéantie! Encore une fois, c'est un combat à mort ici, et Georges a déclaré sa chute et la banqueroute d'Angleterre quand il vous a déclaré la guerre! Pour quiconque sait calculer les chances de cette guerre extraordinaire aet événement est inévitable.

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Français, si, destinés à combattre la ligue des tyrans, vous n'aviez qu'un roi à votre tête, votre perte serait assurée ; mais la liberté vous commande : la liberté crée seule des miracles, et vous vaincrez!

» Vous pouvez tout si vous voulez tout fortement, car si la nature ne vous a pas donné tous les objets de jouissance, elle vous a donné tout ce qui est nécessaire à des hommes libres, tout ce qui peut assurer le succès de cette croisade sainte contre les rois : mais il faut que l'esprit de liberté électrise toutes les âmes, éteigne les passions particulières, ou plutôt les fonde en une seule, la passion de la liberté; il faut enfin que tous les esprits se rallient autour du même autel, et cet autel est ici! La Convention, voilà l'arche sainte de la France! Qui tend à la faire mépriser ou à la dissoudre est l'ennemi du genre humain, car le salut du genre humain est ici!

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Citoyens, que cette idée ne vous abandonne jamais, et les petites passions n'oseront plus souiller cette enceinte : nous serons toujours grands quand nous serons en présence de l'univers, quand nous songerons que nous combattons pour lui!

» Déclarer la guerre à l'Angleterre c'est déclarer une guerre qu'elle a déjà commencée ; et vous ne violez point ici le principe que vous avez consacré, et que tout peuple libre doit consade renoncer aux agressions et à la guerre offensive.

crer,

» L'esprit qui vous a dirigés jusqu'à présent dans celle que vous soutenez contre l'empereur et la Prusse vous suivra dans votre guerre contre l'Angleterre, c'est à dire que, combattant plutôt le gouvernement et ses satellites que la nation, vous vous attacherez à épargner aux individus paisibles les calamités qui ne devaient frapper que des coupables. Eh! citoyens, il n'a pas tenu à votre humanité qu'une partie de ces calamités n'eût été prévenue, puisqu'au temps même où l'on ne devait pas prévoir cette guerre votre pouvoir exécutif a eu ordre de solliciter et a sollicité le gouvernement anglais d'abolir à jamais la barbare coutume de la course, et que ce gouvernement s'y est opiniâtrément refusé. Ainsi il est encore une fois responsable des horreurs que ce genre de guerre doit entraîner pour les deux

nations.

» En déclarant que la République est en guerre avec le gou

vernement anglais c'est déclarer qu'elle l'est avec le stadhouder de Hollande; ce stadhouder, qui est plutôt le sujet que l'allié du cabinet de Saint-James, qui a été et est encore un instrument passif entre ses mains, qui, se prêtant à toutes ses passions, a dans tout le cours de la révolution favorisé les émigrés et les Prussiens, vexé les Français, traité avec insolence le gouvernement français; et j'en atteste ici l'élargissement des fabricateurs de faux assignats arrêtés en Hollande; ce stadhouder, qui, disposant souverainement des forces des Provinces-Unies, dirigeant à son gré les états-généraux, vain fantôme de représentation, arme maintenant pour soutenir la guerre du cabinet de Londres, joint ses vaisseaux aux vaisseaux anglais, favorise nos ennemis en traversant notre importation de grains!

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Le décret présenté par Brissot à la suite de ce rapport est sur le champ mis aux voix, et adopté à l'unanimité.

DÉCRET portant que la République française est en guerre avec le roi d'Angleterre et le stadhouder des ProvincesDu 1er février 1793, an 1er de la République

Unies. française.

