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TROISIÈME SÉANCE

(LUNDI 8 NOVEMBRE 1880).

PRÉSIDENCE DE M. J. BOZÉRIAN.

Étaient présents:

MM. WOERZ, le comte CASTELL, HÉRICH, A. DEMEUR, E. DUJEUX, le chevalier de Villeneuve, J.-O. PUTNAM, J. BOZÉRIAN, JAGERSCHMIDT, GIRARD, READER-LACK, INDELLI, le chevalier TRINCHERI, H.-C. VERNIERS van der Loeff, G.-A. DE BARROS, C. DE MORAES, DE NEBOLSINE, A. LAGERSHEIM, O. Broch, Kern, J. Weibel, ImbrSCHNEIDER, AMASSIAN, le colonel J.-J. DIAZ, DE ROJAS.

MM. ORTOLAN, DUMOUSTIER DE FRÉDILLY, secrétaires.

CHATAIN, G. BOZÉRIAN, secrétaires adjoints.

La séance est ouverte à 2 heures 20 minutes.

M. LE PRÉSIDENT donne la parole à M. Jagerschmidt pour rendre compte des travaux de la Commission qui s'est réunie dans la matinée, sous sa présidence.

M. JAGERSCHMIDT fait connaître le résultat de l'examen auquel la Commission a soumis les divers amendements présentés à l'article 2.

M. de Barros, délégué du Portugal, a demandé qu'on supprimât l'un ou l'autre des mots sujets et citoyens qui figurent en tête de cet article. La Commission, considérant qu'il convenait de tenir compte des Constitutions des diverses nations, a cru devoir maintenir la rédaction du projet, M. de Barros, dans un esprit de conciliation, n'a pas insisté, en demandant toutefois que sa proposition soit insérée au procès-verbal.

M. Hérich, délégué de la Hongrie, et M. Verniers van der Loeff, délégué des Pays-Bas, ont demandé la suppression du mot réciproquement, qui leur paraissait pouvoir donner lieu à un malentendu, en ce qu'il pouvait faire supposer à tort que les dispositions de l'article 2 reposaient sur l'application non pas seulement du traitement national, mais aussi du principe de la réciprocité. Sans partager ces appréhensions, la Com

mission, considérant que ce mot n'est pas essentiel, a cru devoir donner satisfaction à cette demande, en le supprimant.

Un autre amendement a été présenté par M. de Barros; il est ainsi

conçu :

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Tous les États contractants jouiront réciproquement des avantages que les lois respectives accordent ou accorderont à leurs nationaux, tant que ceux-ci accompliront les formalités établies par les législations de chaque État. "

La pensée de M. de Barros était de faire disparaître le second alinéa de l'article 2, qui lui paraissait inutile, comme faisant double emploi avec le premier paragraphe. La Commission n'a point partagé cet avis; elle a reconnu que le second alinéa complétait très utilement le premier dont il formait le commentaire, et qu'il y avait lieu de le maintenir; elle propose seulement, pour plus de précision, de le faire précéder des mots: En conséquence.

M. Demeur, délégué de la Belgique, ayant exprimé la crainte que le mot formalités fût appliqué à tort aux formalités de procédure, la Commission a pensé qu'il convenait, pour rendre le sens absolument clair, de compléter l'article par ces mots : en matière de propriété industrielle, étant bien entendu que les mots propriété industrielle sont une expression conventionnelle, et qu'elle ne préjuge en rien la question de savoir si les brevets d'invention, dessins, modèles et marques constituent une propriété, question qui pourra être discutée à l'article 5.

En résumé, la rédaction définitive adoptée par la Commission est la

suivante :

« Les sujets et citoyens de chacun des États contractants jouiront, dans tous les autres États de l'Union, en ce qui concerne les brevets d'invention, les dessins ou modèles industriels, les marques de fabrique ou de commerce et le nom commercial, des avantages que les lois respectives accordent actuellement ou accorderont par la suite aux nationaux. En conséquence, ils auront la même protection que ceux-ci et le même recours légal contre toute atteinte portée à leurs droits, sous la seule condition de l'accomplissement des formalités imposées aux nationaux par la législation intérieure de chaque État en matière de propriété industrielle. »

M. JAGERSCHMIDT ajoute qu'une autre question a été soulevée dans le sein de la Commission au sujet des mots brevets d'invention. On a fait observer qu'il y avait également des brevets de perfectionnement et des

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brevets d'importation. Il a été répondu que les mots brevets d'invention sont une expression générale comprenant tous les brevets. La Commission a décidé qu'on s'en tiendrait à cette rédaction dans le texte de la Convention, sauf à constater, dans un Protocole de clôture, que les brevets d'importation et de perfectionnement sont également compris dans la dénomination générique de brevets d'invention.

