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résolution de ne faire ni paix ni trève aux aristocrates et à tous les ennemis de la révolution ;

» Elle décrète qu'ils sont hors de la loi ;

» Elle ordonne que tous les citoyens soient armés au moins de piques.

>>

Le 29 du même mois la Convention nationale fortifia encore ces dispositions; elle convertit en décret et rendit commun à toute la République un arrêté, pris par la commune de Paris, portant que tous propriétaires, principaux locataires, concierges, fermiers, régisseurs, portiers, logeurs et hôteliers, seraient tenus d'afficher à l'extérieur de leurs maisons, fermes et habitations, dans un endroit apparent et en caractères bien lisibles, les nom, prénoms, surnoms, âge et profession de tous les individus résidans actuellement ou habituellement dans lesdites maisons, fermes ou habitations. Ces affiches devaient être certifiées, et remises en double aux comités de commune ou de section. Les omissions, les fausses déclarations étaient punies d'un emprisonnement d'un à six mois, et d'une amende égale au double de la contribution des délinquans.

Ces différentes mesures n'atteignaient pas encore toutes les classes que la faux de la révolution devait frapper: la trahison de Dumourier va déchirer tous les voiles, précipiter tous les coups.

Les membres des maisons de Bourbon et d'Orléans se trouvant tous compris dans les délibérations prises à la suite de cette défection, nous placerons ici une discussion dont ils avaient déjà été l'objet, et que nous avions réservée à cet effet.

DU BANNISSEMENT DE TOUS LES BOURBONS.

On a vu (tome X, page 292 et suiv.) que pendant le procès de Louis XVI les deux partis qui divisaient la Convention s'étaient réciproquement accusés, l'un de vouloir sauver le roi, l'autre de hâter sa mort pour le remplacer par un dictateur ou des triumvirs; l'un de préparer le trône au duc d'Orléans, l'autre de tendre au partage de la France

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IN L. Buzot,

de l'assemblee constituante, de la convention, né à Evreux en mars 1760, mort (hors la loi) en 1794.

en républiques fédératives; que tourmentés par ces prétendus projets les deux partis avaient cherché à obtenir des garanties l'un contre l'autre, les montagnards en portant la peine de mort contre quiconque proposerait ou tenterait de rompre l'unité de la République, les girondins en pressant l'exil de tous les Bourbons, et même du duc d'Orléans, quoiqu'il fût représentant du peuple. Le premier de ces décrets venait d'être rendu; nous reprenons la proposition du second. On ne doit pas oublier que cette discussion avait lieu pendant le procès de Louis XVI..

DISCOURS et proposition de Buzot. ( Séance du 16, decembre 1792.)

Citoyens, vous avez bien fait de prononcer cette loi contre ceux qui tenteraient de démembrer l'empire; mais on vous dénonçait les royalistes, et ce décret ne frappe point sur eux. Si vous voulez me le permettre je vais vous proposer une mesure nouvelle, et que je crois salutaire. ( Oui, qui, oui.)

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Citoyens, un grand acte de vengeance nationale va bientôt s'accomplir!

» La justice, trop longtemps effrayante pour le faible, contre lequel seul elle était exercée, s'appesantit enfin sur la tête des rois, et consacre son glaive à la défense de l'égalité !

» Le trône est renversé; bientôt le tyran ne sera plus! Prenez garde; le despotisme vit encore, et la Constitution n'est pas faite.

» Le despotisme vit encore au sein des hommes corrompus, nourris de ses habitudes, de ses préjugés, de ses vices; de ces hommes qui travaillaient à son rétablissement avant les derniers triomphes de la liberté, et qui favoriseraient son retour s'ils le pouvaient impunément.

» Comme les Romains, qui, après avoir chassé Tarquin, s'engagèrent par serment à ne souffrir jamais ni roi dans leur ville, ni rien qui pût mettre en péril la liberté, vous avez décrété la peine de mort contre celui qui proposerait le rétablissement de la monarchie ou de toute autre autorité attentatoire à la souveraineté du peuple.

>> Comme eux vous avez encore un grand exemple à donner. Rome n'avait pas perdu les avantages de son origine; son peuple, fier et pauvre, n'avait pas longtemps fléchi sous le joug de la tyrannie; les sages lois de Numa avaient diminué sa rudesse sans altérer son énergie; les institutions de Servius avaient réglé l'exercice des droits de citoyen : Tarquin seul par ses excès parut les méconnaître ; et ce peuple généreux chassa son pré

mier tyran! Cependant il se trouva dans son sein de nombreux partisans de la royauté: Tarquin le superbe eût été rappelé par eux sans le terrible courage de Brutus, sacrifiant la paternité au salut de la République naissante, et un successeur lui eût peutêtre été donné sans la sagesse du même consul, déterminant le peuple à bannir Lucius, le dernier du sang des Tarquins!

» Nous sortons d'un long esclavage, dont les flétrissures n'attestent que trop la durée et la profondeur! Nous sommes en proie à toutes les passions corruptrices qu'il a fait naître ; le mouvement de la révolution les a déchaînées avec furie, et elles sont prêtes à saisir le premier fantôme capable de rappeler le pouvoir qui les protége.

» Louis XVI, criminel et enchaîné, paraissait moins dangereux ; vous allez l'immoler à la sûreté publique : vous devez à cette sûreté le bannissement de sa famille.

>>> Si quelque exception pouvait être faite ce ne serait pas sans doute en faveur de la branche d'Orléans; car par cela même qu'elle fut plus chérie elle est plus inquiétante pour la liberté.

» Dès le commencement de la révolution d'Orléans fixa les regards du peuple; son buste, promené dans Paris le jour même de l'insurrection, présentait une nouvelle idole : bientôt il fut accusé de projets d'usurpation ; et s'il est vrai qu'il ne les ait pas conçus il paraît du moins qu'ils existèrent, et qu'on les couvrit de son nom.

» Ainsi le sang des rois est un prétexte lorsqu'il n'est pas une cause de troubles et d'agitation: ne l'ajoutous point à toutes celles qui rendent orageuse la formation des républiques.

» Une fortune, et surtout des espérances encore immenses; des relations intimes avec les grands d'Angleterre; le nom de Bourbon pour les puissances étrangères, jalouses de nous donner un maître afin de s'assurer un allié; celui d'Egalité pour les Français, faciles à toucher, et dont le choix singulier fait remarquer d'autant plus son objet qu'il affecte de le cacher; des enfans, dont le jeune et bouillant courage peut être aisément séduit par l'ambition, dont l'ambition peut être habilement excitée par les soins et l'alliance de quelques rois étrangers... C'en est trop pour que Philippe puisse exister en France sans alarmer la liberté! S'il l'aime, s'il l'a servie, qu'il achève son sacrifice, et nous délivre de la présence d'un descendant des Capets!

» Dans la situation où nous sommes les considérations personnelles, les affections mêmes ne peuvent entrer en balance avec les scrupules de la liberté : elle impose les précautions les plus rigoureuses; elle veut éteindre l'espoir de la royauté, effacer toute image qui pourrait en éveiller le souvenir!

» Charles Ier porta sa tête sur l'échafaud, et cependant l'An

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