« La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de défense générale sur la conduite du gouvernement anglais envers la France;

>> Considérant que le roi d'Angleterre n'a cessé, principalement depuis la révolution du 10 août 1792, de donner à la nation française des preuves de sa malveillance et de son attachement à la coalition des têtes couronnées;

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Qu'à cette époque il a ordonné à son ambassadeur à Paris de se retirer, parce qu'il ne voulait pas reconnaître le conseil exécutif provisoire créé par l'Assemblée législative;

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Que le cabinet de Saint-James a discontinué à la même époque sa correspondance avec l'ambassadeur de France à Londres, sous prétexte de la suspension du ci-devant roi des Français ;

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Que depuis l'ouverture de la Convention nationale il n'a pas voulu reprendre la correspondance accoutumée entre les deux états, ni reconnaître les pouvoirs de cette Convention;

Qu'il a refusé de reconnaître l'ambassadeur de la République française, quoique muni de lettres de créance en son

nom;

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Qu'il a cherché à traverser les divers achats de grains, armes et autres marchandises commandés en Angleterre soit par des citoyens français, soit par des agens de la République française;

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Qu'il a fait arrêter plusieurs bateaux et vaisseaux chargés de grains pour la France, tandis que, contre la teneur du traité de 1786, l'exportation en continuait pour d'autres pays étrangers;

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Que pour traverser encore plus efficacement les opérations commerciales de la République en Angleterre il a fait prohiber par un acte du parlement la circulation des assignats;

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Qu'en violation de l'article 4 du traité de 1786 il a fait rendre par le même parlement, dans le cours du mois de janvier dernier, un acte qui assujettit tous les citoyens français allant ou revenant en Angleterre aux formes les plus inquisitoriales, les plus vexatoires et les plus dangereuses pour leur sûreté ;

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Que dans le même temps, et contre la teneur de l'article premier du traité de paix de 1783, il a accordé une protection ouverte, des secours d'argent aux émigrés, et même aux chefs des rebelles qui ont déjà combattu contre la France; qu'il entretient avec eux une correspondance journalière, et évidemment dirigée contre la révolution française; qu'il accueille journellement les chefs des rebelles des colonies françaises orientales;

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Que dans le même esprit, sans qu'aucune provocation y ait donné lieu, et lorsque toutes les puissances maritimes sont en paix avec l'Angleterre, le cabinet de Saint-James a ordonné un armement considérable par mer, et une augmentation à ses forces de terre ;

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Que cet armement a été ordonné au moment où le ministère anglais persécutait avec acharnement ceux qui soutenaient en Angleterre les principes de la révolution française, et employait tous les moyens possibles, soit au parlement, soit au dehors, pour couvrir d'ignominie la République française, et pour

attirer sur elle l'exécration de la nation anglaise et de l'Europe entière ;

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Que le but de cet armement, destiné contre la France,
même été déguisé dans le parlement d'Angleterre ;

n'a

Que, quoique le conseil exécutif provisoire de France ait employé tous les moyens pour conserver la paix et la fraternité avec la nation anglaise, et n'ait répondu aux calomnies et aux violations des traités que par des réclamations fondées sur les principes de la justice, et exprimées avec la dignité d'hommes libres, le ministère anglais a persévéré dans son système de malveillance et d'hostilités, continué ses armemens, et envoyé une escadre vers l'Escaut pour troubler les opérations de la France dans la Belgique ;

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Qu'à la nouvelle de l'exécution de Louis il a porté l'outrage envers la République française au point de donner ordre à l'ambassadeur de France de quitter sous huit jours le territoire de la Grande-Bretagne ;

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» Que le roi d'Angleterre a manifesté son attachement à la cause de ce traître, et son dessein de le soutenir, par diverses résolutions prises au moment de sa mort, soit pour nommer les généraux de son armée de terre, soit demander au pour parlement d'Angleterre une addition considérable de forces de terre et de mer, et ordonner l'équipement de chaloupes canonnières ;

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Que sa coalition secrète avec les ennemis de la France, et notamment avec l'empereur et la Prusse, vient d'être confirmée par un traité passé avec le dernier dans le mois de janvier dernier;

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Qu'il a entraîné dans la même coalition le stadhouder des Provinces-Unies; que ce prince, dont le dévouement servile aux ordres des cabinets de Saint-James et de Berlin n'est que trop notoire, a dans le cours de la révolution française, malgré la neutralité dont il protestait, traité avec mépris les agens de France, accueilli les émigrés, vexé les patriotes français, traversé leurs opérations, relâché, malgré les usages reçus et malgré la demande du ministère français, des fabricateurs de faux assignats; que dans les derniers temps, de concert avec les états-généraux pour concourir aux desseins hostiles.

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