M. LE PRÉSIDENT demande si la Conférence a des observations à présenter au sujet de la rédaction proposée par la Commission.

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M. DE ROJAS (Vénézuéla) dit que le mot réciproquement avait une signification importante, et il propose, afin de bien préciser le sens de l'article 2, d'y insérer la phrase suivante : « Quoique les avantages ne soient pas accordés par la législation intérieure de chaque État. » Il fait observer qu'il ne faut pas perdre de vue qu'en France et au Vénézuéla, par exemple, on n'accorde pas de brevet pour des produits pharmaceutiques qui sont brevetables dans d'autres pays.

M. KERN (Suisse) approuve complètement les propositions de la Commission; cependant, le mot formalités ayant un sens restrictif, il désirerait, pour faire disparaître tout malentendu possible, qu'on ajoutât à la dernière phrase: «Ils auront la même protection que ceux-ci et le même recours légal contre toute atteinte portée à leurs droits, sous la seule condition de l'accomplissement des formalités », les mots et des conditions, en remplaçant en même temps les mots sous la seule condition par ceux sous la seule réserve.

M. DEMEUR (Belgique) ne saisit pas bien l'observation de M. Kern et demande à M. le Délégué de la Suisse de vouloir bien citer un exemple à l'appui de sa proposition.

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M. KERN (Suisse) dit qu'en Allemagne la législation impose au breveté l'obligation d'exploiter son invention d'une manière évidente dans tous pays, afin de ne pas exclure l'un d'eux du bénéfice de cette invention, et qu'elle contient, dans ce but, les dispositions connues sous le nom de système des licences obligatoires".

M. INDELLI (Italie) aurait des objections à faire à l'amendement proposé par M. Kern. Si l'étranger est assimilé au national, il doit remplir

les mêmes formalités. En Italie, on impose aussi l'obligation d'exploiter dans le pays. Toutefois, il considère que la question relative à l'exploitation devra être discutée à l'occasion de l'article 4, et demande à M. Kern de vouloir bien réserver son amendement dont il accepte, du reste, le principe.

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M. KERN (Suisse) voit avec plaisir que M. le Délégué de l'Italie est d'accord avec lui. Mais, bien qu'en effet la question rentre dans l'article 4, il lui paraît nécessaire d'en parler au sujet de l'article 2, qui est l'article fondamental de la Convention future. Il dit que lorsqu'un propriétaire de dessin croit qu'un train de chemin de fer contient des contrefaçons de ses dessins, il peut faire saisir deux ou trois wagons et arrêter ainsi tout un transit; il cause par là des préjudices considérables. La Suisse n'accordera jamais un semblable privilège. Si donc les lois d'un pays interdisent absolument d'effectuer une saisie sur des marchandises en transit, il est bien entendu que, par le mot conditions, le breveté ou ses ayants droit ne sont pas autorisés d'empêcher le transit d'une manière quelconque. Le mot conditions, dont il demande l'insertion, veut dire qu'il ne s'agit pas seulement de formalités, mais de conditions plus graves. Il insiste pour l'adoption de son amendement, parce qu'il explique que à suffire à l'exploitation du brevet dans le pays qui le lui a donné et devra se soumettre à des licences obligatoires si celles-ci sont autorisées la législation du pays qui a accordé le brevet.

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le breveté aura

M. LAGERHEIM (Suède) appuie la proposition de M. Kern. L'article doit être aussi clair que possible. Il faut examiner la situation de chaque État, car il n'est pas douteux que les législations intérieures devront être réformées. En Suède, on serait très heureux de se voir protéger dans les pays de l'Union, mais on pourrait craindre la concurrence étrangère s'il n'était pas clairement établi que les étrangers sont soumis aux mêmes obligations que les nationaux, dès qu'ils sont assimilés à eux quant aux avantages garantis par la loi. Il est donc utile d'adopter une rédaction qui ne laisse pas de doutes.

M. JAGERSCHMIDT (France) croit que l'amendement de M. Kern n'est pas essentiel, car il ne dit rien de plus que ne dit l'article 2, qui consacre l'application du traitement national à l'étranger; mais ce qui abonde ne vicie pas et il ne voit pas d'inconvénient à l'adopter.

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